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EAN : 9782204065801
340 pages
Le Cerf (28/03/2001)
3.25/5   2 notes
Résumé :
Le prix Nobel attribué à 1978 à Isaac Bashevis Singer (Pologne 2904 - Miami 1991) consacrait un écrivain yiddish vivant en Amérique, et bientôt universellement traduit (mais toujours à partir de l'anglais). Non sans quelque méprise sur le sens même de l'oeuvre. Celle-ci est indissociable de la littérature yiddish et de l'histoire juive au XXème siècle. Singer émigre en Amérique en 1935, suivant son frère Josué, et parmi tout un peuple d'immigrants d'Europe de l'Est ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Comme ses lecteurs ont tous été assassinés, et les quelques descendants rescapés assimilés à la culture américaine ou israélienne, la littérature yiddish est presque un organisme mort. Nous restent les traductions, et quelques auteurs décidés à animer une sorte de "revival" (qu'on appellerait à la façon de Singer dans son discours du Nobel, une "t'hiyes hameisim", une résurrection des morts). Henri Lewi, auteur du présent essai, est du nombre et consacre son étude aux frères Singer, Isroel Joshua et Isaac Bashevis, rescapés juifs polonais du "déluge" nazi réfugiés, comme d'autres, en Amérique.

L'ouvrage est dense, foisonnant, et conduit le lecteur dans les complexités de la famille des deux frères auteurs, et dans les problématiques culturelles des années 30 en Pologne et en Amérique. Il ne se borne pas au seul domaine de la littérature, mais se permet des incursions inspirées par la psychanalyse et la psychologie. C'est peut-être là que je ne le suivrai pas : cette dimension de l'essai a probablement une énorme importance pour lui, mais elle contribue à brouiller les idées et les faits de cette vie littéraire si riche, si vivace, que le génocide d'un côté, l'assimilation de l'autre, ont éradiquée si totalement. En somme, j'aurais aimé plus de faits, de titres, d'études littéraires, et moins d'intimité biographique et familiale. On trouve quand même de nombreux textes et documents inédits, et des observations sur les héritiers américains de ces rescapés (Saul Bellow, Paul Auster). La lecture de ce riche ouvrage saura éclairer le lecteur curieux de cette littérature engloutie.
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Cette étude solidement documentée accorde une large place à l'écrivain de langue yiddish Isaac Bashevis Singer ainsi qu'à son frère aîné Joshua. Ces derniers sont nés à Leoncin en Pologne, l'un en 1904, l'autre en 1893. Tous deux émigrent aux USA dans les années 30 alors que s'amoncelent sur l'Europe les nuages noirs du National-socialisme. Ils ne sont donc pas des témoins directs de la Shoah mais des victimes collatérales. Témoins d'un judaïsme polonais yiddishophone presque totalement disparu, les frères Singer n'ont eu de cesse de faire revivre à travers leurs écrits ce monde balayé par la folie meurtrière du 3ème Reich. Pour ce, un outil incontournable et efficace : la langue yiddish, presque unique dépositaire de la tradition ashkénaze. Cette langue en grand danger d'extinction, c'est à ses derniers conteurs qu'il appartient de la maintenir en vie car elle seule peut réanimer le petit monde de la Varsovie juive et du Shtetl. le yiddish, langue vernaculaire des Ostjuden, langue témoin, langue mémoire mais aussi langue méprisée des Gentils. Manes Sperber, autre Juif polonais en exil, se voit humilié par un professeur viennois car il prononce Hous au lieu de Haus! H. Lewi accorde en effet une place non négligeable à d'autres écrivains de la génération du déluge: yiddishophones nés en Pologne ou ailleurs, fils d'immigrés du Yiddishland maîtrisant plus ou moins bien ou pas du tout la langue de leurs parents. Opatoshu, Tenenboym, Howe, Anski, Sperber..., autant d'auteurs que j'ai découverts à la lecture de ce livre. Tous sont pétris de contradictions insolubles mais se présentent à travers leurs écrits comme des " grands réparateurs de la mort". Cette mort qui a en partie tué le Hassidisme, courant mystique fondé au XVIIIeme siècle par le Baal Shem Tov où comptent "l'effusion, l'intensité d'intervention, , l'amour mystique", ce Hassidisme en opposition au judaïsme rabbinique, basé sur l'interprétation rigoureuse des textes. Or, même si la question se posait déjà dans la Pologne juive d'avant le "déluge ", elle se pose aussi après : faut- il perpétrer l'héritage juif qui semble un "choix de soi-même contre l'universel, contre l'attitude assimilée à la Raison ? En clair, faut-il choisir entre le judaïsme et l'universalité ? Faut-il à travers le récit juif continuer le voyage pour atteindre la venue du Messie? Pourtant débarrassé de ses papillotes, pourtant devenu citoyen américain, Singer ne se mélangera jamais vraiment à la population non juive du pays d'accueil dont il ne maîtrisera non plus jamais vraiment la langue... Car, pour terminer avec les mots d'Henri Lewi, s'assimiler, c'est se faire une raison et "se faire une raison, c'est accepter l'inacceptable." Un livre hermétique mais d'une très grande richesse. J'ajouterais tout de même un bémol : le vocabulaire universitaire pompeux de l'auteur qui explique de manière compliquée ce qu'il pourrait dire simplement ainsi que ses références constantes à la psychanalyse, obsédée par les problématiques sexuelles. Faut-il à tout prix psychanalyser les passeurs du Yiddishland ?
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Le moi pur ne donne rien d'intéressant. Singer ne tient pas pour le romantisme d'un moi unique. Le moi séparé de tout cherche à se rendre intéressant par toutes sortes de recherches ennuyeuses, vides : on écrit les noms propres sans majuscules, etc ... Le vide est la chose du monde la mieux partagée : le moi pur est commun, il fait des choses qu'on a déjà faites, il se répète à vide. L'écrivain véritable ne se scrute pas lui-même comme l'ont fait Proust* et Kafka ; il scrute plutôt autrui, sans pourtant craindre de se perdre dans l'objectivité : il se dit à travers la scrutation du texte infini d'autrui. Le moi est plutôt dans la répétition, marquant l'oeuvre tout entière d'une signature indicible.

