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sur 2540 notes
« Le Blanc passe ses journées à essayer de vous tuer lentement, et parfois de vous tuer plus vite. Pourquoi lui faciliter la tâche ? Voilà au moins une chose à laquelle on pouvait dire non ».

Voilà ce que Cora, une jeune esclave, pense lorsque Caesar lui propose de s'échapper avec lui de la plantation Randall, dont le maître ignoble use et abuse de brimades et de tortures en tout genre.
Mais une horreur de plus, et finalement, elle dit oui.
Les voilà partis à travers les bois de la Géorgie, poursuivis par un homme dont la vocation est de reconduire en enfer les fugitifs : Ridgeway, le chasseur d'esclaves. « La terreur était déjà à leurs trousses, comme chaque jour à la plantation, et elle avançait à leur rythme ».

Nous sommes au 19e siècle, les Etats du Nord de l'Amérique ont aboli l'esclavage, mais ceux du Sud rechignent, il faut dire que le Dieu Coton mène la danse, et pour le cueillir, les grands propriétaires ont besoin de mains. Sans les payer, évidemment.

Ce roman passionnant et fourmillant d'informations réelles retrace l'histoire de ces esclaves qui veulent s'échapper, loin de toute cette fange, de ces coups de fouets, de ces viols, de ces meurtres dont la plupart des Blancs font preuve, car « si vous arrivez à garder quelque chose, c'est que cette chose vous appartient. C'est votre bien : votre esclave, votre continent. L'impératif américain.
Si Dieu n'avait pas voulu que les Africains soient asservis, ils ne seraient pas enchaînés ».
Heureusement, des états du Nord est né un mouvement abolitionniste qui organise le « chemin de fer clandestin », un réseau de routes clandestines suivi par ces malheureux. de chemins en chemins, de maisons plus hospitalières en caves, en granges dissimulées, ils peuvent arriver au Canada.
Colson Whitehead y introduit une invention particulière, évidemment non réalisable à l'époque : un VRAI chemin de fer souterrain. C'est la seule chose qui m'a rebutée dans ce roman. Pourquoi cet auteur Afro-américain qui a eu la révélation du passé de son peuple lorsqu'il avait 8 ans en regardant la série télévisée issue du chef-d'oeuvre de Alex Haley, « Racines », a-t-il été imaginer quelque chose de tout à fait irréel ? Cela enlève du crédit au récit.

Mis à part ce « détail » importun, l'histoire met en scène des faits tout à fait réalistes ainsi que des personnages s'étant impliqué en bien ou en mal dans l'esclavagisme. L'atmosphère délétère de l'époque est bien recréée, y compris chez les pseudo-sympathisants des Noirs. le racisme ambiant contamine tout, et les esclaves et ex-esclaves eux-mêmes ne peuvent jamais se montrer tels qu'ils sont, par peur d'une dénonciation.

