AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Olivier Mannoni (Traducteur)
EAN : 9782864247210
352 pages
Editions Métailié (01/01/2011)
3.81/5   8 notes
Résumé :
Né dans le Kurdistan irakien, Kerim ne connaît que la guerre. En allant rendre visite à ses grandsparents, il est capturé par un groupe, enrôlé de force dans leurs rangs, jusqu’à ce qu’il arrive, au prix d’un crime, à se libérer de leur violence. De retour dans sa famille, il n’a plus qu’une idée en tête: quitter l’Irak et se rendre en Allemagne clandestinement
Que lire après Le navire obscurVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Kerim est né dans le Kurdistan irakien. Dans ce pays qui depuis longtemps enchaîne les guerres, l'enfance de Kerim est relativement préservée. Mais à l'adolescence, alors qu'il partage son temps entre l'école et les fourneaux de l'auberge familiale, la violence entre dans sa vie pour ne plus jamais la quitter : son père est abattu sous ses yeux. Quelque temps plus tard, Kerim est kidnappé et embrigadé par un groupe fanatique de Combattants de Dieu, au sein duquel il assistera à l'innommable.

Il parvient à s'échapper, mais pas à reprendre sa vie d'avant. Il prépare alors son exil vers Berlin, où un de ses oncles a émigré des années auparavant. Il se lance dans un parcours risqué jusqu'à la Méditerranée, puis dans une traversée clandestine tout aussi dangereuse sur un cargo, y compris un échouage sur un îlot désert, avant d'enfin débarquer en Europe. Après des mois de démarches administratives, il obtient enfin le statut de réfugié en Allemagne.

Si une nouvelle vie commence pour Kerim, elle n'est pas rêvée pour autant. Malgré ses efforts, il n'arrive pas à comprendre la société dans laquelle il a atterri, son intégration est loin d'être évidente, à l'image de celle des nombreux migrants qu'il côtoie. "Chacun ici était libre, il n'existait pas d'ordre fermement assemblé auquel on eût pu se fier, et l'on devait dès lors se poser des questions sur tout". Tiraillé entre deux mondes, entre un futur désiré et un passé en partie regretté, ne sachant que faire de toute cette liberté inédite pour lui, il s'épuise à tenter de s'adapter à son nouveau pays, avant de lâcher prise.

Tourmenté par ce qu'il a subi et commis, il est rongé par des sentiments de culpabilité, d'abandon, de solitude, de peur. Il cherche refuge dans la foi, la foi idéale et pure que lui avait révélée son professeur chez les Combattants de Dieu.

« le navire obscur » est une plongée dans les eaux troubles et mortifères de l'extrémisme, l'histoire d'un piège qui se referme inéluctablement sur un homme complexe et malaisant qui semble ne jamais avoir réellement maîtrisé son destin. Comme une fatalité, l'étau du fanatisme religieux le tient entre ses mâchoires et resserre son emprise, lentement, sûrement, cruellement. 

Ecrit dans un style sobre, sans jugement, ce roman parle de guerre, d'exil, d'intégration et de racisme, de liberté, de radicalisme, de leurs causes et conséquences.
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          440
Nous connaissons tous l'Irak et ses guerres et avons tous en nous meme lointaines, les images des journaux télévisés, violentes, brutales d'un pays meurtri par ses luttes fratricides puis par les invasions étrangères....
C'est dans cet univers là que Sherko Fatah aux doubles origines Allemandes et Kurdes, nous emmène pour nous faire toucher du doigt la réalité crue des conflits et surtout la fragilisation d'un peuple que la guerre, omniprésente depuis si longtemps, laisse à genou...
L'endoctrinement dans des factions extrémistes des plus jeunes ou plus faibles, l'immersion dans un de ces groupes fanatiques appellé "Combattants de Dieu", leur aveuglement et la haine qu'ils transmettent par leurs paroles ou leurs actes, rien de tout cela ne nous est complètement étranger mais devient ici effroyablement tangible.

