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Anne-Frédérique Rochat (Autre)
EAN : 9782832110386
190 pages
Slatkine (12/03/2021)
3.83/5   9 notes
Résumé :
À la suite d’une rupture amoureuse, Edwige passe l’été dans le chalet de montagne de son amie Anne, décidée à savourer la solitude du lieu. Mais un homme, qui se présente sous le nom de Célien, y fait son apparition. Que lui veut-il ? A-t-il été envoyé par Anne ?

Deux êtres contraints de s’apprivoiser, alors que la frontière entre réalité et fantasme se brouille peu à peu. Récit d’une disparition, ce roman questionne les différents liens qui jalonnent... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Tous ces êtres qui gravitent autour d'Edwige

Pour son huitième roman, Anne-Frédérique Rochat s'est décidée à partir dans la montagne, sur les pas d'Edwige, à qui son amie a confié les clés d'un chalet. Un endroit isolé, mais qui ne va pas tarder à grouiller de monde, réel ou imaginaire.

Après une difficile rupture amoureuse, Anne propose à son amie Edwige de venir se ressourcer dans son chalet de montagne. Mais à peine arrivée, elle est prise d'une terrible angoisse. Ce ne sont pas les bruits de la nature alentour qui l'effraient, mais l'apparition d'un étranger. Ce dernier n'arrive pas pour la voler, comme elle le craignait, mais s'installe dans le chalet. Il lui faut alors sortir de sous le lit où elle s'était cachée et affronter cet homme qui affirme s'appeler Célien et bien connaître Anne. le dernier car postal étant passé, elle va être contraindre de passer la nuit avec cet étranger et, faisant contre mauvaise fortune bon coeur, partage avec lui la vin qu'elle venait d'acheter au village.
«Et finalement la bouteille de rouge se vida au rythme des confidences d'Edwige, qui avait toujours eu l'alcool bavard; elle parla d'Andri, de leur rupture, du déchirement qu'elle avait ressenti, de l'immense tristesse qui souvent la submergeait. Célien écoutait. Il semblait avoir un don pour cela. Écouter et hocher la tête d'une façon qui vous faisait penser que ce que vous disiez était essentiel et très pertinent. Ils allumèrent des bougies, finirent le pain et le fromage, ouvrirent la deuxième bouteille.»
Au lieu de regagner son appartement, comme elle l'envisageait la veille, elle décide de rester et de profiter de la présence somme toute apaisante de cet homme, même s'il est très mystérieux, lui expliquant par exemple à Edwige qu'il sent la présence de sa mère dans le chalet. Après avoir partagé leurs repas, Célien propose à Edwige de l'emmener danser à la fête du village et l'invite quelques jours après à une balade en forêt. Les liens entre eux se tissent, même s'il n'est nullement question d'amour et encore moins de sexe. Grâce à son hôte qui l'invite à lâcher prise, à accepter de dialoguer avec les personnes qui la hantent, elle va retrouver père et mère, mais aussi des proches. La tension dramatique devient alors de plus en plus forte…
Anne-Frédérique Rochat explore depuis maintenant de longues années ces moments de fragilité, ces instants qui font que dans une vie tout peut soudain basculer. Dans le chant du canari c'était ce petit grain de sable qui vient gripper l'harmonie du couple formé par Violaine et Anatole, dans L'autre Edgar c'était la découverte d'un frère disparu, dans La ferme (vue de nuit), c'étaient les retrouvailles, quinze années après leur séparation, d'Annie et Étienne. Cette fois, la faille est plus profonde, creusée de la douleur de l'abandon. Cette fois le travail de reconstruction est plus difficile, entre croyances et incrédulité, entre rêves et cauchemars, le tout baigné d'une atmosphère animale et minérale. Et si vous croisez un lapin blanc, méfiez-vous!


Lien : https://collectiondelivres.w..
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[SERVICE PRESSE]


Longues nuits et petits jours de Anne-Frédérique Rochat


Je remercie Babelio et Slatkine pour l'envoi


Mon résumé :

Pour se remettre d'une rupture douloureuse, Edwige décide d'aller passer ses vacances dans le chalet de son amie, Anne. Au coeur de la forêt, la jeune femme est certaine que cela ne pourra que lui faire que du bien. Qu'elle n'est pas sa surprise, lorsque débarque Celien, un homme un peu bourru, et somme toute assez bizarre.

