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sur 212 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Au temps d'une pandémie et d'un pass sanitaire, Sylvain s'en va battre la campagne de la Meuse à la Reie. Il s'en cours sur les traces de la fugue d'Arthur. La fulgurance d'un poète maudit, Arthur Rimbaud entre deux versants d'une colline, entre deux méandres d'un fleuve. Sous la pluie ou dans la brume, je les imagine tous deux discourir autour d'un verre de bière, une Blanche de Bruxelles, de Namur ou de Bruges. Il est cinq heures du soir au Cabaret Vert.

En fait de bières, il n'en sera jamais question. Ni même de vodka, si cher à mes souvenirs baïkaliens. Il faut dire que le gamin n'est pas en âge de boire. Et que contrairement aux illustres poètes que je peux fréquenter littérairement, Arthur n'a guère besoin d'alcool, de LSD, d'opium ou de mescaline. Arthur, l'être pur, le génie inné qui apprend de ses classiques - donc de ses maîtres - aussi sobrement que moi je m'enfile des bibines. Il voyage à travers les mots, je voyage à travers les houblons. Chacun son passeport pour l'autre monde, celui de l'imaginaire et des lettres.

J'aurais pu prendre la mer à bord d'un bateau ivre, ne dit-on pas qu'Arthur Rimbaud sait mieux décrire la mer sans l'avoir vu qu'un Tabarly à bord de son Pen Duick. Il a l'ivresse dans les mots, pas dans sa conduite. L'inverse d'un Tesson avant sa chute. La légende d'Arthur se naît de sa navigation à travers les flots d'image. J'allume la radio, des chroniques estivales qui seraient tombées à l'eau si cela s'était appelé un hiver avec... Mais bon, on est en été, je bois une bière blanche sur ma terrasse - j'ai pris une photo pour immortaliser la poésie de cet instant présent, feuillette quelques paragraphes, à prendre de-ci de-là, j'imagine même qu'elles peuvent se lire dans le désordre, la ballade proposée n'est pas linéaire. le voyage au final reste en de-ça de mes espérances, restant à quai quand Sylvain me promettait d'embarquer. Mais à l'ombre d'un rayon de soleil, dans le silence d'une bière, je suis bien, j'ai tout de même passé un été avec Rimbaud, ce n'est déjà pas rien...
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J'aurais dû me méfier. Réunir Tesson et Rimbaud dans un même ouvrage, c'était la promesse d'un texte à l'herméneutique éthérée voire anisée. Et de fait, je n'ai pas été déçu de ce point de vue-là.

On connaît la proportion de Tesson à aimer s'entendre écrire. Avec Rimbaud comme sujet, toutes les digues sont rompues et l'on est assommé par son babille permanent. Ce n'est pas sur les traces des chemins buissonniers empruntés par Rimbaud que l'on se perd mais dans cette jacasserie, cultivée certes, mais si peu authentique. L'auteur noircit ici des pages avec bien moins de talent que d'habitude. Il y a la faconde, mais il manque le panache. Il y a les mots mais il manque le coeur.

On sent pourtant poindre, ça et là, la fascination de Tesson pour cette volonté de Rimbaud de créer un nouveau langage. On perçoit ce qu'il y a de combat dans l'écriture de Tesson contre ce verbe qui l'étouffe. Il y a, il faut le reconnaître, quelques traits d'esprit, quelques fulgurances… mais trop peu !

Tesson nous a habitué à mieux, à du moins convenu, à du moins terne.
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C'est une oeuvre intéressante, parfois prenante... mais, car il y a un mais, comme chaque écrit sur Rimbaud et bien que revendiquant le contraire, on finit par tomber dans l'affirmation de l'inconnu. Arthur est certainement le plus grand génie de l'écrit. c'est un météore d'une phénoménale intelligence. il n'en reste pas moins un adolescent bouillonnant de fièvre et de contradiction. l'intérêt majeur de ce livre est dans l'approche qui change l'angle d'éclairage.
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L'éternité

Elle est retrouvée.
Quoi ? - L'éternité.
C'est la mer allée
Avec le soleil.

Ame sentinelle,
Murmurons l'aveu
De la nuit si nulle
Et du jour en feu.

