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sur 285 notes
N°1663 - Août 2022

Le dernier hiver du CidJérôme Garcin – Gallimard.

Il y avait eu « Le temps d'un soupir » l'émouvant hommage d'Anne à son époux, Gérard Philipe (1922- 1959)
Nous avons tous encore en mémoire le visage de cet homme jeune et engagé aux côtés des comédiens et des plus défavorisés, infatigable acteur à la beauté quasi juvénile, prêtant pour les enfants sa voix envoûtante au merveilleux conte d'Antoine de Saint-Exupéry, enterré dans le costume de Don Rodrigue, le Cid de Corneille, qu'il incarna (« la mort a frappé haut » dira simplement Jean Vilar), comme un dernier pied de nez à la camarde qui ne lui enleva que la vie mais pas l'image gravée sur la pellicule, pas la trace de son passage si bref sur terre de trente six ans qui inspira des poètes et symbolisa cette envie de vivre après les atrocités de la guerre. Gérard Philipe reste dans nos mémoires, surtout celles des gens de ma génération, non comme un simple nom sur une plaque de rue, mais comme la trace indélébile de la jeunesse et de la beauté que la vieillesse avec ses rides, ses déformations et ses douleurs, n'altérera jamais, un visage qu'il est impossible de ne pas reconnaître.
Jérôme Garcin a déjà, avec talent, fait revivre nombre de personnages inconnus du public ou oubliés par le temps, il était donc naturel qu'il rendît hommage, avec la sensibilité qu'on lui connaît, à ce merveilleux acteur mondialement connu dont, bien plus tard, il épousa la fille. C'est un beau témoignage, à la fois émouvant et poétique qui retrace également le parcours personnel d'Anne qui accompagna la carrière de son mari dont il énumère les succès, les écueils, les échecs, les critiques qu'il essuya, les convictions politiques, évoque sa mère et même son père qu'il aimait malgré leurs divergences, parle de son besoin de vie de famille avec ses enfants...
Son parcours est indissociable du Théâtre National Populaire de Jean Vilar où il milita comme simple comédien, choisissant d'oublier sa notoriété, ce qui dit assez non seulement son amour de la scène mais aussi son désir de vulgariser cet art, de le partager avec les plus défavorisés, c'est à dire avec ceux qui, pour un tas de raisons, n'y ont pas naturellement accès. Ce désir de vulgarisation me rappelle, toutes choses égales par ailleurs, l'expérience menée par Frederico Garcia Lorca en Espagne avec sa troupe « La barraca » en 1931. Son action se limitera pas seulement là et il luttera pour reconnaissance du travail des acteurs et des intermittents du spectacle. A son enterrement, pas d'officiels, seulement quelques amis et surtout tous les habitants du village de Ramatuelle qui accompagnaient ainsi un ami, un parent ...
Jérôme Garcin relate avec émotion et pudeur ce qu'ont été les derniers jours de l'acteur , le courage d'Anne, sa décision de taire son état à son mari, celui aussi d'être cette tragique comédienne face à cet immense comédien, souligne l'ironie du destin qui avait sollicité la notoriété de Gérard pour participer à une campagne nationale contre le cancer, ce mal qui pourtant allait l'emporter. Il évoque sa vie désormais entre douleurs, silences, espoirs fous de survie, soulève des hypothèses qui pourraient influer sur le cours des choses et auxquelles malgré tout on voudrait croire, en se gardant bien cependant de faire parler un mort, respectant ainsi sa mémoire. Même si on ne l'a pas connu personnellement ou simplement croisé, comme c'est le cas de beaucoup d'entre nous, il reste dans la mémoire collective comme un mythe qui ne mourra jamais, comme James Dean ou Maryline Monroe qui vécurent intensément parce qu'ils savaient, inconsciemment peut-être, que le temps leur était compté. Non seulement il incarna son époque dans son appétit de vivre, mais aussi il n'a pas heureusement eu le temps de connaître l'usure des choses, les rides qui ravagent le visage, les modes qui changent, les goûts du public qui se modifient, la nouvelle génération qui chasse et conteste l'ancienne, l'oubli qu'un acteur plus qu'un autre être, redoute... Que serait devenue cette image si les choses ordinaires de la vie l'avaient altérée ? Au moment où nos sociétés vieillissent, où les hommes souhaitent durer longtemps pour profiter de cette vie qui est un bien unique, mourir jeune est une injustice, la marque d'un destin cruel, surtout si la mort interrompt une belle carrière comme ce fut son cas. Mourir ainsi c'est aussi et malgré soi, nourrir sa propre légende, pourtant, malgré la révolte et le chagrin, cette disparition l'a consacré, alors qu'il était au sommet de son art et qu'il se projetait dans l'avenir.
Sa mort a été tellement brutale qu'on a fait semblant de croire qu'il était parti pour un temps, qu'il était « passé dans la pièce à coté », qu'il allait surgir à nouveau avec son sourire éternel. Nous avons beau nous répéter que la mort n'est rien que la fin de notre parcours terrestre, nous sommes tous mortels et la grande faucheuse choisit ses victimes avec sa logique illogique qui fait durer des vies au-delà du raisonnable et en supprime d'autres, gourmandes d'avenir. J'ai eu beaucoup de mal à refermer ce livre.

