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EAN : 9782350873688
201 pages
Editions Héloïse d'Ormesson (19/05/2016)
3.3/5   10 notes
Résumé :
À Vilavedra, le temps s'égrène lentement face à l'Atlantique. Juana, témoin des passions cachées de la famille Ulloa durant des décennies, se souvient du vieux comte de Gondomar, le patriarche des Ulloa, éperdument épris d'une femme qui ne pouvait être sienne ; de ses fils Rafael et Jacobo, condamnés à vivre séparés par un océan ; et surtout de la jeune Laura, élue par le Destin pour accomplir ses desseins. Mais telle une légende qui se murmure à voix basse, leur hi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Le destin de Laura U. est d'abord et avant tout l'histoire d'une famille, celle des Ulloa, qui commence au début du XXe siècle. Quand le patriarche meurt, ses avoirs sont divisés en deux. L'aîné obtient les riches plantations de Cuba et le cadet les terres ancestrales de Galice, dans le nord de l'Espagne. Mais pourquoi était-il important de diviser la famille par un océan entier ? La rivalité des deux frères (et deux belles-soeurs) n'explique pas tout. Ce mystère, et d'autres encore, finiront par refaire surface.

Mais le destin de Laura U. est d'avantage qu'une banale saga familiale. C'est l'évocation de la vie au début du siècle dernier, avec beaucoup de réalisme mais sans jamais tomber dans les longues descriptions. Elle en dit juste assez pour que le lecteur puisse se situer et, surtout, s'imprégner des lieux, apprivoiser les personnages, sentir l'ambiance, etc. J'étais tellement passionné par le destin de cette famille que j'ai lu le livre en une seule journée. L'auteure Susana Fortes, que je découvre, m'a conquis.

D'abord, ses lieux sont décrits admirablement bien, ils s'imposent à l'esprit. D'un côté, la Galice austère et traditionnelle : le carcan des moeurs bourgoises de province, le cancan des voisins, la folie, la gravité des gens, la tempérence préconisée par le clergé. de l'autre, Cuba exotique et libre : la chaleur et l'humidité, le travail des employés métis, le repos de midi des propriétaires dans le jardin luxuriant à boire une limonade.

Ensuite, il y a ces personnages, une poignée seulement, mais plus grands que nature. Les deux frères Jacobo et Rafael, leurs épouses respectives (la belle roturière Rebeca et la riche et jalouse Elvira) ainsi que la jeune Laura. Puis la vieille nourrice Juana, qui en sait beaucoup, sans oublier quelques fantômes… Presque un huis-clos ! Assez rapidement, l'aîné meurt mystérieusement. Alors, le cadet rapatrie sa belle-soeur et sa nièce (et héritière) dans son château malgré les présages.

C'est alors que l'intrigue se précise. Et l'écriture de Susana Fortes est à la hauteur. le passé est remué, les sentiments enfouis et qu'on croyait cachés refont surface. C'est sombre et exaltant à la fois. L'ambiance devient de plus en plus lourde, alors que des passions se déchaînent et que des superstitions s'emparent de l'esprit des gens. Il est clair que créer une atmosphère est une grande force de l'auteure.

Pour finir, je me demande si le choix du patronyme était dû au hasard ? Il y a quelques années, j'ai lu le roman le château d'Ulloa, écrit par Emilia Pardo Bazan en 1886. Ça raconte la décadence de la famille Ulloa dans le nord de la Galice, avec des accents gothiques malgré qu'il appartienne au courant naturaliste. Une autre histoire de secrets de famille…
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Attention, ce roman est une vraie pépite ! Une merveille qui n'est malheureusement pas assez connue! Susana Fortes nous raconte le destin d'une famille espagnole au début du XXe siècle avec un style d'écriture qui n'est pas sans rappeler les grands auteurs sud-américains et leur réalisme magique.

On fait la connaissance de la famille Ulloa. le patriarche, comte de Gondomar, est mort et en homme autoritaire qu'il a toujours été, impose un mariage à son fils cadet Rafael, tandis que l'aîné, Jacobo, doit partir s'installer à Cuba avec femme et enfant. le destin de cette famille nous est en partie raconté par Juana, la gouvernante qui a élevé les deux garçons ainsi que la fille de Jacobo, Laura, quand elle était bébé. A la mort de Jacobo, sa femme et sa fille Laura, rentre en Espagne.

