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EAN : 9782021501520
336 pages
Seuil (05/05/2023)
3.34/5   22 notes
Résumé :
Flamanville, 1974. Ce village de la pointe du Cotentin se déchire à l'annonce de la possible construction d'une centrale nucléaire. L'usine permettra-t-elle de réveiller la bourgade de la Manche en l'engageant dans la modernité énergétique? Ou est-elle, avec la destruction des falaises et le risque nucléaire, la promesse d'un désastre écologique?
Le maire, André Rouxel, ancien scaphandrier à la mine, consciencieux, pragmatique, et peut-être trop tendre, déci... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Quelques kilomètres avant le bout du monde, l'autre bout du monde, après avoir passé Bricquebec, Grosville et Les Pieux, c'est là, à Flamanville que Vulcain a décidé d'installer sa forge.
Flamanville, c'est une petite excroissance de terre du Cotentin, une sorte de gros bouton qui aurait poussé à la presqu'île, un peu comme si la géologie avait décidé de faire un pied de nez à la frénésie des hommes.
Flamanville, ses falaises, son château du 17ème siècle, ses anciennes mines de fer, son plus petit port de France et son site archéologique protohistorique du Castel ...
Une vieille légende racontait qu'au creux de ses falaises, une bête monstrueuse vivait au fond du trou Baligan où la mer s'engouffrait avec des rugissements terribles.
Et c'est certainement pour faire taire cette rumeur et faire pièce à la peur de la bête qu'une centrale nucléaire, tout simplement, y a été posée.
"Les falaises de Flamanville" est un livre écrit par Jérôme Lefilliâtre, et paru aux éditions du "Seuil" en mai 2023.
Il est précédé d'un avertissement :
"Inspiré de faits réels, ce récit est une fiction.
Les sentiments prêtés aux personnages n'existent que par l'auteur".
Au milieu des années 70, le maire de Flamanville, André Rouxel, apprend par son premier adjoint, qui venait de le lire dans le journal, qu'un projet d'implantation d'une usine atomique était envisagé dans le village.
Trois sites avaient été retenus : Flamanville et Gatteville dans la Manche, Manvieux dans le Calvados ...
Le suspens est insoutenable !
Faudra-t-il attendre la fin de l'excellent bouquin de Jérôme Lefilliâtre pour savoir ?
En tout cas, la force de son livre est d'avoir donné des visages, d'avoir peuplé Flamanville de personnages tangibles, peints avec justesse et crédibilité.
Ce caractère très répandu à préférer que rien n'arrive plutôt que d'affronter l'inconnu, ces parias qui ont vécu l'après-guerre dans les blockhaus, cette habitude de "payer le café" à toute heure de la journée, cette grisaille qui porte à la morne tranquillité d'une douceur de vivre ; Jérôme Lefilliâtre a choisi les bonnes couleurs à sa palette.
Le ballet s'organise autour d'une décision qui se précise.
Une concertation des habitants est entreprise.
Chacun y va de son avis :
p'têt ben qu'oui, p'têt ben qu'non !
La confrontation est devenue inévitable entre des écolos venus d'un autre temps et le reste du village qui espère des emplois et des aménagements inattendus pour le village.
Ce roman est une pépite, un petit trésor d'ambiance, une galerie de portraits fins et sensibles.
Mais les faits n'en sont par pour autant négligés.
Quoi qu'étant un peu jeune à l'époque, je me souviens du lamentable fait divers du contremaître assassiné par irradiation dans sa voiture ; je me souviens avoir vu, posés au pied du phare de Gatteville, de ces bidons de déchet immergés à la hâte et qui revinrent flotter après une nuit déchirée par la tempête ; je me souviens de la révélation de ce funeste plan Orsec/Rad qui fit la conversation jusqu'à dans les cours d'école.
Mais ce que je me souviens surtout c'est que, dans le Val de Saire tout proche où je vivais, le choix entre acceptation ou rejet du nucléaire n'était pas véritablement un sujet.
La centrale était, comme l'arsenal de Cherbourg, un employeur recherché et les classes d'écoles la visitaient régulièrement sans que personne ni trouve à redire.
On sent, tout au long de la lecture de ce livre, que Jérôme Lefillîatre est un enfant du "pays".
Il a su en saisir la délicate alchimie et reconstituer dans une "fiction" ces jours terribles qui ont vu Vulcain déposer sa forge sur le trou Baligan ...
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« Les falaises de Flamanville », Normandie, Manche, Cotentin …
Pour ceux qui ne connaissent pas le Cotentin, il faut expliquer que cette presqu'île de Normandie, ce finistère du bout de la Manche, se divise en deux parties, La Hague à l'ouest, et le Val de Saire, à l'est ; le tout borné au sud par la dépression de Lessay/Carentan et sa zone de marais qui vit atterrir les planeurs de l'opération Overlord, le 06 juin 1944… des marais bien pratiques pour isoler le Cotentin du reste du département, en cas d'accident au centre de retraitement des déchets radioactifs installé sur la lande entre Jobourg et Beaumont Hague.