Il avait ce côté à la fois fragile et aristocrate de l'acteur qui, sur scène donne, par son talent, la vie à des personnages, il avait prêté sa voix au « Petit Prince » je veux retenir ces mots simples d'une chanson qui lui est dédiée et qui lui vont si bien
« Il était un prince en Avignon, sans royaume ni château ni donjon, las-bas au fond de la province, il était un prince... »
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Au travers de ce dernier hiver de Gérard Philippe, Jérôme Garcin retrace (en accéléré) la vie et la carrière de ce beau-père qu'il n'a pu rencontrer. 

Pendant les vacances d'été de 1959, Gérard Philippe se sent un peu patraque, manque d'énergie, mais l'année écoulée fut éreintante entre tournages et théâtre.

Il profite de la chaleur tropézienne, qui cette année le fait un peu souffrir,  il joue avec ses enfants, lit et discute avec Anne, son épouse, se plonge dans les textes qu'il aimerait jouer, notamment certaines pièces des tragédiens grecs antiques ... 

Au retour  à Paris, la fatigue persistant il se résout à consulter un ami. Les premières examens radiologiques ne révèlent rien ... de séjours africains il a été peut être contaminé par des amibes, qui pourraient avoir provoqué un abcès au foie...

Les chirurgiens ouvrent et referment après avoir découvert une tumeur inopérable. Ils annoncent le diagnostic à Anne et tous conviennent de n'en rien dire à l'acteur.

Il décèdera trois semaines plus tard ! 

Une vie brève, mil n'a même pas atteint son trente-septième anniversaire, mais 60 ans après sa mort, il est toujours connu, apprécié et célébré ! 

Un très très beau témoignage sur la vie d'un homme à qui tout a souri ... sauf la vie ! 

Un bel hommage :) 
Lien : http://les-lectures-de-bill-..
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Ok ce sont mes derniers mois de Gérard Philipe et c est horrible de mourir si jeune. Il ne se savait pas condamné. Il continua à faire plein de projets donc le livre est une successions de références au théâtre classique alors sauf si vous en êtes un passionné sinon rien de intéressant.
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« Avec son livre, « le Dernier Hiver du Cid », Jérôme Garcin prolonge le si déchirant témoignage d'Anne Philipe, « le Temps d'un soupir ». L'auteur a épousé Anne Marie, la fille de Gérard et d'Anne Philipe. Il nous parle avec délicatesse et pudeur des derniers jours de l'immense acteur de théâtre et de cinéma qu'était Gérard Philipe. Il nous dévoile aussi, par bribes, sa jeunesse et plus tard sa carrière, mais aussi la grande humanité de cet homme très proche de ses enfants et de son épouse, de ses amis Jean Vilar du TNP et de l'écrivain Georges Perros et des gens tout simplement. le bonheur était là, la tragédie arrivait….