Le roman est passionnant est magnifiquement écrit. On se passionne forcement pour cette famille qui cache de nombreux secrets et on les découvre aux fils des pages avec beaucoup de plaisir. La fin est vraiment réussite et m'a beaucoup plu.

Je lisais Susana Fortes pour la première fois, mais certainement pas la dernière !
Lien : https://missmolko1.blogspot...
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Ce pourrait être le récit d'une saga familiale, dans la tradition la plus convenue du genre : le récit d'une ascension sociale, ou d'une décadence provoquée par la génétique familiale .Il n'en est rien .Dès le début du roman, le docteur Ulloa, contracte mariage le 25 juillet 1917, conformément au souhait de son père, le comte de Gondomar, seigneur de Salvatierra.
Quelque temps plus tard, le frère aîné du docteur, Jacobo, part avec son épouse pour Cuba, dans le but d'y diriger une plantation que possède la famille Ulloa de Andrade dans la province de Camagüey. À Vilavedra, localité de Galice, dans le nord-ouest de la péninsule ibérique, Juana, domestique, est le témoin direct de la vie familiale des Ulloa.
Et c'est vers une plongée dans des univers passablement inquiétants et pervers que nous entraîne Susana Fortes. le rôle de la peur, comme moteur de conduite, y est omniprésent ; il dicte maints comportements et attitudes des membres de la famille Ulloa : ainsi, Rafael Ulloa se souvient-il avec douleur, des sentiments que lui inspirait son père : « Mais le pire n'était pas le tonnerre de sa voix, qui finissait par se briser en quinte de toux sous le poids de son propre effort, c'était le spectacle du courroux biblique d'un père despotique, capable d'infecter comme un aiguillon l'âme innocente de n'importe quel enfant. »
D'autres sentiments troubles sont décrits : celui du docteur Ulloa, en proie à un désir de plus en plus explicite, impérieux vis-à-vis de Laura, héritière de la ligne Ulloa : « le docteur Ulloa resta un bon monnaie à la regarder, debout contre la vitre, le gilet défait, les manches de sa chemise attachées par des élastiques. Pour la première fois de sa vie, il entendit résonner à son oreille, clairement, nettement, le démon. »
Une autre supposition est glissée dans le récit, à l'occasion entre José, un autre domestique, et Juana : « Ainsi donc, Mademoiselle Laura est la fille du comte (…) Tu veux dire, José ? Que Mademoiselle Laura est la soeur de sang de don Jacobo et du docteur, c'est bien çà ? ».
Le roman de Susana Fortes plonge dans les ténèbres de l'âme humaine, il introduit souvent des descriptions de cauchemars faits par les personnages. La superstition y tient une grande place. On pense à l'ambiance des romans de Bernanos, tels que Sous le soleil de Satan, ou Mouchette, et aussi aux peintures terrifiantes de Jérôme Bosch, très représentatives de l'ambiance de ce roman, très bien écrit, magnifiquement traduit, au style dense, au vocabulaire précis. À découvrir.

