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Très bon roman autobiographique de René Frégni, auteur qu'une amie de Babelio m'a recommandé. Il interroge sur les traces que le passé peuvent faire apparaître dans la vie quotidienne. A noter que René Frégni a animé des ateliers d'écriture en prison. Un livre à recommander ! A méditer !!!



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3h que j'ai terminé, et me voilà encore toute immergée en Provence, dans cette toute petite maison du Luberon, en compagnie des pins, des chênes, du buis, des moineaux et des verdiers...et puis aussi en compagnie d'Isabelle, la douce institutrice au regard vert et surtout de René Frégni, un auteur qui aime inventer des histoires sur lui-même, semble-t-il !
Mais René – vous permettez que je l'appelle ainsi, car ce n'est pas rien d'avoir passé quelques heures attachée à ses pas – a « un besoin maladif d'inventer une ombre, de la créer », il « n'est jamais parvenu à laisser couler (sa) vie ».
Effectivement ! Lorsqu'un détenu en cavale, un ancien participant à ses ateliers d'écriture en prison, l'appelle pour lui demander de l'aide, ce cher René accourt. Et ouvre ainsi le livre des ennuis, des problèmes, des catastrophes devrait-on dire plus précisément.


Quel bonheur de lire cet enchainement infernal ! Quel plaisir solitaire ! (René n'a pas l'air de partager ce plaisir, en tout cas).
Ses phrases visuelles, sonores, odorantes et tactiles parcourent l'histoire de part en part et ajoutent une note épicée à la torture psychologique qu'il subit.

J'ai lu ce livre quasi d'une traite, et je peux annoncer avec bonheur et frégnésie que je fais partie des adeptes de Frégni.
Si je lui écrivais pour qu'il m'invite en Provence, me recevrait-il ?
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**** gros coup de coeur

Je ne connaissais cet écrivain que de nom... ce dernier ouvrage est le premier écrit que je lis de lui.
Attirée par les sujets, et aussi par le parcours de cet homme: infirmier psychiatrique mais également animateur d'ateliers d'écriture à la prison des Baumettes...

Ce roman ( à fortes résonances personnelles) met en scène l'écrivain, vivant paisiblement dans une belle campagne non loin de Marseille, avec une belle institutrice, Isabelle; il écrit ses livres, marche, profite de la nature, la soigne... un jour, un cataclysme survient dans son existence, en la personne de Kader, un prisonnier rencontré et connu lors d'ateliers d'écriture que le narrateur animait en prison. Kader s'est évadé, après des années d'isolement... lui demande de l'aide; René l'héberge dans un petit logement qu'il a... et il se retrouve "embarqué" dans une spirale effroyable...

Je n'en écrirai pas plus... Une réflexion sur l'écriture, la magie et la thérapie des mots...Parallèlement à la version apaisante de la belle nature, du pouvoir des mots, il y a tous les fantômes et les côtés sombres, désespérants de ceux qui "n'ont pas fait les bonnes rencontres au bon moment"... et qui sombrent.

René Frégni exprime ses nombreuses réticences et colères face à la prison, et aux dégâts supplémentaires qu'elle crée...

Du mal à en exprimer plus... de ce texte très prenant et bouleversant...Très curieuse de découvrir et de lire d'autres écrits de René Frégni !

"- Qu'allez-vous chercher dans les prisons, monsieur Frégni ? Des émotions fortes ?... L'inspiration ? ...
-Ce que j'y ai trouvé, monsieur Thalès. A dix-neuf ans j'étais dans une prison militaire, un brave aumônier m'a apporté des livres. J'ai découvert la lecture, moi qui avais été viré de tous les lycées de Marseille. Pendant six
mois, dans cette cellule, j'ai lu. L'aumônier continuait à m'apporter, chaque semaine, des vieux livres qui partaient en lambeaux, rongés par l'humidité
de cette prison dans la Meuse. Je suis devenu écrivain grâce à ces lambeaux de livres. J'ouvrais un livre, le matin, et c'est comme si l'aumônier m'avait donné les clés de la prison, je partais en voyage...Voilà ce que je vais faire depuis vingt-ans dans les prisons, j'apporte les clefs et personne ne s'évade...
Personne ne naît monstrueux, monsieur Thalès, ce sont certains quartiers et les prisons qui nous rendent monstrueux. Je ne leur apporte aucune arme, je leur apporte des mots. Je leur apporte ce qu'ils n'ont jamais eu. "(p. 157)

