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EAN : 9782845633865
208 pages
XO Editions (21/08/2008)
3.86/5   7 notes
Résumé :
Pauline a beaucoup d'enfants, et depuis ce matin elle est deule avec eux. Son compagnon est parti, en déclarant qu'il est libre, comme tout le monde, qu'il a le droit d'être heureux, comme tout le monde, et que Pauline d'ailleurs ne vaut pas la peine qu'il reste.

Pourtant jamais Pauline ne s'est sentie aussi légère. « Je me souviens très bien du premier matin, et de la joie qui m'envahit dsè que j'ouvris les yeux. Mon Dieu, mon Dieu, il était parti, l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Comme toujours avec Myrielle Marc, il faut soulever le texte pour tenter de trouver ce qui se cache dessous. Ces romans recèlent des secrets enfouis, enterrés, emmurés, bien dissimulés en tout cas. Une part non négligeable de ce qu'elle nous livre lui est probablement inconsciente (c'est ce que je soupçonne sans pouvoir l'affirmer) et c'est ce qui en fait une écrivaine particulièrement singulière et intéressante.

A priori, nous avons affaire à une allégorie fondée sur la chanson « sur la route de Louvier ». La narratrice voit son quotidien brutalement anéanti par un coup de hache d'une extrême violence. Son compagnon, père de ses enfants (pas de tous), la quitte soudainement, arguant de sa liberté, affirmant que personne ne doit rien à personne, et qu'il est donc en droit de se tirer. Ciao, on ne le revoit plus.

L'abandonnée se retrouve seule à élever les enfants et elle se trouve fort dépourvue, la pauvrette, car l'argent vient à manquer. La voilà jetée sur la route de Louvier et, comme le cantonnier de la chanson, obligée de casser des tas de cailloux. Suivie jusque là, la route royale (celui qui la largue de si vilaine manière était dénommé le roi) n'est plus praticable et il faut la quitter pour emprunter des chemins de traverse bien peu recommandables. Après une période de sidération, cambriolage et prostitution seront du cantonnier sa pioche aux portes de cette redoutable ville de Louvier où, quoi qu'on en pense ou dise, l'être humain libéré de sa morale est sensiblement plus libre qu'auparavant. Enfin, notre héroïne décide par elle-même de ce qu'elle veut (ou peut) faire.

C'est qu'auparavant la narratrice était telle une feuille balayée par le vent, sans prise sur elle-même, sans décider de rien, ballotée selon les événements, comme la narratrice l'exprime fort joliment :

« La feuille au vent peut bien rencontrer l'arrondi d'un trottoir ou le socle d'un réverbère, pourquoi n'aurai-je, moi, buté sur rien ? J'avais voleté, j'avais tourbillonné, je m'étais mêlé aux fétus qui passaient : rien de plus ».

A Louvier, la vie est rude et on peut s'y perdre. Et l'entourage peine à vous comprendre, telle la belle dame du carrosse qui s'étonne de ce que ce cantonnier casse des tas de caillou alors que, la chanson nous le révèle, quand on casse des tas de cailloux sur la route de Louvier, c'est que, ma belle dame, on n'a pas le choix. Et, donc, on peut s'y perdre si, de sa vie passée jetant les derniers oripeaux, on repousse les mains fraternelles qui se tendent vers vous. On s'étiole, on s'assèche, on maigrit, jusqu'au moment où, saisi par le vide qui vous aspire, on ramène à soi ceux qui sont prêt à vous aimer, et qui vous aime et vous aide, et que vous aviez quelque peu brutalisés dans votre découverte de vous-même. Car le roi avait tort : il n'est pas vrai qu'on ne doit rien à personne, la chaîne des humains ne se comprend que par l'entraide, l'amour et la fraternité qui les lient. Que le roi aille se faire foutre puisqu'il a été infoutu de comprendre cela.

Cette allégorie paraît être le corps de l'oeuvre et lui donner son sens. Pourtant, dessous encore (ce qui faut faire d'effort chez Myrielle Marc pour mettre à jour tous les secrets…), il semble qu'il y ait un noeud, une sorte de nucleus résistant autour duquel le reste est construit.

