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Marion Graf (Traducteur)
EAN : 9782881826610
128 pages
Editions Zoé (22/01/2010)
4.19/5   8 notes
Résumé :
En 1909, à Berlin, alors que ses romans valent à Robert Walser un début de gloire, son éditeur Bruno Cassirer fait paraître un recueil de poèmes illustrés d'eaux-fortes du peintre Karl Walser, frère de l'auteur.
Ces poèmes, écrits dix ans auparavant, sont pour certains les premiers textes de Walser à avoir été publiés, en 1898, dans les pages du quotidien bernois Der Bund. Première dans l’œuvre, cette poésie d'un jeune homme de vingt ans a déjà l'intensité mu... >Voir plus
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
PLACIDITÉ

Depuis que j'ai capitulé devant le temps,
je sens vivre en moi quelque chose,
une sérénité ardente et merveilleuse.
Depuis que je badine sans façon
avec les jours avec les heures,
mes lamentations sont closes.
Et d'un seul mot franc et direct
me voici délivré du fardeau
de mes fautes qui me nuisent :
le temps est le temps, il peut s'endormir,
il me trouvera toujours, brave
homme, fidèle au poste.
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SOIR

Noir jaune devant moi dans la neige luit
un chemin qui se perd sous les arbres.
C'est le soir, et lourd
est l'air imbibé de couleurs.

Les arbres sous lesquels je marche
ont des branches comme des mains d'enfants ;
elles implorent sans fin,
si douces quand je suspends mon pas.

Jardins et haies au loin
brûlent dans un obscur fouillis,
et le ciel embrasé voit, figé de peur,
les mains d'enfants qui supplient.
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NYMPHETTES 

Par ce terme, je traduis, exceptionnellement, l’allemand…
L’une de ces deux nymphettes
est aussi mignonne qu’une saladette
d’odorante et tendre doucette 
En Languedoc, d’où je viens, ce terme est un équivalent courant…
et a les plus jolies gambettes
et regarde en silence par la croisée
le paysage constellé de matinale rosée.
Les cheveux de l’autre nymphette sont frisés
comme un bouquet de fleurs ébouriffé.
Hors d’atteinte l’une est debout,
pure et sans garde-fou,
sur des jambes fines comme tout,
en corselet au soleil d’août.
L’autre embrasse et murmure : « Toi ! »,
elle en perd la tête d’émoi,
elle frémit, crépite, flamboie,
saisie par la passion jusqu’au foie,
son cœur à l’inquiétude en proie.
La première ne sait rien des jouissances
que chacune a dû payer de pénitence,
elle ressemble chaque fois qu’elle respire
à un cruchon que la volupté va remplir.
La seconde est envahie par des feux
lascifs et pieux-peccamineux,
et de l’ardeur de l’insatisfaction qui la meut
se défaire désormais ne peut.
Combien joyeuse est une vie, vrai bonheur,
qui hors de nous nous hisse vers les hauteurs.
C’est bien là le malheur, que nous collons aux lourdeurs
du corps, au lieu de nous envoler sans heurt
en des aspirations qui échappent à la pesanteur,
tels des ceps qui, voulant donner avec ferveur,
se trouvent bien de leurs tuteurs.
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VAN GOGH 


Ce pauvre homme
n’arrive pas à m’accrocher en somme.
Devant sa grossière palette
se dissipe en moi toute gentillette
échappée sur la vie. Hélas, avec quelle froideur transie
il a peint l’œuvre de sa vie !
Il n’a peint, me semble-t-il, qu’avec trop de véracité.
Si quelqu’un veut se prendre un tantinet
au sérieux dans l’exposition,
face à l’élan d’un tel pinceau il est saisi d’angoisse tout de bon.
Effrayant comment ces arbres, ces labours, ces champs
la nuit tels des rêves pesants
vous déchirent le sommeil en deux.
Grand respect en tout cas devant d’impétueux
efforts artistiques, en particulier
devant un tableau où l’on peut voir des aliénés
dans un asile les entourant.
L’ardeur du soleil, l’air, la terre, le vent,
il les a sans nul doute magnifiquement rendus.
Mais on a tôt fait de détourner la vue
d’une force d’elle-même aussi tourmentée
dans une œuvre qui du reste ne satisfait qu’à moitié.
On se met à avoir froid dans le dos,
si l’art ne sait rien faire de plus beau
que dérouler devant des âmes désireuses de voir
la nécessité qui l’habite, le devoir, le vouloir.
Quand je regarde un tableau, souhait
d’être caressé comme par une bonne fée,
allez, allez, la paix !
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LE RÉVOLUTIONNAIRE 

Tu avais un tas de chances dans ton assiette,
mais une obscurité aspirait en toi
à descendre aux oubliettes.
Quel motif inusité est ici, ma foi,
oiselettement chanté par moi.
Il faut que bien de la peine je me donne,
pour ne me faire haïr par personne.
Couvert d’une visière, ton visage plus ne se voit,
et un très singulier silence
est désormais de ta bouche la pitance.
Ô, que ne t’es-tu contenté
d’ironiquement pincer tes camarades au mollet,
plutôt que de te sentir tenu de cueillir des lauriers
en posant sous tout rapport au champion de la liberté.
La liberté, c’est ce qui se dit depuis
longtemps, est insouciante et étourdie.
À l’aide des ses jolis yeux,
si enjôleurs et insidieux,
la bougresse a déjà fait de plus d’un oison
un objet de raillerie et de dérision.
Tu prononças des paroles qui déplurent,
tu n’étais pas homme à soutenir des gageures.
Brentano connut la contrition, et toi, parce que tôt,
tu voulus gagner en deux coups de cuillère à pot,
tu as maintenant avant tout renom le repos.
Par quelque contrainte de corps
nous devenons pour ainsi dire plus forts.
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Vidéo de Robert Walser
Marion Graf présente le premier roman de Thilo Krause, "Presque étranger pourtant", qu'elle a traduit de l'allemand. Parution le 6 janvier 2022.
Un homme hanté par son enfance rentre au pays. Il y retrouve ses souvenirs intacts, les meilleurs comme les pires. Les allées de pommiers. le ciel immense. Les falaises de grès. Et Vito, l'ami d'enfance qui fut, dans un système asphyxiant, son compagnon d'apesanteur. Mais avec lui ressurgit le spectre de l'accident originel. Bientôt, la présence aimante de sa femme et de sa petite fille ne suffit plus à chasser le vertige. Des néo-nazis rôdent, une sourde menace plane, diffuse mais persistante. La nature échappe, se déchaîne. Quelle force pourra lever la chape de silence et d'hostilité ? le suspense subtil de ce roman place le lecteur au plus près du narrateur.
Thilo Krause est né à Dresde, en ex-Allemagne de l'Est, en 1977. Il est l'auteur de trois recueils de poèmes, tous primés. Presque étranger pourtant est son premier roman, lauréat du prix Robert Walser. Thilo Krause a l'art de traduire physiquement les émotions avec une précision et des images à couper le souffle.
https://editionszoe.ch/livre/presque-etranger-pourtant
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