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EAN : 9789973580351
270 pages
Elyzad (25/08/2011)
4.28/5   54 notes
Résumé :
Dans la bonne ville de Santa Clara, celle qui produit le meilleur rhum du pays, personne n’est au courant de la révolution que le dictateur Alvaro Benitez a menée il y a une vingtaine d’années. Les habitants vivent et cultivent au gré des sérénades d’Ibrahim Santos, musicien météorologue. Alors forcément, l’intrusion des troupes armées révolutionnaires, et plus encore, l’arrivée d’un jeune ingénieur agronome brillantissime, vont quelque peu bousculer les habitudes..... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (25) Voir plus Ajouter une critique
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Lorsqu'on a lu un livre de cet auteur on a qu'une seule envie lire les suivants. Et je ne fus pas déçu. C'est un conte philosophique mêlant réalité et poésie.

On y découvre des personnages attachants et d'autres issus du pouvoir qui le sont beaucoup moins.

Tout démarre d'un rhum délicieux, à l'apothéose des sens, si merveilleux que le dictateur Alvaro Benitez veut connaître d'où vient ce breuvage et l'exploiter au maximum.
Mais la ville de Santa Clara est un lieux isolé, si isolé qu'ils ne sont pas au courant de la révolution qui s'est produite, il y a une vingtaine d'année… de là leur vie va être modifié…

Une très beau conte contemporain… qui donne l'espoir d'un monde nouveau.

Extrait :

"A tous les dictateurs du monde, regardez donc défiler les heures à vos montres d'or et de diamants. Les peuples vous arracheront leurs rêves, les peuples sonneront votre glas."

elyzad 

Bonne lecture !
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WOUAH ! Si jamais on peut en avoir plein les yeux avec un livre ce serait celui-ci !
Cette lecture est un enchantement. C'est beau, subtile, haletant, fort. La musique, le soleil, les couleurs, on vit dans ce petit village oublié pendant toute la lecture.
Ce jeune auteur a réussi à me transporter dans une ambiance entre Steinbeck et Marquez. Quel talent !
C'est d'autant plus poignant quand on pense que le livre a été écrit avant la révolution en Tunisie et publié après. Je me dis que c'est pour cela que c'est si subtile : dénoncer un système tout en évitant de prendre des risques inutiles.
Je suis donc officiellement fan de Yemen Manai et je vous conseille très sincèrement ce livre.
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Coup de Coeur
Nous sommes à Santa Clara, petite ville créée dans les Caraïbes par une bande de soiffards .Ils se sont installés loin du regard des autres, fondant leur ville, vivant de leurs récoltes et produisant du RHUM merveilleux, oubliant le monde extérieur et ses mouvances politiques et révolutionnaires. Que demander de plus ? Ecouter la sérénade d'Ibrahim Santos tous réunis sur la place la bouteille de rhum à la main et boire et danser jusqu'à l'épuisement, Leur vie aurait continué à être paradisiaque si le nouveau président dictateur Alvaro Bénitez n'avait eu l'occasion de gouter à ce rhum !
Les ennuis vont commencer, une fois repérés sur la carte, un jeune ingénieur frais émoulu de la faculté débarque et veut leur faire appliquer des « méthodes modernes d'agronomie »
Je m'arrête là et vous invite à découvrir ce texte sorte de conte poétique, philosophique et politique où l'utopie n'est pas loin mais où tout cela pourrait bien arriver un jour.
A noter que ce texte écrit par un écrivain tunisien vivant à Paris est paru à Tunis juste après le départ du président Ben Ali !
Prix biblioblog 2012 A découvrir sans hésitation
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Chacun connait le fameux petit village gaulois qui résiste farouchement à l'envahisseur… Mais avez-vous déjà entendu parler de Santa Clara ? C'est un tout petit village perdu au fond d'un pays des Caraïbes, mais qui pourrait se situer dans bien d'autres contrées. À Santa Clara, il fait plutôt bon vivre. On y cultive le meilleur rhum qui soit grâce aux techniques ancestrales et aux prévisions chantées du musicien météorologue Ibrahim Santos. Et puis on y vit tranquille, si tranquille que la révolution n'a pas touché cette contrée isolée… alors qu'elle a eu lieu il y près de vingt ans !

