Quel livre impressionnant ! J'ai été agréablement surprise à la lecture de ce livre que j'appréhendais un peu à cause de son éditeur (Puf) et de sa collection (Souffrance et théorie). Il m'a fallut bien moins de temps que prévu pour le lire et j'y ai pris bien plus de plaisir que je ne l'aurais cru.
J'avais choisi ce livre parmi la liste des livres en course pour le challenge Masse Critique de septembre 2012 car il m'intriguait : une transsexuelle nous parle de sa vie, de son expérience, de sa transformation... Je me suis dit, pourquoi pas, peut être pour me faire une idée autre que celle que les clichés nous imposent. Je m'attendais à un mémoire universitaire, à cause du titre Mémoires d'une transsexuelle, à un texte technique, presque scientifique, un texte difficile à lire et impersonnel, écrit juste pour démontrer, pour argumenter, confirmer ou contredire. Mais finalement, ce livre est tout autre : il se lit à la fois comme un roman, une thèse, des mémoires, UN mémoire, un journal intime... Car Madame Marie Edith Cypris y raconte sa vie à coeur ouvert. Il est alors dur parfois de ne pas se savoir un peu voyeur et de lire les chapitres non sans se sentir un peu coupable ; le lecteur en apprend beaucoup au fil des pages sur l'enfance, le travail, les motivations, la transformation, les peines et les aventures de l'auteure, sur son opinion sur l'opération de transformation génitale, sa prise en charge, sur les associations de transsexuels, etc. C'est presque ambitieux de parler de tant de choses dans un livre de trois cent pages et c'est vrai qu'il est parfois difficile de suivre l'auteure tant son flux d'écriture est rapide et spontané. Mais quelle écriture justement ! Marie ne mâche pas ses mots avec "son humour noir et la dérision parfois féroce dont [elle] fait usage".
Le ton du texte est parfois bien plus technique mais les pages regorgent de notes de l'auteure elle-même qui prend le temps de développer quelques notions qui seraient inconnues au lecteur (des termes médicaux, des lois précises, des extraits de ses lectures). L'introduction à son récit peut surprendre un peu ; j'avoue qu'il m'a fallut la relire plusieurs fois avant d'attaquer le premier chapitre mais l'écriture se fait plus souple dès le début de celui-ci. Une fois l'introduction passée, vous glissez dans la vie de
Marie Edith Cypris qui renverse les clichés et les idées reçues que les médias ont pu nous mettre dans la tête à propos des transsexuels avec un regard neuf sur la question des genres et de la transsexualité. Elle écrit comme elle parle, elle se confie au lecteur comme une copine le ferait à une autre autour d'un café. On s'attache à Marie dont les malheurs nous brisent le coeur, dont l'humour parfois nous fait rire tout haut et dont l'opinion nous amène à nous poser des questions.
Férue de romans, j'appréhendais Mémoires d'une transsexuelle mais l'ouvrage peut se lire comme l'un d'eux. Peut être ai-je eu tort ? Mais j'ai alors plus retenu de lui les aventures, les confessions, les peines et les victoires de
Marie Edith Cypris que les passages plus argumentaires, techniques et complexes de l'auteure qui nous laissent parfois quelque peu sur la touche.