Léon Tolstoï écrit cette nouvelle en 1882, s'inspire d'un thème qui a marqué sa propre vie, la nuit d'Armazas où la vacuité et l'angoisse s'abattent sur lui contre toute attente : il se rendait à Penza pour acheter une propriété, fier comme un maquignon. il avait tout pour être heureux, de mémoire c'était la période où il écrivait
Anna Karénine , il fait une halte dans une auberge .. de cette visite du diable altérant son esprit, il en fait une caricature assez caustique et se fait le propre témoin de ce qu'il a vécu lui-même, bien seul cette nuit là.
On ne peut pas dire que cette année 1882, il la vit sous les meilleurs auspices. On pourrait supposer qu'à mettre ce texte à l'ouvrage soit de circonstance.
Changement de décor entre les années 75 la nuit d'Armazaz et 82 l'écriture des
Notes d'un fou . Dans son couple déjà, ça ne va pas très fort, il y a du tirage. Qu'on ne compte pas sur moi pour en rajouter, d'autres l'ont fait copieusement et à mauvais escient. Sophie reproche à son cher mari -en tout bien tout honneur- d'avoir abandonné la littérature au profit d'essais didactiques et anticléricaux, de bâtir des théories altruistes, mystiques qui vont à l'encontre des intérêts de la famille. Tolstoî menace de mettre ses actes en conformité avec sa pensée, se fâche, se lie avec Tchertkov, individu très riche, mais nuisible, tolstoïen ambigu qui va mettre par dessous le bon équilibre familial qui règne à Iasnaïa Poliana, habitué au faste depuis le mariage du comte et de la comtesse. Oui, là, vraiment mauvaise pioche ! Cette plaisanterie va durer jusqu'à l'éloignement pris à l' encontre de cette sorte de manipulateur qui réapparaîtra plus tard comme une teigne dans l'environnement tolstoïen, ce qui ne sera pas sans conséquence..
Une décision va changer le cours des choses dans la vie du patriarche. Sophie a voulu que les enfants grandissant fassent de bonnes études. Tolstoï achète maison bourgeoise et parc dans Moscou, non loin de la Moscova, et la famille prendra désormais ses quartiers d'hiver dans cette maison cossue. Il se pique alors pour le recensement de la capitale, s'investit lui-même et décide d'enquêter dans le quartier le plus pourri de l'époque (ce quartier a été démantelé depuis). Il en sort fort indigné : s'envolent ses belles illusions sur le sort d'un prolétariat que tout condamne, du vice à la promiscuité. Il voit de ses propres yeux où les paysans convergent et atterrissent, dans ni plus ni moins des taudis, paysans de la campagne qu'il connaît qui viennent nourrir les bataillons ouvriers dans cette Russie urbaine qui s'industrialise. Ces insensés brassages de populations provoquent de l'inhumain, bien loin des aspirations du grand écrivain de la terre russe ..
Il n'aimait déjà pas la ville, il l'aimera encore moins. Néanmoins il s'adapte et effectuera une quinzaine de longs séjours à Moscou ; il y écrira d'ailleurs son troisième grand roman :
Résurrection ..
Par ailleurs, la situation politique du pays n'est guère enthousiasmante pour le chantre de la réforme en profondeur. le nouveau tsar, Alexandre III se lance dans des projets de contre-réformes en prenant à contre-pied les transformations qu'avait opéré son père allant dans le sens de l'ouverture du régime. Dès lors, Tolstoï ne va que radicaliser sa position politique.
Quant à son art maintenant, il est à son sommet ; n' en déplaisent aux affres de son existence. Après ses succès mondiaux, quelques années plus tard, il écrira La Mort d'Ivan Illitch, chef d'oeuvre absolu sur le thème agonisant de la mort.
Alors ces
notes d'un fou, présentement :
Le narrateur consulte parce qu'il s'aperçoit que son état mental s'aggrave.. de l'état larvé, à l'état chronique, il va se passer une dizaine d'années