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EAN : 9782070149377
120 pages
Gallimard (13/05/2015)
4/5   5 notes
Résumé :
Comment, après avoir choisi de se retirer au fond d'une forêt d'Europe centrale, se retrouve-t-on aux sources vives de la modernité? Pourquoi, au croisement des routes, prend-on l'une et pas les autres?
Si Radovan Ivsic a attendu le plus tard possible pour tenter de répondre à ces questions qui l'auront hanté pendant près de cinquante ans, c'est d'abord par souci de ne tirer aucun profit d'une trajectoire qui l'aura conduit d'une solitude délibérée à une ult... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le 25 décembre 2009, le surréaliste croate Radovan Ivsic nous quittait. Compagnon d'Annie le Brun (qui fera paraître un beau livre dédié à cet auteur à la rentrée 2015), grand amateur de poésie, de littérature française, il côtoya Benjamin Péret peu avant son décès à la fin des années cinquante et, parmi d'autres péripéties, fut d'abord listé parmi les artistes dégénérés par les fascistes croates en 1942 avant d'être interdit de publication quelques années plus tard sous le régime communiste de Tito. Radovan Ivsic est aussi l'auteur d'un court article intitulé "Le plagiat des coquilles n'est pas nécessaire", qui répertorie toutes les coquilles se trouvant dans les rééditions des Chants de Maldoror dont les éditeurs n'avaient pas cru bon de relire correctement le texte avant de le réimprimer ! Mais bien avant cela, il avait été un homme perdu, désabusé, mais aussi dégoûté que certains de ces compagnons rejoignent le parti communiste ou pire, encensent Staline, un homme qui décide de s'exiler intérieurement en habitant une maison isolée dans la forêt au-dessus de Zagreb. Il décrit son expérience de retraite en ces termes : "Le temps où j'avance ressemble à celui du rêve." le dormeur va se réveiller, heureusement, lorsqu'il peut enfin quitter la Yougoslavie. Celui-là même qui n'attendait plus rien et avait presque perdu la foi en l'art et en l'insoumission va en effet faire une série de rencontres qui l'amèneront à devenir un proche d'André Breton. C'est cet itinéraire qu'on retrouve dans ce beau petit récit dont le titre pourrait laisser croire qu'il a été trouvé par Jean d'Ormesson - Rappelez-vous cela, rappelez-vous bien tout - mais qui est fort heureusement l'une des dernières phrases dites par André Breton à son ami Radovan Ivsic. Fabuleux petit livre, traversée du vingtième siècle - "Et quel siècle ! Deux guerres mondiales, Auschwitz, le Goulag, la bombe atomique, la guerre froide, la science mise au pas, l'éléphantiasis de la finance mondiale..." - balade littéraire où le livre tient un rôle capital, diaporama du surréalisme et magnifique hommage à André Breton.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je commande mille exemplaires de ce que j'ai conçu comme un petit livre noir. C'est un chiffre évidemment exorbitant, vu que je sais bien que les librairies, faisant toutes partie du système, n'accepteront pas de le diffuser. Néanmoins je fais le pari qu'il y aura quand même un nombre suffisant de lecteurs susceptibles d'être attirés d'abord par l'aspect inaccoutumé de ce livre de 10 x 7 cm, en complète discordance avec les encombrantes reliures des livres soviétiques comme avec leur contenu: il y est parlé d'amour et de mort, alors que l'amour est officiellement tenu pour un préjugé bourgeois et que la mort est escamotée au profit de la joyeuse compétition socialiste des plans quinquennaux. (p. 14)
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"Après la Yougoslavie où les trains internationaux, même quasiment vides, font l'objet de fouilles systématiques avec chiens policiers, les trois jours passés à Genève chez les Vichniac me donnent l'impression d'un feu d'artifice. Il y règne un air de liberté sans pareil que je m'expliquerai plus tard en apprenant que dans leur appartement se seront croisés des opposants à toutes les dictatures, Algériens, Angolais, Iraniens, Biafrais, Russes, Polonais, Israéliens et Palestiniens... Reste que, pour l'heure, tout me paraît complètement irréel, à commencer par pouvoir enfin, après quinze ans, entrer dans une librairie où s'étalent les nouveautés. J'aperçois une nouvelle édition des œuvres complètes d'Alfred Jarry en huit tommes. Je donnerais tout pour l'acquérir, mais avec mes poches vides, il ne faut même pas y penser.

Jamais je n'aurais pu imaginer que le fait d'avoir traduit Les Confessions de Jean-Jacques Rousseau en croate puisse être d'une telle importance pour les Suisses. Je refuse pourtant les interviews qu'on me propose, craignant de me sentir très mal à l'aise en direct, dans une langue que je n'ai guère eu l'occasion de pratiquer, et surtout le lendemain de mon arrivée d'un tout autre monde. En revanche, c'est avec beaucoup de curiosité que j'accepte de me rendre chez différents amis de mes hôtes. Les questions que l'on me pose sont avant tout politiques et non littéraires. C'est pourquoi je suis d'autant plus surpris que l'une des invitées, restée muette pendant un de ces dîners, juste avant de partir, me dit en aparté et sans préambule : "À Paris vous allez rencontrer André Breton, j'en suis sûre." Très étonné qu'elle cite ce nom que personne n'a mentionné au cours de la soirée, je me contente de rire, tant cela me paraît improbable ou impossible. "Ne riez pas, vous allez rencontrer André Breton, je vous le dis." Je prends cela comme une aimable bizarrerie et sur le moment je ne pense même pas à demander qui est cette personne."
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Quelle boussole secrète détermine le parcours ? Printemps 1954. Medvenidca : c'est une montagne couverte de forêts au nord de Zagreb, l'air est tranchant. N'arrivant plus à m'entendre avec quasiment aucun des intellectuels, écrivains ou hommes de théâtre, qui ont, tour à tour, fait allégeance au réalisme socialiste de rigueur sous le régime de Tito. J'ai décidé de vivre là, seul en pleine forêt. Plutôt que de rester dans une ville où j'étouffais, j'habite depuis quelque temps une maison de garde forestier, à presque mille mètres d'altitude, sans eau courante, sans électricité, sans téléphone. J'ignore encore qu'en choisissant cette solitude, j'ai choisi l'inespéré, le chemin qui efface les frontières.
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J'aime venir au "café", à la tombée du jour. Quelquefois, j'ai l'impression, ou peut-être l'illusion, que ce rendez-vous est le lointain reflet de la Table ronde de la légende. Comme s'il y avait eu depuis toujours quelques hommes à se réunir dans la nuit du monde pour refuser le cours des choses.
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Beaucoup de ceux qui avaient désiré être du voyage furent emportés par les terribles tempêtes du siècle, mais, pendant des années, il y en eut toujours de nouveaux à vouloir s'y embarquer.
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