En octobre 2020
Samuel Paty, professeur d'histoire, est assassiné par un islamiste tchétchène bénéficiant du statut de réfugié politique. En avril 2021 le gouvernement, à l'initiative de
Marlène Schiappa, crée (avec nos impôts) le fonds Marianne (2,5 millions d'euros) pour financer des projets voués à « défendre les valeurs républicaines » et «combattre les discours séparatistes ».
En mars 2023, France 2, Marianne et Mediapart s'insurgent contre les contrats signés par le fonds … le Sénat crée le mercredi 3 mai une commission d'enquête et la justice ouvre une information judiciaire pour «détournement de fonds publics par négligence». Les conclusions de la commission d'enquête sont accablantes (non respect de la législation sur les marchés publics ; favoritisme ; amateurisme) et Marlène Schippa sort du gouvernement.
17 associations ont profité de ce fonds Marianne qui a versé 340 000 euros à
Mohamed Sifaoui dirigeant l'UEPPM (l'Union d'éducation physique et de préparation militaire) ;
Rudy Reichstadt et son site Conspiracy Watch ont touché 60 000 euros pour la « production de notices d'information sur de grands thèmes complotistes », audité au Sénat, il indique que le budget de Conspiracy Watch est d'environ 203 000 €, financé à près de 50 % par des subventions publiques.
C'est dans ce contexte que j'ai analysé « Au coeur du complot » publié en mars 2023, juste avant la révélation du scandale Marianne.
Son auteur
Rudy Reichstadt a débuté en 2004 comme rapporteur à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) avant de devenir chef de bureau des affaires financières au sein de la direction de la jeunesse et des sports de la mairie de Paris. En parallèle il crée en 2005 un observatoire du conspirationisme et en 2007 le blog Conspiracy Watch et dispose d'une tribune dans Franc Tireur, journal de
Caroline Fourest et
Raphael Enthoven depuis 2021.
Dans son essai, l'auteur revient sur son passage à la Cour nationale du droit d'asile, « une école d'humilité » (p 21) « car tout compte fait, on ne sait pas, on ne sait jamais. On peut avoir une certitude (…) d'être mené en bateau. » mais il n'exprime ni doute sur son aptitude à découvrir les comploteurs, ni regret d'avoir pu contribuer à l'entrée en France de terroristes comme Abdoullakh Anzorov le bourreau de
Samuel Paty. Nous ne sommes plus à l'époque du « responsable, mais pas coupable » (
Georgina Dufoix, 4 novembre 1991), sommes-nous à l'ère du naïf incompétent et irresponsable ?
Dans le chapitre 4, l'auteur précise que son site bénéficie d'une subvention annuelle versée par la Fondation pour la Mémoire de la Shoah (FMS) depuis 2017. Son site internet évoque une subvention de la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH) depuis 2018. Nulle référence au fonds Marianne.
Dans les chapitres suivants, Conspiracy Watch est présentée comme la référence incontournable en ce qui concerne la dénonciation du complotisme, mais
Julien Giry, chercheur associé à l'université de Rennes et membre de groupes de recherche internationaux étudiant les théories du complot, juge que le site Conspiracy Watch produit « un discours anticonspi qui dramatise la situation et permet de légitimer son existence. le résultat n'est ni rigoureux ni neutre, comme cela a été largement démontré au travers de leurs études. » et cite en référence l'étude de Conspiracy Watch en collaboration avec la
Fondation Jean-Jaurès et l'IFOP, publié en 2018 qui annonçait que « 79 % des Français croyaient au moins à une théorie du complot » jugeant des questions parfois vagues, pouvant prêter à confusion, qui mêlent complots en tout genre, confiance dans les médias et croyance au paranormal.
Au coeur du complot est présenté comme le brouillon d'un futur projet plus épais, plus solide, plus argumenté et l'auteur conclut « demandez vous si je ne mérite pas le bénéfice du doute ? ».
Attendons ce prochain livre qui nous livrera son point de vue sur le fonds Marianne et sera sans doute aussi séduisant que l'interview de
Marlène Schiappa dans Playboy en avril dernier !