Mais un beau matin, le Président-Général Alvaro Benitez décide de trouver d'où vient le sublime rhum qu'on lui a servi et envoie le capitaine del Horno en émissaire, car le village n'est même pas répertorié sur les cartes du pays, pour préparer ensuite l'arrivée d'Alfonso Benitez (premier ministre et frère du président) et d'Alvaro Ulribe, Ministre de l'Agriculture. Car ce rhum magique, envoutant, inégalable pourrait bien devenir le fleuron du pays, sa fierté, et leur permettre enfin d'avoir une vraie place parmi les plus grands pays de la planète.

Mais quelle surprise lorsque le capitaine entre dans ce village du bout du monde où flotte encore le drapeau de l'ancien président, et où rien n'a été rebaptisé ! Avant la visite du frère du dictateur, il va falloir remettre tout ce petit monde dans le droit chemin et le voilà s'activant pour faire rebaptiser les rues, changer les portraits de l'ancien dictateur, apprendre l'hymne national aux habitants, et inciter la foule à crier « vive la révolution ! ».

La première partie de ce conte est totalement délectable, drôle à souhait et je me suis surprise à relire plusieurs fois les pages pour en saisir toute la finesse, l'humour, le sens caché également. Car même si ce récit est traité drôlement et avec légèreté, le lecteur comprend bien vite qu'il se cache sous les mots bien autre chose. Impossible de ne pas penser à d'autres dictatures ou d'autres régimes politiques, et notamment à la Tunisie, pays de Yamen Manai, en proie au joug de son président alors qu'il écrivait ce roman (avant le fameux printemps 2011). Yamen Manai précise d'ailleurs dans la préface écrite en mai 2011 : « Je ne sais quel accueil aurait eu ce livre si le pays était toujours entre les mains de Bonnie and Clyde. Mes angoisses ont été réduites en cendres par le sacrifice d'un homme puis balayées par la révolte populaire. Que c'était magnifique ! Pourvu que cette montagne de dignité n'accouche pas d'une nouvelle souris manipulatrice. »

Le conte devient par contre beaucoup plus noir et plus dur lorsqu'arrive dans le village l'ingénieur agronome Joaqu'n Calderon. Sa mission est d'appliquer les méthodes modernes de culture prônées par le Ministère de l'Agriculture et de faire oublier aux paysans leurs pratiques hors d'âge, pour favoriser le développement de la production. Il va arroser d'engrais ultra modernes les champs de cannes à sucre, utiliser les désherbants les plus puissants, fertiliser à tout va, construire une véritable usine, et n'est d'ailleurs pas peu fier quand les cannes s'élèvent à perte de vue et de hauteur dans les champs. Et bien sûr, il voue une admiration sans bornes à son fameux baromètre, qui peut calculer de façon scientifique le temps qu'il va faire, bien plus fiable que les prédictions d'Ibrahim ! L'auteur critique alors plus ouvertement la société de consommation, qui sacrifie son patrimoine pour d'hypothétiques rendements, qui ne voit pas plus loin que le bout de son nez avide et pressé.

Yamen Manaï sous couvert d'un récit léger et drôle met le doigt sur l'absurdité des régimes totalitaires et souvent celle de leurs dirigeants. À cela, il oppose la sagesse du peuple, qui respecte les cycles de la nature, a gardé la foi dans les choses mystiques ou magiques et prend la vie comme elle vient en se réjouissant de ce qu'il possède, sans regretter ce qu'il n'a pas. le bon sens contre la stupidité et la cupidité (soeurs jumelles), éternel combat… Comme nous sommes dans un conte, tout finira bien dans le meilleur des mondes et les « méchants » prendront une sacrée déculottée, mais laisseront malgré tout l'empreinte de leur passage dans le village, qui n'en sortira pas complètement indemne. Est-on jamais indemne de la bêtise humaine ? Il faut dire aussi que les habitants du village doivent subir la colère de Calderon, qui censure les sérénades, fait rechercher et confisquer tous les instruments de musique (antirévolutionnaires !) et devient violent. Il y aura même des morts…