De la Lumière et de l'Espoir...apportés avec prodigalité par cet écrivain, réunissant deux
" trésors": l' Amour des mots et l'amour des autres, avec une foi chevillée au corps : les miracles de certaines rencontres, changeant une vie " mal barrée"...!
.
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Comment ne pas s'attacher à ce périple aventureux, noir, d'une intensité palpable ?

Au coeur d'une intrigue haletante au sein d'une nature exubérante , cette campagne provençale où les amandiers , les mésanges dans les buissons ardents , l'odeur entêtante du laurier - tin accompagnent un couple de verdiers , des pinsons à la poitrine orangée , des oiseaux aussi colorés que vifs et vigilants ! Quelle écriture ! Splendide qui pousse le lecteur à dévorer ce ouvrage d'une traite !

L'auteur que j'ai le bonheur de découvrir , nous parle de liberté et de contrainte, d'amitié, de petits riens , de plaisir charnel auprès de son institutrice belle comme le jour, à la peau douce, aux seins rassurants, discrète, généreuse, désintéressée ..

Voilà notre héros confronté à Kader, entre Manosque , Marseille et Alpes, spécialiste de l'évasion——belle gueule ——très dangereux ——-un encombrant revenant rencontré lorsqu'il animait des ateliers d'écriture à la prison des Baumettes , qu'il va aider en tentant de ne pas se mettre hors la loi .....

N'en disons pas plus , frisson garanti .

L'écriture est poétique et sensible, soignée, brutale et puissante , précise , nourrie d'images ensoleillées , de sensations tactiles et olfactives jusqu'à une fin qui demande un suivi, peut- être ...

Je ne connais pas encore les autres ouvrages de René Frégni, celui - ci donne envie ....

Une intrigue tissée de sensations violentes et d'une escapade littéraire à propos du métier d'écrivain et de la culture .
L'auteur apparaît à la fois humble et brillant, modeste, pétri de talent, à l'humanisme bien ancré , amoureux de la nature et sensible à la beauté des femmes .
Le lecteur ira de surprise en surprise pour son plus grand plaisir.
Un bel ouvrage au suspense échevelé , à la couleur méditerranéenne affirmée !


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Bon je ne vais pas m'étendre, tant le roman a, sur ce site, été magistralement commenté. C'est juste pour dire que, parti de Terrains Vagues (mais non en friches), je suis descendu vers Manosque, je n'y ai pas rencontré son ermite mais le fils spirituel de l'auteur d'un polar d'alors, Un roi sans divertissement...

Avec Giono, sont convoqués également Christian Bobin, pour la poésie des mots, ainsi qu'Hervé le Corre, une pointure des bas-fonds et du suspens ; les plus anciens peuvent y adjoindre Auguste le Breton et ses Hauts murs.

La magie de ce roman est qu'il n'en est pas tout à fait un, "toute ressemblance" etc. etc. n'est pas que pure coïncidence, on sent qu'il y a du vécu là-dedans, le mec a quand-même un passé assez couillu, ça nourrit bien les pages, à chacun donc d'y faire la part de l'autobiographie ou pas d'ailleurs.

Belle rencontre en vérité, même si elle fut un peu arrangée...
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Ai-je succombé à l'épidémie de Fregnite aiguë qui se propage sur Babelio? Oui, mille fois oui!

Dès les premières pages , j'ai été touchée en plein coeur. Par l'écriture sensuelle , poétique. Par l'amour des mots qui transparait. Par la finesse d'observation des choses simples mais essentielles, la nature, les oiseaux, les fleurs. Par la générosité du regard envers les autres.

