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EAN : 9782919285297
204 pages
Editions Antidata (25/11/2021)
4.38/5   8 notes
Résumé :
Alors que la fuite pourrait être plutôt associée à un refus de l’affrontement, et donc à une forme de lâcheté, peu honorable, les diverses sorties de pistes et manœuvres d’évitement évoquées dans ce recueil semblent aboutir à la conclusion inverse : fuir est un réflexe salutaire, et s’apparente parfois même à une ligne de conduite, voire à un genre de vie.

Ce qui soulève une inquiétante question : comment peut perdurer une civilisation qui donne à tou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Edité chez Antidata, le petit volume est particulièrement attrayant, avec sa couverture dépliable aux couleurs acidulées. On a vraiment envie de le glisser dans sa poche et de l'emporter partout avec soi pour lire une des 13 nouvelles ici ou là.
Les textes sont très variés, mais ont en commun le thème de la fuite, au sens propre ou au sens figuré. Qui n'en a pas rêvé? A un moment difficile de sa vie, ou simplement lassé d'une routine peu satisfaisante. J'avoue y avoir cédé quelques fois. Un décrochage universitaire pour commencer, et je suis toujours en proie à de récurrents cauchemars où je parcours les couloirs de la Fac sans trouver la porte de sortie. le narrateur de Stan Cuesta justement fait ce type de rêve alimenté par sa mauvaise conscience alors que lui a déserté son poste à la Maison de la Radio. La musique a gâché ma vie se place en "top three" de mon classement. Sans doute parce que la nouvelle renvoie aux années Pop club et Pollen de José Artur, marquantes pour ma génération qui est aussi celle de Stan Cuesta. Aussi pour son écriture pleine d'énergie et pour son humour, évidemment.
La fuite est savoureusement drôle dans la nouvelle de Jean-Luc Manet - critique musical rock'n'roll - Nigel, même si elle ne conduit pas plus loin que le café du coin. le texte atteint un niveau comparable aux dialogues de Michel Audiard dans le film culte Un singe en hiver . Il comporte des envolées remarquables dignes du maître. A ce titre, je fais également entrer Nigel dans mon "top three".
Y figure aussi En Avant, de Guillaume Couty. Il a puisé son inspiration dans un sujet d'actualité, puisqu'il traite de la période Covid dont nous ne sommes toujours pas sortis. Mieux vaut en rire, et c'est ce que Guillaume Couty propose au lecteur.
Il y a enfin une nouvelle à part, incomparable à mon sens, c'est Golconde, last but not least ! Elle fait écho au film de Cédric Klapisch sorti juste avant l'an 2000 : Peut-être. Comme ce film, elle offre une ouverture merveilleuse vers un autre monde émergent du sable et auquel on accède par inadvertance. Elle nous invite à remettre en question toute notre existence. Et cela au moyen d'une très belle et envoûtante écriture.
Je remarque que mes textes favoris s'inscrivent dans le milieu musical, et sont écrits par des auteurs musiciens eux-mêmes ou qui baignent en tous cas dans la culture rock. J'en conclue donc que la fuite a plus de force et me touche particulièrement lorsqu'elle est portée par l'esprit rebelle des musiques actuelles. Vive le rock'n'roll ! Merci Antidata !
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Douze échappées très variées et un écoulement ravageur : sous le signe de la fuite, le formidable nouveau recueil collectif de nouvelles des éditions Antidata.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/12/16/note-de-lecture-decamper-collectif/

Comment se relient entre elles treize nouvelles aussi catégoriquement ou subtilement différentes en apparence que celles mettant en scène un bucolique jardin aux délices où se rejouent en toute poésie et en toute horreur quelque Battle Royale ou Chasse du Comte Zaroff (Théo Castagné, « le cimetière aux fleurs »), les glissements de temps s'opérant entre 1891, 1959 et 2015 à propos de certaine marche effectuée loin de l'autre (Pascale Pujol, « La randonnée »), le traitement ironique et soigneusement maximaliste des gestes barrières généralisés (Guillaume Couty, « En avant »), le mythe de la veste restant éternellement sur la chaise de bureau porté à sa puissance maximale, au coeur du milieu de la musique et de la radio, et en hommage à José Artur (Stan Cuesta, « La Musique a gâché ma vie »), la leçon d'empathie paradoxale et décalée fournie par un détour science-fictif appliqué aux exilés et réfugiés contemporains (Gabriel Berteaud, « le deuxième recueil »), le détournement sauvage et tendre d'un rade la nuit pour y refaire le monde et actualiser le garçon de café sartrien (Jean-Luc Manet, « Nigel »), la réécriture malicieuse des jeunes années d'Arthur Rimbaud (Nathalie Barrié, « Semelles de vent »), la mise en résonance d'une célèbre chanson rock française devenant, au crible du grunge, comme le filtre et le miroir des modes en matière de musique actuelle (Nicolas Fert, « Un jour j'irai à New York »), l'appréhension d'un phénomène donné par les regards croisés pas nécessairement convergents et les mémoires indécidables ou carrément divergentes des autres (Jean-Yves Robichon, « Les témoins »), ou encore le détour par la science-fiction, à nouveau, pour rappeler la nécessité de la pause et de l'échappée comme la valeur métaphorique pure de tout récit (Maxime Herbault, « Golconde ») ? Sans oublier naturellement la cruauté tragique d'une prise au pied de la lettre de certaines injonctions apparemment si innocentes telles que « ouvrir bien en grand » (Claudie Gris, « Traversées »), le recours savamment incongru au moment d'absence de Tolstoï au stade enfin terminal de la lutte des classes (Laurent Dagord, « Astapovo ») ou enfin la mise en jeu de paille pourrie par l'humidité et de conséquences à gérer, mobilisant les souvenirs pas toujours reluisants de l'Occupation et de la Libération dans un petit village agricole (Éric Bohème, « Y'a eu comme une fuite »).

