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Françoise Cartano (Traducteur)
EAN : 9782266147972
1088 pages
Pocket (20/01/2005)
4.39/5   1776 notes
Résumé :
Dans le sillage des grands noms de la littérature du Sud des États-Unis, Pat Conroy s'est imposé en 1986 avec un chef-d'oeuvre, Le Prince des marées, aujourd'hui réédité dans une traduction révisée.

Au coeur des somptueux paysages maritimes de la Caroline du Sud, cette « histoire d'eau salée, de bateaux et de crevettes, de larmes et de tempêtes » fouille la mémoire d'une famille troublée, dans un Deep South encore marqué par la ségrégation raciale. <... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (239) Voir plus Ajouter une critique
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Ce livre est un tour de force monumental.

Un pavé de plus de 700 pages qui suit une famille dysfonctionnelle de Caroline du Sud ( les parents et leurs trois enfants ) en remontant sur les deux générations ascendantes.
Une thème central très mélodramatique : Tom Wingo part à New-York rencontrer la psychiatre de sa soeur jumelle Savannah, poétesse renommée, qui vient de tenter de se suicider pour la énième fois. C'est la dernière chance pour la sauver et comprendre l'origine de ses souffrances.
Des sous-thèmes en pagaille, tous très lourds : la ségrégation et le racisme aux Etats-Unis, les guerres du Vietnam et de la Corée, la violence au sein des famille, le viol, la résilience, les relations ambigues entre les ex-Etats sudistes et les autres ...

Là, tu te dis, rouch, ça va être too much en mode grand barnum à l'américaine, tire-larme au possible, bref complètement indigeste. Et ben pas du tout. C'est passionnant, foisonnant de vie, d'une densité romanesque juste inouïe.

Ce roman rebondit en permanence et entraîne son lecteur émerveillé de découvrir une écriture riche, des dialogues d'une intelligence rare, une construction fascinante qui enchâsse avec brio les différents arcs narratifs jusqu'à donner à comprendre la terrible famille Wingo.

Tous les personnages sont complexes et puissants, tous dotés d'une psychologie fouillée et riche : Tom, le narrateur qui déroule le fil familial, dont on ne perçoit pas immédiatement la souffrance intime tellement il s'est réfugié derrière une ironie cassante ; sa soeur jumelle qu'on voit peu mais dont on sent toute la sensibilité et la douleur derrière ses magnifiques poèmes dont nous gratifie l'auteur ; leur frère Luke, en retrait mais dont le caractère se dévoile sur la fin ; leur père crevettier si violent ; leur mère, si belle et si orgueilleuse, romantique et ambitieuse , ne songeant qu'à fuir la pauvreté pour s'élever socialement. Mais aussi la formidable psychiatre Susan qui est tellement plus que cela. Bref, ils sont inoubliables.

L'émotion éclabousse chaque page, j'ai vibré, j'ai pleuré, j'ai ri, j'ai été bouleversée en permanence ( incroyables chapitres 22 et 27 qui révèlent et éclairent tout le roman ). J'ai également été emporté par la magie de certaines scènes comme l'apparition quasi onirique d'un marsouin blanc ou l'irruption dingue d'un fougueux tigre du Bengale chez la famille Wingo.

