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De Gaulle (Lacouture) tome 3 sur 3
EAN : 978B004JR51PY
Seuil (30/11/-1)
3.85/5   17 notes
Résumé :
Etait-il encore possible de faire oeuvre originale en écrivant une biographie de Charles de Gaulle ? Tant de livres lui ont été consacrés qu'il y avait de fortes raisons de douter qu'on puisse apporter du neuf sur une existence dont il semble qu'aucun chapitre n'a résisté aux témoignages des proches, aux confidences des mémorialistes, aux investigations des historiens (. ) Que la chose fût encore possible. Jean Lacouture en apporte une éclatante démonstration. Qu'el... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Autant le Rebelle est sans doute le volet de la biographie de De Gaulle par Jean Lacouture qui peut faire l'unanimité, autant le Politique et le Souverain peuvent susciter des réactions diverses, et cela peut se comprendre. Pour ma part, je réagis toujours positivement au portrait du monarque républicain dessiné par le journaliste-biographe de talent que fut Lacouture. Je trouve cet ouvrage bien plus intéressant que les "hagiographies" laissées par les gaullistes, que les verbatim d'Alain Peyrefitte ou même que les mémoires de l'amiral Philippe de Gaulle, le fils du général.
Je trouve qu'il prend l'exacte mesure de ce que fut Charles de Gaulle, avec ses forces et ses faiblesses, sa grandeur et ses petitesses, comme postulant au pouvoir puis comme Président de la République, chef d'État et premier représentant de la France à l'étranger comme face au peuple qu'il dirigeait, même si, cela a souvent été dit, il aimait mieux la France que les Français, du moins à ce que l'on a cru pouvoir dire de lui, en fonction de son amour de l'histoire de notre pays et de la place qu'il disait vouloir y tenir et qu'il sut y tenir. Sur le flou entretenu par De Gaulle pour parvenir ou plutôt pour revenir au pouvoir après sa "longue retraite" et sa traversée du désert", dues en partie à la perverse pratique politique des "apparentements" formés contre lui par les partis en place sous la IVème République et essouflés en 1958, il n'y a pas mieux, à mon avis, que ce qu'en a dit Jean Lacouture, notamment sur ce que le général comptait faire ou ne pas faire (tout de suite) pour la résolution de la redoutable question algérienne ou comment et par quels moyens il entendait reprendre les rênes de l'État. le dialogue manqué avec Pierre Mendès France, représentant d'une frange des radicaux-socialistes, à ce moment précis, nous laisse l'impression d'un vrai ratage, d'un côté comme de l'autre de la barrière. Guy Mollet, comme responsable de la S.F.I.O., lui, parut moins embarrassé pour faire la courte échelle à De Gaulle, tout comme le Président de la République, René Coty. Jean Lacouture donne de ces pages politiques et du passage progressif de la présidence du Conseil à la Présidence de la République par De Gaulle une très bonne analyse. Et je trouve aussi qu'il fait de l'excellent travail concernant la politique diplomatique et extérieure du général, notamment en ce qui concerne les rapports avec les dirigeants de l'U.R.S.S. mais aussi dans les négociations avec les délégués algériens envoyés à Évian pour sortir notre pays du guêpier algérien, même s'il ne s'y prit pas bien. Coup de chapeau aussi à Lacouture quand il retrace l'épisode de la tentative d'insurrection militaire de Salan, Jouhaud et Zeller, et quand il parle de la hauteur prise alors par De Gaulle dans la gestion de cette affaire. Il faut saluer également ce qui est dit des relations avec les autorités des États-Unis dans la crise russo-cubaine, dans le piège de la guerre menée par les Américains au Vietnam, et de l'effort d'instauration de rapports multilatéraux avec certains États et gouvernements d'inspirations politiques différentes, afin de maintenir partout l'image de dialogue que la France voulait donner d'elle-même sous le régime gaulliste, même si le général entretenait, ce faisant, un mythe, celui d'une France en paix avec elle-même et dépositrice d'une grandeur à laquelle elle ne pouvait pas renoncer, comme si les Deux Guerres mondiales et les mouvements de la décolonisation et de la déconstruction de son Empire n'y avaient jamais rien changé.
