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EAN : 9782070439805
352 pages
Gallimard (13/05/2011)
3.83/5   18 notes
Résumé :

Une image d’Epinal nous fait de Maximilien Marie Isidore de Robespierre (1758-1794) le portrait suivant : fils d’un avocat d’Arras, il fut élu député aux Etats généraux, se rendit populaire aux Jacobins par la rigueur de ses principes, et s’opposa à la guerre contre l’Autriche. Joël Schmidt propose un autre regard. Robespierre, jeune juge hésitant à signer un décret de peine de mort, est transformé par la Révolution qui lui donne une pensée brillante mai... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Après la lecture de cette riche et concise biographie de l'âme damnée de la Révolution, et au-delà, j'ai écrit un article autour de ce personnage toujours aussi incandescent dans la mémoire collective, laquelle s'accommode trop souvent de raccourcis simplistes et anachroniques. Car Robespierre est de ces figures mythologiques de l'Histoire des hommes qui demandent une acceptation de la complexité pour les comprendre, loin d'un monolithe sans nuance et effroyable tel qu'Hitler.
Je disais, dans mon article, entre autres, ceci :
{Le 28 juillet 1794, ayant comparu devant le Tribunal révolutionnaire, Maximilien Robespierre était exécuté avec les « robespierristes » après une arrestation violente à l'Hôtel-de-Ville de Paris, au cours de laquelle il aurait soit tenté de se suicider, soit reçu une balle dans la mâchoire tirée par le gendarme Méda, selon les versions. Mâchoire retenue par un bandage que le bourreau arrachera sans ménagement sur l'échafaud, découvrant aux yeux du peuple une blessure hideuse.
Robespierre – qui, jadis, prononça devant le lycée Louis-le-Grand, où il était élève, un éloge du roi Louis XVI qui passait par là : ironie de l'Histoire ! – est un homme politique peut-être sombre et controversé du roman national ; il n'en est pas moins d'une envergure indéniable. On pourra gloser sur sa froideur, sa cruauté, mais il est essentiel de mettre sa politique en parallèle avec la situation d'alors : la France est attaquée aux frontières par une coalition de puissances étrangères ; à l'intérieur, elle subit l'insurrection vendéenne (dont il ne faut pas ignorer au passage la quasi génocidaire répression) ; la Révolution est incapable de mener une politique unitaire, les factions s'entredéchirant. Dans ce maelstrom de l'Histoire, l'avocat d'Arras reste un fervent patriote […].
Croyant en un Être Suprême – donc en Dieu –, Robespierre fustigera la déchristianisation de la France comme contre-révolutionnaire, rappelant en même temps le principe de la liberté de culte. Il savait aussi certainement qu'on ne détricote pas le passé d'une Nation au risque de la précipiter dans le chaos. Chaque Nation possède un socle sans lequel on ne peut rien construire de viable.
Et si, exalté par sa propre voix, il a initié la dictature de la Terreur, résumer Robespierre à un remplisseur de charrettes pour la guillotine est un peu léger. […]
Robespierre demeure un personnage, non pas idéal – parce qu'il a à répondre devant l'Histoire de ses excès meurtriers –, mais cependant majeur ; pris dans une tourmente collective immense, il en a toujours appelé à la République une et indivisible.
Pour conclure, laissons-lui le mot de la fin à travers deux extraits de son dernier discours, prononcé le 26 juillet 1794, riches d'enseignements et douloureusement d'actualité :
“Dirons-nous que tout est bien ? Continuerons-nous de louer par habitude ou par pratique ce qui est mal ? Nous perdrions la patrie. Révélerons-nous les abus cachés ? Dénoncerons-nous les traîtres ? On nous dira que nous ébranlons les autorités constituées, que nous voulons acquérir à leurs dépens une influence personnelle. Que ferons-nous donc ? ” […]
“ Je suis fait pour combattre le crime, non pour le gouverner. le temps n'est point arrivé où les hommes de biens peuvent servir impunément la patrie; les défenseurs de la liberté ne seront que des proscrits, tant que la horde des fripons dominera. ” }


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Robespierre reste un des noms les plus connus de la Révolution française et aussi l'un des plus controversés. Il fut un personnage important mais quel rôle a-t-il réellement joué dans le déroulement de la Révolution dans son ensemble et dans la Terreur en particulier?
Avant de lire ce livre, je n'avais guère une image positive du personnage mais j'étais prête à réviser mon point de vue. Après l'avoir lu, cela ne s'est pas arrangé...

L'auteur nous fait découvrir le personnage essentiellement au travers du décryptage de ses discours et de leur évolution. Il ne s'agit donc pas tout à fait d'une biographie. A mon sens, l'image qui en ressort encore plus trouble. Certes, il apparait comme incorruptible, farouchement attaché à la Révolution et désireux de la défendre contre toutes les compromissions. Son action n'est en aucun cas basée sur la recherche de son intérêt personnel, à l'exception peut être de son désir de postérité.
Mais le jeune juge d'Arras qui, à son début de carrière, refusait la peine de mort, en vient à être la cause de la mort de milliers de personnes, à justifier, pour défendre la Révolution et le peuple ou du moins l'idée qu'il se fait de ces deux concepts) qu'on puisse exécuter sans jugement tous ceux soupçonnés de trahison. Sachant que comme il a raison, tous ceux qui ne sont pas d'accord avec lui sont des traitres à guillotiner. CQFD.

