Le narrateur, Pierre, décrit ses souvenirs d'appelé du contingent pendant les "évènements" d'Algérie. Il est en poste à Alger lorsque Catherine, la femme qu'il aime, le quitte.
On l'envoie vers une nouvelle affectation, dans le préside de Chella, une enclave française perdue sur la côte du Maroc. La tranquillité régnant dans la petite ville de Chella est factice, et il s'y joue les mêmes luttes pour le pouvoir qu'en Algérie.
De quel bord sont les jeunes intellectuels avec qui Pierre se lie d'amitié? Quelle est la vraie mission des officiers qui le dirigent? Quel double-jeu politique mènent-ils?
Pourquoi Pierre est-il subitement muté à Arbitral, dans un douar reculé? Qui est l'ennemi invisible contre lequel il est censé lutter avec ses soldats musulmans? Qui a abattu l'officier français ayant précédé Pierre à Arbitral? Et au fait, Catherine l'a-t-elle quitté pour un autre?
Les souvenirs de Pierre sont peuplés de détails, mais le sens général des évènements semble lui échapper, et leur chronologie n'est parfois plus très sûre.
Philippe Doumenc utilise ses souvenirs personnels pour tisser un roman superbe, naviguant élégamment entre illusion et réalité.
Il réussit un exploit littéraire en mêlant une mise en scène historique crédible, et la dérive intime d'un homme dont l'esprit oblitère certains pans de la réalité. Nous partageons très vite la mélancolie de son narrateur, témoin passif du bouleversement du monde alentour et de sa propre vie.
Une lecture entêtante. J'ai longtemps cherché Chella sur une carte après avoir refermé le livre...