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EAN : 9788804495963
Arnoldo Mondadori Ed. (01/01/2014)
4.27/5   54 notes
Résumé :
Ungaretti, né en 1888 à Alexandrie, de parents originaires de Lucques, mort à Milan en 1970, est considéré depuis longtemps comme le père de la poésie italienne moderne et l'un des poètes majeurs d'aujourd'hui. Des poèmes de L'Allegria (1919), écrits en partie dans les tranchées, des recueils de la vieillesse (La Terre promise, Le Carnet du vieillard) en passant par la phase riche et sensuelle du Sentiment du temps (1933) et celle plus ample de La Douleur (1947), c'... >Voir plus
Que lire après Vie d'un homme. Poésie, 1914-1970Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Ce qui m'a attirée d'abord dans ce recueil d'un poète que je ne connaissais pas encore, c'est la qualité des traductions: Pierre Jean Jouve, Jean Lescure, André Pieyre de Mandiargues, Francis Ponge ...et, chapeautant le tout, Philippe Jacottet, dont j'ai dit ailleurs tout le bien que je pensais de ses poèmes et de sa traduction en alexandrins de l'Odyssée. Il est rare qu'un poète soit traduit par ses pairs: Giuseppe Ungaretti a visiblement attiré les plumes de ses collègues..

On comprend pourquoi: une poésie concise, brillante, d'une apparente simplicité et toute en raccourcis, en images vibrantes qui, comme un caillou jeté dans l'eau, tracent, longtemps après leur lecture, des cercles concentriques dans nos mémoires..

Parfois ce n'est qu'une image qui s'imprime et le message reste énigmatique, comme dans ce poème Léda, écrit en 1925:.

La très pâle les dents
Lumineuses l'éteignent.

Et dispersé dans le présage de l'oubli
J'en serre de mes bras glacés
La dépouille gorgée de reflets,
Chaude encore,
Et qui déjà tressaille,
Dans un nouveau pullulement caché
De vagues.

Mais parfois c'est une joie, une douleur, une émotion - et elles sont immédiatement partagées, dans l'éclair d'une formulation étincelante:

Le soir venu
Je reposais dans l'herbe monotone,
Et je pris goût
A ce désir interminable,
Cri trouble ailé
Que retient la lumière quand elle meurt.

Le recueil de gallimard s'appelle "Vie d'un homme" et on suit chronologiquement celle de Giuseppe Ungaretti. Il perd un fils, et cette mort cruelle le laisse désolé, abandonné, ...orphelin:

Si, vivant, tu revenais à ma rencontre,
La main tendue, Je pourrais de nouveau,
Dans un élan d'oubli, serrer, Frère, une main.

Mais rien de toi, de toi plus ne m'entoure
Que rêves, que lueurs,
Les feux sans feu du passé.

la mémoire ne déploie rien que des images,
Et moi déjà
Je ne suis plus pour moi
Que le néant annihilant de la pensée.

Il perd les siens, et il se perd: les derniers poèmes parlent aussi de la vieillesse, hantée par la peur de la mort, mais veillée par les tendres mots de l'amour:

Dors à présent, coeur inquiet,
Dors à présent, va, dors.

Dors, l'hiver
T'a envahi, menace,
Crie : "Je te tuerai,
Tu n'auras plus sommeil."

Ma bouche, dis-tu, donne
Paix à ton coeur,
Dors, dors en paix,
Écoute, va, ton amoureuse
Pour triompher de la mort, coeur inquiet.

J'ai doucement voyagé entre ces énigmes et ces paroles fraternelles, et je me suis fait un ami. Ungaretti fait maintenant partie de ces voix que l'on aime retrouver, de ces mots que l'on se prend à relire, à redire...

