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EAN : 9782246817178
224 pages
Grasset (30/09/2020)
4.12/5   20 notes
Résumé :
« Afropea est un agent de liaison au sens positif du mot. C’est ce qu’elle peut représenter de plus noble. N’en faire qu’une expression supplémentaire de la douleur afrodescendante la dévaluerait. Ne la percevoir que comme une identité noire vécue sur le sol européen apporterait de l’eau au moulin des nationalistes culturels. Il n’y aura pas de retour vers une Afrique qui, non seulement n’attend personne, mais pour laquelle la couleur de la peau est un marqueur d’ap... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Dans une réflexion aux allures de démonstration, implacablement menée, qui prolonge celle que l'on retrouve aussi, même si sous un format plus romanesque, dans Rouge impératrice, Léonora Miano imagine ici ce que pourrait être Afropea, un monde dans lequel Africains nés, ou vivant sur d'autres continents que leur terre originelle, et Européens, plus largement Occidentaux, vivraient véritablement sur un pied d'égalité, dans un élan de partage des histoires, des cultures…, et non pas dans un impératif d'assimilation occidentale, pour fonder une nouvelle existence humaine, mondiale, profondément fusionnelle et fraternelle.

Afropea, comme elle l'explique dans une première partie, après un préambule très éclairant sur son propre statut – elle n'est pas elle-même afropéenne, mais subsaharienne, puisque camerounaise – et sur le sens et le but de cet ouvrage, c'est un terme qui a pris naissance en Europe pour englober ceux d'origine africaine qui sont nés en Europe, et qui, de ce fait, ont toujours vécu dans un monde occidental qui ne les accepte pas en tant que tels. Or, pour que cette situation disparaisse, elle démontre, dans une deuxième partie, que l'on doit en finir avec l'occidentalité, qui s'impose depuis des siècles comme la seule voie à suivre, de gré ou de force, pour en arriver à un monde post-occidental, qui permettrait aux Afropéens de ne plus être confrontés au racisme systémique qui les étouffe au quotidien. Dans deux dernières parties, elle montre enfin que l'on doit dans le même temps faire de l'africanité et du panafricanisme des forces capables de passer outre le système imposé par l'occidentalité, de dépasser l'histoire qui a été conditionnée par celle-ci pour en revenir aux sources, et ainsi apporter au monde une nouvelle vision de l'Afrique, hors de cet Occident qui l'a forgée, via l'esclavagisme et/ou le colonialisme. Et c'est seulement à ce prix, pour les deux parties, qu'existera ce nouveau monde, dans lequel chacun s'acceptera dans toute son altérité, pour ne faire qu'un.

Du fait de sa grande qualité rhétorique, avec des arguments et des exemples très précis, parfaitement pertinents – que l'on soit au départ d'accord ou pas, l'on ne peut que prendre en compte la véracité de ce qui est proposé -, ainsi qu'une démonstration rigoureuse, qui sait où elle nous mène, Afropea parvient selon moi à son but : montrer qu'un autre monde est possible, si et seulement chacun fait sa part dans l'évolution de celui-ci ; j'avoue que j'aimerais, comme Léonora Miano, que cette utopie devienne un jour réalité…

Je remercie les éditions Grasset et NetGalley de m'avoir permis de découvrir cet ouvrage d'une grande sagesse, qui ouvre, à mon sens, une perspective et des questionnements fondamentaux quant à l'évolution de notre société.
Lien : http://lartetletreblog.com/2..
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Il est des livres dont la pensée s'exprime avec tant de puissance et de clarté, servie par un style dont la fluidité et la précision est un plaisir de lecture en soi, qu'il est difficile d'envisager en écrire la critique si grande est la peur d'en édulcorer les propos et la grâce. le livre de Leonora Miano est de ceux là, aussi j'ai préféré relever un certain nombre de citations édifiantes d'une part, et en rapporter une, ici, interrogation qui résonne si justement avec l'actualité des décisions qui se prennent dans notre pays.
« La planète n'a pas besoin de nous. Ce que nous exprimons à travers la question de l'écologie, c'est le souci que la terre nous reste habitable. Quel intérêt, dans le fond, si les rapport de domination et de spoliation perdurent ? Si le refus de reconnaître son humanité dans celle de l'autre persiste ? Les relations entre peuples, entre communautés, la manière dont l'histoire coloniale peut enfin être dépassée, sont donc des questions cruciales à aborder dans les sociétés concernées mais aussi les autres, qu'elles continuent d'influencer et avec lesquelles elles ont le monde en partage. » P62,63
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J'ai été un peu déçu par le livre, j'appréciais beaucoup les différentes interventions de Miano à la radio avec une approche qui me semblait originale et assez fine.

L'ouvrage lui varie entre assertions sans démonstrations et des propositions qui m'ont semblé intéressantes.