C'est à travers le destin d'un jeune Kurde, Kerim, que l'auteur nous raconte l'inévitable trajectoire d'une jeunesse amenée un jour ou l'autre à passer de spectatrice à actrice. Ainsi le héros, au début d'une passivité presqu'agaçante face aux évènements et dont chaque acte ou pensée n'est dicté que par son instinct de survie, va, peu à peu se transformer...
D'abord la mort du Père sous ses yeux, puis son séjour chez les "Combattants de Dieu", sa fuite éperdue vers un ailleurs illusoirement meilleur et le passé qui le rattrape deviendront autant de moments clés permettant à l'auteur d'aborder des thèmes comme la survie, la peur, la solitude, la délation, la trahison, la culpabilité et la foi bien sûr.... de montrer aussi comment la blessure d'un pays mène certains sur le chemin du terrorrisme. Sans jugement d'ailleurs. L'auteur explique simplement un processus qui semble inéluctable.

La plume habile de Sherko Fatah, sans tomber dans l'excès, dépeint la violence, la guerre mais aussi la beauté d'un pays qu'il regarde avec tendresse, ses paysages montagneux, ses routes empoussiérées, son soleil ardent comme un contre pied à la laideur des combats...

Un témoignage parfois bouleversant, toujours effarant, une plongée glaciale dans les eaux dangereuses du fanatisme.....

Un grand merci à Babelio et aux éditions Métailié pour m'avoir permis cette découverte très éloignée de mes lectures habituelles.....
Commenter  J’apprécie          80
Il est des lectures dont on ne sort pas indemne. Des lectures qui questionnent le monde, au delà de l' histoire, pourtant tragique, des personnages.
Dans le navire obscur il est question d'enfermement.
Kerim est un jeune kurde d'Irak ; il n'a d'ailleurs pas de nom de famille, c'est vous, c'est moi.
Il est un peu universel : on pourrait le rencontrer partout où l'horreur de la guerre déverse ses flots d'injustices : chez Ahmadou Kourouma ou Manuel Dongala, en Afrique, chez Jean Hougron ou Denis Jonhson en Asie, chez Daniel Chavarria ou Rolo Diez an Amérique du Sud…Balloté entre deux eaux, subissant sans pouvoir tenir le gouvernail.
Kerim traverse sa courte vie en tenant la mort à la main. de son enfance à sa vie de jeune homme c'est une compagne qui ravi ses proches, son univers et son futur.
Il surnage, se demandant si un ailleurs est possible.
Son existence est une succession d'épreuves douloureuses qu'il subi porté par le hasard des rencontres, des montagnes poussiéreuses du Kurdistan à une ville Allemande humide.
Peut de rayons de soleil dans ce parcourt. Peut-être son professeur d'anglais qu'il réussira à épargner alors que les barbus lui ordonnent de le tuer : il s'en sortira par un mensonge. Peut-être Sonja qui l'initie aux délices du désir et de la volupté. Pourtant c'est plutôt la compagnie d'un religieux qu'il recherche, béquille d'une quête spirituelle pour un jeune homme solitaire. Plutôt que d'aller de l'avant Kerim s'enfonce dans une lente descente aux enfers, tiraillé entre une vie à vivre et le dévouement aveugle à une cause.
Tenté par sa nouvelle vie et bridé par son passé, Kerim est un résumé d'une jeunesse perdue : tout à tour enrôlé chez les fous de Dieu, passager clandestin sur un cargo, naufragé sur une île déserte, demandeur d'asile en Europe. Un destin banal pour des centaines de milliers de migrants fuyant la violence et la misère et désireux de trouver un refuge pour commencer à vivre ; enfin.
L'écriture de Sherko Fatah, sobre et précise, accentue la malaise : on sent Kerim pris ai piège. Malgré ses efforts pour évoluer, la lassitude le gagne. Il se résigne au fil des pages malgré notre envie de lecteur de le pousser en avant. S'en dégage une atmosphère pesante mais pas l'idée de refermer le livre et de l'abandonner dans un coin. Au contraire on dévore les pages à la recherche d'un fol espoir.
Mais le conte de fée n'a pas lieu. Kerim n'a plus son destin en main : d'autres vont tirer les ficelles. Il subit les événements plutôt qu'il ne les provoque, trouve refuge dans une foi moyenâgeuse et s'enferme peu à peu avec ses doutes. Et c'est sans doute pour cela que le navire obscur est un grand livre. Il parle de la vraie vie. Une fois le livre terminé persiste un sentiment d'injustice, une colère sourde : comment l'humanité peut-elle en arrivée là ?

