J'entreprends Les Enquêtes de la Belle Époque d'
Alice Quinn par le tome 3, le Carnet volé, ignorant que ce roman faisait partie d'une série. Heureusement, les trois opus peuvent se lire séparément !
Un titre à la tonalité surannée, surtout si l'on sait que les deux premières enquêtes s'intitulent La Lettre froissée et
le Portrait brisé…
Des personnages principaux communs sur les trois histoires, dont un référentiel :
- Lola, une courtisane, une demi-mondaine, qui mène plutôt bien sa barque…
- Miss Fletcher, une aristocrate anglaise déchue, écrivaine à ses heures…
-
Guy de Maupassant, malade, fatigué, peu de temps avant la tentative de suicide qui précéda son internement que nous voyons sombrer dans la folie qui
lui sera fatale…
Le décor :
Canne, 1891… Un endroit « glamour et superficiel » prisé par les milieux mondains, la diaspora russe, un lieu à la mode de villégiature hivernale avec ses grands hôtels et ses belles demeures… Mais aussi une ville comme une autre avec ses quartiers populaires, ses commerces, sa petite bourgeoisie…
Grasse, même époque, ses entreprises de parfumeurs, sa caserne et sa maison de tolérance…
L'intrigue :
En l'espace de quelques jours, les morts accidentelles au sein de la bourgeoisie cannoise se succèdent et défrayent les chroniques : incendie, suicide, chute mortelle… Basile Mouron, un jeune saute-ruisseau, est accusé d'attentat terroriste par un brigadier corrompu ; plus tard, il meurt, assassiné, dans les bras de Lola et, juste avant,
lui confie un mystérieux carnet et
lui fait promettre de retrouver Thérésine, sa soeur disparue.
Lola, Miss Fletcher et
Maupassant se lancent à corps perdu dans l'enquête. Rapidement, ils découvrent que les accidents ressemblent plutôt à des meurtres déguisés. Mais quel est le rapport avec les enfants Mouron ?
Une lecture rafraichissante que j'ai beaucoup appréciée…
L'écriture est dynamique, enlevée… Les péripéties s'enchainent avec un bon rythme et les ressentis des personnages sont décrits avec pertinence et naturel. le récit est à la première personne puisque la narratrice n'est autre que Miss Fletcher, mais cette dernière révèle son rôle d'autrice intra-diégétique et mêle habilement les évènements dont elle est partie prenante et ceux qui se passent sans elle, donnant un effet de perspective original à son récit.
Alice Quinn a fait un véritable travail sur la période au cours de laquelle prend place son histoire, ménageant un bon équilibre entre faits avérés, autour
De Maupassant et des milieux littéraires, et fiction. La folie et le décès
De Maupassant auréolent le récit d'une aura mélancolique et mortifère.
J'ai été particulièrement sensible aux portraits de femmes, personnages principaux et secondaires de ce roman. L'autrice mêle anecdotes révélatrices et peinture d'une société machiste ; ainsi, nous apprenons qu'en 1891, une femme qui porte le pantalon risque la prison sauf si elle a fait une demande auprès de la préfecture pour, éventuellement, faire du vélocipède…
Alice Quinn nous donne à lire des représentations fidèles et réalistes de catégories de femmes dont, habituellement, les milieux ne se mélangent pas : une fille perdue ou courtisane, une ouvrière courageuse et abusée, des femmes du peuples, une bourgeoise cossue, une aristocrate déchue au passé trouble… Lola et Miss Fletcher sont des femmes qui n'acceptent pas leur condition et qui vivent en marge des codes de la bonne société où le mariage reste la meilleure solution.
À côté du possible mariage de raison de Lola, la passion entre Miss Fletcher et Fedora, l'amour secret du journaliste pour la courtisane et les émois mutuels de Mario et Anna ajoutent un petit côté romance à la noirceur des meurtres et des agressions décrits.
Ce roman est le dernier de la trilogie et les personnages principaux s'envolent vers d'autres destins et perspectives… Peut-être lirai-je, à l'occasion, les deux premières enquêtes auxquelles le Carnet volé fait parfois allusion…
Cette lecture, grâce à NetGalley, fut une très belle découverte…
#LeCarnetvolé #NetGalleyFrance
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