Par exemple la partie sur les français à l'étranger - qui postule qu'ils ne parlent que entre eux, n'envoient leurs enfants que dans les écoles françaises… - Bon, pas de preuves, pas de données, pas de démonstration ; et surtout, une généralisation hâtive qui me semble préjudiciable et aller contre d'autres propos dans le même livre. Je prends cet exemple, mais le livre en comprend d'autres de ce type.

Autre regret : le manque de structure du livre, qui rend parfois peu compréhensible les propos.

Au contraire, j'ai apprécié les parties sur les propositions et les réflexions, sur le retour à l'idée de la Négritude, sur la nécessité de sortir de la lecture racialiste du monde et de la domination occidentale des esprits. Dans ce cens, le concept proposé d'Afropea me semble assez fertile, afin de faire collectivement un pas de côté et reconstruire autrement.
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« Afropea » est un mot crée au début des années 90 par le musicien David Byrne, cofondateur du groupe Talking Heads (p.47). Les individus Afropéens sont définis comme étant des personnes d'ascendance subsaharienne établi dans un pays Européen. Cet essai utopique vise à travers cette union des continents à unir et inclure tous les êtres humains.

Profondément humaniste, se livre montre toute la volonté de créer un nouveau monde ensemble. Un monde dans lequel la notion de domination entre sociétés n'existerait plus. Un monde qui s'affranchirait de la conception racialiste des discours identitaires. Cet espace serait construit par un maillage humain issu de de l'ensemble des minorités. Les individus qui vivent en situation de minorité ne se voient souvent nulle part et construisent leurs sensibilités et manières d'habiter différemment.

