« Un cirque passa au loin.
La voix dans le haut-parleur cria :
«
Sentimento, le cirque des pays chauds !
Venez réchauffer vos coeurs glacés par l'hiver au cirque
Sen-ti-men-to ! »
Sentimento, c'est un beau nom ! Il réchauffe… Il s'appellera donc
Sentimento !
Tout à commencer une nuit dans l'atelier de Monsieur Stein, un marionnettiste douée de magie. Pour s'occuper et s'offrir de la compagnie, Monsieur Stein fabrique en cachette des marionnettes qui prennent vie. Il y a eu une jolie poupée, mais son coeur n'a pas résisté, il y a eu un chien, mais trop bruyant, trop réel, il a été démonté, et il y a eu… lui, le monstre qui fait peur à tout le monde.
Le projet de Monsieur Stein était de créer un personnage conforme à sa personne, une sorte de jumeau qu'il aurait aimé comme un frère. Il a commencé par la structure en taillant dans du bois une silhouette grossière qu'il a laissée provisoirement pour lui donner la parole en incrustant dans la bouche des boîtes à musique. Puis, il lui a mis un cerveau avec des mécanismes d'horlogerie très sophistiqués. La soirée étant avancée, il a cessé de le travailler pour aller dormir, pensant le continuer à son réveil. Mais durant la nuit, la créature s'est mise à vivre… et le lendemain, il était déjà trop tard pour terminer le travail. La réaction de Monsieur Stein fut violente. La répulsion qu'il ressentait vis à vis de l'androïde était sans limite et définitive. Pauvre chose mi-humaine !
Devant tant de virulence, la marionnette quitte son créateur et découvre une société hostile.
Sentimento… si doux, si beau, se voit chasser par tout le monde. A leurs yeux, il est un monstre. Après avoir parcouru la ville, dans le froid et la solitude, il part vers la campagne et rencontre une petite fille qui se nomme Selma.
Selma n'a pas peur de lui, elle va même lui avouer quelque chose… pour que la magie continue…
L'histoire de
Sentimento est triste car l'automate connaît une fin tragique.
Carl Norac qui raconte si bien
Les mots doux dans d'autres albums, nous offre un conte à la poésie douce et chagrine sur les différences. Les phénomènes de foire, lorsqu'ils ne sont pas enfermés, suscitent le rejet. Plus que la répugnance, c'est l'appréhension.
Sentimento porte bien son nom car même s'il n'a pas de coeur, il est nanti d'une belle palette de sentiments. Avec Selma, l'auteur apporte la part de rêve, de partage, de foi, d'innocence et d'amour. L'âme égarée de
Sentimento aura eu le bonheur de la connaître.
Avec les illustrations de
Rebecca Dautremer, l'album prend une dimension envoûtante. Les mots défilent… émouvant, délicat, sensible.
Un texte, des dessins, une fusion parfaite. Je vous la recommande.