J'ai beaucoup aimé redécouvrir cet acteur connu dans le monde entier et dont mes parents me parlaient avec fierté. Gérard Philipe aurait mérité un bel hommage pour les 60 ans de la disparition en 2019. Sa beauté, une vie brève et une carrière incroyable n'empêchent pas l'oubli dans ce monde d'aujourd'hui mais une étoile telle que Gérard Philipe n'a sans doute pas besoin de reconnaissance… Je suis entrée avec bonheur et curiosité dans l'univers « cinéma et théâtre des années 50 », j'ai été très émue par la détresse d'Anne son épouse, si digne dans son immense douleur.. A lire pour (re) découvrir ce grand comédien..
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A partir des écrits et témoignages des amis et de la famille, « le dernier hiver du Cid » raconte les trois derniers mois de la vie de Gérard Philippe. Jérôme Garcin relate la façon dont l'acteur a quitté son trône de lumière pour combattre une maladie dont on lui a caché le nom.
Le portrait dressé par Jérôme Garcin alterne la description du roi en lumière et de l'homme avec ses peurs et ses doutes. le public connait le premier et n'avait jamais imaginé le second. de cet enfer qui détruit le corps de Gérard Philippe, Jérôme Garcin choisit aussi de raconter son esprit, alerte qui trouve le pouvoir de l'après dans les tragédies grecques.
Ce livre est dédicacé à la femme de Jérôme Garcin, la petite Anne-Marie. Elle s'était aperçue malgré le silence de sa mère que quelque chose rendait vulnérable son géant de père…
On aperçoit aussi Minou, la mère, la première à avoir porté son regard passionné d'amour sur son « Gégé » mais qui n'a pas vu, malgré son acuité de voyante, cette fin si rapide et douloureuse.
Ce livre est surtout une ode à Anne, la femme de Gérard, qui a préféré garder le secret pour que l'esprit de son mari soit libre de lutter, pressentant que sa fragilité et ses failles ne pouvaient lui donner d'autres choix. Est-ce les souvenirs d'Anne-Marie qui ont influencé ce choix ? Certainement …
La description de cet amour est relatée de façon si pudique et si mesurée, juste suggérée, dans ce quotidien qui dit l'amour sans faille d'une femme effacée et habituée à protéger et à soutenir pour que celui qu'elle aime éclaire sur les tréteaux.
Cette langue douce et aimante nous entoure tout au long de ce récit d'août à fin novembre 1959 avec poésie et beauté pour que reviennent dans nos esprits à la fois le comédien brillantissime, l'homme aux convictions affichées et le mari et le père attentionné que nous découvrons. Vraiment un beau moment de lecture !
La suite ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2020/05/09/le-dernier-hiver-du-cid-jerome-garcin/
Lien : https://vagabondageautourdes..
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Un bel hommage ❤️que celui de Jérôme Garcin qui ne peut laisser indifférents ceux qui se souviennent de Gerard Philipe personnage fantasque hors norme plein de vie , indissociable du bonheur , une émotion certaine liée à nos jeunes années ... une belle écriture ✍️ Nous l'avons tant aimé n'est-ce pas ...
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Paris, 25 novembre 1959, Gérard Philipe, le flamboyant interprète du Cid, vient de mourir , fauché en pleine jeunesse, au faîte de sa gloire, comme quatre ans plus tôt James Dean, ou, bien avant, Alexandre le Grand, un héros comme ceux qu'il savait si bien incarner.
Jérôme Garcin a choisi le 60ème anniversaire de sa disparition pour publier ce livre sur ce comédien dont il a épousé la fille, Anne-Marie. C'est dire qu'il connaît bien les détails, même intimes, de ce "dernier hiver". Parcourant ce récit au jour le jour, le lecteur comprend que le mal dont souffre Gérard Philipe va empirer, et que la tragédie se joue cette fois dans la vraie vie, et non plus sur les planches. Anne, l'épouse attentive et lucide, l'a compris très vite, à Ramatuelle, dans l'été finissant, quand elle voit son mari anormalement épuisé alors qu'il n'a que 36 ans.
De retour à Paris, il semble ignorer (ou feint d'ignorer) la gravité de ce mal qui le condamne à brève échéance, comme les médecins l'ont annoncé à Anne. Il fait des projets, lit , annote des oeuvres qu'il souhaite interpréter ou mettre en scène.
De ce récit à l'écriture assez austère , presque pesante, jaillit par moments l' émotion. Comme des fulgurances, les temps forts de la carrière, si courte et pourtant si intense, de ce comédien adulé et charismatique, viennent recréer le puzzle d'une vie brutalement interrompue.
Un bel hommage, comme Gérard Philipe le mérite.
