Avec ce texte, Emmanuel Reignez décrit dans un style saccadé, haletant, les derniers instants de
Claude Debussy, s'attelant à son dernier oeuvre, son grand projet : un opéra adapté de
la Chute de la maison Usher, la nouvelle d'
Edgar Allan Poe. L'auteur, ici, adepte du conte noir (lire ses précédents livre dont le court et excellent La Fêlure, clin d'oeil notamment à Fitzgerald), dépeint ce combat entre la beauté et la mort,
la création et la folie destructrice, la réunion des opposés ou comme l'écrivait
Baudelaire dans son poème
La Charogne : « Si la vie vous excite, son opposé, telle une
ombre, la mort, doit vous exciter ». Si l'oeuvre de Debussy reste inachevée, il y a les mots de Reigniez pour combler un partie du vide : « La musique, c'est du rêve. C'est du rêve dont on écarte les voiles. La musique n'est pas l'expression d'une émotion, c'est l'émotion même. Elle est au-delà de la pensée, elle est là pour forcer les gens à écouter, malgré eux, qu'elle est là pour les libérer qu'elle les fait aller dans un pays chimérique, introuvable, celui de l'émotion, de l'émotion pure. » Malade, souffrant, et alors que la première guerre mondiale éclate, Debussy choisi la musique contre l'effondrement du monde et de son corps, de la douleur et de la mort. Il choisi l'expression de la beauté et l'excitation de
la création. Avec
Au bord du lit, Reigniez renoue avec la littérature gothique tout en donnant dans l'exofiction (tel
Echenoz et son
Ravel) ainsi que l'hommage, tant à Debuddy qu'à
Poe et, indirectement et forcément : à
Baudelaire. le texte de Reigniez est suivi de celui de
Poe d'ailleurs, dans la traduction de l'auteur des Fleurs du Mal. Un bien beau livre, d'une rare singularité.