Journal d'un jeune diplomate dans l'Amérique de Trump

"Je demande alors à mon interlocuteur s'il croit dans toutes les propositions du candidat. Il s'esclaffe. Cet homme, qui quelques minutes auparavant, acclamait Trump quand il parlait de sa volonté d'édifier un mur à la frontière mexicaine, m'explique : "Mais non, pas du tout. On sait bien que ce mur ne sert à rien. On a 11 millions d'immigrants illégaux aux Etats-Unis. Vous croyez quoi? Qu'on va les chasser les uns après les autres? On sait bien que ce sera pas le cas. Et puis moi, mes voisins sont des clandestins dominicains et je m'entends bien avec eux. Mais c'est pas la question. Moi, je vais voter Trump parce qu'une fois au pouvoir, il va mettre un grand coup de pied dans la fourmilière. Il va virer ce ramassis d'incapables qui nous gouvernent. Et c'est ça que je veux parce que, comme tous les gens ici, je n'ai plus rien à perdre."

Par ailleurs, comme me l'expliquera plus tard Evelyn, une amie afro-américaine issue des banlieues de l'est de Washington, "Nous ne pensons pas que Trump constitue vraiment une menace pour nous. OK, il tient des propos limites et a flirté avec les suprémacistes blancs, mais c'est purement électoral. Il ne reviendra pas sur les avancées majeures du mouvement des droits civiques. Sérieusement, tu l'imagines remettre en oeuvre la ségrégation? " C'est en effet, une éventualité difficilement concevable, d'autant plus que la Cour suprême l'en empêcherait.
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Alors que 66,6% des électeurs afro-américains s'étaient rendus aux urnes en 2012 pour donner un second mandat à Barack OBAMA, ils ne sont que 59,6% à avoir voté en novembre 2016. C'est la première fois depuis vingt ans que le taux de participation des Afro-Américains a baissé.

L'Amérique de la Marche des femmes est urbaine et multiculturelle. Elle lit le New York Times, voyage à travers le monde et est passée par les universités de l'Ivy League.
Pour elle, la mondialisation est une chance. Pendant des décennies, elle a construit un rêve américain qui a exclu l'Amérique rurale, blanche et paupérisée, celle des Left behind.
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Si elle ne tend pas la main à celles et ceux qui, pour beaucoup, ont voté pour Trump par colère, alors elle sera passée à côté de l'Histoire. Surtout, elle n'aura pas bâti les fondements d'une Amérique meilleure pour ses enfants.

La journaliste Salena ZITO avait écrit (The Atlantic 23-09-2016)"la presse prend Trump au mot, mais elle ne le prend pas au sérieux. Ses électeurs, au contraire, ne le prennent pas au mot, mais ils le prennent au sérieux"

Je me rappelle alors la phrase d'une amie journaliste qui m'avait dit "Jérémie, n'oublie jamais que Trump se considère comme un outsider. Son père l'a élevé en lui rappelant sans cesse que leur famille, malgré sa richesse, ne faisait pas partie de la haute société new-yorkaise. Et que sa vie serait donc une quête permanente pour prendre sa revanche sociale sur ceux qui avaient dédaigné son clan"
C'est en effet ce qui plaît à la foule.