Lost children, tome 5

Les deux premiers chapitres se focalisent sur Yuri et son statut d'intermédiaire entre les dieux et la communauté qui l'accueille. C'est lourd, pesant, angoissant. C'est bien rendu. Il y a un aspect sectaire qui ressort de cette communauté. Cet côté est renforcé par la rencontre avec le précédent Kussuf (qui est peut-être une femme, c'est assez difficile de se forger une opinon).

Ce village caché tend à reproduire à petite échelle un système de caste, de secrets, d'interdits et d'obligations qui semblent être fort malsain. C'est fort bien pensé et on retrouve les divers emprunts au folklore asiatique dans les vêtements, costumes cérémoniels, rituels, etc.

Le dernier chapitre se concentre sur Ran et ses origines. On prend connaissance de ses parents et du lien qui les unissait à Gurkha, qui fut son père pendant des années. Ran est appelé en urgence au chevet de Gurkha, mourant, qui lui fait des révélations sur ses parents. le passé de Ran est évidemment empreint de colère et de désir de vengeance, mais les intentions de Tahn Oulrajir, cheffe du Dakhna, sont-elles si honorables? Il y a visiblement un lien entre elle et Gurkha, mais quel est-il?

C'est très bien mené avec un équilibre entre émotions et actions. Mise en page plus imaginative que dans les tomes précédents.

Cette série a du potentiel et elle mérite tellement d'être plus connue. Elle passe entre les mailles du filet des sorties célèbres en seinen et il faut y remédier ! Ce tome est riche en révélations sur les passés de Yuri en tant que gourou du village et Ran, soldat véhément. C'est émouvant sur les 2 pans de la scène. le jeune borgne s'est renfermé sur lui-même pour ne plus avoir à souffrir tandis que le guerrier lui, a eu toute la vérité sur ses parents et son peuple au chevet de son père. Sacré tome puissant et accrocheur !

Si ce tome apporte des infos cruciales que j'espérais apprendre depuis un moment, j'espère aussi qu'il signe la fin des flashbacks. L'histoire passée de Yuri et Ran est évidemment intéressante et explique bon nombre de choses que l'on ne comprenait pas au début, mais ça commence à devenir un peu long (surtout pour une histoire dont on a les tomes si peu souvent, en fait).
L'univers médiéval-fantasy a un aspect dystopique et folklorique très sympa où les cultures, les intrigues géopolitiques, les conflits civils se mélangent aisément et sans maladresse. Lost Children a univers en pleine expansion qui ne demande qu'à être plus exploité.
Les personnages deviennent de plus en plus tangibles et marquants, l'avantage étant que l'auteur prend soin de ne pas en introduire trop d'un coup. Yuri et Ran sont deux figures malmenées dont la destinée difficile explique les jeunes adultes qu'ils sont devenus.
Le dessin est toujours plaisant : les paysages sont riches, les pages ne sont pas chiches en détails, les personnages sont bien réalisés.

Bien qu'elle ne paie pas de mine et que le titre sorte assez confidentiellement je trouve, quelle qualité dans cette série ! C'est fascinant de suivre l'embrigadement parallèle de deux jeunes garçons, l'un dans une religion, l'autre dans une guérilla, pour en faire un enfant-gourou et un enfant-soldat.

L'autrice continue à nous raconter le passé de ces deux héros, alternant les moments sur l'un et l'autre pour que nous comprenions ce qui les a menés à la situation dans laquelle ils étaient dans le tome 1. J'ai trouvé très triste dans les deux cas le leur effondrement dans ce tome. le premier, Yuri, a été trop traumatisé par l'attaque de sa ville et tout ce qu'il y a perdu. Il ne veut plus se lier avec qui que ce soit et cherche à éloigner les autres tout en se murant dans le rôle de "gourou" que la communauté qui l'a accueilli semble lui offrir. Cette dernière est d'ailleurs glauque au possible. On découvre peu à peu tout ce qu'elle cache derrière ce cadre idyllique et ça fait froid dans le dos. Pour autant, je suis fascinée, fascinée par l'emprise qu'ils ont les uns sur les autres dans leur société terriblement hiérarchisée, et fascinée par la façon dont Yuri utilise ses "dons" pour s'y faire une place.

En parallèle, nous suivons donc le destin de Ran, un peu plus en retrait dans ce tome peut-être, qui peine à accepter la violence du groupe dans lequel il se retrouve. Il sait qu'il doit parfois lutter et tuer pour survivre mais ce n'est pas son désir premier. Cependant, il suffit d'un moment charnière pour tout changer : la perte de son père adoptif et la terrible révélation sur ses parents d'origine. J'ai eu vraiment mal pour lui et j'ai trouvé que l'autrice frappait fort ici.

Ainsi avec une construction lente et classique, la mangaka nous amène peu à peu à mieux cerner les personnalités des héros et la trajectoire qu'ils ont eu depuis leur rencontre. C'est dur, c'est violent, c'est dérangeant mais tellement puissant !
Lien : https://lesblablasdetachan.w..