Des humains suffrages,
Des communs élans
Là tu te dégages
Et voles selon.

Puisque de vous seules,
Braises de satin,
Le Devoir s'exhale
Sans qu'on dise : enfin.

Là pas d'espérance,
Nul orietur.
Science avec patience,
Le supplice est sûr.

Elle est retrouvée.
Quoi ? - L'éternité.
C'est la mer allée
Avec le soleil.
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Exercice imposé au lycée, il y a bien longtemps que je n'avais pas lu un poème d'Arthur Rimbaud. La sortie du petit livre de Sylvain Tesson qui fait suite à une série d'émissions diffusées pendant l'été 2020 sur France Inter donne envie de se replonger dans une oeuvre à la fois fulgurante et fugace.
Elève terriblement doué et précoce, il compose très tôt ses premiers vers mais, la poésie étant « le mouvement des choses », il prend la tangente à seize ans. Direction Paris en pleine révolution communarde. C'est l'errance qui va lui fournir une bonne partie de son inspiration (« Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course Des rimes » in « Ma bohème »).
Après une relation épistolaire avec Verlaine, il rencontre son aîné. Il s'ensuit une relation amoureuse aussi explosive que scandaleuse.
Cet épisode passionné n'empêche pas Arthur de rédiger sa « Saison en enfer » et ses « Illuminations » qu'aucun éditeur ne publiera de son vivant. Il faut dire que le garçon n'est pas facile. Un observateur de l'époque le qualifie de névrosé et d'hystérique.
Bref, « il a tout dit entre sa quinzième et sa dix-neuvième année ».
Après, hormis une correspondance assez fournie, ce sera le silence et le grand départ pour l'Afrique. La poésie, c'est fini. Il n'a plus rien à dire. Hormis dans ses lettres qui forment une correspondance conséquente.
Si le caractère épouvantable du jeune homme explique en partie son absence de succès, c'est aussi l'hermétisme de ses poèmes qui déconcerte ses congénères.
Et le décalage est grand entre l'ingratitude des contemporains de Rimbaud (à part quelques exceptions dont celle de Verlaine qui se battit pour la reconnaissance de son amant maudit) et son immense postérité. S'affichant sur des tee-shirts, il symbolise la liberté teintée d'anarchie et d'insolence et est récupéré par de nombreuses chapelles qui en font une icône absolue. Or, rappelle Sylvain Tesson, il devint un « businessman » aux méthodes borderline qui feraient frémir les bien-pensants.
Ce que l'on doit retenir de l'homme, c'est son oeuvre. René Char écrira : « Rimbaud poète, cela suffit et cela est infini ».
Revenons justement à son legs poétique qui, selon l'auteur, n'est rien moins que de « transformer le monde par les mots » en atteignant le « dérèglement de tous les sens ».
Plus sérieuses que le recyclage de l'image de Rimbaud sont les analyses auxquelles se sont livrés de nombreux exégètes.
Pour Tesson, le débat est clos avant même d'avoir commencé. « On peut recevoir la vibration des Illuminations et d'Une saison en enfer sans s'encombrer d'en percer la signification ».
La lecture de ces recueils relèverait d'un expérience sensorielle. « On ferme les yeux, on entend une voix, des couleurs apparaissent » constate l'auteur qui compare le poète à un « peintre sans palette ». Il ajoute : « il n'y a rien à comprendre dans les Illuminations ». Nous sommes bien loin de Victor Hugo « où toute scène de la vie illustre la pensée ». « Arthur porte jusqu'au point de fusion l'incandescence des mots, la liberté du rythme, l'association des images. Il malmène la langue parce qu'il l'aime ». C'est ce que pense Tesson. Ce jugement, je suis bien incapable de l'approuver ni de le contredire, ma connaissance de l'oeuvre de Rimbaud étant réduite. Il me reste vaguement l'impression d'avoir entendu une petite musique fort belle, un art de la fugue qui peuvent avoir un sens (cf. « Le dormeur du val »). Même si la force des images prédomine.
Ce qui m'a un peu agacé dans « Un été avec Rimbaud », ce sont à la fois la mise en avant que Sylvain Tesson fait de sa personne, sorte de clone vagabond de « l'homme aux semelles de vent », et les petites piques qu'il adresse à la société du début du 21ème siècle et aux notions de modernité et de progrès. A force, il radote.

