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EAN : 9782806104526
218 pages
Academia (15/04/2019)
4/5   6 notes
Résumé :
Léa ignore pourquoi sa grand-mère Stamatia, d'origine grecque, n'a jamais parlé de son passé. En fin de vie, Stamatia demande à Léa d'effectuer à sa place le voyage aux Zagoria où elle n'est jamais retournée. Avec en toile de fond la guerre civile et la dictature des Colonels en Grèce, ce roman inscrit une relation familiale dans l'histoire. Il évoque la marge de liberté de femmes face à l'oppression, l'importance de la transmission par les mots, par l'histoire, par... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
L'échelle des Zagoria, publié avec soin et clarté par les éditions Academia, est le deuxième roman de Marie-Bernadette Mars dont j'avais déjà lu, avec plaisir, Kilissa en 2015. Une nouvelle fois, elle nous emmène en Grèce, celle des Colonels, celle d'une guerre civile qui divise, disloque, blesse, tue mais permet aussi l'émergence des visages emblématiques de ceux et celles qui refusent, luttent, prennent des risques au nom de la Liberté. Et ici, comme dans Kilissa, le lecteur ne s'étonnera pas de constater que l'auteure confie aux femmes le soin de passer aux actes de résistance. En effet, ce sont bien Stamatia et son amie Maria qui, alors, nourrissent le besoin de rendre au Pays sa dignité et ses valeurs de justice et d'ouverture et c'est Léa, la petite-fille photographe qui, de nos jours, se mettra en route pour que s'opère ce devoir de transmission qui, l'Histoire le prouve à souhait, est souvent assuré par les femmes. Sans être féministe à outrance, Marie-Bernadette Mars est attentive à la dignité des femmes dans la vie, dans l'Histoire et elle aime souligner les rôles qu'elles sont capables d'assumer avec détermination.
Ce roman n'est pas qu'un récit d'époque. C'est aussi la recherche actuelle d'une petite-fille qui veut, avec son compagnon, partir à la recherche des traces de Yaya, une grand-mère qui perd peu à peu ses mots, son cadre, le passé qui l'a tenue debout toute la vie. « L'échelle des Zagoria » est donc un roman qui traite de la transmission des savoirs, des valeurs, des raisons de vivre et d'espérer. Un roman d'amitié intergénérationnelle, un livre de sagesse, une tranche d'humanité forte.
Au fil de courts chapitres très bien structurés, le lecteur découvre le lien qui s'est tissé entre Yaya et Léa, sa petite-fille, relation fondée sur la complicité, sur les régressions progressives de l'esprit, les pertes de mémoire et la quête des moments de vie enfouis. L'auteure décrit avec pudeur et vérité ce monde des maisons de repos où la vie s'effiloche, où les pièces du puzzle ne trouvent plus leur place, où elles s'estompent, disparaissent ne laissant souvent que désarroi, silence et perte d'autonomie.
Quand l'instant de Stamatia devient la seule vérité, celle du détail, puis celle de la confusion, de l'exact au mitan de l'imaginaire, Léa comprend l'urgence de faire parler les silences qui ont scellé la vie de sa grand-mère. Elle part donc en Grèce, pays dont elle connaît déjà tout le pan du classicisme, de l'architecture, de la mythologie et du théâtre. Mais c'est une toute autre photo qu'elle ira capter, celle d'un pays au sol rugueux, d'un pays où la politique impose à la jeunesse des choix à poser, celle d'une jeunesse courageuse, fidèle aux anciens et à leurs valeurs, une jeunesse résistante, humble et fière.
L'écriture de Marie-Bernadette est au service de son sujet. Tantôt elle l'encadre par la description quasi photographique de tranches de vie, petits bonheurs simples qui respirent la tendresse, le sens de la famille et la richesse des valeurs à partager. Tantôt au contraire, bardée d'interrogations courageuses, son écriture traduit le sombre, l'obscur, le nuisible de la violence et du non-droit qu'affichent les arrivistes, les parvenus, les frères grecques dont la noirceur de l'âme n'a d'égal que leur besoin de paraître et d'écraser autrui.
En sus, l'auteur, du bout de sa plume, pose délicatement quelques questions éthiques sur la justice, le devoir d'intervention, le poids – ou non – d'un acte, l'existence d'une faute ou pas ! Elle ne tranchera pas, c'est au lecteur à le faire, éclairé par un récit qui, in fine, a tout dit.
Puis, dans une dernière partie, Marie-Bernadette Mars partagera sa conviction, son apaisement à propos du dernier voyage… Là où vont les cendres. Le lecteur refermera ce roman en douceur. A coup sûr, avec un autre regard sur la vie et la transmission des valeurs qui lui servent de fondation.

Il est encore temps de le glisser sous le sapin... n'hésitez pas!
Lien : https://frconstant.com/2019/..
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Après son premier roman intitulé Kilissa, Marie-Bernadette Mars nous revient avec un second livre qui explore à nouveau la condition de la femme en la transposant à notre époque tout en faisant voyager le lecteur dans une région peu connue de la Grèce : les Zagoria.


Une grand-mère âgée de quatre-vingts ans, prénommée Stamatia, une grand-mère dont la mémoire défaille, dont la mobilité se réduit de plus en plus avant de séjourner dans une maison de repos.
Une de ses petites-filles, Léa, photographe, vient souvent lui rendre visite, l'écoute raconter ses souvenirs, tout en tâchant de démêler le vrai du faux. Elle se pose de multiples questions sur ce qu'a été la vie de sa grand-mère qui, devenue veuve, a quitté la Grèce avec sa fille Èleni pour suivre en Belgique son second mari.
Suite à la demande de « Yaya », Léa se rend aux Zagoria et rencontre Maria, l'amie d'enfance de sa grand-mère. Celle-ci va lui raconter ce que fut leur jeunesse, sur fond de guerre civile et de la terrible dictature des Colonels. Elle lui révélera aussi le secret de l'échelle des Zagoria...


