Au printemps, 1793. — Au château de Sauvières, en Vendée.[1] — Un grand salon riche. — Une grande salle avec escalier au fond.
Scène PREMIÈRE. — LE COMTE DE SAUVIÈRES, ROXANE, LOUISE, M. DE LA TESSONNIÈRE, MARIE HOCHE. La Tessonnière joue aux cartes avec Louise, le comte lit un journal, Roxane parfile, Marie brode.
LE COMTE. Non, ma sœur, non ! on ne rétablira pas la monarchie avec une poignée de paysans.
ROXANE. Une poignée ! ils sont déjà plus de vingt mille sous les armes.
LE COMTE. Fussent-ils cent mille, ils n’y pourront rien. Le roi n’est plus ! — Louis XVI emporte notre dernier espoir dans sa tombe.
LOUISE. Il n’a pas même une tombe !
ROXANE. La royauté est immortelle. Le dauphin règne !
LE COMTE. Dans un cachot !
ROXANE. Délivrons-le ! (Louise, émue, semble approuver sa tante. La Tessonnière donne des signes d’impatience quand elle se distrait de son jeu.)
LE COMTE. Le délivrer, pauvre enfant ! Tenter cela serait le sûr moyen de hâter sa mort. Ah ! les émigrés auront éternellement celle du roi sur la conscience !
ROXANE. Alors, vous ne voulez rien faire ? C’est plus commode, mais c’est lâche ! Ah ! ma nièce, si nous étions des hommes, souffririons-nous ce qui se passe ?
LE COMTE. Louise, réponds, mon enfant : que ferais-tu ? (Louise baisse la tête et ne répond pas.) Ton silence semble me condamner… Pourtant… tu sais que j’ai pris des engagements…
LOUISE, soupirant. Je sais, mon père !
LA TESSONNIÈRE, avec humeur. Eh ! vous mettez un valet sur un neuf, ça ne va pas. (Marie prend la place de Louise et continue la partie avec la Tessonnière.)
ROXANE, à son frère. Vos engagements, vos engagements ! Il ne fallait pas les prendre.
LE COMTE. Je les ai pris ; donc, ils existent. Vous-même m’avez approuvé quand j’ai juré de défendre notre district envers et contre tous, en acceptant le commandement de la garde nationale. (S’adressant à Louise.) Suis-je le seul qui ait agit de la sorte ? n’était-ce pas le mot d’ordre de notre parti ?
ROXANE. Le mot d’ordre, oui, à la condition de s’en moquer plus tard.
LE COMTE. Je n’ai pas accepté, moi, le sous-entendu de ce mot d’ordre.
Des lettres inédites de la célèbre écrivaine, révélant des échanges inconnus avec de grandes personnalités du XIXe siècle. Un livre exceptionnel !
Lettres réunies et présentées par Thierry Bodin.
Ces 406 nouvelles lettres retrouvées couvrent presque toute la vie de
George Sand, depuis ses quinze ans jusqu'à ses derniers jours. La plupart,
du court billet à la longue missive, sont entièrement inédites et viennent
s'ajouter au corpus de sa volumineuse correspondance. D'autres, dont on
ne connaissait que des extraits, sont ici publiées intégralement pour la
première fois.
Plus de 260 correspondants — dont une cinquantaine de nouveaux — sont
représentés, des moins connus aux plus illustres, comme Barbey d'Aurevilly,
Hector Berlioz, Henri Heine, Nadar, Armand Barbès, Eugène Sue, Victor
Hugo, Louis Blanc, Eugène Fromentin, Jules Favre, Pauline Viardot, la
Taglioni, ainsi que les plus divers : parents, familiers, éditeurs, journalistes
et patrons de presse, acteurs et directeurs de théâtre, écrivains, artistes,
hommes politiques, domestiques, fonctionnaires, commerçants, hommes
d'affaires...
On retrouve dans ces pages toute l'humanité et l'insatiable curiosité de
l'écrivain, que l'on suit jusqu'à ses toutes dernières lettres, en mai 1876,
quelques jours avant sa mort.
Les auteurs :
George Sand (1804-1876) est une romancière, dramaturge et critique littéraire française. Auteure de plus de 70 romans, on lui doit également quelque 25 000 lettres échangées avec toutes les célébrités artistiques de son temps.
Thierry Bodin est libraire-expert en lettres et manuscrits autographes. Ses
travaux sont consacrés au romantisme français, en particulier Honoré de Balzac, Alfred de Vigny et George Sand.
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