Mais ce livre aurait pu rester juste un écrit au fil du temps, si délicieux soit-il. On accompagne avec bonheur la vie solitaire et contemplative du narrateur, dans cette Provence magnifique, où la belle Isabelle aux yeux verts illumine son quotidien.Cependant, la suite transforme ce calme constat des jours qui passent en autre chose. Car Kader s'est enfui de la prison, Kader au rire de cheval mais à la gâchette facile, dangereux, si attachant... Le narrateur- écrivain , qui l'a connu lors d'ateliers d'écriture en milieu carcéral , l'aidera et sera donc complice de sa cavale. Jusqu'où s'aventurera-t-il?

Je vous laisse le découvrir. Ce livre associe habilement journal intime, notations sur le vif, aventure, thriller. Et l'auteur prend un malin plaisir à mêler aussi réalité et fiction, il est le "héros" de l'histoire , de nombreux éléments autobiographiques apparaissent, fusionnant avec le romanesque, l'invention. Cela m'a fait penser à " L'écrivain national" de Serge Joncour.

On s'émeut, on sourit, on rage avec le narrateur, on vibre des mots , des impressions, on se prend au jeu du vrai et faux, on est RAVI! J'espère que ce ravissement continuera, car j'ai deux autres livres de René Fregni qui m'attendent... Mon seul regret, c'est que, d'après ce que j'ai compris, il aurait été préférable de commencer par les romans précédents, qui évoquent déjà certains des personnages.
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La critique de Migdal m'ayant interpellée, je viens de lire ce beau roman de René Frégni. Je ne connaissais pas cet auteur, j'ai été enchantée par son écriture poétique et la grande humanité qui ressort de cet ouvrage.
L'histoire a pour cadre la Provence qui est ici décrite de façon lumineuse, avec ses senteurs de lavandes, ses couleurs, ses oiseaux...
L'auteur mène une vie paisible et heureuse auprès d'Isabelle, René Frégni nous raconte cette vie sous forme de journal avec des mots d'une grande sensibilité.
Jusqu'au jour où un coup de téléphone va venir perturber cette sérénité.
Là, on peut se demander pourquoi ? Pourquoi avoir tout risqué, peut-être tout balayé pour... Je n'en dirais pas plus !
On apprend que l'auteur intervient dans les prisons pour animer des ateliers d'écriture, il a aussi travaillé en hôpital psychiatrique, tout cela demande de la grandeur d'âme et explique certainement la grande humanité qui se dégage de ce livre.
Il s'agit certes d'un roman mais basé sur des faits réels dont on avait beaucoup entendu parler à l'époque.
Happée par cette histoire à la fois autobiographique, policière et d'une grande sensibilité, je n'ai pas pu lâcher ce livre avant de l'avoir terminé en très peu de temps.
J'espère qu'il y aura une suite...
Un coup de coeur avant la rentrée littéraire et la découverte d'un auteur dont je suivrai les écrits.
Merci aux amis babeliotes !
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J'adore découvrir de nouveaux auteurs. Et quand je dis « nouveaux », il faut aussi entendre des écrivains qui ont déjà pas mal roulé leur bosse mais qui ne font pas forcément trop de vagues commerciales, en périphérie de ceux qui pratiquent de main de maitre le marketing à haute dose. (Tiens, il parait que la maison d'édition de l'écrivain français le plus vendeur envoie d'office à certaines librairies les romans du dit auteur, même s'ils ne les ont pas commandés. Donc, sauf si les libraires font l'effort de renvoyer les romans pour être remboursés ; ces livres se retrouvent dans les vitrines, sur les tables de ces librairies, bon gré mal gré. Ça c'est un marketing fichtrement bien pensé. Faudrait pas que t'oublies de l'acheter : il en va du top1 des ventes à respecter !).