« On ne se souvient des pays oubliés que pour mieux les exploiter ! » Un slogan très en vogue au moment où la France s'apprête à se doter d'un certain nombre de centrales nucléaires de production d'électricité. Il faut dire qu'à part un site dans le Calvados, deux sites semblent être également « présélectionnés » : Gatteville à l'est et Flamanville à l'ouest. Tout ça afin de fournir de l'électricité à la Bretagne, dépourvue de centrale nucléaire…
Le site de Flamanville sera finalement retenu, et le trou Baligan, une grotte marine, qui vit « le fils d'un prince d'Irlande, Germain, plus tard béatifié », arriver « un jour à l'horizon, fendant la mer sur une rouelle de bois » et terrasser le dragon à sept têtes qui y séjournait, sera rayé de la carte ; entraînant manifestations et violences. Même le curé s'en mêlera qui déclarera en chaire (si l'on en croit « Le Canard Enchaîné ») : « Nous devons dire oui à l'atome comme Marie a dit oui à l'Archange Gabriel »…

Une période que j'ai bien connue où écologistes naissants et anti-nucléaires déjà bien implantés (voir « Chronique d'une lutte » de Didier Anger paru en 1977) se complétaient dans l'opposition à la politique énergétique de Giscard d'Estain…

Mais revenons à nos moutons (des roussins de la Hague, bien sûr). J'ai mis un certain temps à me résoudre à acheter et lire ce bouquin qui concerne une période et des endroits importants de ma vie de « jeune adulte ». La cause ? Jérôme Lefilliâtre. Grand reporter à « Libération »… le « Libé » d'alors. Mais il s'agissait d'une autre époque, d'un autre journal…
Oui, nos moutons… « Les falaises de Flamanville », une réussite : outre le fait que les événements retracés ici le sont assez fidèlement, Jérôme Lefilliâtre nous offre en première partie une brillante galerie de portraits des gens d'ici (comme le disait Gilles Perrault) et d'ailleurs ; ainsi qu'un portrait très réussi de la Hague dans toute sa beauté austère et sauvage, façonnée par les vents, sublimée quand le crachin monte à l'horizontale à l'assaut des falaises. Tout ça est remarquablement troussé, jusque dans la mentalité des gens de la Hague, des gens durs dans la tête, durs à la peine…
Enfin, on retrouve l'alternative environnement versus emploi tellement présente encore de nos jours dans ce Cotentin si souvent oublié mais qui ne fait pas grand-chose pour se montrer. Que voulez-vous, les gens d'ici sont comme ça.

Le cotentin ? On n'y passe pas. Il ne mène nulle part, à part à la mer. On y vient quand on a quelque chose à y faire…

