PHILIPPE MONCHOLe jardin des Anges
Editions la Trace
« Une cafetière italienne, un chat qui ressemble à un lion, un jardin ayant vocation, et pour cause, d'accueillir les « Ange », (Anghiulu, Malak), les « Séraphines (Séraphine l'institutrice, Celle de la brasserie des miroirs, la sirène bleue, Sera...) », les « Pierre » (Pierre, Pietru, Petrus), et un décor immédiatement planté pour un voyage à travers les siècles. Autant de personnages doublés, triplés, sautillant d'une époque à l'autre et se moquant bien des barrières du temps.
Et nous voici nous-mêmes embarqués dans le « train du sommeil », là où le rêve empiète sur la réalité, là où la réalité surgit comme dans un rêve, dans un décor de pruniers et de clémentiniers.
« La suprématie de la musique recouvre la plage sans miroirs. Deux êtres marchent et font connaissance. Il n'y a rien de plus simple. »
Et Miché l'ami artiste peut bien fouiller le passé, pour essayer de trouver un certaine logique dans cet univers onirique fait de tortues de mer, de poissons-lune, de trésors trouvés, (bouton de marin, broche romaine ou pièces arabes), de capitaines et de pirates, de femmes-sirènes et de légionnaires romains.
Tout comme l'auteur nous entraîne dans ses songes, s'immergeant dans les scènes historiques comme on plongerait dans une temporalité devenue élastique.
« Dans la fureur des combats que les hommes se livrent, résistent des mots écrits, des phrases bleutées, des poésies qui les retiennent à la vie ».
Très curieusement, la perception du rêveur finit par supplanter celle de l'ami Miché explorateur et découvreur du passé. Comme si l'univers des songes pouvait être ressenti de façon plus réelle que l'évocation des faits. La troisième voie serait-elle celle de la poésie qui permet aux deux mondes de se croiser ?
La solitude est-elle l'habit de lumière capable de nous transporter, agit-elle à la manière d'une double-peau, d'une double-vue, devenant la clef d'accès aux mondes parallèles, aux portes des rêves, aux interstices du réel ? « Heureusement, il y a Bach »...
L'univers de
Philippe Moncho nous propose un passé revisité, un présent effleuré, un avenir fantasmé dans un livre bouteille à la mer, pigeon voyageur transportant un message à une mystérieuse dulcinée.
Ses mots ont une rondeur tout à fait spécifique, leur poésie est gorgée de douceur. Jusqu'à ce « vous » respectueux utilisé pour s'adresser à la femme aimée, mais aussi au chat-lion, sauf lorsqu'il exagère, et qu'un passage au « tu » s'impose, pour marquer sa désapprobation.
« Il est tellement doux ce vous. Rond, chaud, séduisant. Il roucoule, ronronne dans le palais, se roule en boule sur la langue.... »
Alors, peut-on se soustraire à une invitation dans
le jardin des Anges, et refuser le café amicalement proposé, comme promesse supplémentaire de bienveillance ?
Une invitation qu'à mon tour j'aimerai vous proposer, tant il est important de partager ce qui est beau, dans un jardin où le langage est poésie et l'univers enchanté.
Rachel