Placé sous le signe de la fuite (que seul le formidable mauvais élève Éric Bohème aura détourné de son sens ici le plus communément accepté, en lui offrant sa signification la plus hydraulique), « Décamper », le nouveau recueil collectif de nouvelles des éditions Antidata, publié en novembre 2021, nous rappelle, à l'image de ses désormais et heureusement nombreux prédécesseurs, « Ressacs » (la mer, en 2019), « Petit ailleurs » (la cabane, en 2017), « Parties communes » (les voisins, en 2016), « Terminus » (le dernier, en 2015), « Jusqu'ici tout va bien » (la phobie, en 2013), « Version originale » (le cinéma, en 2013), « Temps additionnel » (le football, en 2012), « Douze cordes » (la musique, en 2012), ou encore « CapharnaHome » (la maison, en 2010), à quel point est puissante la beauté intrinsèque de la forme littéraire courte et de son télescopage thématique à plusieurs créatrices et créateurs. Que l'on connaisse déjà les autrices et les auteurs, à travers leurs travaux dans de précédents recueils collectifs ou dans leurs oeuvres individuelles (citons par exemple les « Sanguines« de Pascale Pujol, le « Haine 7« , le « Trottoirs« ou le « Aux fils du Calvaire« de Jean-Luc Manet, ou encore « le Monico« d'Éric Bohème), ou que l'on ait la joie de les découvrir ici pour la première fois, c'est bien à la patience, à la détermination et au goût exigeant et toujours joueur de Gilles Marchand et d'Olivier Salaün, les deux co-éditeurs attentionnés d'Antidata, en plus d'être tous deux d'impressionnants écrivains (lire absolument « Une bouche sans personne« , « Un funambule sur le sable« , « Requiem pour une apache« et « Des mirages plein les poches« du premier cité, et « Il y a un trou dans votre CV« du deuxième), que l'on doit ce régal chaque fois renouvelé.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Livre reçu dans le cadre d'une opération "Masse critique" je tiens à remercier Babelio et Olivier des éditions Antidata.
J'avoue que je ne connaissais pas cette maison d'édition avant.
Apparemment, elle est spécialisée dans le recueil de nouvelles.
Décamper, ce n'est pas une seule histoire, mais 13 différentes, écrites par 13 personnes différentes.
Je ne vais pas faire ici 13 critiques différentes, mais je vais plutôt donner un avis général.
Tout d'abord, je dois féliciter les personnes qui sont responsable de la mise en page, car la présentation de chaque nouvelle et terriblement efficace et original, bravo.
Ensuite je dois dire que chaque auteur a sa vision de la fuite, car oui, ce sont peut être 13 nouvelles différentes, mais toutes axées autour du thème de la fuite.
On a différents styles, de la SF, de l'anticipation, du contemporain, du classique, etc...
Le point faible étant que l'on a pas le temps de s'habituer à une nouvelle, que c'est déjà la suivante.
Avec 13 nouvelles pour un peu plus de 200 pages, on a une moyenne de 15 pages par histoire.
C'est comme les courts métrages pour le cinéma.
Étant donné qu'il y a beaucoup de style différents, je n'ai pas plus aimé que ça une ou deux histoires.
Mais il s'agit évidemment plus du genre que de l'histoire elle même.
Mon avis général étant quand même très positif.
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La fuite m'intéresse depuis longtemps, c'est une thématique qui me touche particulièrement. Ça me parle. Très souvent, j'ai envie de me lever et de partir sans me retourner en changeant d'identité (chacun son truc 🤷). J'ai retrouvé dans chacune de ces nouvelles un élan semblable au mien. Que ce soit la fuite pure et simple de sa propre vie, la fuite d'un système jugé despotique ou comme moyen de se réinventer, beaucoup de facettes y sont abordées. Même la fuite d'eau. J'ai aimé les différents univers qu'on traverse durant notre lecture, des univers presque trop similaires au nôtre, des absurdes en passant par des univers propres à la science-fiction.
Bien sûr, certains thèmes et certaines plumes me touchent davantage que d'autres, mais dans l'ensemble ce recueil est vraiment réussi : il cerne bien la fuite et l'échappatoire qu'elle évoque. J'ai eu du plaisir à découvrir certains auteurs dont j'essaierai de lire d'autres livres car leur façon de traiter ce sujet m'a séduite.
Je remercie Babelio et les éditions Antidata que j'ai découvertes à cette occasion pour l'envoi de ce livre.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
- Du rhum tavernier, et du meilleur !
Ça tombe bien, une carafe d'origine caribéenne trône sur une étagère.
- Merci matelot, continue-t-il lorsque le gobet attendu rallie sa position.
Il porte le breuvage ambré à ses lèvres et se fige.