Edwige est une jeune femme blessée. Son compagne ayant rompu, elle se voit proposer de passer ses vacances dans le chalet de son amie, Anne, elle-même en vacances à l'étranger. Entourée de verdure et de silence, Edwige s'ennuie rapidement.

Celien est un homme d'une quarantaine d'année. Bourru, il semble un peu intriguant et surtout, il semble taper juste à chaque fois qu'il discute avec Edwige.


Mon ressenti final :

Une lecture plutôt surprenante.

Bon… Comment te dire… Sur la forme, ce fut une lecture plutôt agréable. L'idée de base est plutôt commune, mais en même temps, j'ai bien aimé le démarrage. La rencontre entre les deux personnages est assez sympa et j'avoue que Célien m'a plutôt plu. Enfin, au début.

Sur le fond, je n'ai rien compris à l'histoire. Alors, si. J'ai compris le contexte. Edwige sort d'une rupture amoureuse, elle s'isole pour faire le point et ce mec bizarre débarque de nulle part, avec son sac à dos et ses manières bourrues. J'ai compris également que Celien doit être un genre de conscience d'Edwige, avec qui elle converse pour dresser la liste de ce qui part en vrille dans la vie de la jeune femme. Au passage, il creuse dans son passé et des fêlures apparaissent, prenant la forme de la maman adorée d'Edwige.

J'ai plutôt l'esprit cartésien, et je dois avouer qu'on m'a complètement perdue sur l'aspect psychologique du récit. Freud doit se retourner dans sa tome et me traiter d'idiote parce qu'honnêtement, le pourquoi m'a totalement échappé.

Au-delà de cela, le récit en lui même n'est pas désagréable. L'écriture est un peu pompeuse mais ma foi, reste agréable à lire et facile à comprendre. Ce sont les subtilités cachées derrière les mots qui m'ont fait défaut.

Bref, une lecture mitigée car oui, j'ai bien aimé l'histoire en surface et non, parce que ce sentiment d'être idiote et de ne rien comprendre au sujet psychologique m'agace fortement.

Si vous voulez faire le point avec Edwige, c'est ici : https://amzn.to/3nkG2m1
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J'ai adoré ce livre. Je l'ai lu d'une traite, je ne l'ai pas lâché et je remercie les Editions Slatkine grâce à qui j'ai fait une très jolie découverte et qui va me pousser à découvrir d'autres livres de cette autrice suisse.
Après une déception amoureuse, quand on aime la plage et la mer et que l'on ne connait pas la montagne, est-ce une bonne idée d'aller se réfugier dans un chalet paumé au milieu de nulle part, seule et isolée, en plein été ? Un chalet qui a été prêté à Edwige par une collègue, Anne, qui est partie à l'autre bout du monde. N'est-ce pas synonyme d'angoisse ? Quant en plus on se fait insulter par les locaux qui en veulent aux touristes qui abiment la nature, le moins qu'on puisse dire c'est que les vacances commencent plutôt mal… Et si en plus on découvre que l'on va devoir se rationner au niveau lecture (trois livres pour un mois) alors ce n'est pas loin de virer à l'horreur… Il ne reste plus qu'à converser avec les personnages des livres et les faire évoluer pour meubler la solitude, sauf que…
Dès le deuxième jour, un parfait inconnu débarque et s'invite dans le chalet… Il s'installe sans rien demander. Qui est-ce ? Pourquoi est-il là ? Que cache-t-il ? Cet homme répond au joli prénom de Célien : prénom étrange d'origine latine qui vient de caelum qui veut dire ciel. Ce prénom « Célien » , décortiqué, m'a fait penser à « ce lien » en deux mots : Ce lien avec qui ? avec quoi ? avec la nature? le passé ? les disparus ? les événements de la vie ? avec notre moi intérieur ? Ce Célien serait- il un genre d'ange gardien?
Ce séjour s'inscrit entre rêve et réalité, comme hors du temps et de l'espace, mêle souvenirs et mystères, au point qu'Edwige ne sait plus démêler ce qu'elle vit de ce qu'elle imagine, ce qu'elle croit de ce qu'elle invente ; elle baigne dans l'irréel, cherche à se retrouver elle-même, se débat entre rêves et cauchemars, entre souvenirs et imagination. La présence de ce Célien la rassure et l'inquiète, la destabilise à la fois. Il faut impérativement qu'elle lâche prise, qu'elle se libère du poids du passé, qu'elle fasse le deuil de sa mère et de son amour déçu, qu'elle s'accepte comme elle est; mais quand elle ouvre les yeux, la nuit, ou est la frontière entre ce qu'elle ressent, ce qu'elle voit, ce qu'elle croit ?
Accepter qui on est, ce n'est pas facile à avaler, à digérer. C'est comme un repas qui ne passe pas. Il convient d'assimiler, d'intégrer pour, après un moment difficile, se relever et continuer à avancer. Il faut affronter nos démons, de la même manière qu'il faut du courage pour s'enfoncer au plus profond des forêts, au risque de se perdre, de disparaitre…