J'aime découvrir des écrivains peut-être plus discrets que d'autres mais qui font leur petit bonhomme de chemin, découvrir des petits trésors enfouis et qui ne demandaient qu'à être découverts et appréciés pour leurs qualités. Des écrivains qui savent manier la plume, qui écrivent des livres un peu comme à leur image, intimistes, presque humanistes, qui savent raconter des histoires comme l'oncle Paul, des histoires dans lesquelles on se plonge, on se laisse bercer, immerger, submerger doucement.
Depuis quelques temps, je lis de belles critiques sur l'écrivain René Frégni et notamment sur son roman « Je me souviens de tous vos rêves ». Intriguée, j'ai consulté la liste de ses romans. Et là, j'en voudrais presqu'à ma soeur de ne pas m'en avoir parlé avant, elle qui vit à quelques kilomètres à peine de Manosque, où vit cet écrivain. D'ailleurs, sur une ligne droite qui mène jusqu'à Pertuis où vit Thomas Vinau (découvert il y a quelques années avec « Ici ça va », deuxième faute de ma frangine… Elle les cumule, ma soeur).
Mais ces écrivains-là, il faut les bichonner, il faut les protéger. Ils me font penser à de petites criques, d'une beauté époustouflante et sauvage, connues par les autochtones seuls. Des endroits dont il faut garder le mystère, dont il faut cacher l'existence aux hordes de touristes, sortis frénétiquement d'un bus climatisé énorme, garé pas loin, et qui viendraient forcément dénaturer et abimer le lieu. Il paraît qu'avant Bardot Saint-Tropez était un village de pêcheurs, il paraît… Encore une qui aurait dû tenir sa langue et se faire plus discrète à l'époque.
Alors me voilà devant le paradoxe de vouloir vanter les mérites de Frégni, touchée par ses mots, la beauté de son texte, tout en souhaitant garder intact cet homme qui vit près de la nature, qui aime la solitude et le calme, loin du vacarme du monde. Mais, n'ayant pas la notoriété de BB ni ses atours (déjà je ne suis pas blonde), je me suis finalement dit que mon petit billet n'aura pas le même impact-et loin de là- qu'un frétillement de cils de BB. Et Frégni a trop vécu pour savoir ce qu'il aime et apprécie aujourd'hui et il sait se sauvegarder. Il restera telle une pierre précieuse à l'état brut, pas encore taillée.
J'ai découvert la plume de Frégni par « Les vivants au prix des morts » et je me suis plongée dans le récit, incroyable récit, devrais-je dire. Je ne sais pas si j'ai déjà lu un roman avec un tel style d'écriture. Un mélange savamment dosé de poésie et de polar.
On entre dans la lumière éclatante pour plonger dans le noir. de l'amour pour une femme à la folie des hommes. Frégni sait par petites touches, tel un peintre pointilliste, parler de la nature, du silence, du chant des oiseaux, du pouvoir de l'écriture. Il sait parler de la beauté des femmes (surtout celle de son institutrice). Il évoque par son regard l'amour qu'il éprouve pour ce qui l'entoure. Il sait apprécier ces petits matins tranquilles avec un bol de café, regarder par la fenêtre des petits riens qui sont beaucoup, le bruissement des arbres, la voisine qui promène son chien. Il nous enveloppe d'une douceur languissante. La douceur d'une pierre polie par les vagues qu'on caresse entre ses doigts, même si c'est au prix parfois de la rugosité d'un rocher contre la plante des pieds contre laquelle on s'écorche et on se met à saigner. le silence et la quiétude de la nature mais aussi le silence étouffant d'une cellule de prison des baumettes, parmi les cris des détenus. On a beau parfois vouloir s'isoler, l'amitié, l'amour des autres nous rattrape, avec ses joies et ses malheurs et on pourrait s'en mordre les doigts.
Dans quelques jours, je partirai pour la Provence, me balader près de la montagne Sainte Victoire, parmi les champs de lavande et de coquelicots, attendant le temps du chant des grillons, profitant des marchés nocturnes, de l'accent du Sud et d'un rythme plus lent et régénérant. Je ne sais pas si je croiserai au hasard d'un petit chemin un homme qui ressemblera à René Frégni. Mais il est certain que je penserai à lui lors de mes balades, respirant, m'inondant de cette nature, de cette beauté simple qui le bouleverse comme moi.