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Juana se souvient, car Juana a passé sa vie au service de la famille Ulloa, dans la région de Galice empreinte de cette magie que procurent des paysages austères et rudes, dans ces familles où la passion est dévastatrice, lorsque les convenances et les obligations imposent une vie pas toujours choisie, où les apparences sont parfois trompeuses, même si elles règlent la vie de tous, chaque jour.
Dans la famille Ulloa, il y a d'abord le comte de Gondomar, le père de Rafael et Jacobo, patriarche tout puissant, homme autoritaire et volontaire, à qui nul ne résiste, ni sa belle-soeur, ni même Rebeca, sa belle-fille. Lorsque le comte meurt, l'héritage sépare inexorablement les deux frères : Rafael reste au domaine, Jacobo part gérer les terres de la famille à Cuba, dans cette ile où l'exotisme cède le pas aux croyances d'un autre temps, celles des indiens de caraïbes. Mais Jacobo vient de mourir, Rafael part à Cuba aider sa belle-soeur, régler la succession et organiser la vie du domaine, puis les deux femmes, Rebeca et sa fille Laura, retournent en Espagne. A partir de ce moment-là, les secrets inavouables, les amours clandestines et coupables, sont se révéler peu à peu, au coin du feu, dans le silence feutré des aveux et de la parole qui enfin se libèrent.
Il y a une véritable atmosphère dans ce roman, on imagine des images de contrées luxuriantes mais déroutantes pour ces émigrés contraints au départ, Cuba fait rêver, mais Cuba fait également peur, de par ses mystères et ses croyances. On y voit émerger les brumes du matin, surnaturelles et mystérieuses, dans cette région d'Espagne qui vit tournée vers l'autre côté de l'océan. le coeur est en lutte avec la raison, emporté dans la tourmente d'un climat à l'unisson avec les esprits torturés des hommes.
Le rythme est très dense, de belles descriptions, peu de dialogues, et cependant une histoire racontée avec force détails qui ont tous leur importance. Rien d'inutile ou de verbeux, il y a à la fois profusion et économie de mots, c'est assez étrange d'ailleurs, et l'on souhaite ardemment se blottir au coin du feu pour terminer cette lecture à la fois prenante et perturbante. Voilà une saga familiale où les mystères ont des répercussions sur plusieurs générations. Laura U est une héroïne qui plonge ses racines de chaque côté de l'atlantique, des brumes sombres de Galice aux paysages éclatants de Cuba, dans les secrets de famille les plus inavouables et les mieux gardés, témoin d'une époque et d'un statut social auquel elle ne pourra pas échapper.
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Juana, une vieille femme, se souvient de ses années au service de la famille Ulloa qu'elle a toujours pensée marquée par le destin. Ainsi, on entre dans l'histoire du comte et de la comtesse de Gondomar et de leur fils Rafael et Jacobo. Puis le récit quitte les souvenirs pour évoquer la mort de Jacobo qui avait quitté la Galice pour Cuba. Rafael décide de se rendre là-bas pour aider la femme de son frère, Rebeca et sa fille, Laura. Il revient de ce voyage troublé par sa rencontre avec l'enfant qui devient une jeune fille. Plus tard, Rebeca et Laura quittent Cuba et viennent s'installer auprès de Rafael. le trouble suscité par Laura auprès de Rafael ne fait que grandir, et les fils du récit commencent à laisser voir la trame tissée par les secrets de la famille. Si l'ambiance devient de plus en plus lourde au cours du texte, le récit prend du sens et de la cohérence et, alors que le style recherché et le flou régnant sur les tenants et aboutissants du récit au début du roman rendent initialement la lecture pas des plus agréables, on se prend finalement à cette histoire de famille.
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critiques presse (1)
LeFigaro
16 juin 2016
Entre Cuba et Galice, une saga familiale lyrique et enflammée par Susana Fortes, l'auteur d'En attendant Robert Capa.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Dès que la voiture eut quitté la place de la cathédrale, il demanda au chauffeur de faire demi-tour et de se rendre au quartier de l'Arsenal, où l'on entendait déjà des tambours, des rires, des airs d'accordéon. Ils se retrouvèrent soudain, au détour d'une rue, sur une place grouillante de marins, avec plusieurs cabarets aux fenêtres ouvertes. Il sentit son cœur battre plus fort, mais comme à distance. A l’intérieur, les mains sur les hanches, tournoyaient des mulâtresses, des Noires aux jupes relevées jusqu'aux cuisses, qui frappaient le sol de leur talons sur un rythme de guaracha, des blondes aux seins proéminents qui ôtaient leur soutien-gorge en échange d'un verre, et des hommes aux allures et aux carnations diverses, mais aux mains généralement enfouies dans un magma de seins ou de fesses. Il sentit s’éveiller entre ses jambes la chair à vif d'un animal hérissé et déambula en esquivant les ivrognes avec l'habilité d'un cocher, mais il se sentait perdu au milieu de ce tohu-bohu sans nom, jusqu'à ce qu'une danseuse jamaïcaine endiablée, à la robe rouge comme les flammes de l'enfer, vienne à sa rescousse et s'enferme avec lui dans une chambre. A peine eut-il le temps de sentir contre lui sa fébrilité transpirante qu'elle le fit retomber assis sur un grabat, lui défit sa ceinture et le chevaucha jusqu'à lui faire rendre l’âme, l’entraînant dans des profondeurs aux relents de crustacés, où il crut voir luire le regard jaune d'un chat.