Vraiment, je recommande ce roman à tout qui veut connaitre les fondements de l'histoire américaine. La ligne de faille tragique entre les Noirs et les Blancs continue à suinter encore aujourd'hui…
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L'auteur, avec un grand talent, imagine un chemin de fer souterrain qui conduit les esclaves du Sud des Etats-Unis vers la liberté au Nord et à l'Ouest. Ce "chemin de fer" a réellement existé sous une forme symbolique, une chaîne de solidarité qui a permis à de nombreux esclaves noirs de s'affranchir.
Après (entre autres) "La case de l'oncle Tom" (ouvrage qui a suscité des polémiques) ce livre-ci permet de prendre conscience du sort épouvantable réservé à de nombreux hommes, femmes et enfants sous le joug de l'esclavage sudiste.
L'héroïne, Cora, est attachante dans sa pugnacité.
J'aurais aimé en savoir plus sur sa vie à la fin du roman, c'est pourquoi j'ai mis un petit bémol à ma critique.
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La jeune esclave, Cora, au caractère bien trempé, vit dans les Etats-Unis du Sud , en Géorgie en pleine période de l'esclavage au 19ème siècle avant les guerres de Sécession.
La culture du coton bat son plein.
Sa grand-mère, sa mère, et Cora appartiennent à la même famille de maîtres.
Sa mère aurait réussi son évasion. le chasseur d'esclaves, Arnold Ridgeway, n'a pas réussi à la retrouver.
Caesar, un jeune esclave, nouveau sur la plantation, propose à Cora un plan d'évasion qu'elle commence par refuser mais après une scène particulièrement violente, elle accepte.
Le chemin est long, parsemé d'embûches.
Colson Whitehead a imaginé un réseau de chemin de fer souterrain à partir des étapes franchies par les anciens esclaves avec l'aide de leurs passeurs, à partir de témoignages recueillis sur les chemins empruntés.
Quand on lit Tracy Chevalier " La dernière fugitive", une habitante met une cabane dans son jardin à disposition des esclaves en fuite. Ces réseaux clandestins existaient bien et laissent des traces dans les témoignages et les romans. L'Underground Railway, lui est pure fiction de la part de l'auteur, il est presque magique.
Un roman cruel, intense, avec une écriture et des scènes percutantes.
On comprend pourquoi le Pulitzer et le National Book Award ont été attribués à l'auteur. L'histoire des Etats-Unis regorge encore de faits d'inégalité raciale malgré ce début de liberté depuis la fuite des esclaves, les années 1960 et l'actualité. le dernier magnifique roman que j'ai lu au sujet des activistes blancs contre les Afro-Américains était celui de Jodi Picoult " Mille petits riens" : un roman inoubliable.
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«  Ce sont des mains noires qui ont construit la Maison- Blanche, le siège de notre gouvernement national. Nous ne sommes pas un peuple mais une multitude de peuples différents . »

«  Comment une seule personne pourrait- elle s'exprimer au nom de cette grande et belle race —- qui n'est pas une seule race—- mais mille races, avec des millions de désirs, de voeux et d'espoirs pour nous- mêmes et pour nos enfants? . »

«  Car nous sommes des Africains en Amérique .
Une chose sans précédent dans l'histoire du monde . »
Voici trois extraits significatifs de ce roman Historique fort , visuel, intelligent et imaginatif , entre réalisme magique et fresque éminemment historique bien documentée, Impressionnante , sans concession : un livre politique .

Un conte cruel recélant avec précision toutes les myriades possibles de l'enfer de l'esclavagisme .....à l'affranchissement ;

La tyrannie implacable de cette Amérique esclavagiste, d'avant la guerre civile :
Le calvaire de la vie de la petite esclave Cora: voyage au coeur de la noirceur, hiérarchie du malheur: subir l'horreur du fouet à lanières , cruauté insigne du marquage au feu, battus , violés, traqués, misérables, bannis , pourchassés comme des bêtes, Des objets exhibés ....
L'auteur conte ces horreurs avec un réalisme qui déchire le coeur du lecteur , cette haine ignoble , ces tortures.
Il ne nous épargne rien.

Aux alentours de 1820, le mouvement anti- esclavagiste prend naissance dans les États du Nord , sous forme d'organisation d'entraide aux fuyards dit: « Chemin de fer Clandestin » caracolant dans des tunnels obscurs, reliant des bouts de gare clandestins à des humains ..
C'est l'occasion pour l'auteur de faire connaître au lecteur l'état d'esprit des différents États, en ce qui concerne l'esclavagisme : Géorgie, Caroline du Nord , Caroline du Sud, Indiana , Tennessee , les uns « abolitionnistes » , les autres , « répressifs » soit s'enfonçant dans la terreur, soit recélant de vrais- faux accents de liberté.
Un livre qui va bien plus loin que l'épopée de L'histoire de Cora, même si elle fait froid dans le dos.
Il déroule la tyrannie, la psychologie des protagonistes , le mal , la gangrène absolue du racisme, la monstruosité des châtiments.
C’est un récit sans pause, très bien construit , pas de perte de rythme , le ton est alerte, sensible, captivant , prenant , précis , riche à l’intrigue passionnante même si les personnages sont nombreux : Conelly, Cora , Caesar , Mabel, Terrance, Michael , Chester, Lovey, les frères Randall, Moses, Ajarry....
«  Il y avait une hiérarchie du malheur , des strates concentriques de malheur , et on était censé en tenir compte pour savoir ou se situer . »