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"D'une fleur cueillie à l'autre offerte
l'inexprimable rien"
C'est par ce court et très beau poème ("Toujours") que s'ouvre "La vie d'un homme" (Vita di un uomo), recueil de Giuseppe Ungaretti regroupant des textes parus entre 1914 et 1970.
Fondateur aux côtés d'Eugenio Montale et de Salvatore Quasimodo de l'école hermétique italienne, Ungaretti a toujours promu une poésie qu'il voulait sans rythme ni rime, non conventionnelle. Dans tout son parcours littéraire, il a défendu une écriture intimiste et sensible. Il perdit un enfant, terrible épreuve dont il ne se remis jamais et qui donna à son écriture un ton très douloureux, puis un élan mystique pour aboutir enfin à une phase de résignation. Cette dernière période qui coïncidera avec sa vieillesse donnera de magnifiques poèmes, pleins de maturité. Son écriture fut également inspirée par la vie quotidienne et les vicissitudes de son époque (les deux guerres mondiales, le nationalisme). Malgré cela, il a toujours voulu la tourner vers l'humain et surtout vers l'espoir.

Le poète se définissait souvent lui-même comme un "girovango", un nomade. Sa poésie tend pourtant à une recherche d'attachement, à un sentiment très fort d'unité, à une recherche ininterrompue de sens. Qu'elle soit dépouillée jusqu'à l'extrême (je pense ici aux deux magnifiques vers "M'illumino d'immenso" - Je m'illumine d'infini) ou dans des textes plus longs, sa poésie atteint toujours une vérité, un sentiment de pureté. Elle se déploie, se fait sens puis plénitude absolue, dans un style toujours allusif, tout en retenue, que l'on dirait minimaliste.

"La vie d'un homme" est un chemin que j'aime souvent emprunter. Il y a dans les poèmes de Giuseppe Ungaretti une grâce, une humilité et une ineffable beauté que le temps et mes différentes relectures (ce recueil m'accompagne depuis de très nombreuses années) n'ont jamais altéré.
À signaler la remarquable traduction des textes par Jean Lescure et Philippe Jaccottet.
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Le livre regroupe des poèmes pris dans différents recueils de l'auteur sur l'ensemble de son oeuvre et de sa vie.

Belles poésies, qui effleurent la vie, la mort, la religion, l'amour. Ce n'est pas désagréable, mais j'aurais aimé plus de rythme, plus de lyrisme.

Découverte plaisante, mais sans plus.
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Un recueil qui m'a laissé un sentiment mitigé.
D'un côté, la brièveté et la simplicité tranchante des poèmes m'ont assez plu. le style est efficace et sans fioritures. Les thématiques du désert, de la montagne, des saisons, de la guerre, de la vie, du temps sont certes des sujets souvent repris, mais il agréable de lire sous la plume d'Ungaretti une marque à la fois personnelle et touchante. Cependant, d'un autre côté, la voix monotone qui parcourt la lecture des poèmes ne m'a pas emporté plus loin. Toutefois, je ne peux en retirer un souvenir négatif.
Je laisse à d'autres la subjectivité et la sensibilité d'en parler mieux que je n'ai pu le faire ici...
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Une très belle découverte en poésie. Beaucoup de douceur et de musicalité dans ces poèmes, brefs, vifs.
Le style me fait un peu penser à celui d'Apollinaire, avec un peu de Charles Juliet.
Les poèmes, brefs, sont parlants et m'évoquent les bords de la Méditerranée.
Très émouvants et chantants, ils m'ont fait voyager et ils font saisir, toucher du doigt, un sens au monde.
Je recommande vivement la lecture de ce poète, que je regrette d'avoir découvert aussi tard.
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Citations et extraits (161) Voir plus Ajouter une citation
DiALOGUE

1966-1968
UNGA

12 SEPTEMBRE 1966

Tu es apparue à la porte
Vêtue de rouge
Pour me dire que tu es feu
Qui consume et renflamme.

Une épine m'a piqué
De l'une de tes roses rouges
Pour que tu suces à mon doigt
Un sang déjà presque tien.

Nous avons suivi la rue
Que lacère la verdeur
De la colline sauvage
Mais depuis longtemps je savais
Que de qui souffre avec foi téméraire
L'âge pour vaincre ne compte.