Un roman exceptionnel qui joue sa partition d'orchestre symphonique complet avec une luxuriance littéraire d'une grande beauté.
Commenter  J’apprécie          20050
Voila un des plus beaux livres qu'il m'a été donné de lire ces derniers temps. Roman d'une rare intelligence sur le drame et la tentative de résilience qui s'ensuit, ce texte nous raconte l'histoire d'une famille de la Caroline du Sud avec ses névroses et ses joies comme toute famille, mais dont la vie insulaire et la relative pauvreté accentuent les effets. Savannah, la soeur du narrateur et poète de talent ira faire soigner sa schizophrénie latente à New York, et c'est à la demande de sa psychanalyste que son frère Tom racontera toute leur histoire.
J'ai dévoré ce pavé bien construit, bien écrit, avec beaucoup de simplicité mais aussi beaucoup de beauté dans les descriptions avec leurs interférences sur les personnages, de précision dans l'analyse psychologique des personnages et leurs rapports entre eux sans le moindre manicheisme, beaucoup d'efficacité dans les dialogues, beaucoup d'habileté dans la progression du récit qui nous fait parcourir un cheminement sûr et haletant, et dans lequel on ne s'ennuie pas une minute. Les temporalités sont justes et on passe du récit du narrateur à la réalité impitoyable peu à peu arrachée par la psy, et d'un passé un peu embelli à l'aveu ancré dans une réalité brutale : la folie de Savannah, sans être gêné le moins du monde.
Tout sonne juste, sans pathos, sans caricatures, les personnalités sont profondes et vraies, les réactions des personnages sont parfaitement ajustées aux situations et aux circonstances et la clarté du style contribue largement à donner une grande humanité au récit.
Ce livre, prêté par une amie, aura été une de mes plus belles découvertes. Un grand merci à elle, et à Conroy bien sûr !
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Cinq étoiles! pour ce livre, il n'y aurait presque rien à rajouter.
J'apprécie les récits de ce genre, qui s'étalent pratiquement sur une vie entière, qui donnent du temps au temps. Ici, l'histoire d'une famille déchirée par l'adversité, la dureté de certaines existences. On y trouve du tragique, de l'humour, des larmes mais également des joies, en fait, on y trouve la vie!
Un véritable moment d'évasion .Vous n'y trouverez pas une écriture " léchée"
mais vous y trouverez de l'humanité.
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La littérature est pavée de chefs d'oeuvres qui trouvent tout leur éclat dans les fameuses racines familiales. Pat Conroy est un cabossé de la vie. Il a décidé de glisser dans ses romans des pans de sa propre histoire familiale où la violence est toujours au centre.

Il nous raconte la fratrie Wingo, qui vit une enfance ancrée dans la beauté de la nature et de plaisirs simples de la vie mais au sein d'une famille complètement dysfonctionnelle. Un père violent, une mère démissionnaire et indigne de confiance, cruelle et arriviste qui contribue à installer l'anxiété et la schizophrénie chez ses enfants.
Les tragédies et les traumatismes s'acharnent sur la famille. Ils cacheront des secrets insurmontables dans un accord mutuel destructeur.

Relations conflictuelles, culpabilité, incapacité à se comprendre et se pardonner. Tous les membres, cabossés souffrent du manque de communication. Ils taisent les problèmes et font comme s'ils n'existaient pas. Ils vont chacun à leur façon essayer de survivre, de se reconstruire.
L'auteur va dérouler l'histoire de leur vie à travers des séances de psychanalyse afin de faire ressortir les traumatismes et les manquements en nous livrant un collage touchant de souvenirs et de sensations.

L'écriture de Pat Conroy peut être par moments fluide et poétique et devenir d'un coup dense et ironique.
Face à la tragédie et à l'indicible l'auteur nous sert de belles descriptions teintées de mélancolie, de résilience, de la tentative acharnée de faire corps avec la nature pour empêcher les drames et les horreurs du passé de tout anéantir.

Le prince des Marées est une histoire tragique mais aussi une belle histoire d'amour et de rédemption où Pat Conroy ouvre des pistes et fait naître de puissantes expériences humaines.


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« L'histoire des Wingo est une histoire faite d'humour, de grotesque et de tragédie. Avec une prédominance de la tragédie »

L'auteur lui-même définit en deux lignes dans ce fleuve littéraire gigantesque, l'essence même de son récit. L'épopée d'une famille dysfonctionnelle, foutraque, perdue dans ses mensonges et les chausse-trappes de sa mémoire, marquée par un grain de folie transgénérationnelle. Un grand-père mystique, un père en recherche éternelle de la bonne idée, une mère aussi grandiose que dangereuse : le narrateur , Tom tente de reconstituer et de comprendre la trajectoire des trois enfants issus de cette généalogie démente.

