Dans ce deuxième roman,
Caroline le Rhun nous emmène dans une zone qu'elle connaît bien, la zone celtique qui couvre la Bretagne, l'Irlande et le Pays de galles. Dans un monde qu'elle côtoie également, celui de la pêche au chalut.
Nous suivons le travail de patrons-pêcheurs, leurs efforts pour rapporter la quantité de poissons suffisante à assurer le salaire des marins, leurs affrontements avec les Britanniques dans les eaux internationales, leur colère face aux pratiques scandaleuses de pêche électrique qui perturbe gravement l'équilibre marin (pêche interdite depuis 2001, après avoir été tolérée pour les Danois).
Nous regardons les militants écologistes de l'association Oceanys, avec Laura Boyle à sa tête, se faire harponner par des marins-pêcheurs en colère, nous les suivons aux îles Féroé, consternés, écoeurés, devant le massacre traditionnel et coutumier de cétacés par centaines. Nous partageons leurs colères, impuissants et irresponsables nous-mêmes, nous qui laissons des tonnes de microbilles de plastique polluer les eaux marines.
Et l'histoire dans tout ça ? Elle semble être là juste parce qu'il en faut bien une. Les personnages ne sont que des prétextes, les patrons-pêcheurs Bretons Marc et Ronan, les marins, la famille qui attend à quai. Mary, l'Irlandaise meurtrie par la mort de son compagnon Eric, qui se reconvertit avec bonheur dans la gestion d'une galerie d'art à Cork (Irlande), avec le soutien de Ronan.
La tradition celtique est là, avec ses vieilles croyances et ses coutumes. La vieille Anna (bizarre, ce prénom, pour une Bigoudène...) fixe avec art sa coiffe en forme de « tuyau de poêle » (disaient les gamins irrévérencieux de ma jeunesse!) et se signe à la vue des cormorans sombres comme la mort qui escortent le Nominoë.
De façon diamétralement opposée, on parle d'albatros équipés de balises qui pourront dénoncer les énormes bateaux contrevenants à la loi maritime.
Je finirais presque par en oublier l'intrigue du livre, à savoir l'enquête policière sur le sabordage du Nominoë dont la coque a été percée, entraînant son naufrage et la mort de trois marins. Mais c'est vrai que cette intrigue semble bien secondaire. L'essentiel concerne manifestement la pêche hauturière et c'est le principal intérêt du roman. L'arrière-paysage politique lié au Brexit apporte une touche d'actualité au sujet.
Je me demande si l'auteure, manifestement passionnée par sa région et le monde de la mer, ne devrait pas rédiger un essai documenté et illustré plutôt qu'un roman policier in fine assez peu palpitant. A vouloir tout aborder, on finit peut-être par ne plus être très crédible.
C'est en tous cas une découverte, pour laquelle je remercie Babelio et les éditions Palemon.