On était un lundi,
Pour nous prendre les mains
Et nous parler heureux
Il ne fut d'autre refuge
Que ce triste jardin
De la ville convulsée.
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PETIT MONOLOGUE - extraits
     
Se souvenir est signe de vieillesse,
Aujourd'hui je me suis souvenu de quelques haltes
De mon long séjour sur la terre
     

Avec, resurgi de l'ombre
Le faible tremblement des flammes
Sur la brûlure
D'un peu de cire vierge,
Et le jour, quelques temps après, nommé :
Tu es poussière, et tu retourneras à la poussière ;
Dans ce vide, par impatience d'en sortir,
Chacun, et nous aussi vieillards
Pleins de regrets
— Et nul ne sait sans en faire l'épreuve
Combien l'illusion étrangle
Qui ne vit que de regrets — ;
Impatient, dans ce vide, chacun délire,
Futilement, s'acharne
A se réincarner dans quelque fantaisie
Qui elle aussi sera vaine,
Et sa stupeur est grande,
Car les leurres du temps se renouvellent
Si vite qu'on ne s'en aperçoit point.
Aux enfants seuls siéraient les songes
Ils possèdent la grâce de candeur
Qui guérit tout dommage, si d'un souffle
Elle change les voix en elle, ou les rénove...
Mais l'enfance, pourquoi
Si vite devient-elle souvenir ?
Il n'est rien d'autre sur la terre, rien
Qu'une lueur de vrai
Et le néant de la poussière,
Même si, incurable fou
Vers l'éclair des mirages,
Dans son secret et dans ses gestes, le vivant
Semble se tendre toujours.
     
Un cri et des paysages 1939-1952 (à Jean Paulhan)
Traduit de l'italien par Philippe Jaccottet
pp. 263-264.
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IN MEMORIAM

Son nom c'était
Mohamed Scheab

Descendait
des émirs nomades
s'est suicidé
parce qu'avait
plus de Patrie

Aimait la France
changea de nom

Il fut Marcel
mais pas Français
savait plus vivre
sous la tente des siens
où l'on écoute
la cantilène du Coran
en buvant du café

Et ne savait
pas délivrer
la chanson
de son abandon

Je l'ai suivi
avec la patronne de l'hôtel
où nous vivions
à Paris
au numéro 5 de la Rue des Carmes
une ruelle en pente les murs fanés

Il repose
au cimetière d'Ivry
un faubourg qui semble
éternellement
dans une journée
où s'en va la foire

Et peut-être suis-je seul
à savoir encore
qu'il à vécu

Locvizza, 30 septembre 1916
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IL TE DEVOILERA

Reviens-moi, bel instant.

Jeunesse, parle-moi
En cette heure comme un gouffre.

Beau souvenir, assieds-toi un moment.

Heure de lumière noire dans les veines
Et des stridulations muettes des miroirs,
Des faux abîmes de la soif...

De la poussière plus profonde aveugle
Le bel âge promet :

Avec cette tendresse des premiers pas, lorsque
Le soleil aura touché
La terre de la nuit
Et dénoué chaque fumée en fraîcheur,
En retournant au ciel plus pâle
Il te dévoilera, le corps rieur.

1931
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DANS LE DEMI-SOMMEIL

Je veille la nuit violentée

L'air est criblé
comme une dentelle
par les coups de fusil
des hommes
renfoncés
dans les tranchées
comme les escargots dans leur coquille

Il me semble
qu'une ahanante
tourbe de cantonniers
pilonne le pavé
de pierre de lave
de mes routes
et je l'écoute
sans voir
dans le demi-sommeil.