Lien : http://opoto.org/blog/wordpr..
Commenter  J’apprécie          50
"Un tesson ne peut-être que le souvenir du verre dont il provient." Kerim, le "héros" de Sherko Fatah dans le navire obscur, est un tesson de bouteille, brisé et coupant. du Kurdistan irakien, où il connaît les horreurs de la guerre et l'embrigadement, jusqu'à Berlin, où il ne trouve pas la paix, avec, entre les deux, un voyage en clandestin, dans les entrailles puantes d'un vieux rafiot. La peur et l'incompréhension façonnent le destin de Kerim dans ce roman au style sec et puissant, d'un réalisme suffocant. le livre est comme une tragédie implacable dont les épisodes s'enchaînent avec une logique imparable. le passage de Kerim chez les "Combattants de Dieu", raconté en plusieurs flashbacks fulgurants, l'angoisse claustrophobe dans la cale du navire, le dénouement, enfin, d'une force inouïe, amplifiée par l'économie de moyens, délivrent des scènes terribles, presque insupportables, dans la violence, plus morale que physique, qu'elles suggèrent. Un livre qui, s'il n'est que fiction, va bien au-delà des documentaires traitant du terrorisme, des extrémismes quels qu'ils soient, et des chocs des mondes. Il n'y a pas plus dangereux qu'un tesson de bouteille.
Commenter  J’apprécie          30
Sherko Fatah dépeint la situation actuelle en Irak au travers du récit de la jeunesse de Kérim, aîné d'une famille de trois enfants.

Là où il habite, le jeune adolescent est relativement préservé. Même si il croise en allant à l'école des chiens errants affamés ou des camions pleins de prisonniers. Il perçoit la guerre par la peur constante de sa mère et par les épisodes de combats lointains lorsqu'il se rend chez ses grands-parents à la frontière iranienne.

Sa trajectoire va changer lorsqu'il assistera à l'assassinat de son père par des hommes du service secret venus déjeuner en son restaurant.

Après la dénonciation abusive d'Anatol, un ami de son père, ce second évènement va amorcer la culpabilité et le questionnement de Kérim.

Lorsqu'il se fera enlever par les combattants de Dieu, il est un être très malléable. On ne sait pas, à ce stade du livre comment il s'enfuit de ce groupe et revient chez sa mère, amaigri et riche.

Sa seule ambition sera alors de rejoindre son oncle en Allemagne. Il va alors vivre le sort des exilés, des passagers clandestins. Ce passage du livre n'apporte rien à son histoire personnelle si ce n'est qu'elle se termine elle aussi par un abandon et une culpabilité envers son compagnon de voyage qu'il abandonne sur une île déserte.

On le comprend, Kérim accumule les abandons, les sentiments coupables.

J'ai particulièrement aimé dans ce livre la construction lente et progressive qui donne à la dernière partie un grand intérêt. Au fil de l'évolution de Kérim en Allemagne, j'ai compris toute la puissance de l'embrigadement inconscient des forces extrêmistes. le professeur des combattants de Dieu a su insuffler en Kérim la haine des américains, hommes cupides et sans Dieu.

J'ai un peu été surprise par la remarque sur les attentats du 11 septembre. Elle est toutefois assez sibylline pour ne pas réellement choquer.

