Sur un ton à la fois enjoué et caustique,
Leskov nous raconte dans ce roman les tribulations de Hugo Pectoralis, jeune ingénieur agronome allemand, qui fort de ses méthodes modernes d'exploitation, veut dupliquer celles-ci en Russie profonde. Armé d'une « volonté de fer » (*), presque conquérante comme sait l'être l'Occident, il se donne tous les moyens pour réussir son entreprise, va gravir les échelons dans la hiérarchie de sa filière, apprendre la langue russe en six mois, mais c'est mal connaître le tempérament slave qui ne va pas s'en laisser compter et engager la riposte selon des méthodes de harcèlement presque sardoniques comme peut user un village entier désireux d'en découdre avec le jeune impétueux venu d'Occident, allemand de surcroît qui va finir par essuyer les plâtres. Pectoralis se serait coulé encore dans les strates du pays visité.. je ne suis même pas sûr que cela aurait suffi, vu les tempéraments en jeu de part et d'autre, bien distincts, voire parfois antagonistes. En tout cas, il eut le loisir de voir les choses russes de l'intérieur et de les observer attentivement.
Il n'en fallait pas plus de cette fine observation des moeurs russes sous le prisme de notre jeune allemand pour flatter la sagacité et la sensibilité de
Leskov, on comprend mieux à la lecture de ce roman pourquoi le dessein de cet écrivain russe contemporain des
Tourgueniev,
Dostoievski et Tolstoi a séduit ces cimes de la littérature russe, par son originalité et par ce qu'il y a de fondamental selon le principe qu'il était « quelqu'un qui avait quelque chose à dire de personnel ». Dans l'ombre de ces géants, il a su trouver sa place grâce à leur adoubement, il faut bien le dire. Oui franchement il était aimé !..
Si l'on veut compléter sa connaissance des grands auteurs classiques russes, il faut lire
Nicolai Leskov.
(*) le terme est redondant dans le livre