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Si j'ose parfois partager mon avis sur mes lectures , c'est, me semble t il, par goût du partage de beaux moments... je ne souligne que les écrits qui m'offrent des émotions, des réflexions, à travers lesquels je souligne des passages qui résonnent et m'élèvent, m'éclairent, me consolent parfois...Aujourd'hui pourtant, c'est une vraie déception que je décide de livrer. le dernier hiver du Cid, livre écrit par le gendre de Gérard Philippe et peut être est cela?Jérôme Garcin satellise cette étoile sans jamais l'avoir connue que par souvenirs offerts... ses mots trahissent une admiration, une presque volonté de s'inscrire dans la lignée du comédien.
Cependant,... son écriture est assez prétentieuse, alourdie et enclavée par trop d'adverbes empêchant de cueillir la simplicité de ce l'homme.
Le texte est nourri d'extraits de discours sur la carrière du Cid éternel, peut être trop...finalement...
par manque de simplicité, par trop de diversions, par excès d'adjectifs privilegiant les emprunts lettrés , l'essentiel me semble omis : peu d'émotions et de douceur dans ce dernier acte.
Ceci n'est que ma déception... j'ambitionnais des mots plus profonds pour fendre cette comète qui reste l'éternelle référence malgré 60 années de silence...
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C'était au siècle dernier un artiste habité par la grâce. Gérard Philipe « avait révolutionné l'interprétation classique de l'héroïsme, modernisé le jeu classique, rendues actuelles des tragédies révolues », redonné à Rodrigue sur la scène du Théâtre National Populaire de Jean Vilar toute la la fougue juvénile du héros « À quoi attribuez-vous ce renouveau, cette jeunesse du Cid ? » « A Pierre Corneille. » avait-il répliqué cinglant dans son humilité.
C'est toute une période que Jérôme Garcin va, pour nous, reconstituer. le bouillonnement intellectuel de l'époque gaullienne et la place essentielle consacrée alors à la culture, la générosité et l'engagement politique de l'acteur dans le communisme, son militantisme, il signera en 1950 l'appel de Stockholm contre le nucléaire « Nous considérons que le gouvernement qui, le premier, utiliserait contre n'importe quel pays l'arme atomique commettrait un crime contre l'humanité et serait traité comme criminel de guerre », toujours actuel.
Mais en cet été suffocant de 1959, dans sa résidence de campagne de Ramatuelle, dans le Var, le héros est fatigué. Il l'ignore, il est condamné. Il ne lui reste plus que cinq mois à vivre. Sa femme le sait, joue au comédien la comédie de la santé, pour qu'il puisse encore se projeter dans ses rêves, dans ces grands rôles qu'il n'osait interpréter avant sa pleine maturité. Lui l'ignorera toujours, jusqu'au terme de sa vie, jusqu'en ce 25 novembre 1959, où son cancer va le foudroyer dans son sommeil. Et c'est dans les habits du Cid qu'il sera enterré pour rejoindre l'Olympe des géants.
« C'est moi qu'ils ont étendu sous cette froide pierre ; c'est pour moi qu'ils avaient aiguisé leurs épées ; c'est moi qu'ils ont tué. Adieu la gaieté de ma jeunesse ; l'insouciante folie, la vie libre et joyeuse au pied du Vésuve ! Adieu les bruyants repas, les causeries du soir, les sérénades sous les balcons dorés ! » déclamait-il encore dans Les Caprices de Marianne d'Alfred de Musset.
C'est sa femme Anne à ses côtés qui l'aura empêché de céder à la facilité « où sa beauté droite lavait la France de sa laideur morale » et qui jusqu'au bout va le protéger de son amour, brisé par un impitoyable destin. Désormais seule, ensevelie dans son immense chagrin. « Vivre n'est plus qu'un stratagème / le vent sait mal sécher les pleurs […] Je reste roi de mes douleurs » Aragon.
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Et voilà ! Je termine "Le dernier hiver du Cid" avec les yeux humides. Jérôme Garcin a su si bien évoquer Gérard Philipe, son exceptionnelle lumière, que j'ai l'impression de le perdre à nouveau. Quel fantastique comédien, quel incroyable être humain !

Un ange est passé. Il nous laisse une petite blessure de nostalgie et un magnifique sourire.

#LeDernierHiverDuCid #JeromeGarcin #Gallimard #GerardPhilippe #lectures #livres #chroniques

Le quatrième de couverture :

Il y a soixante ans, le 25 novembre 1959, disparaissait Gérard Philipe. Il avait trente-six ans. Juste avant sa mort, ignorant la gravité de son mal, il annotait encore des tragédies grecques, rêvait d'incarner Hamlet et se préparait à devenir, au cinéma, le Edmond Dantès du Comte de Monte-Cristo. C'est qu'il croyait avoir la vie devant lui. du dernier été à Ramatuelle au dernier hiver parisien, semaine après semaine, jour après jour, l'acteur le plus accompli de sa génération se préparait, en vérité, à son plus grand rôle, celui d'un éternel jeune homme.
Lien : http://lesbouquinsdesylvie.fr
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