Tous les ingrédients de ce qui fait mon bonheur de lectrice y sont : le décor New-Yorkais, doublé d'une Amérique sudiste rétro à souhait, la psychanalyste juive, la folie en filigrane, qui sublime la poésie, les valeurs bafouées du rêve américain : carton plein. Et que l'ouvrage fasse trois cents pages (là j'en redemande), cinq cents ou mille (et là le compte est bon), c'est gagné pour des heures de plaisir. D'autant que l'écriture est magique, que ce soit dans les descriptions de paysage ou dans les épisodes de crise familiale d'une grande violence , les dialogues au top (l(humour du narrateur est sa principale défense), et les personnages analysés avec subtilité. Malgré l'épaisseur du pavé, pas d'ennui. Les chapitres se succèdent en réservant des surprises de taille : l'histoire du marsouin blanc ou de la tortue puante, non seulement sont drôles mais représentent aussi des éléments cruciaux dans l'histoire de la saga familiale et aident à comprendre les drames. nous avons même le droit aux cadeaux d'un conte pour enfants et des sublimes poèmes de Savannah.
Tout y est là , la guerre du Vietnam, la guerre froide, la lutte des classes, le racisme (on n'est pas dans le sud pour rien).

On peut se demander si Pat Conroy n'a d'ailleurs pas été l'initiateur de ces romans américains dont je listais les ingrédients ci-dessus. Il est paru en 1986 et pourrait être le chef de file d'une recette à succès. Est-ce une bonne idée de se jeter sur le film avec Barbara Streisand?
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Citations et extraits (245) Voir plus Ajouter une citation
J'avais perdu près de trente-sept ans à me complaire dans une fausse image de ma personne. J'étais tombé dans le piège que je m'étais tendu à moi-même en acceptant au pied de la lettre la définition de moi conçue par mes parents. Ils m'avaient défini très tôt, inventé comme un mot inscrit dans un hiéroglyphe mystérieux, et j'avais passé ma vie à me conformer à cette trompeuse invention. Mes parents avaient réussi à me rendre étranger à moi-même. Ils avaient fait de moi l'image exacte de ce dont ils avaient besoin à l'époque et, parce qu'il y avait dans ma nature une part essentiellement complaisante et orthodoxe, je les avais laissés me pétrir et me mouler aux linéaments bien lisses de leur incomparable enfant. Je m'inscrivis dans le cadre de leur vision.
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"Hé, où allez-vous ? demanda-t-il ?
- Je rentre chez moi", dis-je sans me retourner. Je l'entendis courir derrière moi.
"Pourquoi ?
- Parce que tu es trop nul, mon petit gars. Va donc faire du violon, ça fera plaisir à tes parents. En plus, je ne supporte pas ton attitude. Et si moi je ne la supporte pas, je vois mal comment tu pourrais un jour t'imposer comme meneur dans une équipe. Bouger un peu ton cul de pleurnichard pour devenir un quarterback."

