MAISON 2
Extrait 3
ai écrit « J'ai toujours été content et satisfait ... jusqu'à ce que l'homme vienne et m'apprenne à imiter, mais je ne savais pas ce que j'avais écrit ». Et cette phrase, les poètes la croient plus que toutes les autres.
Quelle merveille que l'énoncé dégoulinant d'ingénuité de l'enfant battu qui pleure le rassurant claquement du fouet, comme le placard était doux qui empêchait les horribles sons de la vie
Infans = nature ? Avez-vous vu des taureaux confiner le bœuf dans une mare, le noyer juste un peu, l'empêcher de sortir. Oui, j'ai vu les cadavres de lièvres à demi mangés par le père, certes, mais des lapins enfermés dans le terrier jusqu'à l'âge adulte ?
MAISON I
Extrait 2
ai marché en mastiquant une longue phrase,
mais n'avais que deux chevaux et des rubans, un habit, leur souvenir
et déjà votre ville avait trop d'objets et déjà vous vouliez les
oublier à moi
entends tinter l'éteint de toutes mes gamelles vides,
tout ce qui s'est cabossé sans le bruit
Mais entre l'os et le muscle il n'y a pas le cartilage du désir,
aucune de vos greffes ne prendra
Mais pourquoi croyez-vous que vos mots boucliers m'ont tué ?
ceux que ai récités face contre terrrrr,
une dizaine de mots dans mes mains en pleurs, mais la béance
sans mots de celui qui
se retirerait me laissant éternellement à marée basse, coquillage sans
eaux, entendre le bruit de la mère, faire oreille pour ma coquille vide
Motte d'amour, d'une voix sans visage qui s'est arrachée, on s'adressait à
moi, même pas besoin de visage. Mais pourquoi m'avoir ôté sa voix ?
MARCHE I
extrait 4/4
Muré=sans expérience= cœur pur= verbe premier= poésie !
ai construit avec mes tuteurs mes premiers souvenirs, ai fait
album, fabriqué à mon corps défendant une chrchronologie
Sans fracas s’envole la maison des silences
Tout me laisse à présent,
Loin des pierres qui me regardent
Et vacille à la vie
Et tous ces yeux en la ville qui m’attend
Et l’écume de ses pourquoi
MARCHE I
extrait 2/4
L’humidité m’a reconnu facilement,
l’agonie du réveil, l’impossible souvenir du gouffre premier,
le premier cri
du matin,
l’absence de caresses,
vagues de manque,
tête brumisée d’absences
d’où aurais appris que la souffrance se jette vers,
que la douleur a une direction
Aucun animal de ma taille ne passe l’horizon et n’en déduis rien, jamais.
Et la caresse de mes rubans qui hachurait la journée ?
traits de biais, ont strié la poussière de la cache
Encore mouillé de murmures, sans qu’il n’ait fallu se lever,
Alors que les questions n’étaient que des trous blancs
Qu’ils n’ont cessé de remplir
MAISON 2
Extrait 2
Et j connais désormais le mot chance, première trappe,
nouvelle souffrance d'un pompon de la vie que n'ai jamais su attraper, cramponné à la terrrrr,
jamais les bras au ciel, mais
c'est bien un seul tour de manège !
Lui parler du silence des pierres ?
La cité dolente - Laure Gauthier accompagnée par Serge Teyssot-Gay
À quoi pourrait ressembler l'Enfer sur terre aujourd'hui ? En dialoguant avec La Divine Comédie de Dante, Laure Gauthier dans La cité dolente réinvente l'Enfer à partir du récit poétique d'un vieil homme anonyme qui s'enferme volontairement dans un hospice : il fuit notre monde où l'on est enseveli sous un flot constant d'images et d'objets et espère, depuis son EHPAD, trouver enfin le temps de penser à sa vie avant de mourir. Mais l'Enfer aujourd'hui, c'est bien de ne pas pouvoir nous retrancher ni respirer, ne pas parvenir à trouver le temps, même pas à l'orée de la mort.
Laure Gauthier, accompagnée du musicien Serge Teyssot-Gay, expérimentent et tracent un chemin d'énergie : depuis la voix et la guitare électrique, l'autrice et le musicien arrivent à affronter la violence mais aussi à sonder profondément en nous pour y trouver l'énergie d'y résister : ils tentent d'inventer ensemble un mouvement pour « oser faire le choix de respirer, les pieds nus et les mains vides ».
« Il est des jours où je ne vois ni le soleil,
ni la lune
le regard est éduqué
pour rester à hauteur de vitrine ;
regard gondole, fausse vénétie. »
Laure Gauthier, La cité dolente
À lire – Laure Gauthier, La cité dolente, Lanskine, 2023.
Lumière par Iris Feix, son par Axel Bigot
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