Ce livre est envoutant et j'ai beaucoup aimé me laisser embarquer dans ce voyage qui allie magie, rêve, questionnements et angoisse… Je vous invite à la poursuite du lapin blanc et à entrer en contact avec… pour savoir, il faudra lire ce livre qui m'a enchantée.
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Je dois avouer que j'ai mis du temps à commencer à écrire cette chronique, j'ai eu besoin de laisser décanter mon ressenti, non pas que je n'ai pas aimé ma lecture - bien au contraire ! - mais c'est un roman assez loin de ce que je lis habituellement.

Anne-Frédérique Rochat nous livre ici un récit rempli de mystères, aux frontières du réel. Cet été-là, Edwige, notre héroïne sensible qui se trouve dans une phase compliquée après une rupture difficile et le décès de sa mère, passe ses vacances dans le chalet de son amie Anne. Elle se retrouve à partager les lieux avec un homme inconnu, Célien. Ce dernier, personnage insondable, a l'air de bien la connaître, évoque des dons que la jeune femme possèderait mais dont elle ignore encore l'existence. Il lui pose plus de questions qu'il n'apporte de réponses ou d'éléments sur sa propre identité.

Une atmosphère très particulière se dégage de ce roman : un été en suspens dans les montagnes suisses, avec comme bruit de fond la forêt environnante, le chant des oiseaux mais aussi des cris d'animaux. Souvent, Edwige rêve de sa mère décédée récemment, mais aussi d'un gros bonhomme et d'un lapin (tour à tour blanc et bien vivant et ensuite mangé ou ensanglanté…). Ces présences sont-elles vraiment réelles ou uniquement le fruit de ses rêves ? Cette forêt de montagne à la belle mousse verdoyante réserverait-elle des surprises ?

L'ambiance mystérieuse de ce roman a su me transporter. La plume de l'auteure rend un bel hommage aux personnes disparues, ainsi qu'à la montagne et à la forêt. La fin laisse planer des doutes. Les questions que j'ai pu me poser tout au long du récit sont restées sans réponse (ou alors j'ai raté quelque chose…). Mais finalement, peu importe à mes yeux car cela restait dans la veine du roman : énigmatique et poétique jusqu'au bout.

En résumé, un beau récit plein de mystères et de sensibilité que je vous recommande !

Lien : https://tasouleslivres.com/l..
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Maman ? Oui ? Pourquoi tu es là ? J'ai vu ton cercueil descendre sous terre !

🦦

190 pages - 13.9 x 1.1 x 21 cm – Parution : Mars 2021 – ME suisse

🦦

Edwige, pourquoi toi ? Tu es jeune, tu es pleine de ressources, pourquoi devoir t'isoler comme ceci ? Pourquoi devoir quitter ton appart et surtout TON CHAT !
Edwige, pourquoi tu te sens si mal ? Pourquoi tu vois des choses ? Tu fais de la fièvre ?
Edwige, penses à toi.
Edwige, pourquoi ne te poses-tu pas de question sur Célien ? Comme Céline mais au masculin ?
Edwige, que fais-tu dans le bois ?

🦦
Alors déjà, disons merci à la Masse Critique de @babelio_ et aux éditions @editionsslatkine pour l'envoi !

Certaines personnes sont au courant, j'ai kiifféééé ce livre ! Etonnamment, le côté philo ne m'a pas rebuté !

Déjà, il se lit super rapidement par sa petitesse (190 pages, on a clairement connu pire que ca !) et parce qu'il est suppperrr intriguant ! Je voulais toujours mais toujours savoir ce qu'il allait se passer.

En y réfléchissant après coup, je me rends compte qu'on a pas vraiment beaucoup de détails sur la vie d'avant d'Edwige et pourtant, cela ne m'a pas du tout dérangé. Je n'ai pas eu l'impression de me perdre dans des millions et milliers de détails inutiles !

L'histoire en elle-même est assez prenante même si elle a un côté WTF. J'ai vraiment trouvé cela pas mal. A l'inverse, je pense pas que cela soit une histoire pour tout le monde certains éléments pourraient, selon moi, heurter !