«  Connais ta valeur et tu connaîtras ta place dans l’ordre des choses. Échapper aux limites de la plantation ,c’eût été échapper aux principes fondamentaux de son existence : Impossible. »
Impressionnant ! Éblouissant !
Mais ce n’est que mon humble avis , bien sûr !
Un livre acheté au «  Hall du Livre » , au hasard de mes déambulations pour sa jolie première de couverture, mais pas que ...
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On fait la connaissance de Cora, esclave trimant dans une plantation de coton en Géorgie, alors qu'elle est âgée de seize ans. le maître des lieux, Randall et ses fils, entretient la terreur pour dissuader dans l'oeuf toute idée de rébellion, ou de fuite : coups de fouet, viol. Ce jour-là, Caesar, esclave lui-aussi, vient lui proposer de s'enfuir avec lui.

Réticente au départ, une journée de maltraitance encore pire que les autres, elle finit par se résoudre à le suivre. Cora n'a pas eu une vie simple : Ajarry, sa grand-mère a été kidnappée dans son village en Afrique et après avoir survécu à une marche harassante jusqu'aux bateaux négriers, et résisté à la traversée en fond de cale, elle est vendue à la famille Randall, au marché où l'on exposait « la marchandise » pour évaluer ceux qui seraient assez forts physiquement pour résister au travail acharné dans les champs de coton (trop fatigant pour les Blancs que seul l'argent intéresse !)

Le seul « plaisir » d'Ajarry était de cultiver son petit lopin de terre (3m2 !) ce que faisait également Mabel, la mère de Cora. Un jour, ou plutôt une nuit, Mabel est partie et on ne l'a jamais retrouvée, malgré les kidnappeurs lancés sur ses traces par Randall. Échec qui va hanter autant le maître que Ridgeway, le chef des kidnappeurs, patrouilleurs ou miliciens comme on voudra, alors quand Cora décide de suivre Caesar, on imagine la rancoeur, la colère le désir de vengeance….

Caesar et Cora réussissent à ne pas se perdre dans les marais, faisant des détours pour rendre le pistage plus difficile et ils arrivent à la gare souterraine et le train (Underground Railroad) qui va les conduire d'abord en Caroline du Sud, où ils arrivent à trouver un endroit pour dormir et petits travaux. L'accueil est de prime abord chaleureux et nos deux héros décident d'y reste, laissant passer plusieurs trains mais Ridgeway les poursuit âprement avec sa bande.

Il faut repartir, mais elle devra le faire seule, direction le Tennessee puis l'Indiana, Ridgeway toujours à ses trousses.

Tout au long du parcours de Cora, on va rencontrer des Blancs abolitionnistes vrais, et d'autres qui se revendiquent comme tels mais n'hésitent pas à trahir, à dénoncer, à passer à tabac, tuer, pendre (il y a une avenue des pendus !) et bien-sûr ceux qui se revendiquent esclavagistes et se laissent aller sans problème à leur pires instincts, les nazis n'ont rien inventé, ni en théorie ni en pratique…

Voici par exemple la « philosophie » de Ridgeway :

Si les nègres étaient censés jouir de leur liberté, ils ne seraient pas enchaînés. Si le Peau-Rouge était censé conserver sa terre, elle serait encore à lui. Et si Le Blanc n'avait pas été destiné à s'emparer de ce nouveau monde, il ne le possèderait pas.

