Un bon numéro de cette revue qui a, je crois, cessé définitivement d'exister. C'est un numéro spécial théâtre roumain, avec en couverture un dessin de Neagu,
Eugène Ionesco jeune.
Dans ce numéro, beaucoup d'articles qui méritent d'être mentionnés. Il y a tout d'abord un hommage à
Alain Paruit, traducteur qui faisait partie du comité de rédaction et dont sont reproduits, en traduction inédite, sept poèmes de Virgil Mazilescu. Parmi les critiques et notes de lectures, j'ai retenu surtout les lignes de
Radu Bata (pp. 247-250) consacrées au livre de
Lola Lafon, La petite communiste qui ne souriait jamais, ainsi que celles (traduites du roumain par
Laure Hinckel) de George Banu en marge de la pièce de
Shakespeare,
Comme il vous plaira, mise en scène par le roumain Silviu Purcarete (pp. 233-238).
Mais revenons au dossier « Le théâtre du mot vide ». 180 pages à lire absolument.
Virgil Tanase y écrit un mot introductif, « Le chariot vide », après quoi, on peut lire la reproduction intégrale du chapitre concernant la pièce « L'Anglais sans maître » de l'ouvrage de
Eugen Simion, « Le Jeune Ionesco », façon, plutôt sympathique de s'approprier le théâtre d'
Eugène Ionesco, en littérature roumaine. Cette pièce dont le titre original est « Englezește fără profesor », n'est au fond que la première version de la très célèbre pièce française « La Cantatrice chauve ».
Pour moi, le principal intérêt de la revue réside dans les traductions, par
Philippe Loubière de quatre pièces en un acte de
Teodor Mazilu, précédées d'une courte étude intitulée « Un théâtre de la démystification » qui présente le dramaturge roumain en ces termes : « personnage central de la bohème littéraire bucarestoise pendant les années noires de la Roumanie communiste,
Teodor Mazilu est romancier, poète, à l'occasion chroniqueur sportif, et surtout l'auteur d'une oeuvre théâtrale remarquable, tant en nombre de pièces (27 titres de longueur inégale) que par une puissance dramatique dévastatrice ». Puis, pp. 85 -101,
Virgil Tanase propose un large extrait qu'il traduit et adapte pour la scène de la comédie en trois actes « Idiots au clair de lune » du même Teodor Mazilescu.
Et comme il s'agit de lister les principales contributions de ce numéro, je ne saurais omettre ma découverte d'un texte de Horia Gârbea, « Mme Bovary c'est les autres ». Je n'ai, je crois, jamais encore évoqué Horia Gârbea, né en 1962, auteur prolifique et actuellement numéro 2 de l'Union des écrivains roumains. Je termine avec ces quelques lignes de Mircea Ghițulescu : « Madame Bovary c'est les autres est l'illustration exemplaire de cette doctrine [nulle par la conscience lucide de ce que nous sommes ne s'exprime mieux que dans la comédie]. le massacre justicier de
Hamlet est connecté à la haine assassine de Madame Bovary avec des références qui évoquent tantôt, et ce n'est certainement pas par hasard, le théâtre de
Ion Luca Caragiale, tantôt
Carmen de
Mérimée, tantôt Faust. L'auteur met dans la bouche de
Hamlet une phrase qui vient des comédies de I.L. Caragiale : « Quel merveilleux médecin que l'amour ! » et le tour est joué : cette circonlocution creuse déclenche un massacre digne des tragédies shakespeariennes mais qui n'est, somme toute, une série de crimes burlesques accomplis au nom d'un amour de quatre sous ».