Un livre passionnant et engagé, toujours actuel.
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A mon avis, la caractéristique la plus distincte que le Tibétain tirait de sa foi bouddhique était un sens de la vanité fondamentale des choses. Du caravanier à l'abbé d'un monastère, du paysan au seigneur, tous les Tibétains partageaient la conviction que le monde est tongpanyi, c'est-à-dire le vide : un vide qui retire toute substantialité à ce que nous pensons comme "étant" et qui n'est qu'apparence. Mais la présence de ce vide ne jetait point un voile de chagrin sur les choses : elle leur restituait des proportions appropriées par leur comparaison et leur relation les unes aux autres. Dans la pratique, il ne s'agit pas d'un facteur qui mène le Tibétain à une conception douloureuse et pessimiste du monde, quand bien même le Bouddha a fait de la Vérité de la Peine Universelle la première pierre de sa doctrine. IL faut concevoir le vide comme une relativité. Si tout est vide, la souffrance l'est aussi ; le plaisir et la douleur sont des apparences illusoires. Ainsi, il n'y a pas de motif de chagrin ; au contraire, le résultat de ces postulats est une certaine légèreté, une glissade aisée sur les choses, puisqu'au fond rien n'est concluant.
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