C'est ici l'écriture yiddish qui réconcilie l'exception et la généralité. Elle est exception, en tant que langue d'un groupe minoritaire ; et généralité, comme langue du groupe. Les racines sont généralité et exception, a priori. "La littérature est inséparable des origines, des racines de l'écrivain." Tolstoï, Gogol, Dostoïevski sont de grands écrivains parce que russes ou ukrainiens (Gogol). Les Juifs assimilés peuvent être "de grands érudits et bien autre chose encore, ils ne seront jamais de grands écrivains."

*quelle erreur sur Proust ! (note du lecteur)

p. 22
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Ce qui est vivant et efficace, au moins dans la réalité humaine, la seule qui compte, c'est la prière et l'effusion ; c'est à dire, l'intercession du rebbe. Le rebbe, dans les œuvres de Bashevis, c'est Bashevis lui-même : à lui est dévolue, collectivement, à travers la pratique de l'écriture, la fonction d'évocation des morts, de conjuration des démons et des dibbouks (...)Après la mort des Juifs polonais, c'est lui qui assure la continuation et la survie (...)Dans l'écriture de Singer, dans son humour, se dit l'esprit du hassidisme, son refus de la mélancolie, du réalisme, une révolte contre le réel, la triste réalité.
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Car le meilleur ou le seul moyen de renverser et dominer une situation qui échappe à toute prise est de se raconter des histoires, c'est le récit en général qui est l'issue.
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Il ne s'agit pas seulement de continuer à vivre; mais de retrouver quelque chose comme une joie ancienne, un privilège familial.
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C'est la capacité mimétique qui fait d'Isaac Singer le représentant et le médium du judaïsme polonais assassiné : dans ses nouvelles, les hommes, les femmes, les vieillards, les animaux, les anges et les démons s'expriment par sa bouche ;
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