A lire pour les amateurs de séries comme moi.
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L’idée révolutionnaire que met en œuvre cette fiction magistrale, c’est qu’une série télévisée de qualité doit avoir de la mémoire, une conscience aiguë du monde environnant et de la suite dans les idées. À la maîtrise au long cours des histoires-fleuve qu’elle raconte, Hill Street Blues ajoute des emprunts constants à l’actualité, à la littérature, aux objets de culture dite populaire (rock et musique de jazz, comic books, romans policiers, dessins animés) et ne cesse d’expérimenter pour préparer l’avenir. Un acteur, et non des moindres, incarne à lui seul cette expérimentation permanente. À deux reprises, au début et à la fin de la série, il campe des personnages de flic équivoque. Le premier, Benedetto, est corrompu mais ne manque pas de sens moral : il se suicide. Le second, Norman Buntz, quoique moins trouble, recourt toutefois à des méthodes pas toujours orthodoxes. Sa personnalité lui vaudra de devenir l’un des protagonistes les plus marquants des deux dernières saisons, au point que le personnage sera brièvement repris dans un spin-off, Beverly Hills Buntz (1987-1988). L’acteur, c’est Dennis Franz, interprète de plusieurs films de Brian de Palma. En 1993, David Milch, producteur exécutif des deux dernières saisons de Hill Street Blues, écrira pour Franz un nouveau rôle de policier : celui d’Andy Sipowicz, flic déchu dont NYPD Blue conte la rédemption. La filiation entre Benedetto, Buntz et Sipowicz est claire. Le message l’est aussi : la création télévisée se nourrit de tout, y compris d’elle-même, et c’est une entreprise de longue haleine. À partir de Hill Street Blues, ce que les grands producteurs-scénaristes de télévision élaborent et revendiquent, semaine après semaine, série après série, c’est, tout simplement, une œuvre. Ni plus, ni moins.
Comme nous le verrons, la plupart des séries décrites dans ce livre s’interrogent sans arrêt sur le sens de ce qu’elles racontent, questionnent les valeurs plus qu’elles ne les affirment, anticipent sans cesse des évolutions sociales ou psychologiques inéluctables, rappellent des vérités masquées ou oubliées qui dépassent largement le cadre de la société américaine. C’est cette volonté de décryptage et de dénonciation du monde qui rend les téléfictions américaines si impressionnantes et si efficaces. L’ambition – ou, devrais-je dire, la prétention – des « fictions françaises de qualité » est, d’abord, de « faire de l’art ». Très peu y parviennent. Moins nombreuses encore sont celles qui transmettent un enseignement utile à leurs spectateurs. L’ambition des séries américaines de qualité est, plus modestement de montrer et d’émouvoir, de secouer les spectateurs, de leur faire ouvrir les yeux, de les empêcher de sombrer dans la torpeur. Comme nous allons le voir, elles veulent, en même temps, distraire et donner à réfléchir.
Ce que l’on sait moins en France, c’est que l’ombre de The Twilight Zone plane sur un très grand nombre de productions télévisées actuelles. L’investissement personnel et le contrôle total, scénaristique et artistique, qu’exerça Serling sur sa création anticipent ceux des grands producteurs-créateurs d’aujourd’hui, de Steven Bochco à David E. Kelley. À une époque où la fiction télévisée devenait le royaume de la sitcom, de la série policière et du western à suivre, The Twilight Zone ouvrait une quatrième voie : celle d’un rendez-vous hebdomadaire sans aucun point fixe sinon celui de la relation établie entre un conteur et son public par la seule magie de la narration. The Twilight Zone était un lieu d’imagination sans entraves, où tous les fantasmes étaient permis, mais d’où morale et éthique n’étaient jamais absentes. Ce que disait Serling, et ce que ses spectateurs ont retenu, c’est que l’inquiétante étrangeté fait partie de la vie.
"Bienvenue aux éditions P.O.L", un film de Valérie Mréjen. Pour les 40 ans des éditions P.O.L, quelques un(e)s des auteurs et des autrices publié(e)s aux éditions P.O.L écrivent une carte postale et laissent un message aux éditions P.O.L.
Avec par ordre d'apparition de la carte postale: Violaine Schwartz, Jean-Paul Hirsch, Lucie Rico, Emmanuel Lascoux, Jacques jouet, Philippe Michard, François Matton, Frédéric Boyer, Catherine Henri, Suzanne Doppelt, Lamia Zadié, Marianne Alphant, Suzanne Duval, Laure Gouraige, Emmanuel Carrère, Jean Rolin, Elisabeth Filhol, Célia Houdart, Nicolas Fargues, Nicolas Bouyssi, Louise Chennevière, Frédérique Berthet, Marie Darrieussecq, Jocelyne Desverchère, Jean Frémon, Kiko Herrero, Julie Wolkenstein, Emmanuelle Bayamack-Tam, Liliane Giraudon, Frédéric Forte, Pierric Bailly, Valère Novarina, Hélène Zimmer, Nicolas Combet, Christian Prigent, Patrice Robin,, Emmanuelle Salasc, Alice Roland, Shane Haddad, Mathieu Bermann, Arthur Dreyfus, legor Gran, Charles Pennequin, Atiq Rahimi, Anne Portugal, Patrick Lapeyre, Caroline Dubois, Ryad Girod, Valérie Mréjen / Dominique Fourcade, Marielle Hubert, Robert Bober, Pierre Patrolin, Olivier Bouillère, Martin Winckler, Jean-Luc Bayard, Anne Parian, Nathalie Azoulai, Julie Douard, Théo Casciani, Paul Fournel, Raymond Bellour, Christine Montalbetti, Francis Tabouret, Ryoko Sekiguchi,
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