Le fantastique se mêle au récit poétique, et la magie rode dans ce pays, transportée par la musique d'Ibrahim Santos. Il faut dire que cet Ibrahim est un personnage bien mystérieux. Descendant de Salem Sandos, poète météorologue compagnon de Chistophe Colomb, et arrivé dans le village par hasard (hasard, vraiment ?), il annonce dans ses sérénades le temps à venir pour que les habitants du village puissent cultiver leur terre de la meilleure façon qui soit. C'est un mystique, tout comme la gitane Lia Carmen qui lit l'avenir dans le marc de café et a vu comment se terminerait l'histoire dans la tasse de Calderon.

Ce roman a reçu, entre autres, le prix Biblioblog, et l'auteur, rencontré à Lille à la Librairie Tirloy, a raconté que l'idée de ce roman lui était venue lors d'un voyage à Cuba, dans un village où il s'est aperçu que ne trônait aucun portrait, aucun panneau publicitaire. Un village coupé du monde, des médias et de la politique ? L'occasion était trop belle pour oublier ce détail et a permis à La sérénade d'Ibrahim Santos de prendre forme dans son esprit, pour le plus grand bonheur des lecteurs. Ce conte, métaphore de la dictature tunisienne, et de bien d'autres dictatures dans le monde, permet de s'amuser tout en offrant une réflexion profonde sur les états totalitaires et l'empreinte qu'ils imposent à leurs habitants.

Une petite merveille portée par une écriture sensible, extrêmement poétique, pleine d'humour et parsemée également de références littéraires et historiques, dont le lecteur se régalera, à lire et relire absolument ! Et un jeune auteur à suivre !
Lien : http://liliba.canalblog.com/..
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Il a un curieux talent, Ibrahim Santos : jouer une sérénade sur son violon ou sa viole d'amour lui inspire des vers qui s'achèvent tous par une prédiction météorologique ! Au point qu'aucun agriculteur de Santa Clara ne se risquerait à rentrer sa canne à sucre sans l'avoir d'abord écouté !

Curieuse ville, aussi, que cette petite ville perdue à trois jours de voyage de la capitale. Une gitane y reçoit des infos alarmantes sur le futur proche (une hirondelle qui se fracasse contre votre vitre, égale cataclysme!), un barbier plein de sagesse, un maire furieusement pétri de son importance et attaché à sa richesse, à savoir des centaines de cochons amoureusement élevés, un vieillard qui ne sait plus de quand il date et a perdu la plupart de ses souvenirs, un idiot de village scotché à sa trompette, tout un petit monde à la Bunuel qui vit heureux, à produire le meilleur rhum du monde dans un contexte d'une parfaite sérénité.

Donc, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Jusqu'au jour où... ! Une bouteille du précieux breuvage atterrit sur la table du Général-Président révolutionnaire, Benitez, qui ne s'en remet pas et veut plus de rhum, tout le rhum produit à Santa Clara. Son frère le Premier Ministre envoie donc un émissaire dans cette ville perdue, on l'annonce, stupeur ! La ville vit comme il y a vingt ans, avant la « révolution qui a sauvé le pays », comme si de valeureux révolutionnaires n'avaient pas démis le Général Burgos, pas libéré le bon peuple de son joug ! Il faut donc, au risque de redoutables représailles et dans l'urgence débaptiser places et rues, apprendre le nouvel hymne révolutionnaire, bref effacer les traces d'un dictateur pour afficher celles du suivant !

On ne cesse de rire à la lecture de ce rafraîchissant ouvrage qui pose pourtant les bonnes questions sur ce qu'est (ou doit être) le pouvoir politique, la vraie qualité de vie, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Sans verser dans le gémissant « C'était tellement mieux avant », l'auteur met en valeur la qualité des âmes et des coeurs, la valeur des vertus ancestrales, le partage et la solidarité, le tout dans se poser en donneur de leçons mais en condamnant fermement les dérives dictatoriales au nom de la liberté des peuples. Conte philosophique, conte écologique, joli texte qui alerte tout en amusant.