Tel était l'authentique Grand Esprit, le fil divin qui reliait toute entreprise humaine : si vous arrivez à garder quelque chose, c'est que cette chose vous appartient. C'est votre bien : votre esclave, votre continent. L'impératif américain.

Ne cherchez pas le train, il n'existe pas tel que le décrit l'auteur, en fait le terme Underground Railroad fait référence au réseau de routes clandestines utilisées par les esclaves pour franchir la ligne de démarcation entre les états esclavagistes du sud et les états du Nord avec les abolitionnistes qui les aidaient.

ColsonWhithead nous brosse un tableau de l'Amérique esclavagiste vraiment très détaillé, reprenant les expressions utilisées par les esclavagistes à l'époque, mais qui résonnent particulièrement avec le règne Trumpiste et le racisme revendiqué haut et fort par les suprématistes Blancs dont la parole a été libérée….

J'ai bien aimé le style de narration : l'auteur parle alternativement de tous les protagonistes, creusant leur personnalité, les chapitres consacrés à Ridgeway et à Ajurry par exemple sont très instructifs, et cela rend le récit moins dur à supporter.

J'ai bien aimé retrouver la plume de ColsonWhithead, dont j'ai beaucoup apprécié récemment « Nickel Boys » et ce roman, même si ce n'est pas un vrai coup de coeur, il n'en est pas passé loin et restera longtemps dans ma mémoire.

Ce roman qui, je le rappelle, a reçu le prix Pullitzer en 2017 ainsi que le National Book Award en 2016 devrait être mis entre toutes les mains, notamment des plus jeunes pour les sensibiliser à l'autre face du rêve américain…

J'ai beaucoup pensé au feuilleton TV « Racines » il y a longtemps, et je dois reconnaître que ColsonWhithead m'a donné envie de lire enfin le roman d'Alex Haley que je remets à plus tard depuis des années…
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Etre esclave au début du XIX· siècle en Géorgie, c'est un statut immuable, personne normalement ne peut s'échapper, car les maitres ont payé, et ne peuvent admettre que leurs biens, duquel ils disposent, s'en aillent. Eux peuvent revendre, à des particuliers ou dans des ventes aux enchères, dans des liquidations, et même au gouvernement, avec des conditions avantageuses : prêts et déductions fiscales. Mais il est impensable que des biens meubles, ce qu'ils se sont ingéniés à faire croire à propos des africains razziés dans les campagnes, massés sur les côtes, il est impensable que ces biens meubles s'échappent, car ils sont repris et crucifiés après tortures immondes en présence d'invités blancs de marque.
Ce qu'ils ne feraient pas à leurs animaux, ils le font subir à leurs esclaves.
Pour cela, ils payent des chasseurs, qui traquent les évadés.
Les esclavagistes ont payé leur main d'oeuvre pour travailler dans les champs de coton et d'indigo, alors pour faire accepter leurs exactions, ils ont fait croire et essayé de leur faire croire que cette main d'oeuvre n'était en fait pas vraiment des êtres humains.

Ça déculpabilise une bonne fois pour toutes.


Underground railroad, c'est l'odyssée d'une esclave née dans une plantation de coton, petite fille d'une dahoméenne capturée, qui tente tout de même le coup, et s'évade, comme beaucoup d'autres et comme sa mère l'a fait.

Colson Whitehead , à partir d'un fait réel, l'existence de certaines routes dont il existe une carte, routes qui sont prises par les esclaves pour sortir des Etats cotonniers esclavagistes et aller vers le Nord, imagine des chemins de fer souterrains, avec chefs de gare, conducteurs, réseau d'information, ceci organisé par des blancs qui risquent leur vie. L'abolitionnisme commence, mais dans le Sud posséder des écrits le prônant c'est la peine de mort assurée. Si tous les Noirs, qu'ils soient en fuite, affranchis, ou même complètement innocents sont lynchés (ces derniers, pour l'exemple,) et transformés en strange fruit, comme chaque vendredi, durant les festoiements des villages de Caroline du Nord, lynchages attendus et applaudis par la foule en délire, les Blancs les ayant aidés, ou cachés sont eux aussi exterminés.

