Je suis assez partagée. Certaines parties sont limpides et passionnantes (l'introduction ou le chapitre sur le travail sexuel par exemple, que j'ai presque entièrement stabilotés) mais j'ai vraiment ramé sur d'autres (comme le chapitre 'Omnia sunt communia'). L'option SES en seconde est bien loin, je n'y connais rien en économie, et j'ai trouvé l'autrice verbeuse par moments. Bref j'ai sauté des passages :)
Si tu es comme moi, prends ton courage à deux mains. Et si tu as des bases sur Marx (ou un cerveau mieux câblé que le mien), fonce !
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C'est un livre qui m'a ouvert les yeux. J'étais certes déjà féministe, mais je n'avais jamais pensé de moi-même à l'exploitation de la femme d'un point de vue capitaliste. Cela a clarifié beaucoup de choses. Une lecture qui me semble indispensable pour comprendre notre monde de manière générale.
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Un essai captivant et intéressant avec des idées percutantes pour penser le monde. Je regrette juste un manque de précision et parfois de rigueurs sur certaines idées. Peut-être qu'il a manqué d'un peu d'édition sur ce livre mais ça n'en reste pas moins intéressant comme toujours avec La fabrique
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Dans son livre Le capitalisme patriarcal, l’universitaire et militante américaine relit le philosophe allemand avec un regard féministe, pointant les failles et les zones d’ombre relatives au travail des femmes.
Lire la critique sur le site : Telerama
Tout d’abord, si l’on trouve très tôt chez Marx des condamnations des inégalités entre les genres et du contrôle patriarcal sur la famille et la société, il « n’avait pas grand-chose à dire sur le genre et la famille » et, même dans Le Capital, ses idées sur le sujet doivent être reconstruites à partir d’observations éparses.
Toutefois, l’œuvre de Marx a apporté une contribution significative au développement de la théorie féministe. Non seulement sa méthode historico-matérialiste a aidé à démontrer le caractère construit des hiérarchies et des identités de genre, mais son analyse de l’accumulation capitaliste et de la création de valeur a donné aux féministes de ma génération des outils puissants pour repenser les formes spécifiques d’exploitation auxquelles les femmes sont soumises dans la société capitaliste et le rapport entre « sexe, race et classe ».
[…] pour illustrer les tendances structurelles de la production capitaliste (la tendance à allonger la journée de travail jusqu’aux limites de la résistance physique des ouvriers, à dévaluer la force de travail, à tirer le maximum de travail d’une quantité minimum de travailleurs) et pour dénoncer les horreurs auxquelles les femmes et les enfants ont été soumis à chaque stade du développement industriel.
Par ces rapports, nous apprenons que des couturières mouraient par «excès de travail, manque d’air et manque de nourriture », que des jeunes filles travaillaient quatorze heures par jour sans prendre de repas ou rampaient à moitié nues dans des galeries pour remonter le charbon à la surface, ou que des enfants étaient arrachés à leur lit au milieu de la nuit, «forcés, uniquement pour survivre, de travailler », « immolés » par une machine vampirique qui continuait à sucer leur vie «tant qu’il y a[vait] encore un muscle, un nerf, une goutte de sang à exploiter». Peu d’analystes politiques ont décrit la brutalité du travail capitaliste – en dehors de l’esclavage.
Malgré cela, la construction de la sexualité féminine comme service, et sa négation comme plaisir, a longtemps entretenu l'idée que la sexualité féminine était un péché qui ne pouvait s'expier que par le mariage et la procréation, et cela a produit une situation où chaque femme était considérée comme une prostituée potentielle qui devait être contrôlée constamment. En conséquence de quoi, des générations de femmes, avant l'essor du mouvement féministe, ont vécu leur sexualité comme une chose honteuse et ont dû prouver qu'elles n'étaient pas des prostituées. Dans le même temps, la prostitution, tout en faisant l'objet d'une condamnation sociale et d'un contrôle de l'État, a été reconnue comme une composante nécessaire de la reproduction de la force de travail, précisément parce qu'on supposait que l'épouse ne pouvait pas satisfaire les besoins sexuels de son mari.
P. 155
Que le mariage ait signifié pour les femmes être « une domestique le jour et une putain la nuit », c’est ce que les femmes prolétaires ont toujours su, puisque chaque fois qu’elles voulaient abandonner le lit conjugal elles étaient confrontées à leur pauvreté. Malgré cela, la construction de la sexualité féminine comme service, et sa négation comme plaisir, a longtemps entretenu l’idée que la sexualité féminine était un pêché qui ne pouvait s’expier que par le mariage et la procréation, et cela a produit une situation où chaque femme était considérée comme une prostituée potentielle qui devait être contrôlée constamment. En conséquence de quoi, des générations de femmes, avant l’essor du mouvement féministe, ont vécu leur sexualité comme une chose honteuse et ont du prouver qu’elles n’étaient pas des prostituées. Dans le même temps, la prostitution, tout en faisant l’objet d’une condamnation sociale et d’un contrôle de l’État, a été reconnue comme une composante nécessaire de la force de travail, précisément parce qu’on supposait à l’époque que l’épouse ne pouvait pas satisfaire les besoins sexuels de son mari. C’est ce qui explique pourquoi le travail sexuel a été le premier aspect du travail domestique à être socialisé. (p. 154-155, chapitre Origines et développement du travail sexuel)
Séparer la bonne ménagère, laborieuse et économe, de la prostituée dépensière était une condition essentielle à la constitution de la famille telle qu’elle a émergé au tournant du siècle. Il fallait séparer la « bonne » de la « mauvaise » femme, l’épouse de la « putain », pour faire accepter le travail domestique non rémunéré. (…) Une nouvelle division sexuelle du travail a émergé (…) La respectabilité est devenue le dédommagement du travail non rémunéré et de la dépendance à l’égard des hommes. C’est le « marché » qui a bien des égards a tenu jusqu’aux années 190/1970, quand une nouvelle génération de femmes a commencé à le refuser. Mais l’opposition au nouveau régime s’est apparemment développée très tôt, parallèlement aux efforts des réformateurs. Il semble que de nombreuses prolétaires aient résisté à l’idée d’être contraintes de travailler au foyer. Comme le rapporte Hewitt, dans le nord de l’Angleterre, on a observé que de nombreuses femmes allaient travailler même quand elles n’en avaient pas le besoin parce qu’elles y avaient pris « un goût prononcé », préférant « l’usine peine de monde au foyer tranquille par haine du travail ménager solitaire » (p. 139-141, années 1860 en Angleterre - chapitre L’Invention de la ménagère).
Un passionnant entretien avec Silvia Federici sur ce que se doit être un féminisme conséquent.