La masure de ma mère

« Ma mère s'appelait Lise ». Dès cette première phrase, le ton est donné. Ce court ouvrage est celui de Lise, la mère de Jeannine Ogor qui plonge au coeur de son histoire pour raconter sa vie. Par manque d'argent, Lise doit quitter sa famille, et devient gardienne de vaches chez le maître. Son regard se porte sur tout ce qui l'entoure, sur les relations sociales, la fracture qui existe entre les riches et les pauvres. Elle découvre le monde et tisse des liens, profonds, sincères avec les uns et les autres. Ils marqueront sa vie. Livre-mémoires, livre-souvenir, La masure de ma mère n'est pas qu'un récit de vie. C'est aussi celui de l'intimité d'une région, austère, rude, où les différences sociales sont très ancrées, où donner la vie peut-être une condamnation sociale. C'est le livre de la vie, de l'amour, de la colère, de la haine aussi.

Si le récit m'a déstabilisée lors des première pages (la langue est simple, âpre parfois, à l'image de la campagne du Bas-Léon de ce début de XXème siècle), je me suis vite retrouvée prisonnière de ces pages joliment illustrées, et la toute dernière m'a même arrachée une larme. Ce récit sans fioritures fait mouche, il va droit au but, et l'histoire de Lise m'a beaucoup touchée. Sans doute y ai-je trouvé un écho de la vie de ma Mémé.

Décidément, Babelio est source de bien belles découvertes.

Merci infiniment à Pierre Krause et à la Masse Critique Babelio qui m'ont permis, encore une fois, d'avoir un très agréable moment de lecture.
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Tragique, émouvant, ce récit n'est pas un roman mais plutôt un témoignage, une biographie. Avec ses mots et ce qu'on lui a raconté, Jeanine Ogor nous raconte ici l'enfance de sa mère dans la campagne bretonne au début du XXe siècle. Son récit a été enrichi des connaissances de Jean Rohou, universaitaire ayant écrit plusieurs livres sur la Bretagne, la religion, les inégalités...



On a du mal à imaginer que la vie pouvait être si rude en France, il n'y a de cela pas si longtemps, et pourtant... La famille de Lise n'a pas beaucoup d'argent et sa mère, veuve, peine à s'en sortir, alors la fillette est envoyée chez un oncle, un riche fermier. Elle va vivre chez lui et gardera les vaches. Elle ne sera bien sûr pas payée pour son travail, mais elle aura un toit au-dessus de la tête et pourra manger à sa faim, ce qui à cette époque et dans cet endroit était déjà une chance. C'est dans cet endroit qu'elle va grandir, rencontrer de belles et de mauvaises personnes, découvrir la vie...



Les conditions de vie sont rudes et pourtant, il y a pire ailleurs nous dit-on. Lise nous décrit son quotidien. Ce regard d'enfant innocent porté sur les choses de la vie est touchant. Mais la pauvre petite ne récolte que des claques lorsqu'elle ose poser des questions. Alors, elle observe, essaie de comprendre le monde qui l'entoure mais constate des incohérences chez les adultes et les hommes d'église qui font eux-mêmes ce qu'ils condamnent chez les autres... On apprend avec elle la fin de la guerre, le retour des hommes mutilés. On s'attendrit de sa curiosité et de sa peur face à des choses qui lui semblent terrifiantes mais fascinantes : les trains, les avions...

On apprend beaucoup de choses sur les moeurs de l'époque : le folklore local, la peur du diable, les lits clos qui ressemblaient à des armoires et offraient un peu d'intimité à ceux qui dormaient dans la même pièce (je n'en avais jamais entendu parler avant), les enfants livrés à eux-mêmes et ne mangeant pas à leur faim, les épidémies qui déciment des villages entiers, les demandes en mariage orchestrées de A à Z pour ne pas tomber dans le déshonneur, les enfants qui récitent des prières apprises par coeur mais dont ils ne comprennent pas un mot, les amants illégitimes et les maîtres qui couchent avec les servantes, les filles-mères tombées amoureuses de beaux marins, les faiseuses d'anges et les matrones, les prostituées de la rue de Siam et les virées à Brest des hommes mariés. Quel tableau !



Mais ne vous y trompez-pas, tout n'est pas triste et sombre et la petite Lise est pleine de candeur et d'optimisme. Il y a les veillées au coin du feu, les repas de fêtes, les tartines de pain au beurre salé servies avec du bon lait frais, les histoires de korrigans, d'Ankou, de fantômes et de marins qui se transmettent de génération en génération, les descriptions de paysages et les mots bien particuliers qu'utilisent les bretons pour décrire la pluie et le vent. J'ai beaucoup aimé ce récit émouvant et instructif. Il est ponctué d'anecdotes, de notes intéressantes et précieuses, de mots en breton (traduits, bien sûr), d'illustrations en noir et blanc qui m'ont beaucoup plu et qui ont été réalisées par David Cren, et même de recettes de cuisine ! Quelle bonne idée !

En quelques mots :

"La Masure de ma mère" est un très beau livre. C'est un bel hommage que rend Jeanine Ogor en racontant au monde l'enfance de sa maman dans la campagne bretonne du début du XXème siècle. Les anecdotes et informations apportées par Jean Rohou sont précieuses et passionnantes et les illustrations de David Cren nous transportent dans le temps. C'est tout un univers, une part de l'Histoire qu'on ne connaît malheureusement pas assez qui s'ouvre à nous. Une belle lecture, enrichissante et pleine d'émotions.

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Un visage triste, comme taillé à la serpe nous interpelle sur cette couverture. En la dépliant on aperçoit la masure, masure qui rime avec misère.
Ce roman est un témoignage, l'histoire d'une petite fille de 11 ans placé chez des fermiers dans cette campagne bretonne du début du siècle dernier. Il n'y a pas si longtemps donc, et pourtant on a l'impression d'avoir fait un bond immense dans le temps.
Une famille pauvre, les lits clos, la garde des vaches toute la journée dans les près. A meubler son ennui. Lise a quitté sa famille, par manque d'argent. Lise y découvrira les mystères de la vie, y recevra de la tendresse et de la haine...
Jeanine Ogor livre là son premier récit. L'histoire de sa mère.
En courts chapitres numérotés, largement illustrés au crayon noir, on retrouve dans ses lignes le charme de la Bretagne, une région assez unique. Après il y a l'histoire, des coucheries, des enfants qui n'ont aucun droits, des bâtards marqués dès la naissance, des maîtres gentils ou sournois et les serviteurs. Et puis les curés, omniprésents avec la religion qui commande tout. Étranges curés.... On a du mal à croire à tant de perfidie...
Un livre souvenir, pour découvrir une époque pas jolie-jolie dans ce Bas-Léon. Entre renseignements divers et histoires étonnantes il se lit facilement. L'histoire de Lise est touchante.

Merci à Babélio et la librairie dialogue pour cet envoi. ( accompagné d'un marque-page Charlie)

Un très beau témoignage sur la vie en Bretagne au début du 20ème siècle. C'est vivant, authentique, troublant, dans une belle simplicité d'écriture, avec de belles gravures en noir et blanc qui parsèment le livre et lui apportent du charme. Les personnages sont bien campés et à travers le regard de cette petite fille l'histoire nous touche profondément. C'était hier et si proche de nous...