Je me pointe jusqu'à la lourde où brille une poignée de cuivre dûment fourbie. Sonnette. Son moderne, mélodieux pour pas rendre cardiaque le visité. Les premières mesures de Lara retentissent, exécutées par l'orchestre philarmonique de Budapest sous la conduite du maître Kracklamy.
Une diligente soubrette qui serait ravissante avec cinquante kilogrammes de moins, pas de tache de vin au cou ni de grosses verrues à pelage angora sur le menton, vient m'ouvrir. A cause de ses formidables lunettes de myope, en la regardant, t'as l'impression d'apercevoir le commandant Cousteau à travers la vitre de son bathyscaphe par deux mille mètres de fond.
Les minutes s'enchaînent, me permettant de mesurer l'inexorabilité de la vie qui coule, coule sans trêve, indifférente à nos états d'âme. Et, crois-le bien, que tu fasses l'amour ou des mots croisés, la trotteuse ne flanche pas, ne ralentit pas et t'estoque à chaque seconde pour, vicieusement, te déguiser en mort, toi si peinard dans ton présent d'aujourd'hui.
*RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE* :
San-Antonio, _Réflexions définitives sur l'au-delà,_ morceaux choisis recueillis par Thierry Gautier, Paris, Fleuve noir, 1999, 120 p.
#SanAntonio #FrédéricDard #Aphorismes #LittératureFrançaise #XXeSiècle