Bien sûr, on cherche des « clés », un petit pays caribéen, deux frères pilotant une dictature, des militaires aux ordres, de la musique partout, des fumeurs de cigares, une rhumerie réputée, un rêve de progrès fulgurant, on peut avoir une idée...

Le livre vaut surtout pour son style, des petits tableaux frais comme des aquarelles, drôlatiques comme des pages de Rabelais, instructives comme le « Requiem por un campesino espanol » de Ramon Sander, ébouriffante comme des passages de Garcia Marquez, rebrodés d'extraits de poètes arabes, le tout au son du luth arabo-andalou et des claquements de bottes. Un spectacle complet, qui laisse à penser, à se réjouir, à craindre pour la suite de notre histoire, à se méfier des solutions extrêmes au nom de la prétendue utilité publique.
Un livre qui éveille, qui réveille, un livre intelligent et savoureux, un excellent livre !
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
"A tous les dictateurs du monde, regardez donc défiler les heures à vos montres d'or et de diamants. Les peuples vous arracheront leurs rêves, les peuples sonneront votre glas."

elyzad
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Ainsi, sous le ciel de Santa Clara, un rhum à peine extrait avait le goût d'un rhum trois ans d'âge, un rhum trois ans d'âge avait le goût d'un rhum sept ans d'âge, et un rhum quinze ans d'âge paraissait éternel.
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Le soir tomba. La lune était belle et ronde et pas une constellation ne cachait ses étoiles. L'air léger portait dans tout Santa Clara l'odeur de la viande de porc grillé, et faisait geindre le maire qui gisait par terre, lampes éteintes, dans l'obscurité de sa maison.
Le vieux Ruiz s'était déniché une nouvelle canne. Il était dans son jardin, debout devant le feu, et mettait sur le grill des côtes épaisses qu'il avait salées et malaxées avec du romarin.
"J'avais raison, il est bien juteux !"
Alfonso Bolivar était assis derrière lui. Sa chemise était nettement moins blanche que le matin même. Il jeta par terre l'os de la monstrueuse côte qu'il venait de s'envoyer.
— Vive la Révolution ! dit-il en riant. Il se lécha les doigts et prit une gorgée de la bouteille de rhum qui traînait par terre. Si une vieille pierre comme toi ne s'y connaissait pas en cochons ! Tu devais même être là quand le Bon Dieu les a créés.
Nelson Ruiz opina de la tête.
— Oui, j'étais là ! Il porta à sa bouche une côte grillée et mordit dedans. C'est même moi qui lui ai demandé de les créer !
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Une mouche à la cuirasse verte et luisante n'arrêtait pas de se poser sur le bord épais de ses narines. [...] Il levait le bras en direction de la foule et faisait envers elle de grands gestes elliptiques, comme s'il la couvrait tout entière par la seule paume de sa main. Puis cette même paume venait tapoter avec noblesse sa poitrine décorée. Son autre main bougeait d'une façon nettement moins aristocratique, puisque l'amour que portait la mouche verte à ses narines était à son apogée.(p.55/59)
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L'autosuffisance alimentaire était alors devenue pour lui [le dictateur] l'objectif à atteindre coûte que coûte. Mais en bon militaire, il avait sur le sujet une opinion bien arrêtée :
- On parviendra à l'autosuffisance, même s'il faut pour cela que le peuple arrête de manger !
Son Ministre de l'Agriculture, qui fut un temps étudiant en Espagne, le convainquit de fonder une Académie agricole avant d'opter pour une solution aussi géniale.
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Videos de Yamen Manai (16) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Yamen Manai
A l'occasion du Festival Etonnants Voyageurs à Saint Malo, Yamen Manai vous présente son ouvrage "Bel abîme " aux éditions Elyzard.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2545399/yamen-manai-bel-abime
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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