Ce billet est aussi pour vous dont les critiques sur les romans de René Frégni ont éveillé ma curiosité et m'ont permis d'avoir la chance de découvrir un écrivain qui m'a offert ces émotions comme je les aime. Un écrivain que j'ai envie de découvrir plus encore. Et de faire partager aussi (j'en parlerai sûrement à ma soeur… Elle a de la chance, ma soeur, je ne suis pas trop rancunière). C'est un billet pour vous remercier chaque jour d'élargir mon horizon, d'enrichir mes émotions, de faire entrer un peu de magie, de beauté et de lumière dans mon quotidien. Et ça, ça n'a pas de prix.
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Les vivants au prix des morts est un roman qui m'a pris au coeur. Je ne suis pas prêt de l'oublier. Nous sommes ici en dehors des sentiers battus. L'auteur d'ailleurs est atypique, il écrit sur ce qu'il connaît : la prison pour être intervenu en milieu carcéral dans l'animation d'ateliers d'écriture, l'écriture qui peut sauver des hommes, les aider à tendre les bras à travers les barreaux de leurs prisons.
Ici le narrateur s'appelle René, comme l'écrivain, René Frégni. Les deux personnes d'ailleurs se confondent, sans ambiguïté.
Nous démarrons la lecture de son journal, nous sommes au plus près de lui, dans des phrases qui cueillent le jour, l'instant présent, un vol de ramiers, la neige qui est là accrochée aux branches, des dames qui traversent la rue d'en face, Isabelle son amour qui va qui vient de l'école où elle enseigne auprès de tous petits, les seins d'Isabelle pour lesquels l'auteur porte une fascination irrésistible. Il écrit cela dans son journal qui commence.
Un jour, plus tard, le téléphone sonne, c'est Kader à l'autre bout du fil. Ils se sont connus il y a quelques années à la prison des Baumettes, René animait un atelier d'écriture où Kader était présent. Kader vient de s'échapper de prison. Il est en détresse. Il veut que René l'aide. Dès lors, tout va basculer...
Plus tard, après ce qui va suivre de cette rencontre, les nuits du narrateur se succèdent, faites de cauchemars. C'est comme une traque immobile.
Kader, c'est la cavale d'un homme qui ne veut plus retourner en prison, finir ses jours là-bas.
Ce livre est une ode à l'écriture, mais aussi une révolte à l'incarcération. Kader sait d'avance qu'il sera rattrapé, retournera en prison. La rencontre avec René, le narrateur est juste une pause, une parenthèse de liberté, une manière aussi de revoir son fils Bryan qui a seize ans.
C'est un roman où se côtoient la peur et la douceur de l'amour. Tout cela oscille dans le fracas du temps.
Le narrareur y apporte ses mots, sa parole et des voyages imaginaires. Il apporte de la lumière et des gestes qui apaisent. Il ne cesse de parler d'Isabelle, son aimée, comme s'il devait sans cesse la perdre au lendemain, dans cette histoire improbable.
Il nous parle de l'hiver, il nous parle du printemps qui soulève la terre, du désir qui surgit des ruines de l'hiver, des pierres vertes des rivières où il fait bon marcher pieds nus. Lorsque le printemps surgit, il nous parle aussi avec merveille d'un vol de mésanges bleues. La sagesse des oiseaux est sa manière de tenir debout.
Il nous parle de l'incarcération. Les prisons sont des labyrinthes peuplés de prédateurs. Entre les murs des prisons, y-a-t-il autre chose que la misère et l'ignorance ? L'auteur nous dit que la lecture peut agrandir la cellule d'un détenu.
À un moment, l'ancien détenu que fut Kader parle de la lecture comme quelque chose qui permettrait de s'évader, une sorte d'escalier de cordes tissé de mots, accroché aux barreaux d'une fenêtre, suspendu au-dessus du vide...