Cependant, l'immigration irlandaise, sans intégration, fuyant la grande famine de leur pays pour retrouver la misère , les taudis, les égouts de l'Amérique, n'a fait qu'ajouter à l'opposition pas résolue entre le Sud esclavagiste pas prêt à accepter une « invasion noire » et le Nord, abolitionniste.
Ces Irlandais ou Allemands qui seraient payés et feraient le travail des Noirs, le coton, seraient une solution possible, cependant ils ne règlent pas le racisme.


Pourquoi a t il été si compliqué pour les Etats Unis de se dépêtrer de l'esclavage ? le roman se situe avant la guerre de Sécession, et déjà les utopies nordistes d'émancipation se heurtaient à l'idée sudiste qu'aucune compensation ne serait donnée pour les propriétaires, inacceptable puisqu'ils avaient payé, ça oui, ils avaient payé.
Il explique les racines du futur Ku Klux Klan, la raison de la guerre qui a affronté Nord et Sud, la difficulté pour Lincoln de faire admettre la Proclamation d'émancipation, et aussi le courage infini de ces esclaves qui bravaient les pires tourments en essayant de s'enfuir, et le courage infini des Blancs qui les aident comme ils peuvent à gagner le Nord.
Livre addictif, par la manière de nous faire côtoyer Cora, la petite maligne, qui sait que, même si elle a passé une grande partie de sa vie dans les chaines, chaque personne a son « maillon faible ». Et qui, comme Shéhérazade, parle à son futur bourreau, gagnant ainsi un temps précieux. Elle apprend à lire dès qu'elle le peut, alors que comme il est interdit de penser, il est interdit de lire dans la plantation, crime puni par la perte de ses yeux.

La situation de la petite rusée semble parfois s'améliorer, lorsqu'elle figure dans un zoo humain, où la vie dans les plantations est idéalisée, elle file le coton, assise derrière un rouet, puis connaît l'enfermement durant des mois dans un cagibi d'un coin de grenier, puis est dénoncée, et assiste à l'affrontement entre ceux qui veulent la pendre en public pour réjouir les villageois, et le chasseur de tête payé par le propriétaire pour la ramener.

Livre qui nous fait comprendre que la peur des blancs des Etats esclavagistes, refusant l'émancipation, est non seulement économique, mais aussi une peur « qu'ils nous prennent nos femmes », qu'ils se reproduisent et que leur nombre dépasse le nombre des blancs.

Peur sexuelle et démographique.

Peur aussi, pour ces protestants dont l'un récite les versets de la Bible à chaque coup de fouet qu'il assène, de l'enfer qui les attend. Ou que ces hordes sauvages venus de la jungle ne se vengent comme Nat Turner.

Peurs qui se cumulent et s'aggravent, dans ce Sud cotonnier pétri de bêtise et de petitesse comme certains enfants dénonçant leurs parents, ou voisins , ou même mari voulant se débarrasser de sa femme, volonté de stériliser les anciennes esclaves, récits moqueurs sur la fuite d'esclaves « à cause d'une peccadille », essai de faire croire que si les Noirs sont en esclavage, ils l'ont bien cherché, si les Amérindiens se sont fait décimer, ils ont perdu le combat, et pourtant grandeur et courage des
« Blancs justes » risquant leur vie.
Colson Whitehead en écrivant ce sublime livre, à la fois réaliste sur la condition des esclaves des plantations, et à la fois imaginatif, comme la couverture de son livre, où l'on voit les rails s'élever dans le ciel et devenir oiseaux, a voulu rendre hommage à ses ancêtres, il le fait d'une façon bouleversante et percutante.