Dans le duel qui opposa le général à son deuxième premier ministre, Georges Pompidou, je pense que bien des sous-entendus, maladresses et non-dits également imputables à l'un et à l'autre ne nous permettent pas de trancher définitivement, même si j'avoue avoir un préjugé favorable pour Charles de Gaulle.
J'ai retiré, il y a des années de cela, une impression très positive et une grande satisfaction de la lecture de ce troisième volet de la biographie de De Gaulle écrite par Jean Lacouture.

François Sarindar
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Citations et extraits (102) Voir plus Ajouter une citation
" (...) Avec Johnson, l'évolution s'accentua rapidement : le Vietnam devint au dehors sa préoccupation quasi exclusive. Ce qu'il cherchait en Europe, c'était plutôt de s'y épargner des soucis, afin d'être en mesure de se concentrer sur ce qui, pour lui, représentait de jour en jour davantage l'essentiel... " [Maurice Couve de Murville]
Le Vietnam, la Chine, l'Amérique latine... sur tous ces terrains, dès les premiers mois de la présidence de Lyndon Johnson, le général de Gaulle heurtera de plein fouet les sentiments, voire les visées de son partenaire de Washington. Au mois de février [1964], c'est la reconnaissance par la France de la République populaire de Chine, qui est vue comme une trahison de la solidarité occidentale face au " bloc " de l'Est - alors qu'il est désormais évident qu'un tel geste est celui que peut le moins goûter le pouvoir de Moscou.
Au mois de mars, la visite triomphale du général de Gaulle au Mexique (" la mano en la mano ! ") est encore considérée par les Etats-Unis comme une intrusion intolérable sur le continent américain. " Le général de Gaulle, déclare à la télévision l'ancien président Truman, a tort de mettre le nez dans nos affaires : il pourrait bien se le faire couper... " Ce qui donne une idée à la fois de la façon dont on considère à Washington l'indépendance des pays latino-américains, et de l'altération subie par l'image du général de Gaulle en quelques mois aux Etats-Unis.
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Lors de son entrevue décisive avec Georges Pompidou, qui le 30 mai [1968] entre 14 h 30 et 15 heures, l'avait persuadé de troquer le référendum contre les élections, le Premier ministre avait eu cet argument : " Si le référendum est perdu, c'est vous qui êtes visé. En cas d'élections, ce n'est que moi... - Et si les élections sont gagnées ? " avait riposté de Gaulle. Toute l'histoire des mois à venir était dans ces quelques mots.
D'autant qu'elles n'étaient pas un succès, ces élections, mais le triomphe qu'on a dit. Un tel triomphe que la stature du Premier ministre, leur inventeur, puis leur organisateur, ne pouvait manquer d'en être magnifiée. Mazarin avant mai, le député du Cantal était, après le 30 juin, Richelieu. Il allait apprendre (ce qu'il était peut-être en train d'oublier) que de Gaulle n'était pas Louis XIII.
Le général fit un accueil ambigu au feu d'artifice électoral de juin. Georges Pompidou rapporte qu'au lendemain du premier tour, qui faisait prévoir sinon le triomphe, au moins un grand succès, le général lui avait dit : " Pompidou, comment expliquez-vous qu'après une telle victoire nous soyons l'un et l'autre désenchantés ? " L'un et l'autre ?
Au lendemain du second tour, dans son bureau de l'Elysée, un familier du général railla drôlement (était-ce Vallon ?) cette " chambre bleu d'Auvergne " - sans provoquer le moindre sourire. Vingt histoires circulaient. Celui-ci racontait que, devant un ministre suggérant de " dominer la victoire ", de Gaulle aurait rugi : " La dominer ? Il faut l'exploiter, oui ! " Selon celui-là, il aurait dit : " Ce sont les élections de la trouille ! " et encore : " C'est une chambre PSF (*). Je lui ferai faire une politique PSU (**)."

(*) Le parti du colonel de La Rocque à la veille de la guerre.
(**) Parti Socialiste Unifié.