EXTRAITS
- Définition du génie : savoir avant de voir, connaître avant de goûter, entendre avant d'avoir écouté !
- La poésie, c'est le réel quand il devient surréel.
- le mouvement procure l'idée et pourvoit aux images.
- La marche, état suprême de poésie.
- Voyager, c'est promener son mal de vivre en croyant le semer !

Lien : http://papivore.net/litterat..
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On y retrouve la vie de Rimbaud, mais une vie de souffrance, de douleur et Sylvain Tesson insère des extraits « en bleu » de la poésie de Rimbaud.

Sylvain Tesson met en évidence l'intensité d'une vie et nous indique que la poésie que souhaitait Rimbaud ne devait pas appartenir au grand de ce monde.

[La poésie est le mouvement des choses. Rimbaud se déplace sans répit, change de point de vue].

Sa poésie restera sans succès durant toute sa vie.

[On décèle le génie, on se méfie du diable]…[Pas de tribune, nulle édition, peu de reconnaissance. Il dérangeait. le génie faisait peur].

Rimbaud avait une forme de synesthésie et comme l'écrit Sylvain Tesson il [moissonne tout : couleur, sons, images, odeurs. C'est la ratatouille !] et s'il n'était pas un poète, on n'aurait pu lui octroyer d'être un très bon cuisinier !
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(Découverte d'un nouveau mot... et tellement d'autres puisque le vocabulaire de Sylvain Tesson est plus riche qu'une tropézienne.)
Est-ce que j'ai appris des choses sur Rimbaud dans ce livre? Peut-être pas. Ou peut-être si: j'aurais au moins appris à prendre ses poèmes comme ils viennent, sans avoir à y chercher la clé (le sens) que Rimbaud ne donnera plus jamais. Si tant est qu'il y en avait bien une et que ces explosions de mots épileptiques n'étaient pas une bravade de gamin pour faire tourner en bourrique l'élite des trop bien pensants ennuyeux.
Une autre façon d'appréhender Arthur Rimbaud.

Pitch (4ème de couv):
"Lire Arthur Rimbaud vous condamne à partir un jour sur les chemins.
Chez le poète des Illuminations et d'Une saison en enfer, la vie s'organise dans le mouvement.
Il s'échappe hors de l'Ardenne, cavale dans la nuit parisienne, court après l'amour en Belgique, se promène à Londres puis s'aventure à mort sur les pistes d'Afrique.
La poésie est le mouvement des choses. Rimbaud se déplace sans répit, changeant de point de vue. Son projet: transformer le monde par les mots.
Ses poèmes sont des projectiles, des bouquets de feu: cent cinquante ans plus tard, ils nous atteignent encore."

Ce livre n'est pas une biographie, ni une explication de textes. C'est un recueil des chroniques radiographiques réalisées par Sylvain Tesson qui veut apporter un éclairage nouveau sur le poète. Un génie mais sans le talent pour l'amener au firmament. Une comète qui épuisera bien vite son carburant. Ni tout noir, ni tout blanc: mister-Rimbald, voyageur-Rimbaud et toutes ses nuances hallucinatoires, dépressives ou colériques.

Le recueil fait beaucoup d'aller-retours entre la France et l'Abyssinie. Entre l'Ardenne et l'Aden. Et se répète un peu trop… la faute au cahier des charges radiographique? Mêlant bouts de poèmes et de correspondances de Rimbaud avec les réflexions de Tesson qui se veut un peu trop donneur de leçons alors même qu'il tire sur ceux qui le font. Et qui sort du cadre pour des écueils sur les restrictions imposées par le Covid qu'aurait certes certainement mal vécu le marcheur-Rimbaud et qui semblent profondément emmerder l'écrivain-Tesson. Perso, je me serais bien passée de cela et aurait préféré que le serviteur s'efface davantage.

Des chroniques à écouter tranquillement entre deux "obligations" plutôt qu'à lire d'affilée pour éviter la saturation et le sentiment de redondance.

PS: Pour les curieux, un extrait ici
Lien : https://unlivredansmabaignoi..
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