Vallonello di Cima Quattro, 6 août 1916
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Videos de Giuseppe Ungaretti (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Giuseppe Ungaretti
« […] Jour après jour, Saba - de son vrai nom Umberto Poli (1883-1957) - compose le “livre d'heures“ d'un poète en situation de frontière, il scrute cette âme et ce coeurs singuliers qui, par leur tendresse autant que leur perversité, par la profondeur de leur angoisse, estiment pouvoir parler une langue exemplaire. […] […] Au secret du coeur, dans une nuit pétrie d'angoisse mais consolée par la valeur que le poète attribue à son tourment, cette poésie est une étreinte : à fleur de peau, de voix, une fois encore sentir la présence de l'autre, porteur d'une joie qu'on n'espérait plus. […] Jamais Saba n'avait été aussi proche de son modèle de toujours, Leopardi (1798-1837) ; jamais poèmes n'avaient avoué semblable dette à l'égard de l'Infini. le Triestin rejoint l'auteur des Canti dans une sorte d'intime immensité. […] […] Comme le souligne Elsa Morante (1912-1985), Saba est plutôt l'un des rares poètes qui, au prix d'une tension infinie, ait élevé la complexité du destin moderne à hauteur d'un chant limpide. Mais limpidité n'est pas édulcoration, et permet au lecteur de percevoir deux immensités : le dédale poétique, l'infinie compassion. » (Bernard Simeone, L'étreinte.)
« […] La première édition du Canzoniere, qui regroupe tous ses poèmes, est fort mal accueillie par la critique en 1921. […] Le Canzoniere est un des premiers livres que publie Einaudi après la guerre […] L'important prix Vareggio de poésie, obtenu en 1946, la haute reconnaissance du prix Etna-Taormina ou du prix de l'Accademia dei Lincei, ne peuvent toutefois tirer le poète d'une profonde solitude, à la fois voulue et subie : il songe au suicide, s'adonne à la drogue. En 1953, il commence la rédaction d'Ernesto, son unique roman, qui ne paraîtra, inachevé, qu'en 1975. […] »
0:00 - Titre 0:06 - Trieste 1:29 - le faubourg 5:27 - Lieu cher 5:57 - Une nuit 6:32 - Variations sur la rose 7:15 - Épigraphe 7:30 - Générique
Contenu suggéré : Giacomo Leopardi : https://youtu.be/osdD2h8C0uw Marco Martella : https://youtu.be/R9PPjIgdF2c Iginio Ugo Tarchetti : https://youtu.be/hnV93QZ6O1s Guido Ceronetti : https://youtu.be/mW1avxXaSKI Alberto Moravia : https://youtu.be/MgIVofYEad4 Pier Paolo Pasolini : https://youtu.be/-sWZYlXVZ-U Cesare Pavese : https://youtu.be/uapKHptadiw Dino Buzzati : https://youtu.be/ApugRpPDpeQ Sibilla Aleramo : https://youtu.be/Y24Vb0zEg7I Julius Evola : https://youtu.be/coQoIwvu7Pw Giovanni Papini : https://youtu.be/tvirKnRd7zU Alessandro Baricco : https://youtu.be/¤££¤74Giuseppe Ungaretti64¤££¤80 Giuseppe Ungaretti : https://youtu.be/_k1bTPRkZrk LES FILS DE LA LOUVE : https://youtu.be/ar3uUF-iuK0 INTRODUCTION À LA POÉSIE : https://www.youtube.com/playlist?list=PLQQhGn9_3w8rtiqkMjM0D1L-33¤££¤76LES FILS DE LA LOUVE77¤££¤ AUTEURS DU MONDE (P-T) : https://www.youtube.com/playlist?list=PLQQhGn9_3w8pPO4gzs6¤££¤39LES FILS DE LA LOUVE75¤££¤8 PÈLERINS DANS LA NUIT SOMBRE : https://youtu.be/yfv8JJcgOVM
Référence bibliographique : Umberto Saba, du Canzoniere, choix traduit par Philippe et Bernard Simeone, Paris, Orphée/La Différence, 1992.
Image d'illustration : https://itinerari.comune.trieste.it/en/the-trieste-of-umberto-saba/
Bande sonore originale : Maarten Schellekens - Hesitation Hesitation by Maarten Schellekens is licensed under a Attribution-NonCommercial-NoDerivatives 4.0 International License.
Site : https://freemusicarchive.org/music/maarten-schellekens/soft-piano-and-guitar/hesitation/
#UmbertoSaba #Canzoniere #PoésieItalienne
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