Concernant la fin, je l'ai trouvé bien et cela m'étonne tellement. Cela ne correspond pas aux fins que je suis habituée à lire maiiiis, je n'ai pas été déçue ou blasée !
C'est vrai que si Edwige se posait un peu plus de questions cela aurait pu être sympa mais je n'ai pas ressenti de réel manque de détail ou de profondeur
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
INCIPIT
Attention aux glissements de terrain. Elle ouvrit les yeux dans un frémissement, son cœur cognait dans sa poitrine de façon chaotique, de la sueur dégoulinait le long du petit sillon que formait — lorsqu’elle était couchée sur le côté — l’écart entre ses seins. Et contre les parois de cette chambre dans laquelle elle dormait pour la première fois résonnait cette phrase, sortie tout droit du rêve, ou du cauchemar, qu’elle venait de faire et dont les images s’évaporaient dans la lumière crue du matin: attention aux glissements de terrain.
Encore ensommeillée, elle se leva: paupières mi-closes et jambes en coton. Chancelante, elle descendit l’escalier, se dirigea vers la cuisine, ouvrit un placard, saisit un verre qu’elle remplit d’eau du robinet, jusqu’à ras bord, et but d’une traite. Existait-il un étanchement plus satisfaisant que celui de la soif? La soif, Bouche sèche et sensation de sable dans le corps. Où donc était passé le sang? Le sang. Le voilà qui coulait de nouveau sous la peau, dans le bleuté un peu inquiétant des veines, après qu'elle eut bu son grand verre d’eau.
Edwige était en vacances. Elle était à la montagne, une montagne accueillante et aride à la fois qu’elle connaissait mal, lui ayant toujours préféré le bord de mer. Pourtant, lorsque son amie et collègue lui avait proposé de lui prêter son adorable chalet pendant l'été - elle-même partant six semaines aux États-Unis -, elle avait dit oui. Anne avait fourni à Edwige par e-mail toute une série d’explications qui lui avaient permis d’arriver sans encombre à destination, d’abord dans le minuscule village, terminus du car postal, puis, après avoir marché une bonne vingtaine de minutes sur un chemin pentu, au chalet. Après un virage, elle l’avait entraperçu, entouré d'arbres, caché, masqué à la vue, ce qui lui plut, bien qu’une légère angoisse l’étreignît: l'endroit respirait la solitude, la grande; serait-elle capable d'y faire face? La clé se trouve dans la lanterne noire accrochée au-dessus de la porte d’entrée. Elle avait dû se mettre sur la pointe des pieds pour l’attraper.
— Après les épreuves que tu as traversées, ça te fera le plus grand bien de te ressourcer.
— Oui, tu as peut-être raison.
— Bien sûr, et c’est l'endroit idéal, tu verras, un véritable paradis!
— Merci, avait-elle dit.
Anne lui avait pris la main et souri.
L'intérieur était simple: une cuisine ouverte sur l’entrée, un salon, des toilettes au rez-de-chaussée; une salle de bains et une chambre à l’étage, qu’on rejoignait grâce à un escalier en bois qui craquait sous vos pas.
Oui, le paradis pouvait ressembler à ce qu’elle voyait depuis la fenêtre de la cuisine ou celle de la chambre, ou par n'importe quelle ouverture. Montagnes, ciel rose et sapins somnolant dans le vent. Le paradis oppressait-il les poumons, lui aussi, si on le regardait trop longtemps?
La journée venait à peine de commencer et Edwige se demandait déjà ce qu’elle allait bien pouvoir en faire. Repose-toi. Il n’y a rien à prévoir, à organiser, repose-toi, c'est tout ce qu’il t'est demandé. Elle déplaça une des chaises de jardin pour attraper les premiers rayons du soleil et s’assit face au vide, face à l’immensité.
À midi, elle se prépara à manger: soupe aux pois, pain et fromage. Elle avait emporté avec elle, dans son sac à dos, de quoi se nourrir pendant un ou deux jours, après elle irait au village, dans la supérette qu'elle avait vue depuis le car, pour garnir les placards.
Son déjeuner terminé, elle fit la vaisselle, puis monta à l'étage s'étendre un moment, tenta de faire une sieste, mais n’y parvint pas. Je peux toujours redescendre, songea-t-elle en voyant les ombres bouger sur le lambris de la chambre, rien ne m’oblige à rester, rien ne me retient, ce doit être un plaisir, sinon à quoi bon. Était-ce un plaisir? Serait-ce un plaisir de rentrer chez elle et de retrouver la blancheur de son appartement? Que valait-il mieux? Le silence de la montagne ou le jacassement de la ville? De quel silence parles-tu? Il n'y a pas de silence, sauf peut-être dedans, tu parles de ton silence, c’est ça? Parce que la montagne, elle, parle, souffle, chuchote, stridule, piaille. Où que tu ailles, ton silence à toi te suivra.
