Manteg
à Daniel Boukman
5
Et peut-être faudra-t-il embrasser la terre de cendres
et descendre les escaliers de marbre ;
peut-être faudra-t-il chevaucher le cheval de misère
jusqu’au bord de la dernière mer ;
peut-être faudra-t-il combattre et tourner en rond
derrière son ombre !...
Aléliron ! Aléliron pour une ronde !
La ronde de l’homme-cerf-volant
qui virevolte après le vent.
Et vent sont les mots,
Et vent est la musique
et vent tout ce qui donne des ailes, Aléliron !
Aléliron pour l’homme-serpent
car il est celui qui sait s’enrouler sur lui-même et se mordre la queue ;
car il est celui qui sait changer de peau
et sait danser comme une flamme.
Aléliron !
Aléliron pour l’homme-cabri !
Car il est celui qui a le pied léger
et qui peut sauter de roche en roche
sur les roches des falaises ;
car il est celui qui peut vivre suspendu entre soleil et tuf,
Aléliron !
L’homme-du milieu du jour c’est celui qui sait
le temps de toute chose
« Aléliron !
L’homme est seul dans une ronde.
Aléliron !
L’homme est tout seul dans une ronde »,
Dit l’homme du milieu du jour. Dit encore :
« Fuis ! Fuis loin de tous les chemins qui mènent
dans le ventre de la Mort dévoreuse !
Car le pouvoir est ombre. L’ombre de l’homme. »
//Monchoachi (1946 -)
« ... INDÉFINIMENT MA JOIE » //C
Les vents ultimes cousaient leurs violences
pourléchaient semblablement les sables
les poètes comptaient l’iambe et l’anapeste
trafiquaient leur pidgin de contre-
bande, signaient
saignent, bricolent
« Ventre affamé n’a point d’oseille »
Ca n’empêche pas la monnaie de la pluie, ni les ressou-
venirs (moi je connais un talus gauche...)
les ressouvenirs, le saute-mouton clandestin
du bonheur
Les vents dérapent sur les haies
la mer heureuse se déride
passagèrement et j’y vais, j’y vais.
Gare aux murs.
31 octobre – 1er novembre 1972
//Henri Droguet (29/10/1944 -)
Manteg
à Daniel Boukman
2
La fleur s’est éclose avant le jour
et dans la clarté toute nue de l’aube
venue d’on ne sait où
mais à cheval sur les épaules des siècles
telle une croix, blotti dans les entrailles de l’homme,
dans son corps, sous sa misère,
– sous ses petites misères –
à la pointe de ses combats, dans toutes ses révoltes
au milieu de son rêve de liberté...
Coup de vague en coup de vague
tel un écueil qui reparait semblable à un innocent,
tel un vol d’oiseaux noirs qui étire son ombre sur la terre,
ou alors comme une mer de jours amers
au bord d’une nuit de flamboyants...
... Une colline de marbre dressée sur un horizon
de sueur et de sang !
Qui me dira de quelle mort ces malheureux
portent le deuil ?
Quelle malédiction les afflige ?
Quel masque, de la sorte, empèse leur visage ?
De joug en joug – dans un jour plus profond
que l’écho des cimetières, dans des pierres
plus épaisses que les jours étrangers –
une seule et même grand-roue folle
qui tourne folle
entourée d’une foule de démons prêts à vous bondir dessus
comme des chiens voraces
Qui sait ?
Car l’homme était à la mesure de l’homme,
même si son regard ne dépassait pas
les frontières de sa vie !
Car le temps ne comptait pas encore le temps
comme un défilé de petites tombes,
comme une procession de petites morts !
C’est l’homme de misère qui est le devenir de l’homme
avec sa couleur de terre brûlée, et dans ses yeux
une désolation infinie.
//Monchoachi (1946 -)
Pour l’exemple
extrait 4
Je me tais
l’eau passe sous les arches
je me tais
ici l’on ne fait plus le pain
et toi tu cherches, dis,
nuageux,
le tweed des rivières pérennes
et toi tu cherches, dis,
l’odeur des granges remembrées
la pluie en long
en large en travers
et moi je cherche, dis,
la très ancienne enfance
le chant interminé de l’archipel
et de la mort envisagée
et moi je cherche, dis,
là-bas l’oliveraie
et tu te tais, dis,
tu te tais.
9 – 10 novembre 1974
//Henri Droguet (29/10/1944 -)
Manteg
à Daniel Boukman
4
Si la vie dans la vie trouve sa promesse
– et la promesse de la vie est une ronde sans fin,
un commencement commencé à chaque instant
dans chaque semence, dans chaque fleur
comme une ronde d’étoiles dans un rêve d’enfant –
Si la terre dans la terre porte sa floraison
et jusqu’en sa source
arrache au frémissement de sa chair
un chapelet de musique cristalline
Si le vent dans le vent court après le temps,
sur la volée de la feuille,
et le saisit dans les stigmates de la pierre
Si le feu est flamme dans les entrailles de la terre
et éclair dans la déchirure du ciel
Si la mer dans la mer roule son écume de sel –
Et que moi-même
au fond de la mer de sel
veuille plonger
et renaître avec des ailes
et plus loin, et plus haut
tournoyer.
Le chemin de l’homme n’est pas dans l’homme
mais au-delà
//Monchoachi (1946 -)
A l'occasion du Festival de Nancy "Le livre sur la place" 2022, Bernard Chambaz vous présente son ouvrage "La peau du dos" aux éditions du sous-sol. Rentrée littéraire automne 2022.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2640417/bernard-chambaz-la-peau-du-dos
Note de musique : © mollat
Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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