Incipit, Le rose et le vert
Ce fut vers la fin de 183* que le général major comte von Landek revint à Kœnigsberg sa patrie ; depuis bien des années il était employé dans la diplomatie prussienne. En ce moment, il arrivait de Paris. C’était un assez bon homme qui autrefois, à la guerre, avait montré de la bravoure, maintenant il avait peur à peu près constamment, il craignait de n’être pas possesseur de tout l’esprit que communément l’on croit nécessaire au rôle d’ambassadeur, — M. de Talleyrand a gâté le métier, — et de plus il s’imaginait faire preuve d’esprit en parlant sans cesse. Le général von Landek avait un second moyen de se distinguer, c’était le patriotisme ; par exemple, il devenait rouge de colère toutes les fois qu’il rencontrait le souvenir d’Iéna. Dernièrement, à son retour à Kœnigsberg, il avait fait un détour de plus de trente lieues pour éviter Breslau, petite ville où un corps d’armée prussien avait mis bas les armes devant quelques détachements de l’armée française, jadis, à l’époque d’Iéna.
Pour ce brave général, possesseur légitime de sept croix et de deux crachats, l’amour de la patrie ne consistait point à chercher à rendre la Prusse heureuse et libre, mais bien à la venger une seconde fois de la déroute fatale que déjà nous avons nommée.
Les récits infinis du général eurent un succès rapide dans la société de Kœnigsberg. Tout le monde voulait l’entendre raconter Paris. C’est une ville d’esprit que Kœnigsberg, je la proclamerais volontiers la capitale de la pensée en Allemagne ; les Français n’y sont point aimés, mais si on nous fait l’honneur de nous haïr, en revanche on méprise souverainement tous les autres peuples de l’Europe, et de préférence, à ce que j’ai remarqué, ceux dont les qualités se rapprochent des bonnes qualités des Allemands.
Personne n’eût écouté un voyageur arrivant de Vienne ou de Madrid et l’on accablait de questions le trop heureux bavard von Landek. Les plus jolies femmes, et il y en a de charmantes en ce pays-là, voulaient savoir comment était fait le boulevard des Italiens, ce centre du monde ; de quelle façon les Tuileries regardent le palais du Louvre, si la Seine porte des bâtiments à voiles, comme la Vistule, et surtout si pour aller faire une visite le soir, à une femme, il faut absolument avoir reçu d’elle le matin une petite carte annonçant qu’elle sera chez elle ce soir-là.
Critique de Say, proche de Bentham, Stendhal se confronte aux théories économiques de son temps. de l'utilitarisme au malthusianisme en passant par la question de la division du travail, le célèbre écrivain était aussi économiste.
Pour comprendre l'économie à travers le regard De Stendhal, Tiphaine de Rocquigny reçoit Christophe Reffait, maître de conférences en littérature française, Université de Picardie Jules Verne.
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