Comment en est-il arrivé là ? Par sa fascination pour la civilisation romaine et son identification aux défenseurs de la république romaine et à la vertu qu'il avait sans cesse au bout de la plume ... Par son enfermement dans sa propre rhétorique, les mots entrainant les mots et l'exaltation des phrases en dehors de toute réflexion sur le sens des propos tenus, par son absence totale d'empathie et de compréhension de ses contemporains et par son ignorance crasse de la réalité du monde matériel et du peuple, dont il encense l'idée tout en en méprisant la réalité, en bourgeois de son temps qu'il est et reste. L'auteur en fait un personnage qui, dépassé par ce qui arrive, choisit la fuite en avant dans un mouvement de révolution permanente. L'auteur dans sa conclusion veut le présenter comme n'étant pas le monstre sanguinaire qu'on a longtemps décrit et cite des jugements plus favorables à
Robespierre de divers penseurs et historiens. Certes, il n'est pas un dictateur comparables à ceux que le XXeme siècle nous a fait connaitre. Certes, il voulait le bien du "peuple", rien pour lui-même et tachait de s'adapter à des circonstances exceptionnelles. Dans ce récit, il parait parfois dépassé par l'extrême violence et les massacres que ses mots déclenchent. Il fait des discours incendiaires et disparait quelques jours ou semaine, peut être malade, laissant les faits se dérouler comme s'il n'y était pour rien. Peut être ne savait-il pas ce que les mots peuvent produire. Nous le savons mieux aujourd'hui. Mais la mécanique qui se déploit et qu'il active est effrayante de déshumanisation et est finalement une des premières expressions du totalitarisme appelé à connaitre de grandes heures.
Pour autant, les circonstances historiques étaient-elles telles que cette attitude ait réussi à faire vivre la révolution? Que serait il passé sans la terreur ? avec des Si .. n'est-ce pas ?

Finalement juger Robespierre n'a pas tellement de sens. C'est la mécanique et l'enroulement des faits et des comportements qui doit effrayer et retenir l'attention au-delà de la personne de Robespierre : lorsque la raison quitte les humains, lorsque l'emballement des formules de communicants qui veulent faire de l'audience ou du "clic" et lorsque les anathèmes passent pour de l'argumentaire, lorsque les croyances et les passions de chacun prennent le pas sur débat, la prise en compte de l'altérité et la recherche de solutions, lorsque le "peuple" , déclamation incantatoire, n'est qu'une idée appelée à la rescousse des passions des politiques et non pas une réalité d'hommes et des femmes divers et complexes lorsque la recherche de compromis et d'accords est décriée comme n'étant que compromissions.

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critiques presse (1)
Telerama
15 juin 2011
Si la postérité n'a pas été tendre avec lui, cette étude apporte d'intéressantes nuances.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Lorsqu'on lit les déclarations et les discours de Robespierre, ainsi que ceux de quelques uns de ses fidèles, on est frappé par leur rhétorique, certes remarquablement agencée, mais qui semble les entraîner à commettre des actes irréparables au nom de la vertu républicaine. On sent que les mots tels que tyran, despote, peuple, etc ... sont devenus des abstractions dont ils se gorgent avec une sorte de plaisir incantatoire. Ils leur permettent de ne plus réfléchir à leurs actes, ils en sont en quelque sorte les esclaves. [...] .
Les mots ont un pouvoir qui les dépasse, qui les déresponsabilise et qui leur donne une sorte de liberté de juger sans appel, leur faisant croire tout ce qu'ils disent, sans que la moindre réflexion morale et intellectuelle intervienne.
Page 164
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On sent que des mots tels que "tyran", despote, peuple, etc., sont devenus des abstractions dont ils [Robespierre et ses fidèles] se gorgent avec une sorte de plaisir incantatoire. Ils leur permettent de ne plus réfléchir à leurs actes, ils en sont en quelque sorte les esclaves. L'éloquence, dont ils ont appris toutes les tournures et tout l'art au cours de leurs carrières professionnelles ou dans l'exercice de leur fonction de députés, a un effet d'entrainement qui doit certainement leur procurer une volupté intellectuelle extraordinaire. Les mots ont un pouvoir qui les dépasse, qui les déresponsabilise et qui leur donne une sorte de liberté de juger sans appel, leur faisant croire à tout ce qu'ils disent, sans que la moindre réflexion morale et intellectuelle intervienne. Ils se trouvent comme enveloppés dans l'élan de leur phraséologie et ils finissent par y croire.
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Je suis fait pour combattre le crime, non pour gouverner. Le temps n'est point arrive où les hommes de bien peuvent servir impunément la partie : les défenseurs de la liberté ne seront que des proscrits, tant que la horde des fripons dominera.

Robespierre, ultime discours devant la Convention 8 thermidor an II (26 juillet 1794)
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Robespierre fait peur par son intransigeance, par sa volonté de prendre la défense du peuple à tout prix contre l'aristocratie, certes, mais aussi contre la bourgeoisie dont il est un représentant. Ses collègues pour se défendre le calomnient. Ce sera une de leus armes constantes jusqu'à sa mort et même après.
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Il appartient à la bourgeoisie et ne peut pas concevoir l'égalité de tous devant l'argent. C'est ce qu'on appelle en langage marxiste une aliénation. Pour clairvoyant qu'il soit, Robespierre ne conçoit pas une société ou il n'y ait pas de riches et de pauvres, mais il demande simplement que les seconds aient les mêmes droits que les premiers, ce qui est une utopie et un contresens, l'argent, seul, permettant souvent l'obtention de droits que les pauvres ne posséderont jamais.
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