Fidèle à sa formation classique et philosophique, l'auteure aborde à travers une histoire familiale des thèmes existentiels et intemporels.

L'échelle des Zagoria est un roman sur le temps qui passe avec son cortége de souvenirs qui parcheminent l'existence, avec la solitude de la vieillesse régénérée par les visites familiales mais étiolée par les pertes de mémoire et le travestissement de la réalité, avec l'épreuve de la décrépitude physique. Parallèlement à l'écoulement du temps, M.-B. Mars renvoie au lecteur, comme un reflet de miroir, la question lancinante du sens de l'existence humaine en la rattachant à la trame de la transmission familiale.
« Je porte en moi – nous portons tous et toutes en nous – l'histoire de vies antérieures, recomposée selon notre personnalité, notre être profond.
Mais toute branche n'est-elle pas vivante aujourd'hui et sèche demain ? Elle se casse, elle tombe. Elle ne disparait pas, elle se transforme. Elle devient poussière, humus , terreau. Elle devient cendre dans un feu qui réchauffe, qui fait luire des yeux émerveillés, qui fait rêver. Elle devient complice alors des confidences échangées ou de récits enchanteurs qui donnent la vie . » ( p.109)

Ce roman composé presque exclusivement de personnages féminins traite aussi et surtout de la condition de la femme. Dans une société très marquée par la soumission et la tradition, Stamatia et Maria osent se lever pour braver les interdits en affirmant par des actes de bravoure leur liberté face à l'oppression.
C'est encore ce que fait, mais d'une autre manière, la maîtresse d'école Despini Katerini dont l'auteure trace un portrait très émouvant. Par ses paroles, son témoignage, ses opinions personnelles, des exemples repris à l'hitoire grecque, elle donne de véritables leçons de vie et d'humanité à ses élèves en les incitant à devenir eux-mêmes, c'est-à-dire à être capables de dire non et à exercer leur liberté.
« Les enfants étaient impressionnés. Despini Katerini, par ses histoires, imprimait en eux la conviction qu'un jour un de leur geste aurait de l'importance, que, là où ils étaient, là où ils seraient, il leur faudrait oser prendre la bonne décision, et qu'un oui ou un non pouvait changer le cours des choses. » ( p. 130)

Ce récit met , par ailleurs, en évidence l'importance de la transmission indispensable à l'être humain pour nourrir ses racines tout en développant sa personnalité. Certes il existe dans toutes les familles des non-dits qui ne permettent pas toujours de démêler l'écheveau des secrets mais ceux-ci sont supplantés par des gestes quotidiens qui renforcent l'appartenance familiale : une visite dans une maison de repos apporte par sa seule présence un rayon de soleil, un objet tel une photo ou un jeu fait revivre le passé, des paroles amicales peuvent redonner confiance et espoir...

Enfin le lecteur sera sensible à l'intimisme et à l'émotion qui irriguent tout le roman sans jamais verser dans l'émotivité.

Sur le plan formel ce récit très bien écrit s'apparente à un roman cinématographique voire kaléidoscopique car l'auteure multiplie les changements de scène dans de courts chapitres que l'on pourrait assimilés à des tableaux, en passant sans cesse d'un personnage à l'autre (Stamatia – Léa – Maria...), ce qui permet au lecteur de jouer le rôle d'un témoin invisible.

Relevons encore la beauté de la couverture qui représente une photo d'écorce de platane (l'auteure est passionnée de photographie) avec des plaques qui s'effritent telles les cicatrices de la vie ou encore les brisures et les craquelures du temps qui s'écoule...

On dit souvent que l'on attend qu'un(e) écrivain(e) rédige un second opus pour le(a) juger. Marie-Bernadette Mars a parfaitement réussi ce passage, gage de futures belles découvertes pour le lecteur !

« L'histoire d'un paysan ou d'une cuisinière est aussi riche de sens et d'humanité que celle d'un chef d'Etat ou d'un prix Nobel. » (F. Gaussen)


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Je dois bien reconnaitre que je n'avais pas très envie de lire ce livre. Mais lors d'un "apéro lecture", une participante en a tellement bien parlé qu'elle m'a donné envie de le lire. Et je ne le regrette absoluement pas. J'ai été transporté par cette histoire, la découverte d'un pan de l'histoire de la Grèce (la dictature des colonels), les personnages tellement attachants,... Et puis, quelle écriture! Marie-Bernadette mars est certainement une "grande plume belge"!
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
En écoutant Maria, je comprends que les femmes prenaient parfois des décisions importantes, mais dans l'ombre. Ce sont les hommes qui étaient propulsés en avant, en une sorte de mise en scène sociale.
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Nous jouons. Les dés roulent, les pions avancent, se croisent. Ce rapprochement sans conversation entre Maria et moi, ces gestes avec seulement les mots pour les mouvements du jeu induisent une chaleureuse connivence. Nous rions ensemble, nous sommes dépitées quand un pion est pris et qu’il faut recommencer le chemin. Nous jouons une part, puis une deuxième, une troisième.
Et puis, soudain, Maria me dit :
- Demain, je te montrerai la skala Vradetou.
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J'irai toucher les étoiles et je les ferai briller pour vous.
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Comment peut-on changer à ce point? Mais où s'en vont la vivacité, l'élégance, le dynamisme? Où s'en va la vie?
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Les mots sont les traces de tant et tant d'instants de vie...
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