A LIRE ; A MEDITER ; A GARDER ; A FAIRE LIRE
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Cora est une jeune noire de seize ou dix-sept ans, on ne sait pas bien car elle ne connaît pas sa date de naissance. Elle est née esclave dans cette Amérique du milieu du XIXe siècle, au milieu de la plantation des Randall. Sa mère a fui, l'abandonnant. Caesar, esclave récemment arrivé, lui propose de s'évader vers les états du Nord, en empruntant une ligne de chemin de fer souterraine organisée par des blancs abolitionnistes. le long voyage de Cora vers la liberté espérée sinon promise commence…
Le roman de Colson Whitehead a reçu les plus grands prix, le National Book Award et le Pulitzer, ainsi que la reconnaissance des lecteurs en étant élu roman de l'année 2016. On pourrait s'attendre à lire un ouvrage d'une grande et rare qualité, mais l'écriture de l'auteur n'est pas à la hauteur des distinctions. On n'est pas du tout devant un grand texte de littérature américaine. La narration est rapide, hachurée, des phrases courtes, un vocabulaire commun.
Reste l'histoire, partagée entre fiction, voir science-fiction car « l'underground railroad » n'est que la métaphore d'un réseau organisant la fuite des esclaves, et militantisme noir contre l'esclavagisme et le racisme. La démarche est légitime et louable, et il est toujours bon de se rappeler l'Histoire et ses travers, mais l'auteur en enfermant le récit dans des circonvolutions manichéistes finit par aliéner la réflexion du lecteur sur un sujet si horrible et flirte souvent avec une propagande dirigée, martelant son propos de scènes d'un sadisme rare des propriétaires blancs vis-à-vis de leurs esclaves noirs.
Oui, l'esclavagisme est une honte pour l'ensemble de l'humanité et l'Afrique a payé un lourd tribut, c'est une évidence. Mais dans le cadre d'un roman, il aurait fallu privilégier l'action plutôt que les idées politiques, et ne pas non plus couper le récit avec des focus sur tel ou tel personnage qui ne font que faire s'échouer davantage le frêle esquif romanesque de Colson Whitehead.
On ne doute pas que le sujet traité a largement contribué à l'attribution des prix, dans un contexte où un président noir finissait son deuxième mandat…
Prix Pulitzer 2017, National Book Award.
Traduction de Serge Chauvin.
Editions Albin Michel, Terres d'Amérique, 398 pages.
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Un livre ultra puissant qui mérite largement les récompenses qu'il a reçu.
Un road-trip sur fond de quête de liberté en plein dans l'Amérique ultra violente au temps de l'esclavage .Un livre qui nous force à regarder la réalité de la traite des noirs bien en face.
De la violence gratuite et rendue légitime par le gouvernement, la peur des blancs, un réseau de trains clandestin destiné à sauver ceux qui ont le courage ou la folie de s'enfuir. Tout cela nous plonge dans un passé pas si éloigné que cela ou les noirs étaient considéré comme du vulgaire bétail.
S'enfuir oui et aussi survivre face à la traque incessante d'une partie de la population et des chasseurs d'esclave.
Une ode à la liberté.
Un tout grand livre.
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On a beaucoup parlé et entendu parlé de ce livre : Underground Railroad. Il s'inscrit dans une actualité qui a sans doute contribué à son succès : l'Amérique de Trump divise, attise et réveille les anciens démons. Ils n'étaient pourtant pas bien loin, mais ce nouveau président semble leur ouvrir grandes les portes d'une réalité qui fait froid dans le dos.