Lorsque la nuit tomba sur la maisonnette en bois, les craquements se multiplièrent. Edwige prit une couverture dans l’armoire murale du salon, s’en enveloppa — par besoin de protection plus que par crainte du froid — et s’installa dans le canapé. Quelque chose courut sur le toit, elle savait que cela pouvait arriver, bien sûr, des bestioles se baladaient sur les ardoises, cela n’avait rien d’inquiétant. Un cri transperça l’obscurité, elle frissonna. Quelle drôle d’idée de venir s’enfermer dans un chalet en plein été! Elle avait toujours préféré la mer pour le bruit des vagues. Une présence renouvelée à chaque instant, flux et reflux permanents. Pas de cris, uniquement celui des mouettes, libre et joli comme un rire. Ce rire, elle aurait aimé l'entendre ici, à la montagne, afin qu’il allège l’atmosphère. Pourquoi n’y avait-il pas de mouettes autour du chalet? Pourquoi chaque chose restait-elle à sa place? Elle rêvait de renversements et de surprises, d’inattendu et d’incohérences. Tout était toujours si prévisible. Elle-même était dramatiquement prévisible. Depuis sa naissance. À la date prévue par le gynécologue, exactement, pas un jour après, pas un jour avant. Que n’avait-elle attendu un peu avant de débarquer! Que n’avait-elle profité du ventre tendre et chaud de sa mère! Si elle avait su. La froideur, et tous ces heurts, que même le rire enjôleur des mouettes ne parvenait pas toujours à effacer. Elle aurait patienté.
Elle se rendit à la cuisine pour se faire une infusion (c'était son rituel du soir, une tisane avant d’aller au lit, histoire de se détendre et de réchauffer son estomac), il y avait de la camomille dans le placard, elle plaça le sachet blanc dans une tasse après l’avoir humé (cela faisait partie du rituel, sentir la bonne odeur de fleur, yeux fermés), attendit à côté de la cuisinière que l'eau bouillit. Cela prit plus de temps que d’habitude, à cause de l'altitude. Lorsque enfin les bulles vinrent agiter la surface, elle versa le contenu de la casserole dans la tasse. Tout irait bien, il était normal qu’elle ressente de l'appréhension, ce n’était pas évident d’être isolée en pleine nature, mais elle était courageuse et méritait de profiter du calme et de la tranquillité du chalet d'Anne.
En remontant le drap jusqu’à son cou, dans la pénombre de la chambre éclairée par une lune presque pleine, elle pensa à toutes les nuits où elle n'avait pas été seule, toutes les nuits d'amour qui l’avaient consolée, soulagée, portée, soulevée, pour un temps - qu'elle avait toujours jugé trop court, car dans sa vie elle avait été quittée plus souvent qu’elle n’avait quitté. Mais ces nuits, toutes ces nuits d’amour, personne ne pouvait les lui retirer, comme les morts, elles rôdaient, l’entouraient, la berçaient.
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Ils firent tinter leurs verres. Et finalement la bouteille de rouge se vida au rythme des confidences d’Edwige, qui avait toujours eu l’alcool bavard; elle parla d’Andri, de leur rupture, du déchirement qu’elle avait ressenti, de l’immense tristesse qui souvent la submergeait. Célien écoutait. Il semblait avoir un don pour cela. Écouter et hocher la tête d’une façon qui vous faisait penser que ce que vous disiez était essentiel et très pertinent. Ils allumèrent des bougies, finirent le pain et le fromage, ouvrirent la deuxième bouteille.
– Je prends les choses trop à cœur, c’est ça mon problème. Tout me heurte, tout, je n’arrive pas à mettre le monde à distance. Ou alors il faut que ce soit géographiquement. p. 33
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Mais ces nuits, toutes ces nuits d'amour, personne ne pouvait les lui retirer, comme les morts, elles rôdaient, l'entouraient, la berçaient.
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A croire que ses mots, avec leurs petites dents crochues, étaient restées plantées dans sa peau et continuaient d’y inoculer leur venin.
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