"(...) Mais tu es un sale petit con et j'aimerais t'aider à comprendre pourquoi tu es comme ça."
Il respira un grand coup, tremblant, désemparé.
"Va te faire enculer, mon pote, dit-il d'une voix qui annonçait les larmes.
- C'est déjà fait. Je me suis fait enculer en acceptant de te rencontrer.
- Je n'ai rien à voir là-dedans, dit-il, contrôlant sa voix avec difficulté.
- C'est là que tu te trompes, Bernard, dis-je, prêt à porter le coup de grâce mais la mort dans l'âme tandis que ma voix se faisait plus froide et plus cinglante. J'ai rarement vu de gosse aussi mal dans sa peau de toute mon existence. Et je sais déjà une chose, à ton sujet, alors que je ne te connais que depuis cinq minutes. C'est que tu n'as aucun ami dans ce foutu monde. On doit se sentir seul pendant l'hiver, là-bas, à Phillips Exeter, non, Bernard ? Est-ce qu'ils te cherchent ? Je sais que tu es rejeté, mais est-ce qu'en plus tu leur sers de tête de Turc, Bernard ? Est-ce que ta vie là-bas ressemble à un cauchemar ? Est-ce qu'ils te molestent, Bernard ? Vois-tu, je connais bien les garçons et je sais comment ils traitent les inadaptés. Comment s'appelle ton copain, Bernard ? Dis-moi son nom."
Il se mit à pleurer, tenta de ravaler ses larmes, mais elles jaillirent de ses yeux comme le flot trop puissant par-dessus la digue.
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Puis Savannah sortit de la maison. Et il se passa alors quelque chose que je suis incapable d'expliquer, une chose que je ressentis au moment où ils coururent l'un vers l'autre, que je ressentis au plus profond de moi, en un lieu intouché qui vibra d'un mystère instinctuel, enraciné dans l'origine des espèces - indicible, encore que je fusse conscient que ce qui s'éprouve peut être nommé. Ce ne furent ni les larmes de Savannah, ni celles de mon père qui déclenchèrent cette résonance, cette farouche musique intérieure, faite de sang, de ferveur, d'identité. C'était la beauté et la peur de la parenté, des liens ineffables de la famille, qui faisaient chanter une flamboyante terreur et un amour paralysé à l'intérieur de moi. Mon père était là, source de toutes ces vies, source de toutes ces larmes, mon père qui pleurait maintenant, qui sanglotait, sans honte. Les larmes étaient de l'eau, de l'eau salée, et derrière lui je voyais l'océan, j'en sentais l'odeur, avec le goût de mes propres larmes, la mer et la douleur en moi, fuyant dans le soleil, et mes enfants qui pleuraient de me voir pleurer. L'histoire de ma famille était une histoire d'eau salée, de bateaux et de crevettes, de larmes et de tempêtes.
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Ce fut ma mère qui m'inculqua l'esprit sudiste dans ce qu'il a de plus intime et de plus délicat. Elle croyait que les fleurs et les animaux faisaient des rêves. Lorsque nous étions petits, le soir, avant de nous coucher, de sa voix de conteuse ma mère nous révélait que, dans leurs rêves, les saumons voient des cols de montagne et des museaux d'ours bruns penchés sur l'onde claire des torrents. Les vipères, disait-elle, rêvent de planter leurs crochets dans les tibias des chasseurs. Dans leur sommeil, les orfraies sentent crier et voient leur double plonger lentement, au profond, pour attraper les harengs. Les cauchemars de l'hermine sont peuplés des rudes battements d'ailes des chouettes, et l'immobilité nocturne de l'orignal subit le souffle qui annonce l'approche des loups gris.
Mais de ses rêves à elle nous n'avons jamais rien su, car ma mère nous tenait à l'écart de sa vie intérieure. Nous savions que les abeilles rêvaient de roses, les roses des pâles mains des fleuristes, tandis que les araignées rêvaient des sphinx qui se prendraient dans leurs toiles argentées. Enfants, nous étions les dépositaires de ses éblouissantes vêpres de l'imagination, mais nous ignorions que les mamans rêvent aussi.
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J’ai grandi en Caroline du Sud où je suis devenu un homme, un Blanc sudiste, et je vivais avec brio la haine que j’avais consciencieusement appris à nourrir contre les Noirs lorsque le mouvement en faveur des droits civiques m’est tombé dessus sans crier gare, au détour d’une barricade, me démontrant à la fois mon ignominie et mon erreur. Comme j’étais un garçon réfléchi, sensible et épris de justice, j’ai fait mon possible pour me réformer et jouer un petit rôle insignifiant dans ce mouvement, ce dont je me suis empressé de tirer un orgueil plus qu’excessif. Puis je me suis retrouvé à l’université où je suivais la préparation militaire des Officiers de Réserve composé exclusivement de jeunes mâles de race blanche, et je me suis fait craché dessus par des militants pacifistes que mon uniforme dérangeait. J’ai fini par rejoindre les rangs de ces manifestations, mais je n’ai jamais craché sur quiconque ne partageait pas mes opinions. Je pensais passer tranquillement le cap de la trentaine, en brave contemplatif à l’humanisme irréfutable, lorsque le mouvement de libération de la femme m’a coincé au détour d’une avenue et, une fois de plus, je me suis retrouvé du mauvais côté de la barricade. Apparemment, j’incarne tout ce que le XXe siècle compte de turpitudes.
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Vidéo de Pat Conroy
Extrait de "Le Prince des marées" de Pat Conroy lu par Matthieu Farcy. Parution le 13 mai 2020.
Pour en savoir plus : https://www.audiolib.fr/livre-audio/le-prince-des-marees
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