Le roi s'en va. Et on ne le voit plus. Plus jamais. Il a disparu. Evaporé. En un certain sens, le roi est mort. Car une personne qu'on ne voit plus jamais, elle est comme morte. Et ce roman, donc, traite aussi (et surtout ?) de la mort d'un proche et du traumatisme provoqué. Un proche… un compagnon ? un frère ? une soeur ? un père ? Et c'est là que j'ai eu l'impression que la narratrice avait masqué ce traumatisme par un écran de fumée avec l'allégorie qu'elle nous a si adroitement servie. Et que cette allégorie (intéressante en elle-même, certes) détournait notre regard de ceux qui, telle une petite armée toujours présente dans le roman, souffrent vraiment de cette disparition, à savoir les enfants. Car la narratrice, elle, connaît certes des difficultés, mais ne souffre pas de la disparition en elle-même du roi. Non, dans le roman, le roi, c'est le père, pas le compagnon. C'est le père qui est mort.

Car ils sont omniprésents les enfants et remarquablement mis en scène. Par des questions, des interrogations timides, ils cherchent à comprendre ce qui se passe et ce que leur mère leur cache. Elle ment sans vergogne (le roi reviendra pour Noël, on ira le voir à Rocamadour, etc). Et les enfants soupçonnent la vérité, l'oublie parce que celle-ci est insupportable pour y revenir cependant régulièrement. Avant de comprendre sans comprendre, et alors de refuser d'y penser.

Ce qui me fait penser que le noeud du roman est contenu dans ce drame dissimulé et non dans l'allégorie de Louvier, c'est la phrase admirable qui révèle une souffrance trop magnifiquement exprimée pour ne pas avoir été vécue :

« Combien de temps ça met à crever, cette partie du coeur d'un enfant qui vivait de sa confiance en son père ? Deux jours ? Trois mois ? Dix ans ? Est-ce que ça saigne ? Est-ce que ça crie ? Est-ce que ça se débat ? Est-ce que ça vend chèrement sa peau ? Ou bien est-ce que ça se racornit en silence, doucement, poliment, sans déranger les gens ? »

Il est risqué (prétentieux aussi) de la part d'un lecteur de trop interpréter un roman. Et ceux de Myrielle Marc sont comme un oignon, il faut enlever plusieurs couches pour en découvrir les secrets. Tous les secrets ? Qui peut y prétendre. Mais quand on parvient à remuer le coeur d'un lecteur, c'est qu'on a touché chez lui une corde sensible, et donc probablement une corde en partie commune. La disparition du père, qu'il soit mort ou non. Dans les citations, je vois que zabeth55 a extrait cette même phrase. Preuve qu'elle fait mouche chez beaucoup.

Je terminerai en disant que l'écriture aussi témoigne du talent de Myrielle Marc. Une langue ciselée, travaillée, poli, délicate, qui donne un réel plaisir à la lecture. Et qui, par moment, dans ce conte/roman, n'est pas dénuée d'humour. A lire par ceux qui savent apprécier la vraie littérature. Celle, sincère, qui a quelque chose à nous dire.
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Premières pages hermétiques, où l'on se demande dans quel roman on est tombé, et puis…. un magnifique portrait de femme.
Laura raconte. Elle se raconte. Elle s'adresse à Mathias, mais qui est-il ?
Femme qui doute d'elle, qui a peur. Femme en colère, qui fonce. Femme débordée mais femme seule. Femme qui sombre. Femme qui fait face.
C'est superbement écrit, avec beaucoup de style, de finesse, d'intelligence ; plein de vie et d'humour aussi, même dans les périodes sombres.
Un auteur dont je vais m'empresser de trouver les autres titres.
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Pauline se retrouve seul avec ses cinq enfants, le roi est parti. Au début c'est une nouvelle vie, une nouvelle liberté, mais très vite Pauline perd pied, elle tombe dans le vol, dans la prostitution. C'est une coulée rapide vers l'abime racontée avec brio par myrielle Marc dont vous ne vous pourrez sortir indifférent ;
parce que tout est possible et pour tout le monde.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Combien de temps ça met à crever, cette partie du cœur d’un enfant qui vivait de sa confiance en son père ? Deux jours ? Trois mois ? Dix ans ? Est-ce que ça saigne ? Est-ce que ça crie ? Est-ce que ça se débat ? Est-ce que ça vend chèrement sa peau ? Ou bien est-ce que ça se racornit en silence, doucement, poliment, sans déranger les gens ?
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Son appartement est bourré de livres. Brochés, reliés. Des éditions originales pour la plupart.
« Une belle phrase est plus belle sur du papier japon » prétend-il.
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