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EAN : 9782267016475
370 pages
Christian Bourgois Editeur (17/11/2002)
3.88/5   4 notes
Résumé :

« Au début des années 60, la grande idée de Christian Metz fut d'aborder, avec les armes de la linguistique, l'objet-cinéma et d'offrir à la discipline ainsi fondée la reconnaissable rigueur d'une science. Celle-ci a des adeptes, maintenant, un peu partout dans le monde et les travaux de Metz sont traduits en une quinzaine de langues étrangères. Au-delà de la critique de films à laquelle nous éti... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Datant de 1977, le livre se place dans le prolongement de Langage et cinéma (1971). Il traite encore du cinéma en tant que "texte filmique", et au même niveau de généralité. Mais aussi et c'est nouveau, du "fait cinéma" : son inscription comme institution ou art spécifique, et les mécanismes psychologiques / psychanalytiques qui rentrent en jeu dans sa pratique sociale et individuelle.

Avant lui, Langage et cinéma faisait en bonne partie un recensement d'outils conceptuels tirés de la linguistique. le but de l'entreprise était d'apporter au chercheur des outils donnant à l'interprétation cinématographique une assise théorique solide.

Le signifiant imaginaire propose une actualisation à la lumière de la psychanalyse (autant freudienne que lacanienne). Actualisation et non « rejet » : Metz le répète, il n'a jamais rejeté ses travaux antérieurs, il les a dépassés, ouverts à ces nouvelles perspectives qui enrichissent les précédentes.

Son nouveau postulat : la pratique du cinéma repose sur un certain nombre de figures anthropologiques qu'a dégagées la théorie freudienne, dans sa logique de consommation individuelle et dans son usage social…

Metz examine donc plus attentivement la relation du spectateur au film, alors que Langage et cinéma s'intéressait d'abord au film lui-même, à ses codes. Il est passé en quelque sorte de l'émetteur au récepteur, c'est-à-dire le public, et au sens le plus général. En effet Metz ne distingue pas les goûts personnels, ou les appartenances sociales du spectateur... Il s'interroge sur les mystères toujours à l'oeuvre dans les salles obscures : espace de la salle de cinéma, présence réelle de la photographie en mouvement, absence réelle de l'objet photographié, jeu des identifications et des projections... Toute une mécanique complexe que la psychanalyse aide à mettre en lumière.

Le livre est un recueil de textes écrits entre 1973-1976, et rassemblés par thèmes. Il est structuré en quatre parties:

I. le signifiant imaginaire.
5 chapitres passionnants sur la pratique sociale du cinéma: "aller au cinéma", "parler de cinéma", "aimer le cinéma"…

II. Histoire/Discours (Note sur deux voyeurismes)
Partie très courte mais très riche, sur la question du film de fiction à cheval entre un régime d'histoire et de discours. Metz écrit par exemple que le "lieu" du film de fiction "est en chacun de nous, dans une disposition économique que l'histoire a modelée en même temps qu'elle modelait l'industrie du cinéma." (p. 115)

III. le film de fiction et son spectateur (Etude métapsychologique)
Christian Metz envisage dans cette partie la "visée filmique" au croisement de trois régimes de conscience : la perception réelle, le rêve, la rêverie. La réception du spectateur tiendrait de ces trois régimes, sans se confondre avec aucun. Un point de réconciliation permis par ce qu'il nomme l' "effet fiction".

IV. Métaphore/Métonymie, ou le référent imaginaire
En termes de volume écrit, c'est la moitié du livre. Une partie qui fait d'abord appel à la linguistique, et qui intéressera plutôt à mon avis les linguistes vraiment spécialisés?

Globalement, l'auteur utilise des termes un peu obscurs au premier abord mais qu'il prend toujours soin d'expliquer: paradigme et syntagme, condensation et déplacement, processus primaire et secondaire, métaphore, métonymie…

J'apprécie la rigueur de Metz et sa manière de s'appesantir sur la notion jusqu'à ce qu'elle soit parfaitement intelligible. Metz était paraît-il un enseignant très généreux et disponible avec ses étudiants. Et effectivement, sa visée didactique se ressent pleinement. Le livre est écrit dans une belle langue qui porte en elle-même la clarté. Je dirais que chez lui, la « beauté du sens trouvé » se marie directement à la beauté (esthétique) de la langue, sans que ni l'un ni l'autre ne prenne le dessus. Et j'y ressens la marque de son amour pour la linguistique, sa discipline de formation et de coeur. Pour Metz, comprendre (par le mot juste) est un éblouissement, un plaisir qui relie indissolublement l'intelligence à l'appréciation esthétique. La belle phrase est en même temps la phrase claire.

Enfin, bien que très renseigné, Metz se pose humblement comme un chercheur. Et quand la direction de pensée est encore floue dans l'état actuel de la recherche (la sienne, ou celle dans laquelle il s'inscrit), il la pose comme telle, il balise les espaces en friche avec méthode. Ce qui est une manière de procéder très structurante pour la compréhension du lecteur. En même temps, le lecteur se retrouve conscient des espaces à remplir, et donc piqué avec lui par la curiosité…

À tout prendre, je tiens le livre comme une lecture fondamentale pour qui s'intéresse de près au cinéma dans son articulation avec la psychanalyse. Cette approche spécifique trouve dans ce livre l'une de ses meilleures formulations. C'est en tout cas la meilleure porte d'entrée dans l'oeuvre de Christian Metz : un condensé de l'oeuvre de sa vie, un exercice de rigueur, une lecture de cinéma dont on sort très enrichi.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Dès sa naissance à la fin du XIXe siècle, le cinéma a été comme happé par la tradition occidentale et aristotélicienne des arts de fiction et de représentation, de la "diégésis" et de la "mimésis", à laquelle les spectateurs étaient préparés - préparés en esprit, mais aussi pulsionnellement - par l'expérience du roman, du théâtre, de la peinture figurative, et qui était donc la plus rentable pour l'industrie du cinéma. (p.54)
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Spectateurs-poissons, qui absorbent tout par les yeux, rien par le corps : l'institution du cinéma prescrit un spectateur immobile et silencieux, un spectateur "dérobé", constamment en état de sous-motricité et de sur-perception, un spectateur aliéné et heureux, acrobatiquement raccroché à lui-même par le fil inivisible de la vue, un spectateur qui ne se rattrape comme sujet qu'au dernier moment, par une identification paradoxale à sa personne propre, exténuée dans le regard pur. (p.119)
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Il y a du libre derrière le lié, puisque toute démarche commence dans l'inconscient, et il y a du lié dans le libre, puisque l'inconscient est une organisation non-quelconque d'affects et de représentations. (p.187)
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L'inconscient, dans sa double face refoulée et refoulante (= inconscient du Ça et inconscient du Moi), ne dort jamais vraiment, et ce qu'on appelle le sommeil est une modification économique qui affecte principalement le préconscient et le conscient. (p.128)
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Video de Christian Metz (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Christian Metz
Cours de cinéma de Marc Vernet, professeur en études cinématographiques à l’université Paris-Diderot et conseiller pour le patrimoine cinématographique de l’Institut national du patrimoine. Le 5 mars 2010 au Forum des Images, Paris.
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