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EAN : 9782749210636
199 pages
Erès (20/08/2009)
4/5   1 notes
Résumé :

Freud a inventé et conçu la psychanalyse à partir de la clinique de l'hystérie dont il a fait le modèle de la névrose. D'elle devaient dépendre les grands concepts psychanalytiques : le refoulement, l'inconscient, les mécanismes de défense, le transfert... Les formes cliniques de la psychose n'ont jamais été absentes de la réflexion freudienne, mais, très rapidement, les éléments importants du modèle hystérique se sont révélés inadéquats à les contenir. Il e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Sacré Freud, il nous aura fait bien marrer. Il laisse un petit étron mal séché au soleil et tous ses successeurs se penchent et soufflent dessus pour qu'il durcisse enfin et vienne consolider le socle de la psychanalyse. Mais la bouse, ils l'étiaffent plus qu'autre chose.


Le petit étron en question, c'est la psychose. Faut savoir que Freud, il était juste bon à psychanalyser les névrosés et encore, on n'en est pas vraiment sûrs. C'est qu'il n'avait rien d'autre sous la patte que des hystériques. A partir de là, il a mis au monde des concepts divers et variés : le refoulement, l'inconscient, la projection, l'introjection, le transfert, etc.


De son vivant déjà, des sympathisants de la cause freudienne (Karl Abraham, C. G. Jung, Sandor Ferenczi, Victor Tausk) se sont emparés des petites briques de son modèle pour les appliquer à leurs propres observations, et ils se sont rendus comptes que le modèle formé à partir de l'hystérie ne contenait pas toutes les réalités de l'univers psychique, surtout quand on cause de psychose.


Dans ce livre, on aura donc droit à la diachronie du concept de la psychose et on évoquera quand même les quelques briques cassées par Freud en ce qui concerne cette structure mentale et ses hypothèses pour l'approcher en cabinet, tel un tigre face au benêt touriste de parc zoologique. Pour Freud, la psychose est le résultat d'un détachement de la réalité : la part libidinale autrefois dévouée aux objets revient sur le moi et provoque un délire primaire qui est la marque d'une relation narcissique au monde.


Le plus intéressant, c'est surtout de lire comment les ouailles de Freud, en voulant lui dorer la pilule théorique, se sont bien souvent trouvées dans des situations délicates qui remettaient en cause des points fondamentaux de la théorie.


Le conflit entre Jung et Freud s'élabore progressivement autour des questions concernant la différence entre l'hystérie et la démence précoce, le mécanisme de la paranoïa, le mécanisme de la réalité des souvenirs et la nature de la libido. Pour Jung, le délire dans la psychose résulte moins de l'élaboration personnelle d'une fantaisie que la déprivation de la singularité d'un individu, fasciné par les figures imaginaires archaïques et collectives. Il s'agit alors de rompre l'apparente singularité de ces figures pour enclencher le processus d'individuation, là où Freud semblait patauger avec plaisir dans le marasme fantaisiste des formations inconscientes.


Karl Abraham fut un disciple plus fidèle et tempéré. Sa psychologie génétique, considérant que l'introjection représente la modalité psychique de base et que le sadisme et la haine occupent une place importante dans les affections psychotiques, pose toutefois problème à l'égard de la conception freudienne de la sexualité infantile et prégénitale, avec tout son petit système de la topique. Pour Freud, l'objet est substituable car fondamentalement narcissique ; pour Abraham, ce n'est pas le cas et il faut distinguer les cas où l'investissement libidinal de l'objet s'est fait au stade oral, anal ou génital –entendu qu'il s'agit là moins de zones anatomiques que de stades temporels que doit franchir un individu.


Sandor Ferenczi, de même, fut globalement un bon disciple. Il s'éloigne seulement de la théorie énergétique de Freud pour élaborer une théorie expliquant comment le sujet vient à la réalité, en inversant les positions classiques. Ce n'est plus le sujet qui forme la réalité mais la réalité qui forme le sujet. Si le Moi freudien constitue l'instance par excellence, engagée dans le commerce avec la réalité, le Moi ferenczien a buté hors de ce corps la mégalomanie infantile en imposant la reconnaissance du pouvoir des forces de la nature. C'est ce processus qui ne s'est pas correctement réalisé dans la structure psychotique.


Victor Tausk, enfin, qu'on traite de sous-fifre de la psychanalyse obligé de se suicider pour en découdre de Freud, n'a commis qu'un essai véritablement dérangeant quant à la théorie freudienne : « de la genèse de l'appareil à influencer au cours de la schizophrénie ». Sous son aspect très orthodoxe, cet essai différencie deux formes de narcissismes (inné vs. acquis) et constitue le narcissisme comme élément fondateur du Moi. A partir de là, il rend compte du morcellement corporel du psychotique et ouvre le champ à la création d'une clinique du corps, conçue à partir d'une clinique différentielle de l'objet. Encore une fois, c'est l'apparente gratuité de la fantaisie dans la conception freudienne qui est remise en question. Tausk ne prend pas le psychotique pour un délirant ferme, il considère que sa symptomatologie témoigne de la résurgence d'un moment d'une ontogenèse.


Tout ça pour dire qu'après le père Freud, reste encore du boulot. La dissidence, même légère, a du bon, puisqu'elle a permis de réévaluer l'absence de transfert présumée, de remettre en cause le dogme de l'anobjectalité et d'interroger la fonction du langage en tant que lien au corps et à la réalité. Toutes questions qui, bien sûr, n'intéresseront que ceux qui se sentent quelques affinités avec la folie.
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
La psychanalyse sans fondement clinique n’est rien d’autre qu’une idéologie, parce qu’elle a d’abord été conçue comme une cure, c’est-à-dire un mode de traitement. L’effet thérapeutique que l’on doit exiger de la psychanalyse n’implique pas pourtant que celle-ci emprunte son cheminement et ses méthodes à la science médicale, dont il est fondamental qu’elle reste distincte, même si elle est pratiquée par des médecins ; c’est d’ailleurs la question du transfert, « l’un des grands axes de ce travail », qui marque les limites de ces deux domaines.
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Le rêve d’un petit enfant est évidemment une objection de choix à la théorie freudienne de fantasmes bâtis sur des souvenirs, et un argument supplémentaire en faveur de la thèse d’un inconscient phylogénétique.
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Pour [Ferenczi], la pensée elle-même n’est rien d’autre que cette relation symbolique, cette façon de maintenir ensemble « l’intérieur » et « l’extérieur », et où toute connaissance est d’abord reconnaissance.
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Le « sens de réalité » inaugure pour la psychanalyse non plus la venue du sujet au monde, mais l’advenue du monde au sujet.
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C’est la régression libidinale qui va désormais pouvoir rendre compte de la succession chez un même sujet de tableaux cliniques divers […].
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