Le style littéraire est agréable, aisé et fluide. L'auteur est parvenu à construire un personnage intéressant car complexe malgré ses défauts. C'est un livre assez fort qui aide à entrevoir la folie de certains kamikazes.
Lien : http://surlaroutedejostein.o..
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Il pensa à elle et tenta de comprendre ce qu'elle attendait de lui. Il sut tout d'un coup que leur vie commune serait une chaîne de rendez-vous constamment renouvelés, que leur amour, leur avenir ne reposeraient que là-dessus. Chacun ici était libre, il n'existait pas d'ordre fermement assemblé auquel on eût pu se fier, et l'on devait dès lors se poser des questions sur tout, il fallait se mettre en chasse, tenter de s'offrir, c'est pour cela qu'il y avait des perdants à ce jeu, ceux qui n'avaient pas grand-chose à proposer, les laids, les bêtes ou tout simplement les maladroits. Une fois que l'on était enfin ensemble, il fallait même se battre pour trouver du temps à partager tout en craignant, par-dessus le marché, qu'il ne fût trop ennuyeux. Ce combat éternel n'était-il pas précisément le coeur de cette liberté pitoyable dont le professeur lui avait parfois parlé, cette liberté qui rend solitaire et vise aussi justement à détacher les êtres les uns des autres, à les dissocier de l'unité afin qu'ils errent, toute leur vie durant, dans l'espace vide?
Commenter  J’apprécie          140
Kerim se rappelait précisément ses mots:
- Et pense aux femmes. Chacun, à l'Ouest, te dit qu'elles devraient avoir les mêmes droits, qu'elles devraient être libres. Mais personne n'est vraiment libre. Tout ce qu'ils veulent, c'est que les hommes et les femmes s'opposent au lieu d'être là les uns pour les autres. Ils nous racontent que la liberté consiste à ce que chacun poursuive ses propres intérêts et fasse seulement ce qui lui est utile. Et ce sont là encore des choses dont ils deviennent esclaves parce qu'ils veulent en avoir toujours plus.
- Et pourquoi nous raconte-t-on cela?
- En agissant ainsi, ils détruisent l'ordre, la famille, et rendent solitaires les gens, les hommes et les femmes. Ils se marient, et quand ils divorcent ils se battent l'un contre l'autre pour leurs biens et leurs enfants comme s'ils étaient deux étrangers. Il s'agit toujours de l'argent, crois-moi, c'est l'argent qui les possède. Cela les rend froids et durs, et c'est pourtant la seule chose à laquelle ils croient réellement. Ils ne peuvent pas faire autrement, c'est ainsi qu'on les a éduqués. Même si leurs films et leurs livres affirment le contraire, l'argent et les choses qu'il permet d'acheter font leur misérable foi. Ils disent aimer la vie, mais cette vie est cupidité. Ils disent "progrès", mais ce progrès ne fait que préparer le terrain qu'ils exploiteront et détruiront demain, sans répit, vides et insatiables.
Commenter  J’apprécie          10
Pour les Allemands, lui expliqua l'Albanais, les demandeurs d'asile étaient la lie de la terre. Kerim l'entendi ainsi: personne, parmi les Allemands, ne pouvait comprendre pourquoi des gens qui n'avaient pas le droit de travailler et vivaient donc sur l'argent public, venaient dans leur pays sous prétexte qu'on l'avait inscrit dans la Constitution, on ne savait pas trop quand.
- Cela fait soixante ans qu'ils vivent dans la paix, dit Ervin.
Tout ce qu'ils connaissent, c'est par le tourisme, ce sont les pays sur lesquels ils daignent porter le regard. Rares sont ceux qui peuvent s'imaginer, dans leurs rêves, ce que cela signifie de devoir quitter sa patrie. Et les politiciens font tout pour que nous n'allions pas bien: sans ça, les électeurs les puniraient. De là cette nourriture de merde et la baraque où nous nous trouvons...
Commenter  J’apprécie          20
J'ai réfléchi, reprit Tony, et j'ai souvent hai tous ces pauvres. Je me disais qu'il vaudrait mieux etre un animal. Les animaux peuvent se nourrir tout seuls. Mais nous, demi-animaux qui ne possédons rien et avons besoin de tout, nous cherchons la proximité des autres hommes parce que la seule chose qu'il nous reste est la possibilité de vivre de leur compassion. Mais cette compassion s'épuise. C'est particulièrement grave dans les villes.
Commenter  J’apprécie          30
Kerim fut pris d'une tristesse qui lui arracha un soupir. Chaque mètre supplèmentaire l'y plongeait plus profondément. Il tenta de se rappeler tous les projets qui lui restaient, tout ce qui avait été important pour lui, et fut étonné par le peu de choses qui lui vinrent à l'esprit. J'ai dû dormir, se dit-il, dormir d'un long, très long sommeil. J'ai totalement oublié de regarder l'avenir, et maintenant que je me réveille, il faut mourir.
Commenter  J’apprécie          20

Video de Sherko Fatah (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sherko Fatah
Anne-Marie Métailié - Rentrée littéraire .Anne-Marie Métailié vous présente sa rentrée littéraire : "Hérétiques" de Leonardo Padura Fuentes. http://www.mollat.com/livres/padura-fuentes-leonardo-heretiques-9782864249610.html "Topologie de l'amour" d'Emmanuel Arnaud. http://www.mollat.com/livres/arnaud-emmanuel-topologie-amour-9782864249627.html "Un voleur de Bagdad" de Sherko Fatah. http://www.mollat.com/livres/fatah-sherko-voleur-bagdad-9782864249641.html Notes de Musique : Cuban Cowboys/Live at WFMU on Transpacific Sound Paradise 1_23_10/01 Intro. Free Music Archive.
autres livres classés : Guerre Irak-Iran (1980-1988)Voir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (21) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3246 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..