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Avec Flohic, le lundi après-midi [28 avril 1969], le général de Gaulle sera un peu moins laconique :
" Au fond, je ne suis pas mécontent que cela se termine ainsi [...]. Quelles perspectives avais-je devant moi ? Des difficultés qui ne pouvaient que réduire le personnage que l'Histoire a fait de moi et m'user sans bénéfice pour la France.
Je lui ai proposé une réforme, capitale pour l'avenir, qu'elle a repoussée. Je n'avais pas d'illusion quant à l'issue du scrutin [...]. Pensez à tous ceux que j'ai vaincus et qui se sont trouvés de bonnes raisons de voter contre moi, tout en sachant bien qu'ils faisaient une mauvaise action contre la France ! Il y a d'abord les vichystes, qui ne me pardonnent pas d'avoir eu raison. Puis l'OAS, ceux de l'Algérie française - dont certains n'étaient pas sans valeur. Puis tous les notables [...] que j'ai tenus si longtemps écartés du pouvoir !
Mais il y a une question qui dépasse ma personne, c'est celle de la légitimité. Depuis 1940 [...] c'est moi qui l'incarne et cela durera jusqu'à ma mort. Il y a de toute évidence 47 à 48% de voix gaullistes irréductibles. Je les ai toujours eues. Dès l'instant que je ne suis plus là, la question est de savoir si elles vont rester groupées. Mais c'est sur elles, à ces conditions, que l'on doit compter pour bâtir un régime et un gouvernement. Il est possible que l'on se prête à des manœuvres et que l'on reconstitue, avec un Pompidou quelconque, la IVe République sans le dire... "
Et le général de conclure :
" En tout cas, je ne dirai plus rien ".

(...)

Deux confidences, enfin, de Charles de Gaulle à son beau-frère : sa décision de ne pas sortir de La Boisserie, de n'y recevoir personne, hormis sa famille et deux ou trois collaborateurs directs dont il a besoin pour mettre en ordre ses papiers et préparer la rédaction de la suite de ses Mémoires; et le projet qu'il a formé de gagner l'Irlande " où il pourra retrouver le souvenir de certains de ses ancêtres ", à l'époque où se déroulera la campagne présidentielle. Georges Pompidou vient, le jour même, de faire acte de candidature : seul de tous les députés gaullistes (avec Louis Vallon), Jacques Vendroux, quittant La Boisserie, se refusera à l'appuyer.
Avant de le laisser partir, le général de Gaulle avait déclaré à Vendroux : " Je n'ai plus rien à faire avec eux, ils me sont étrangers."
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On va passer à table, vers 8 h 30, quand le téléphone sonne. C'est Etienne Burin des Roziers qui s'est dévoué, violant, il le faut bien, les consignes du silence. " Et oui, mon général, c'est le ballotage... " De Gaulle grommelle, annonce qu'il restera le lendemain à La Boisserie pour " réfléchir ", et raccroche. Deux heures plus tard, nouvel appel. Cette fois, il ne s'agit plus d'un témoignage de fidélité personnelle contre la solitude, mais - c'est l'hôtel Matignon qui appelle - d'un geste politique. Et si le général " craquait "... Si, dans sa colère, il refaisait " le coup du 20 janvier 1946 ". On le sait porté, cet Intraitable, à de brusques ruptures.
Ils sont trois auprès du récepteur, à l'hôtel Matignon: Georges Pompidou, Louis Joxe et Alain Peyrefitte. Pompidou plaide pour la poursuite du combat. Il sent au bout du fil un homme effondré et n'entend que des récriminations, mélange d'autocritique et de rancœur. De toute évidence, le général est profondément atteint... Le Premier ministre n'a pas l'impression d'avoir gagné la partie quand il passe le récepteur à Joxe, vieux compagnon.
Le négociateur d'Evian ne recueille lui aussi qu'une déploration indignée : " Je me retire... Ils ne veulent plus de moi... - Mon général, il fallait s'y attendre... Les conditions de la campagne... La diversité des candidats... Vous ne pouvez abandonner la lutte..." Joxe a l'impression de labourer la mer, et transmet l'écouteur à Peyrefitte.
