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EAN : 9782267018981
83 pages
Christian Bourgois Editeur (08/02/2007)
4/5   5 notes
Résumé :
Susanna est un bref roman écrit entre le 9 décembre 1939 et le 13 février 1940. Dans la lignée du romantisme allemand, Kolmar raconte l’histoire d’une jeune fille et de sa gouvernante. Susanna est une figure d’innocence absolue, à la limite du trouble mental. Chacun de ses actes, chacune de ses paroles, ses rapports avec les êtres et les choses ont la fragilité du verre près de se briser. A la fin, il se brisera, sous l’effet de l’amour. La ligne de ce magnifique ré... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Voilà un texte succinct mais qui fait chavirer le lecteur. Une gouvernante fait la connaissance de la jeune fille dont elle va devoir s'occuper. Âgée d'une vingtaine d'années, Susanna - la jeune femme - est d'une beauté à couper le souffle. Mais elle est quelque part à voguer dans une douce folie. "Les nuages qui passent au-dessus de nous ne pèsent pas sur elle ; les murs qui nous oppressent et nous entravent, nous autres adultes, n'existent pas pour elle." (p. 10)

Orpheline de père et de mère, Susanna vient de voir son ancienne nurse, Séraphine, partir en retraite et la nouvelle, plus âgée, raconte l'histoire, la leur. Quand commence le roman, on apprend que cet épisode est déjà bien ancré dans le passé. Toutefois la réminiscence de cette rencontre, de cet isolement passionne. La nouvelle gouvernante se retrouve seule en charge de cette grande enfant qui divague constamment. Susanna est vouée à rester seule, confinée à sa demeure, sans contact aucun sinon celui choisi par le tuteur légal. Quelle perspective morne que se cloîtrer alors que les premiers émois pourraient surgir à tout moment !

Et la tant redoutée passion amoureuse a bien lieu, cautionnée par l'ancienne et la nouvelle gouvernante. le soupirant reste à l'extérieur du jardin et fait sa cour à travers la grille. Pourquoi empêcher une telle idylle alors que contact physique, il n'y a pas ?
Tout serait évidemment beaucoup trop simple si l'amourette s'était bornée à ce petit jeu d'adolescents. La situation s'emballe lorsque le jeune homme prévoit de rejoindre définitivement Berlin.

Ce livre est particulièrement agréable à lire car les deux personnages campent deux personnalités extrêmement éloignées. Lorsque Susanna crie à la passion, la gouvernante rétorque par la raison et la prudence. Toute leur cohabitation crée ainsi des dialogues particulièrement croustillants ou chacune délivre un peu de vérité.

Lecture poignante lorsqu'on la situe dans la biographie de l'auteur : dernier texte écrit en 1939, dans un appartement collectif pour Juifs, avant la déportation. La plume est juste car elle évoque la furieuse envie de vivre et de connaître l'extérieur.

C'est vraiment à recommander.
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Ce récit étrange et envoûtant nous raconte une rencontre insolite entre deux femmes que tout oppose: l'âge, le vécu, la perception des choses... La première, Susanna, est différente de ce l'on attend habituellement d'une jeune femme de l'époque, elle est vive, joyeuse, entreprenante, mais surtout, elle vit dans son monde. Elle croit en ses rêves, en ses idées quelques fois saugrenues, en ses certitudes, avec une telle force qu'elle en est touchante et qu'elle parvient à nous faire croire en sa propre réalité.
La seconde, sa gouvernante nouvellement engagée et narratrice de cette histoire, semble désabusée et assiste spectatrice aux allocutions de sa protégée. Elle va apprendre à connaître, ou du moins à appréhender, l'étrange jouvencelle dont elle s'occupe de la manière qu'elle juge la meilleure. Cela se finalise de façon tragique, mais logique.
C'est un récit surprenant, dans lequel il n'est pas facile de s'immerger, et le fait qu'il soit très court ne permet pas une intégration, mais c'est intéressant et l'histoire est poétique.

Le fait que l'auteure ait écrit ce texte en une période sombre, de conflit, alors qu'elle était assignée à résidence avec son père dans un appartement collectif pour Juifs et que seule la nuit lui permettait assez de tranquilité pour coucher les mots de cette histoire sur papier, tout cela donne plus de force à cet ouvrage.
Bien que parfois curieux, ce livre a su me charmer. Mais je conseille de le lire en une fois, si possible sans faire de pause.
Lien : http://letoucherdespages.blo..
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Un récit court et plein de poésie, qui au fil des pages, discrètement, parle aussi de la position des juifs allemands... Un texte sur la folie aussi, l'amour impossible, et le regard des autres sur cette folie. Gertrud Kolmar, de son vrai nom Gertrud Chodziesner, née en 1894 dans un famille de la grande bourgeoisie juive, est morte en février 1943 dans le camp de concentration d'Auschwitz. Elle avait réussi à transmettre ses manuscrits à sa soeur, exilée en Suisse, alors qu'elle-même refusait de quitter l'Allemagne pour rester auprès de son père (déporté pour sa part en septembre 1942). Je lirais bien La mère juive, écrit en 1930 après la mort de sa mère, mais il n'est pas à la bibliothèque, où je peux juste aussi lire un recueil de poèmes, Mondes.
Lien : http://vdujardin.over-blog.c..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Je n'ai jamais été aimée. L'ami de Susanna, que j'avais à peine entrevu, que je ne cessais de revoir depuis cette nuit-là, c'était le beau jeune homme des livres. Il était ce grand jeune homme grec, mince, aux cheveux bouclés ; dans sa voix le nom de l'aimée n'était que braise. Je ne savais rien. Mais la plus belle des filles ne pouvait appartenir qu'à un homme beau. Et voilà que la plus belle fille aimait cet homme pas très grand, trapu, âgé d'au moins trente ans, qu'elle aimait ces cheveux plats et clairsemés sur cette tête au crâne bombé, et ces traits sans finesse, au type sémitique prononcé. Et il prononçait le nom magique et sa voix ne tremblait pas, et sa politesse tranquille formait un mur insurmontable, impénétrable. Je ne savais rien. Je n'avais jamais aimé.
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Il y a des mots qu'on peut prendre dans la main. Et certains qui ont une odeur... Par exemple, "poêle à frire". Je n'aime pas dire "poêle à frire", la pièce est aussitôt pleine de fumée grasse.
- Et qu'est-ce que tu dis alors ?
Elle réfléchit. "Je dis "rose"." Et je vis le mouvement, je vis le souffle de ses lèvres fleurir comme un bourgeon qui s'ouvre, doucement, avec des feuilles à la respiration sourde, et une odeur merveilleuse. Rose. (p. 14)
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Après tous ces jours passés enfermés, j'inspirai l'air frais goulûment. Il neigeait. Les gros flocons tombaient très délicatement, très distincts les uns des autres, ils venaient se ranger tranquillement sous les pieds et adoucissaient la démarche dure et saccadée. Enveloppaient amoureusement les visages quotidiens et sans espoir des maisons, les emmitouflant lentement dans de blanches capuches. Et les gens qui glissaient et se croisaient étaient tous semblablement sans être, des ombres, comme séparés par de larges espace. Il n'y avait pourtant pas de brouillard, rien qu'un gris très silencieux, d'une mélancolie féminine ; le soleil, invisible, mourait. J'aurais aimé marcher des heures dans cette lumière grise, dans cette douceur muette. Elle me portait comme m'aurait portée sur son dos un animal fort et doux, et la pensée et le souci aux arêtes vives s'étaient dissipés, envolés, n'étaient plus qu'un vague souvenir, un rêve...
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