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Il répondit de façon plus détendue, cependant, lorsque sa belle-sœur l’interrogea sur Juana.
«Elle est toujours là», dit-il avec une inflexion involontaire de tendresse dans la voix à la pensée de son ancienne nourrice et des éternels chaussons de feutre dans lesquels elle trottinait discrètement d'un bout à l'autre de la maison. Jamais on ne la voyait nulle part, mais elle surgissait toujours dès qu'on avait besoin d'elle. «Toujours aussi silencieuse, juste un peu plus vieille. Elle commence à avoir des absences. Parfois, elle passe des heures à chercher son nécessaire de couture parce qu'elle ne sait plus où elle l'a mis. Mais il y a d'autres choses, en revanche, qu'elle n'oublie pas du tout.» Lorsque le docteur Ulloa parlait de Juana, il en parlait comme d'un être d'une nature différente, obéissant à d'autres lois, celles qui ont cours dans les chansons d'autrefois, dans les psalmodies des aveugles, dans les chapiteaux sculptés des cathédrales. Ils ne pouvait concevoir qu'elle ait jamais eu un âge, tant il était persuadé qu'elle faisait partie de l’essence même du temps.
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Ils passaient d'un sujet à un autre. Rebeca, qui était friande de toutes les nouvelles du pays, se laissait éblouir par les descriptions que faisait son beau-frère de ce monde regretté, si différent de celui des tropiques. Un monde de toits défoncés, de champs de maïs que survolaient des nuées de grues, qu'atteignaient parfois aussi les mouettes, le vent humide de la baie et son odeur de salpêtre. Elle l’écoutait parler de sa contrée natale comme si les mots avaient le pouvoir miraculeux de lui restituer, l'espace d'un instant, ce paysage de vignobles bien dessinés, ce bleu profond des contreforts de la montagne où la rivière traçait sa courbe argentée, ces coteaux où paissait le bétail, ces petites fermes que séparaient des murets de pierre; il lui semblait voir les lumières jaunes des maisons qui ponctuaient le ciel, les soirs d'hiver, sitôt le soleil couché; elle sentait presque l'odeur du fumier dans les étables, celle du bois verre qu'on brûlait dans les chemins entre les longs murs des enclos; elle croyait entendre les sabots des vaches, le grincement des charrettes sur les chemins pierreux et même, par moments, les voix des femmes qui évoquaient à voix basse sur la plazza del Crucero, leur broc de lait sur la tête, les étranges événements qui se produisaient, telle l'apparition, dans une cellule du couvent de Santa Clara, du corps dénudé d'une novice qui s’était pendue avec le cordon de son habit consacré le jour même.
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Dona Elvira n’était pas à proprement parler une femme laide. Elle avait les cheveux bouclés, toujours attachés sur la nuque, une bouche fine qui eût été jolie sans le rictus, d'une dureté de fer, qui donnait à sa lèvre supérieure l'expression d'un moralisme implacable. Elle était pieuse au point que Juana, se levant avant le jour pour traire les vaches, l'avait plus d'une fois trouvée agenouillée dans le noir sur son prie-Dieu, son rosaire entre les mains, avec ce regard absorbé qui ne peut être le signe que d'un début de troubles ovariens ou d'un fanatisme sombre et tragique.
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- Les événements n'arrivent pas d'eux-mêmes, il y a toujours quelque chose qui les déclenche, un geste, une parole. On parle trop. On se met à parler, et les mots sortent tout seuls, presque sans qu'on le veuille, comme s'ils avaient leur vie propre, même ceux que nous avons retenus avec précaution pendant des années ; soudain, sans qu'on sache comment, ils sortent et parviennent aux oreilles de la seule personne qui ne devait pas les entendre.
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Video de Susana Fortes (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Susana Fortes
En attendant Robert Capa - Susana Fortes Marque Page 24-01-2011
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