Ici j'ai perçu le désir de l'écrivain : écrire l'autre côté de la vie, l'autre côté du versant, celui qu'on devine du bout des doigts, qu'on rêve d'atteindre un jour.
C'est aussi un livre sur l'amitié. Il est dit qu'un ami, c'est celui qui prend la bêche, creuse le trou pour enterrer le cadavre de l'homme que l'autre vient d'assassiner.
Ce roman est un endroit de poésie où l'on côtoie aussi les loups. Il est magnifique pour cela.
Dans cette lecture, j'ai été embrasé.
Merci à Blandine, à qui je dédie ce billet, pour m'avoir donné envie de lire ce livre très beau.
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Tout est lumineux, beau et calme dans ces premières pages que le narrateur, écrivain, écrit. « Chacun de nous devrait commencer sa journée par un café et quelques mots dessinés sur un cahier rouge ». de jour en jour, l'observation amusée des oiseaux dans la haie, les mots débordant d'affection pour Isabelle, la jeune et belle institutrice qui partage sa vie et qui aime préparer des gâteaux aux pommes avec les enfants de sa classe de maternelle, alimentent ces pages. Il y a aussi les faits divers, distillés, décortiqués, qui l'interrogent sur la violence des hommes. Lui, l'écrivain poète, préfère sillonner les sentiers de ses collines provençales et s'occuper des arbres fruitiers du jardin d'Isabelle.
E, au milieu de ce bonheur si simple et si calme, un coup de tonnerre soudain, avec l'appel téléphonique de Kader.
Kader, ce détenu de la prison des Beaumettes qui fréquentait les ateliers d'écriture de l'écrivain, Kader que le narrateur n'a pas oublié, « un morceau de soleil tombé dans les ténèbres de la prison. Un morceau d'enfance. »
Comment réagir lorsqu'un détenu en cavale demande votre aide ? A partir de cet appel, rien n'est plus pareil et la vie de l'auteur va basculer vers la peur. Comment protéger Isabelle à laquelle il ne dit rien, ou presque ? Elle comprend pourtant, à l'inquiétude visible de son compagnon, qu'il se passe des choses graves. L'écriture, qui est la vie du narrateur, le fuit inexorablement, avalée par cet effroi qui ne le quitte plus. Entraîné malgré lui dans une aventure dangereuse, il a perdu sa tranquillité. Triste retour des choses, il vit désormais avec la peur, comme ces hommes qu'il a tant côtoyé lors de ses ateliers d'écriture en prison.
Tout au long du récit, on sent à la fois la crainte de Kader et de sa violence qui peut éclater à tout moment, et cette fascination pour le voyou charmeur au sourire irrésistible.
Cette rencontre entre les deux hommes et les aventures qui vont en découler sont fascinantes. Sans doute que la véracité du récit tient aussi au réel qui se glisse entre les phrases. René Frégni a su tisser avec talent une intrigue sombre de truand en cavale à laquelle il a mêlé sa propre histoire d'écrivain animateur d'ateliers d'écriture dans les prisons. C'est bien sa vie qu'il évoque lorsqu'il écrit « Je vais dans les prisons pour comprendre les hommes, comprendre qui je suis, écrire des livres vrais » Et cet équilibre constant entre la réalité et la fiction est vertigineux.
Le récit est tendu et nous tient en haleine. Mais ce noir est ponctué de respirations où la nature est très présente et c'est vivifiant. La plume de René Frégni a cette capacité de nous faire entrer dans le paysage
: « J'ai traversé des terres de brouillard, suivi un instant des chemins qui tournaient et plongeaient dans le miroir d'un étang. Les forêts sortaient de l'hiver dans leur manteau de lierre. »

Une belle, une fascinante lecture. René Frégni est un auteur que je découvre grâce aux échanges avec les lecteurs de Babelio et je n'ai qu'une envie : continuer à découvrir son oeuvre.

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