Monsieur Valéry

Monsieur Valéry a inauguré le Quartier de Monsieur Gonçalo M. Tavares en 2002. Ce quartier fantaisiste et utopique toujours en expansion est surtout habité par des écrivains, poètes, dramaturges et autres artistes. Chacun de ces Messieurs a son domaine de prédilection et porte sur le monde contemporain un regard décalé.
Monsieur Valéry est un fondu de logique, un obsédé de rationalité, qu'il applique à la lettre dans sa vie quotidienne, ce qui le mène au non-sens. Il est fou et lunaire, souvent perdu dans ses réflexions : "Qui me dit que l'endroit où j'arrive après dix heures est le même que celui où j'arrive en vingt minutes ?".
Les expériences absurdes et fantaisistes de Monsieur Valéry nous sont rapportées avec le plus grand sérieux dans vingt-cinq textes brefs à l'écriture directe et minimaliste. de petits croquis enfantins viennent renforcer la clarté des comptes-rendus.
Monsieur Valéry m'a fait penser à un poète en vacances chez les Shadocks.

A côté de ses grands livres complexes et sombres, l'auteur portugais a conçu une série d'ouvrages centrés à chaque fois sur un auteur connu, et censé le raconter dans un petit volume illustré de nombreux dessins. Ces personnages habitent un quartier dans un lieu indéterminé, et chaque volume raconte leurs pérégrinations et bizarreries dans de courts chapitres. C'est loufoque et sympathique, tout en étant signifiant, une sorte de philosophie accessible à tous n'est jamais loin.

Dans ce volume, Tavares prend donc comme personnage Paul Valéry. Je ne connais pas suffisamment ce dernier pour pouvoir vraiment saisir ce que l'oeuvre de son modèle a pu donner à l'auteur portugais comme accroche pour son petit ouvrage. le rapport du personnage avec la réalité telle que nous la connaissons (ou pensons la connaître) est quelque peu décalé, mais Monsieur Valéry s'interroge d'une façon sérieuse, et quasi métaphasique sur ce qui l'entoure. Il est un peu obsessionnel et va jusqu'au bout des raisonnements, ce qui fait qu'il semble parfois dépasser la mesure et sombrer dans l'absurde, mais en même temps, pourquoi certaines choses serait-elles absurdes ? C'est peut-être notre regard qui est trop formaté, trop habitué à voir les choses d'une certaines manière.

Il y a quelque chose du monde de l'enfance dans ce livre, l'éternel pourquoi posé à propos des choses qui semblent être des évidences, mais au fond elles ne le sont que parce qu'on les considère comme telles...La nécessité de les expliquer, peut les déconstruire et les rendre vacillantes.

C'est vraiment étonnant, très réussi, avec un ton personnel. J'ai très envie maintenant de découvrir les autres volumes décrivant les étranges mais sympathiques habitants de cet étrange quartier.

Le quartier (o bairro, en portugais) est une série de livres qui racontent la vie de ses habitants aux patronymes empruntés à de grands écrivains. Ici, il s'agit de monsieur Valéry, un petit homme étrange qui a un rapport très spécial avec le monde qui l'entoure. Une succession de chapitres très courts, illustrés par quelques dessins, car monsieur Valéry aime beaucoup dessiner ; sans doute trouve-t-il le dessin beaucoup plus efficace que le langage pour expliquer ses théories loufoques.
Il ne me semble pas qu'il soit tellement question de Paul Valéry, de sa personnalité ou de son oeuvre, à part peut-être de son rapport à la philosophie. Comme l'indique le sous-titre en français, monsieur Valéry est souvent préoccupé par des problèmes de logique, un peu à la manière d'un sophiste grec, ironique et ayant de sérieux conflits avec la réalité. On retrouve surtout des thèmes chers à Tavares sur les oppositions, la mobilité problématique et l'immobilité absurde, l'enchevêtrement de causes et d'effets, la géométrie, le ciel inaccessible…
Monsieur Valéry est un être poétiquement burlesque, un peu à la manière de Monsieur Hulot.