Quel vaste sujet ! Je ne peux que vous encourager à découvrir cet ouvrage tant il éclaire sur le deuil et la façon de percevoir la mort d'un pays à un autre (voir d'un continent à l'autre) en fonction des croyances religieuses, des traditions ancestrales, des contraintes géographiques et sociales.
Je ne vais pas pouvoir entrer dans les détails. Il y aurait tant à dire sur les rites funéraires (rites de passage, rites de deuil qui n'existent plus guère en France, rites de commémoration), sur les symboles aperçus sur les différents monuments funéraires (croix de toutes sortes, inscriptions, sculptures...), sur la forme même des monuments, voire sur leur absence.
Ce qui ressort de cette étude, c'est le désir des vivants de répondre à l'angoisse de la mort, d'offrir au défunt aimé une sorte de vie éternelle par le biais du monument funéraire. Le cimetière est donc le miroir d'une société, de ses croyances, de ses rites, de son passé historique mais surtout aussi de la cellule familiale.
Les photos sont magnifiques d'humanité. Si elles ne sont pas techniquement des plus recherchées, elles sont en tout cas très démonstratives et révèlent le secret de chacune des sépultures photographiées. Les cimetières du monde entier s'offrent à nous ; chaque continent étant très bien représenté.
Je me dois cependant d'apporter quelques bémols à ma critique élogieuse.
D'abord je me suis beaucoup énervée face à toutes ces virgules mal placées. Ce phénomène m'énerve d'autant plus dans une oeuvre littéraire ! Il faudrait lire Et si on dansait ? d'Erik Orsenna...
Ensuite, je regrette les envolées philosophiques de Jean-Pierre Mohen. L'auteur s'écoute clairement parler (ou se regarde écrire) : du coup il manque de clarté dans son propos et finit par perdre un peu son lecteur.
Enfin, il est dommage que les photos, très éclairantes, n'aient aucun lien avec le texte. Lorsque celui-ci nous parle de rites africains par exemple, on se retrouve avec des photos de cimetières norvégiens... Pour ma part, j'ai donc décidé de lire d'abord l'étude de Jean-Pierre Mohen avant de m'attarder sur les photographies de Jean-Claude Garnier.
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D'après J.-H. Déchaux (1997), l'idée qui prédomine chez les occidentaux contemporains, dans ce mouvement de personnalisation de la mort et de ses rites, est qu'il faut "réussir sa sortie", la mort étant l'ultime accomplissement de la présence terrestre. L'auteur pense que les efforts déployés en faveur des soins palliatifs et de l'accompagnement des mourants se situent dans cette optique. Mourir, c'est aujourd'hui pour beaucoup finir dignement sa vie, sans passage particulier dans un autre monde.
La philosophie laïque de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, qui défend à Paris le maintien du Père-Lachaise au sein de l'agglomération des banlieues galopantes, justifie son point de vue en magnifiant la proximité des morts et des vivants : "L'homme prolonge au-delà de la mort ceux qui ont succombé avant lui. (...) Cette propriété de la nature humaine (...) nous fait assez affectueux et assez intelligents pour aimer des êtres qui ne sont plus, pour les arracher au néant, et pour leur créer en nous-mêmes cette seconde existence qui, sans doute, est la seule véritable immortalité". Dr Robinet (1869), cité par Philippe Ariès (1977, p. 251)