Cet essai lumineux et passionnant est détaillé par un grand nombre d'arguments et d'exemples précis qui apportent une réflexion sur la construction de l'identité sociale et culturelle des individus. Je suis sous le charme de cette écriture et désireux de découvrir ses romans.
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Leonora MianoAfropea
"Les Afropéens sont ceux par lesquels l'Afrique et l'Europe fusionnent dans un projet fraternel anti-impérialiste et anti-raciste" (Note de l'auteur)
Alors que se dessine la nouvelle carte géopolitique du monde, il est intéressant que Leonora Miano, une subsaharienne qui a fait ses études en France, nous partage ses impressions. Entre ceux qui sont restés en Afrique et les autres qui se sont formés en Europe.
Au départ d'Afropea, David Byrne veut mesurer l'influence des cultures africaines sur la sensibilité européenne. Il reconnait que la rencontre entre les peuples n'a laissé intacte aucune des parties.
AU I9°s. .les Européens, avec l'accord de Berlin se sont mis d'accord pour partager entre eux l'Afrique subsaharienne, en imposant leur style de vie, leurs valeurs, l'accidentalité.
Ce faisant ils ont détruit la culture, les religions, les valeurs, le savoir-faire de ces pays qui sont devenus dépendants et minoritaire dans leur propre pays.
Non content de piller leurs richesses naturelles, ils ont oublié qu'avant la colonisation le Subsahariens étaient les héritiers de royaumes plus riches et développés.que l'Europe
Le projet d'Afropea est d'établir un partenariat à égalité avec l'Europe, ce qui relève de l'utopie de quelques chercheurs mais préfigure l'avenir.
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critiques presse (1)
LesInrocks
28 septembre 2020
Un essai qui résonne avec une conjoncture politique marquée par le repli identitaire [...].
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Les Français sont mal placés pour exiger que quiconque s'établissant dans leur pays en adopte les moeurs, la langue, et baptise ses enfants selon les usages locaux. Lorsqu'ils se trouvent dans leur ancien pré carré, les Français d'ascendance européenne unique ne parlent que leur langue, sont capables de passer plusieurs décennies sur un territoire sans en maitriser un seul idiome, envoient leurs enfants dans des écoles françaises, ne leur donnent jamais de noms locaux à moins d'être particulièrement excentriques. Et quelquefois, ils entrent sans visa dans ces pays, ce qui permet aux pédo-criminels et autres malfaiteurs de profiter sans états d'âme d'une indigence rampante. Les Français recevront chez eux ce qu'ils offrent aux autres. En matière d'assimilation, ils ne cessent de montrer l'exemple. Où qu'ils se trouvent dans le monde, même dans des pays frontaliers de la France européenne, leur premier réflexe est de s'établir en communauté, de s'assurer que le fromage ne manquera pas et que l'on pourra se passer d'apprendre une langue étrangère.
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Devant l’histoire des conquêtes coloniales et de l’esclavage, il n’y a plus de citoyens du monde, plus d’humanité universelle. Ne restent que la fabrique de la race , ses motivations et les gains que l’on fait fructifier en bon rentier de l’Occidentalité. C’est ce qui rend tellement intolérable l’évocation de cette histoire, une culpabilité se rapportant surtout à un héritage symbolique et matériel auquel il n’est pas question de renoncer pour fraterniser, c’est à dire commencer à rendre justice. D’ailleurs on estime l’avoir déjà fait, puisque l’esclavage a été aboli, acte par lequel la France se serait rédimée. Cependant, les abolitions de l’esclavage sont au premier chef l’aboutissement des luttes constantes des opprimés, ce que le discours français a encore trop tendance à éluder. De plus, l’argument révèle sa malhonnêteté lorsque l’on s’aperçoit que l’esclavage fut aboli en raison du projet que l’on avait de coloniser l’Afrique où l’on mettrait les populations au travail, y compris sous la contrainte. C’est en 1946 que la France abolira le travail forcé dans ses colonies d’Afrique de l’Ouest. Un siècle exactement après la deuxième abolition de l’esclavage, celle de 1848, censée avoir lavée la France de ses péchés. P42,43
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Les gémissements des identitaires français et de ceux qui jugent opportun de s'associer au coeur plaintif de conquérants déchus suscitent un certain effarement. On se demande ce qui devait résulter de l'aventure colonial, ce que doivent produire ses continuations à peine voilées, le futur que tout cela destinait à l'humanité. Comment pouvait-il échapper à l'entendement moyen que l'on ne posséderait pas tous ces mondes envahis et soumis, sans devenir aussi leur propriété ? Comme le dit l'adage, what you own owns you : vous appartenez à ce que vous possédez. S'élançant à l'assaut du monde, l'Europe conquérante se livra à lui. Les phénomènes migratoires que l'on voudrait contenir étaient prévisibles. Et inarrêtables.
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Dans ce propos dont j’assume la subjectivité, la dimension intuitive et l’hybridité formelle, Afropea incarne, dans l’hémisphère Nord, les peuples du monde brutalisés par l’Europe conquérante dès la fin du XVe siècle, puis par ce qui s’est appelé l’Occident. Une autre façon de désigner le capitalisme et sa violence. C’est la vénalité inhérente à l’occidentalité qui engendra la notion de race telle que nous la connaissons aujourd’hui. C’est à sa domination que l’on doit la racialisation des corps et des imaginaires. L’Occident ne se limite plus aux groupes humains ayant leurs racines en Europe de l’Ouest, bien qu’ils soient à l’origine de ce système et en restent les premiers bénéficiaires. L’Occident, c’est aussi la manière dont l’esprit qui a donné le jour à ce phénomène, se déployant à travers la planète en raison de l’influence coloniale, s’est acclimaté pour transformer la vision que l’on avait du monde, de soi dans le monde. P26,27
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Qui songe à se passer des denrées coloniales que sont le café, le cacao, le thé ? Le premier repas du jour, y compris dans les demeures des nationalistes les plus résolus, consacre la longue incorporation de l’autre en soi. C’est à l’époque des conquêtes européennes et de l’esclavage que les produits coloniaux prennent place dans le quotidien des français et deviennent indispensables. Ils se naturalisent au point que l’on oublie les humains exploités au loin pour l’obtention de ces douceurs. En 1792, les Parisiens modestes prennent d’assaut les réserves de sucre des négociants, se livrant à un pillage en règle. Pas une pensée ne leur vient pour les insurgés de Saint-Domingue – qui deviendra Haïti – dont la révolution, qui débute en août 1791, cause la pénurie et la hausse des prix. Pourtant, le corps invisible des esclavagisés, leur souffrance et les ressources qu’ils mobilisent afin de contrer la violence qui leur est faite, sont ingérés par les consommateurs de sucre. Depuis, la chair des uns ne cesse de se mêler à celle des autres. Ce processus est bien plus profond que le croisement conçu par l’acception originelle du terme métissage. Les parisiens d’autrefois n’étaient pas pires que ceux d’aujourd’hui qui se massent à l’aurore devant les Apple Stores, sans une pensée pour les Congolais dont le labeur et souvent la mort irriguent les outils technologiques dernier cri. Même dysfonctionnelle, trop asymétrique, la relation entre les peuples est établie. Elle n ‘est pas la rencontre souhaitée, mais sa réalité ne se dément pas. Les plaintes, les éructations, n’y changeront rien. P60,61
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Vidéo de Léonora Miano
Romancière, essayiste, prix Médicis en 2013, Léonora Miano s'interroge dans son nouveau livre sur ce qu'elle nomme « le problème blanc » et la blanchité. de quoi décontenancer tous ceux qui veulent évacuer la question fondamentale du racisme et du colonialisme. Entretien dans « À l'air libre », où il est aussi question de mémoire, de migrations et du couple hétérosexuel.
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