Elle avait cette grâce féline innée. Elle avait fière allure, avec des cheveux flamboyants qui descendaient jusqu'à la taille et des yeux bleus qui scintillaient d'un éclat d'espièglerie.
Ruslana Korshunova était belle comme un astre, elle était belle à en crever.
Allez sur le Net ou sur YouTube pour le vérifier.
La vie de Ruslana était un véritable conte. Elle arrivait de son petit Kazakhstan. Sa maman était femme de ménage qui se tuait à récurer les cuisines et les WC pour pouvoir payer à sa fille des études, celles qui lui offriraient une vie meilleure que la sienne.
Ruslana avait tout pour elle, car en plus de sa beauté naturelle, elle était intelligente, parlait quatre langues et excellait en maths.
Alors le monde entier de la mode, lorsqu'il découvrit cette "perle rare", "ce diamant pur", s'est mis à genoux devant elle.
Ruslana a donné la cadence de son pas gracieux, sur la scène des plus prestigieux défilés. Elle rayonnait sur les plateaux. Par sa magnifique présence, elle effaçait les plus belles Top Models du moment, comme Kate Moss et bien d'autres.
Ruslana a posé pour les plus grands magazines comme « Vogue », comme « Glamour », ou comme « Elle ». Elle fut aussi l'égérie des parfums Nina Ricci
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Ruslana avait seize ans en 2003 lorsqu'elle fut découverte.
Elle avait des rêves plein la tête. Son avenir était rempli de promesses éblouissantes.
Elle allait très vite arriver au somment du monde.
Mais en juin 2008, c'est un véritable coup de tonnerre, un séisme, un énorme coup de massue digne de celui du dieu Thor, une immense consternation qui s'abattent sur le monde superficiel de la mode.
Ruslana chute du balcon de son appartement du 9e étage. Elle est retrouvée morte.
Personne n'a vu ou voulu voir les signes avant-coureurs, chacun étant trop occupé à choyer, à cocooner « leur poule aux oeufs d'or ».
Mais derrière le sourire malicieux et le regard intensément bleu de Ruslana, chacun aurait pour voir qu'elle était parfois désenchantée et remplie de tristesse.
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L'enquête de police conclu à un suicide.
Pourtant des mystères subsistent autour de cette mort accidentelle.
Certains ont parlé d'un assassinat mafieux. Que la jeune fille âgée de seulement vingt et un an, aurait été poussée.
Qu'avant sa mort elle était entrée dans une secte ?!
Un fait troublant tout de même, révélé par la police new yorkaise de l'époque.
Lorsque que dite police a retrouvé, sur le trottoir, le corps désarticulé de Ruslana Korshunova, celle-ci avait les cheveux coupés. Sa longue et belle chevelure rousse avait été saccagée, mutilée comme dans un acte rituel avant un crime.
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Géraldine Maillet, aujourd'hui chroniqueuse brillante et véhémente, qui connait bien ce milieu de la mode, a brossé un superbe portrait de femme. L'auteure a rigoureusement bien décrit aussi la mentalité parfois infecte et surfaite du monde du mannequinat.
Sa plume est vivante, vibrante. Elle est très acérée, très sarcastique, surtout lorsqu'elle donne de la répartie au personnage charismatique de Carrelyn Watts, l'agent de Ruslana chez « Glitter ».
Géraldine Maillet décrit un univers très spécial et inquiétant qui, derrière les belles robes, les paillettes, le khôl, les sourires d'anges, les flashs des photos, cache cette obsession de la rentabilité et du paraitre.
Nous sommes plongés dans le monde du fric, celui qui écrase tout sur son passage.
Un véritable rouleau compresseur qui en imposant ses dictats de la minceur et la beauté, continue d'infliger à toutes ces jeunes filles une énorme et réelle souffrance.
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Certaines ont réussi à s'en sortir et se sont reconverties, comme la belle
Ines de la Fressange, entre autres. D'autres Top Models sont tombées dans l'oubli, loin des projecteurs. Beaucoup d'autres encore sont tombées plus grave dans l'anorexie et la maladie.
D'autres encore, plus fragiles et aussi bien moins connues que Ruslana, sont décédées.
On ignore leur nombre parce que qu'il y a une omerta sur ces drames dérangeants. Une façon ignoble de « cacher la poussière sous tapis. »
Des filles qu'on avait rempli le coeur de promesses et qui sont mortes d'overdose, mortes de ne plus oser s'alimenter pour garder leur ligne et en conséquence leur travail.
Des filles mortes aussi de chagrins et de désespoirs.