Jérôme Lefilliâtre, un auteur dont j'attends le deuxième roman avec un certain intérêt.
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Je suis Normand. de Seine-maritime mais Normand. Flamanville, c'est pour moi un nom, pas plus. Je suis scientifique. Flamenville pour moi c'est une centrale nucléaire, pas plus. Aucune image, aucun souvenir de son implantation, rien dans son histoire qui rejoigne mon histoire. Alors ce bouquin, j'ai hésité... Un journaliste en plus... Pas trop affinités...
Aucun regret.
Je ne sais pas dans quelle mesure ses personnages s'inspirent de la réalité mais il a réussi à me transporter dans le temps : celui des années soixante-dix et dans l'espace : celui des mines qu'on ferme, de la ruralité des déclassés subissant la "crise", les mines qui ferment...
Il n'y avait pourtant pas d'enjeu, de suspense puisque je savais bien qu'elle se construirait, cette centrale. la preuve, aujourd'hui on attaque la troisième tranche, l'EPR qui va nous sauver de la dépendance au pétrole...
Ou pas... Nous condamner à autre chose...
L'écho que nous renvoie ce livre est remarquable. Toutes les questions qui se posent à nous dans nos choix étaient déjà sur la table il y a cinquante ans. Apparemment, nos prédécesseurs avaient fait les bons choix puisque nous en remettons une couche...
Ou pas...
"Errare humanum est, perseverare diabolicum" comme disait l'un de mes profs, phrase que pourraient utiliser les Legendre du roman...
Le débat continue, décennies après décennies, dans les mêmes termes, et certains semblent sûrs de détenir la vérité. Mais avons nous vraiment le choix?
Un roman vivifiant comme l'air Normand (que seul l'air Breton concurrence) qui nous rappelle que nos interrogations persistent, que les décisions sont toujours prises de manière exogène par des gens très compétents qui ne subiront aucun contrecoup si ces choix sont mauvais.
Et qu'il y a toujours des gens admirables qui luttent par conviction, pensant qu'un autre monde est possible. Même s'il n'a aucune chance d'advenir puisque nous sommes des êtres humains, simplement des êtres humains.
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Roman très documenté et intéressant sur la politique du tout nucléaire, le grand plan Messmer des années 70 et surtout sur la démocratie participative, le début de l'écologie politique...
Des personnages riches et attachants, des paysages grandioses, des habitudes, des rumeurs, tout est très bien dessiné.
On découvre par le biais d'anecdote, des faits divers peu connu : les incidents nucléaires (graves !!) de Saint-Laurent-des Eaux, la tentative d'assassinat avec des déchets nucléaires à La Hague...
On attend une suite à ce roman, certainement en 2 parties : l'exploitation de la centrale, et le fameux EPR ! Ce serait super !
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Franchement, le style est plat, banal, ennuyeux au possible. L'auteur est journaliste et pas écrivain, donc on peut passer sur ces défauts…
Mais c'est un roman, donc impossible de faire la part de ce qui s'est passé réellement et de l'imagination de l'auteur.
Même les descriptions de ces magnifiques paysages sont médiocres et peu évocatrices. Quelle punition cette lecture !
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critiques presse (2)
LeMonde
17 août 2023
D’une situation binaire – les pro- et les anti-centrale nucléaire –, le roman fait émerger, c’est là tout son enjeu, l’agitation qui se cache derrière son titre faussement bucolique.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Liberation
20 juin 2023
Arguments environnementaux contre revitalisation économique, ce débat reste d’actualité et il est raconté ici via des personnages hauts en couleur : le maire, homme simple et pragmatique qui voit surtout les avantages de l’affaire pour la région ; la châtelaine solitaire et désargentée qui envisage d’abord les désastres écologiques, les jeunes profs écolos, les agriculteurs, les pêcheurs, un SDF que chacun croit fou et jusqu’à René Dumont qui fait une apparition pour contester le projet.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
On associe toujours le Cotentin à l'eau que le ciel verserait en crachin, une grave erreur. Il pleut, souvent, beaucoup, une pluie à vous mettre le cafard lorsqu'elle s'éternise des jours et des jours, comme le ciel gris et bas qui recouvre alors les têtes. Mais ceux qui ne voient que cette eau qui tombe passent à côté du vrai miracle local, quand ce bout du monde s'illumine, pendant quelques heures, d'un soleil faisant ressortir toutes ses lueurs scintillantes. [...] Le phénomène est encore plus sensible dans La Hague, un pays de dunes, de landes, de bocages et de pierres qui se distingue par sa danse de teintes et de pigments : il y a ses innombrables nuances de vert, jamais tout à fait les mêmes, selon les herbes qu'on observe, les arbres, les buissons, les talus ; il y a aussi le blanc du sable, la mer bleue ou grise, le jaune fané de la végétation poussant sur les mielles, le jaune vif des ajoncs et le mauve des bruyères sur les collines et les landes, le brun des arbustes secs ; c'est aussi un pays de vaches aux robes tachetées ou unies.
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C'est le directeur de la Hague que je dois appeler, lui au moins pourra me renseigner, se dit André, qui s'indigne en silence, ils nous refont le coup de la Hague, quand ils ont décidé de coller une usine sans avertir personne, du jour au lendemain, mais pourquoi Flamanville et pas Granville, ou pas Barneville plutôt ?
Parce qu'on n'a pas les touristes, nous ?
Parce qu'ils s'en foutent ?
Pendant trois longues minutes, Rouxel ne bouge pas d'un muscle ni d'une paupière ...
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... je suis heureux de m’adresser à vous, car le combat que vous menez ici contre cette funeste centrale nucléaire, au pied de vos superbes falaises, n’est-ce pas incroyable, la lutte contre cette terrible idée va au-delà d’un simple enjeu local. C’est un épisode fondateur de la grande bataille contre la civilisation de la croissance que nous avons à mener. Sauf à disparaître, nous membres de l’espèce humaine. Sauf à mourir, nous êtres humains.
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Une bonne partie des maisons de La Hague, comme on appelle le petit pays constituant cette extrémité de la presqu'île et que touche Flamanville sans faire vraiment partie, ont été construites avec cette pierre de teinte sombre, qui donne aux villages des alentours une solidité minérale, un aspect d'éternité et de résistance au temps, une épaisseur impénétrable.
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Victor Kaminski était peu apte au monde qui l'environnait : ce monde le tenait donc pour fou.
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