"Si les nègres étaient censés jouir de leur liberté, ils ne seraient pas enchaînés. Si le Peau-Rouge était censé conserver sa terre, elle serait encore à lui. Et si le Blanc n'avait pas été destiné à s'emparer de ce nouveau monde, il ne le possèderait pas.
Tel est l'authentique Grand Esprit, le fil divin qui reliait toute entreprise humaine : si vous arrivez à garder quelque chose, c'est que cette chose vous appartient. C'est votre bien : votre esclave, votre continent. L'impératif américain."

Ce qui se murmurait tout bas, se revendique haut et fort… La littérature essaie de réveiller les consciences et n'y arrive pas si mal, je trouve : La servante écarlate de Margaret Atwood a généré un élan sans commune mesure et Underground Railroad rappelle les ravages de l'esclavage et ce qu'il fallait de force, de volonté, de courage et autant de chance pour s'en échapper. Et s'en libérait-on vraiment ? Une fois les chaînes à terre, ce sont d'autres entraves qui prenaient le relais. Pour beaucoup, elles sont encore là aujourd'hui…

l'Underground Railroad, c'est ce réseau qui aida les esclaves à recouvrer leur liberté, c'est une réalité, mais aussi un mythe, une de ces belles choses qui aide à survivre quand l'espoir n'a plus sa place. Cora, une jeune esclave de 16 ans, propriété d'un blanc sadique et tortionnaire, va accepter de partir avec Caesar, une nuit, pour atteindre ce chemin de fer souterrain, promesse de vie et de liberté ! On va la suivre de la Georgie en Caroline du Sud et du Nord, passant par bon nombre d'États, fuyant toujours et encore, un chasseur d'esclave lancé à ses trousses.

Peut-être fallait-il être seule au monde comme Cora pour y arriver ? Ne pas regarder en arrière pour ne pas flancher ? Car l'échec, c'était la mort assurée !

Colson Whitehead va nous faire vivre sa fuite, sa traque, mais aussi nous donner à voir la réalité de ce qu'était la vie d'un esclave à cette époque, les dissensions entre esclavagistes et abolitionnistes qui mèneront à la guerre, l'apprentissage de la liberté qui ne passe pas seulement par l'absence de chaînes, mais aussi par l'émancipation, grâce à l'apprentissage de la lecture et de l'écriture, la rémunération du travail, la revendication de l'égalité des droits pour tous les Hommes, peu importe leur couleur, … En lisant Underground Railroal, on s'aperçoit que la lutte sera longue, si tant est qu'elle soit terminée, ce dont je doute !

Ce qui fait la force de ce livre, je pense, c'est son approche « pédagogique ». L'auteur fait vivre ses personnages, moins pour nous faire compatir à leur destin, que pour nous les donner en exemple, pour nous montrer que malgré toute cette horreur, ces femmes et ces hommes de l'Underground Railroad, que l'on croyait sans destinée, sans avenir, et sans aucune chance de réussite, ont résisté, sans jamais baissé les bras et y sont allés…

"Le monde du dessus doit être tellement ordinaire comparé au miracle en dessous, le miracle qu'on a créé avec sa sueur, avec son sang. Le triomphe secret qu'on garde dans son cœur."