- Dites-moi, moussaillon, c'est qui la fille là-bas, au fond ? On ne vous a jamais dit ? Jamais de femme à bord : foi de Roger Le Querrec, officier de la Marine Marchande, pour vous servir !
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Une fois passée sa soixantième année, Jean de Conty a commencé de subir le retour des souvenirs d’un passé lointain.
Il le savait : c’était le signe de l’entrée dans la vieillesse. Cela ne le troublait pas. Il en éprouvait même une forme de plaisir. Il retrouvait, sans l’avoir cherchée, une part perdue de lui-même.
Parfois, le plaisir était incongru, malicieux. Le souvenir qui revenait le distrayait du présent.
Un jour, par exemple, recevant un « Important », il lui a retiré en imagination son costume de quasi ministre pour le vêtir de la blouse fuligineuse du marchand Dutertre, qui, deux fois dans l’année, livrait le charbon chez ses parents. L’image était restée enfouie pendant plus de quarante ans !
Conty entendait le camion de livraison s’annoncer dans un fracas de tous les diables, sur les ornières du chemin, le long de la voie ferrée. Dutertre en descendait dans la douleur, charriait le gros sac sur son dos cassé, le déposait à l’entrée du cellier. Un instant après, il se requinquait du verre de vin rouge qu’il buvait à la cuisine, sur la toile cirée, comme chez chacun de ses clients. Pourquoi l’Important avait-il fait revenir le marchand de charbon ?
À d’autres moments le retour des souvenirs pouvait se faire gênant.
Cela lui arrivait aux heures de fatigue et d’ennui. Lors d’un interminable conseil d’administration, il suffisait d’un visage ou d’un mot pour que la pensée du Président s’en aille vers le passé, y retrouve des trésors, et qu’il paraisse étrangement distrait.
Un soir, comme sa secrétaire lui tendait son élégante mallette de chevreau, il vit instantanément sa mère, Bernadette, dans sa blouse d’intérieur grise, qui lui tendait le seau à charbon. Il sentit dans sa main la pièce de bois lisse qui enrobait l’anse métallique. Il entendit le léger crissement du seau qui balançait sous l’anse. Il avait dû prendre un air égaré, qui inquiéta un peu. Il ne put descendre en rêve, à la cave, jusqu’au tas de charbon luisant. (Laurent Dagord, « Astapovo »)
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J’ai été en fin de carrière assez jeune. Vers 27 ans. Depuis, je n’ai plus jamais travaillé. Du moins au sens où l’entend à peu près tout le monde. Disons que je n’ai plus jamais été salarié – à part pour quelques petits boulots brefs et dérisoires, quand mes finances étaient vraiment dans le rouge. Mais ça ne compte pas. L’important, c’est que j’ai brusquement quitté une route toute tracée – plutôt une autoroute, d’ailleurs, large, cossue et confortable – pour emprunter des départementales qui se sont souvent avéré déboucher sur des chemins de terre ne menant nulle part. Ce n’était pas bien grave, puisque j’avais aussi abandonné l’idée d’aller quelque part en particulier. Le voyage était la destination, comme a dit je ne sais plus qui. (Stan Cuesta, « La Musique a gâché ma vie »)
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- Tous ces gens là, regarde-les. Ils sont morts sans le savoir. Morts et découpés et bien rangés dans leur chambre froide en attendant le grill. Le pire c'est qu'ils sont convaincus d'être vivants, alors qu'ils ne sont rien de plus qu'un stock de calories. Comme ces cellules souches, qu'on cultive dans des cuves en usine, pour produire la viande qu'ils sont en train de manger. Ils viennent se cultiver ici dans leur bar, c'est leur cuve personnalisée. Ils boivent. Ils mangent. Ils font le plein de calories qu'ils iront brûler dès demain à l'usine, pour produire quoi ? Des calories, toujours plus de calories, des calories jusqu'à la nausée qui nourrissent les propriétaires de leurs usines, qui eux-mêmes nourrissent les propriétaires de l'Astropole. Puis eux là, ils y gagnent quoi ? Un salaire. Un petit pourcentage des calories qu'ils produisent et qu'ils viennent brûler ici, dans leur cuve. Et ils recommencent ce petit sketch, jour après jour, persuadés que tout ça a un sens, convaincus d'être autre chose que de la viande industrielle. À gerber je te dis.

(Le deuxième recueil, Gabriel Berteaud)
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Bien sûr que je me souviens de lui. À l'époque, on s'aimait comme des ados, on était si jeunes. Des amours maladroites, brouillonnes, on découvrait nos corps. On se jurait fidélité pour l'éternité, c'est-à-dire pour la nuit, un peu plus parfois.

(Les témoins, Jean-Yves Robichon)
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