Le ministre de l'Information croit, lui, entendre " un adolescent puni, buté, et brûlant de s'infliger un châtiment supplémentaire ". Il multiplie les arguments. Compte tenu de l'histoire, des conflits suscités par le gaullisme, le général ne peut normalement compter que sur 25% d'électeurs automatiques. Tout ce qu'il obtient en sus - de 20% à 50% - est lié aux circonstances. En l'occurrence, elles n'étaient pas très favorables. Il ne faut pas oublier non plus qu'au premier tour on vote selon son cœur. 44%, c'est énorme, considéré d'un regard froid, le résultat est bon, la marge de manœuvre considérable, la victoire assurée... Alors ?
Le monsieur de Colombey grogne et raccroche. Mais de toute évidence, l'argumentation de Peyrefitte l'a remué. Et quand, une heure plus tard, Pompidou rappelle Colombey pour lire au général le commentaire qu'il compte diffuser, où il est question de la " division qui a empêché l'élan national...", de Gaulle le coupe sèchement : " Pas empêché : mettez " différé"." Pour ne pas comprendre, il eût fallu ne pas connaître le sens des mots : ce qui n'était pas le cas de Georges Pompidou. De toute évidence, le vieux monsieur s'est repris. Il va gronder, bouder, mais il va lutter.

(...)

Et c'est un de Gaulle " rajeuni de dix ans ", assurent certains ministres, qui préside le 8 [décembre 1965] un surprenant Conseil des ministres, ouvert par une phrase peu banale dans sa bouche : " Je me suis trompé ! " Il va même plus loin : " C'est moi, et moi seul, qui ai confondu élection et référendum... Je mentirais si je disais que je n'ai pas été atteint..." Mais il ajoute de l'air le plus naturel du monde : " Bien entendu, je me maintiens ! ", non sans répéter ce qu'il a dit à Pompidou : que ce serait un débat où il ferait tout pour éviter de perdre les voix ouvrières qui se sont portées sur son nom : " Mitterrand dit qu'il est de gauche, mais quand il s'agit de Saint-Domingue ou du Plan, la gauche, c'est moi ! " Et de conclure : " Au premier tour, les Français se défoulent. Au second, ils sont sérieux..."
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C'est lui qui a inventé ce dénouement majestueux : à un peuple qui se refusait, il a donné son congé. Il est parvenu à muer une défaite en retraite, art suprême de la stratégie. Il n'a pas subi. Il a choisi. Le mandat que 55% des Français lui avaient confié en 1965, il l'a déposé librement, quittant qui l'humilie. Geste gaullien par excellence et dont il savoure, sous les arbres de la Haute-Marne, l'âcre élégance.
" Je ne suis pas tombé du pouvoir, j'en suis descendu. La volonté nationale ne renverse pas, elle ordonne : on lui obéit. J'ai honoré par ma conduite mes convictions républicaines...", déclarait Cavaignac à l'Assemblée nationale.
De Gaulle n'aurait pas écrit " descendu ". Ecarté, plutôt. En tout cas, il n'a pas obéi à un ordre, il a pris une décision.
Dans le scrutin du 27 avril [1969], il voit avant tout un règlement de comptes différé. Contre lui ont joué de vieilles et implacables rancunes - de Vichy, de l'Algérie, de l' " argent ", du quotidien. D'une France moyenne, conforme, au ras du sol. D'une France qu'il déteste, celle des boutiquiers et des comités. Celle de la plupart des électeurs du 30 juin 1968, qui s'est retournée contre lui et vengée de ses peurs de 1944, de 1958 et de 1968, dès lors qu'a surgi, grâce à Georges Pompidou, la chance d'un " gaullisme " sans de Gaulle, d'un ordre benoît, confortable et bien armé.
Ce n'est pas sans une satisfaction aristocratique qu'il tombe, victime de cette " meute ", intimement persuadé que c'est alors sa grandeur qu'il expie. Contre Charles de Gaulle s'opère la revanche de l'affaire Pétain, de l'affaire " Empire ", de l'affaire Europe, de l'affaire Amérique, de trente années de défis permanents. (...)
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Video de Jean Lacouture (31) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean Lacouture
20 mai 1996 Olivier BARROT présente une biographie de MONTAIGNE, écrite par Jean LACOUTURE, aux éditions du Seuil : "MONTAIGNE A CHEVAL". Images d'archive INA
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