Une belle lecture partagée pour cette dernière pioche de l'année !
Lien : https://page39web.wordpress...
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L'Underground Railroad désigne un réseau clandestin organisé par des abolitionnistes et des esclaves affranchis, qui permit au XIXème siècle, avant la guerre de Sécession, la fuite de nombreux esclaves noirs aux États-Unis. Malgré son nom, il n'était pas du tout une véritable voie ferrée souterraine, il en était l'image, même si le chemin de fer a joué un rôle fondamental dans ce réseau d'aide aux esclaves fugitifs.
La particularité du roman de Colson Whitehead est d'introduire dans le récit un véritable réseau ferroviaire souterrain. C'est une manière romanesque voire fantastique d'aborder un sujet éminemment politique qui ne questionne d'ailleurs pas que le passé. C'est donc l'idée d'une métaphore qui prend totalement vision et corps dans le récit.
Ce n'est pas tout à fait un coup de cœur, mais presque... Il a manqué selon moi parfois des émotions chez les personnages ; cependant j'ai envie d'en dire un grand bien parce que ce livre doit être lu, doit vivre, doit vibrer dans les mains de ceux qui le liront. Il est beau.
Avant d'entrer dans ce roman, je vous invite à regarder le magnifique dessin de la jaquette : nous voyons les rails et les traverses d'un chemin de fer quitter le sol, prendre la tangente, s'éparpiller dans le ciel en un nuage d'oiseaux. Se perdre dans la contemplation de cette jaquette est déjà une manière d'entrer dans ce livre...
L'histoire commence en Géorgie, dans une plantation de coton quelques années avant la guerre de Sécession. Cora est une jeune esclave, abandonnée par sa mère, qui s'est enfuie quelques années plus tôt. Quelques pages auparavant, nous avons pu apercevoir d'où venait Cora, du moins d'où venaient les siens, sa grand-mère par exemple. J'ai trouvé particulièrement émouvant ce premier passage où nous découvrons la manière dont celle-ci est arrachée de sa terre africaine, puis son arrivée sur le sol américain, cette violence immédiate...
En général, les esclaves ne peuvent s'enfuir et lorsqu'ils tentent de le faire, ils sont aussitôt pourchassés, une énergie diabolique et de manière savamment organisée, avec la complicité des populations collaboratrices, permet en général de retrouver les fugitifs qui sont aussitôt pendus dans des conditions atroces.
Cora est une jeune fille qui est confrontée quotidiennement à la cruauté et à la brutalité de ses « maîtres ». Elle voudrait fuir, sachant le sort qui risque de lui être réservée. Elle fuit avec Caesar qui la désire, lui a fait des avances quelques jours auparavant ; il s'est proposé de l'aider à accomplir ce rêve presque impossible. C'est dès lors une longue fuite, dans les campagnes, dans les marécages, dans les granges et ils savent qu'ils seront traqués très rapidement comme des gibiers.
Leur errance, leur cavale est éprouvante. À la faveur d'un récit haletant, j'ai été happé dans le sillage de ces amants en fuite.
Et ma crainte était que cela allait bien vite mal tourner à un moment ou un autre.
Alors j'ai décidé de fuir avec eux, je ne sais pas ce que vous auriez fait à ma place.
Nous avons couru dans ces marais, nous étions libres, formidablement libres, je me rappelle que nous avons ri, éclaté de rire parmi les ajoncs et les eaux stagnantes, même si nous savions que notre fuite serait repérée, peut-être seulement dès le lendemain, nous avions encore une bonne longueur d'avance.
Plus tard, tout ne s'est pas passé comme prévu. Nous nous sommes cachés dans le grenier d'une famille d’abolitionnistes blancs. Je pensais que ce fameux train souterrain était un mythe. Il a fallu que je le vois de mes propres yeux. Un train, des rails, des chefs de gare, Incroyable !
Nous pensions qu'il était facile de passer d'un État à l'autre, quitter les États du sud comme un saut de puce, rejoindre la Caroline du Nord. Mais nous étions traqués par Ridgeway, ce chasseur d'esclaves. Un type cruel, vénal, impitoyable, qui ne lâche jamais sa proie, mais vraiment jamais.
Plus tard je me suis réveillé, pas facile de revenir de cette gare souterraine. J'espère que les passagers clandestins sont arrivés à bon port. Je pense que oui, du moins pour certains.
Je suis encore sur le quai de cette gare souterraine, sans doute invisible de tout le monde. Je referme ce livre et j'entends revenir dans le froissement des pages les cris lointains de ces hommes, ces femmes, ces enfants, traqués comme des bêtes dans leur fuite éperdue, tendant leurs mains meurtries à travers la nuit que viennent déchirer d'autres mains là-bas pour les agripper au balastre du jour.
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