James Dewey Watson [classé parmi les plus grands esprits scientifiques du XXe siècle pour avoir, avec son collègue Francis Crick, découvert la structure de l’ADN en 1953] se déclare opposé à l’idée de toute régulation du génie génétique: “Je pense que nous devons nous tenir le plus possible à l’écart des règlements et des lois.” Mais c’est son argumentation qui est instructive, qui commence par écarter toute idée d’un caractère prétendument sacré du génome humain et, partant, toute idée de “droits” en ce domaine:
“C’est tout à fait absurde. Enfin, qui ou qu’est-ce qui décide du caractère sacré? L’évolution est parfois très cruelle! Nous ne pouvons pas prétendre avoir un génome parfait et lui attribuer un caractère sacré! Le mot “sacré” me fait penser aux droits des animaux. Qui a donné des droits aux chiens? Le mot “droit” est très dangereux. Nous avons déjà les droits de la femme, les droits de l’enfant, etc. C’est à n’en pas finir! J’aimerais cesser d’utiliser les mots “droits” ou “sacré” et les remplacer par “besoins”. Les humains ont des besoins, et ils doivent tenter d’y pourvoir en tant qu’espèce sociale. Essayer de donner à ces faits très simples un autre sens plus ou moins mystique, c’est bon pour Steven Spielberg ou des gens comme ça. C’est n’importe quoi! Ce sont des foutaises!”
On passera charitablement sur l’assimilation indue opérée entre ce qui est “sacré” et cet qui est parfait: de toute évidence, même ceux qui revendiquent le caractère sacré du génome humain, quoi qu’ils entendent par là (et je suis d’accord avec Watson pour récuser fermement cette expression), ne veulent pas tant parler de sa perfection que de son inviolabilité, ce qui est évidemment très différent: car il y a une foule de choses que l’on peut estimer inviolables sans pour autant les estimer parfaites. On pourrait en outre s’interroger sur l’exacte qualification de ce qui est ici précisément visé: l’immortalité, la perfection, ou, plus modestement, l’amélioration ou la guérison, qui sont autant de promesses des thérapies géniques – sont-ce là véritablement des besoins ou plutôt des désirs, et ont-elles en conséquence ce caractère impérieux de nécessité vitale que Watson pense pouvoir leur attribuer pour justifier sa propre recherche?
A partir d'un exposé pédagogique sur la théorie de la confiance qu'il a été le premier à formuler, l'auteur pose un diagnostic philosophique sur la source des crises que nous devons affronter et offre un outil critique permettant d'entrevoir les alternatives possibles.
En retraçant la genèse de l'individualisme moderne, Mark Hunyadi développe la profondeur historique du problème de la confiance, ainsi que la raison philosophique pour laquelle ce thème – pourtant unanimement reconnu comme essentiel – a été largement négligé dans la littérature philosophique. Au fil de nombreux exemples, il montre, que la confiance est relation au monde, avant d'être relation au risque, contrairement aux théories dominantes, de nature essentiellement économique. L'emprise du numérique sur nos existences a pour effet d'éliminer tendanciellement les relations de confiance, au profit de relations sécurisées. Ce phénomène dessine l'horizon d'une société automatique, d'où sont chassées les relations naturelles de confiance qui nous lient au monde – aux objets, aux autres, aux institutions. Ce livre s'inscrit donc dans la longue tradition de la théorie critique de la société dont l'auteur est un spécialiste reconnu.
Dans la collection
À ceux qui veulent changer le monde
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