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EAN : 9782848766836
224 pages
Philippe Rey (23/08/2018)
4.12/5   108 notes
Résumé :

Trina s'adresse à sa fille, Marica, dont elle est séparée depuis de nombreuses années, et lui raconte sa vie. Elle a dix-sept ans au début du texte et vit à Curon, village de montagne dans le Haut-Adige, avec ses parents.

En 1923, ce territoire autrichien, annexé par l'Italie à la suite de la Première Guerre mondiale, fait l'objet d'une italianisation forcée : la langue allemande, qu'on y parle, est bannie au profit de l'italien.

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Critiques, Analyses et Avis (33) Voir plus Ajouter une critique
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1923, Trina passe sa maturité, le bac italien.
Elle habite dans l'Alto Adige, le sud Tirol, région frontalière de l'Italie, avec l'Autriche. La langue est l'allemand, la religion, chrétienne, le travail celui des champs et des étables. Mussolini rase la région, italianise les noms, fait changer les enseignes des négoces, et interdit le port des vêtements traditionnels. de plus il est question de la construction par les fascistes, d'une digue sur le fleuve, déjà projetée en 1911 mais annulée pour cause de risques géologiques. Une digue qui signera la fin de la région.

Trina dans ce chaos, est dans le vide, quoi faire ? Elle ne peut enseigner vu l'interdiction de la langue. Passer dans la clandestinité pour le faire, comme lui conseille le prêtre et suivre Erich,résistant, le garçon qu'elle veut épater ?
L'injustice de la vie se manifeste à travers une belle prose imagée, où les sentiments s'y apposent comme des gouttelettes de pluie.

Encore une histoire de fascisme, encore le dilemme entre partir ou rester ? Erich
dit à sa femme, “c'est ici que je suis né, mes parents sont nés, tu es née, mes enfants sont nés. Si nous partons, ils auront gagnés.”.....mais cette résistance pacifique sera-t-elle suffisante pour les empêcher de leur faire du mal, et résister à la souffrance, même si à la fin, ils gagnaient (?). le comble du paradoxe, je dirais même de l'ironie, est qu'à l'époque ils espèrent être sauvé par Hitler et reprendre leur identité allemande.......Et quand Hitler va leur proposer de quitter leur région et émigrer officiellement en Allemagne, les choses vont se compliquer encore plus , la région se divisant radicalement et tragiquement en deux camps, ceux qui restent et ceux qui partent et surtout que la deuxième guerre mondiale gronde aux portes de l'Italie.....
Une population prise entre deux feux, les fascistes et les nazis.....

Trina, la narratrice, écrivant dans un vieux cahier, s'adresse à sa fille, Marica.... partie....disparue, suite au dilemme.....

Pour être franche je n'avais aucune idée de cette tranche de l'histoire du Sud Tirol ni de ce livre, ni de l'auteur, qui m'a été proposée par le club de Lecture de l'unique et magnifique librairie de la ville voisine. Une librairie qui essaie de subsister grâce à l'amour des livres de sa propriétaire, et ses activités intéressantes comme ce club où participent hommes et femmes de tout âge, et plutôt des jeunes. Pourtant l'auteur est déjà présent sur Babelio, et son livre “Le dernier arrivé “ traduit en français a remporté le grand prix littéraire italien Campiello en 2015. C'est un beau récit tragique où la petite histoire s'immisce dans une page douloureuse de l'Histoire italienne. Une heureuse surprise, qui se lit d'une traite et que j'espère sera très bientôt traduite en français.

« Le parole non potevano niente contro i muri che aveva alzato il silenzio. »
( Les paroles n'avaient aucun pouvoir face au mur érigé par le silence )
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L'émotion est une étrange alchimie..

La première de couv' de "Resto qui" -je reste ici- m'a tout de suite plongée- c'est le mot- dans deux souvenirs : une ballade sentimentale  et une balade sépulcrale..

La première,  je l'ecoutais sur mon Teppaz à carreaux, quand j'avais un petit coup de  blues, ou envie de me faire un coeur de midinette:

"Dans le ciel, pas un nuage
Et pourtant j'ai le coeur gros:
Mon village, mon village
Dort au fond de l'eau..
Loin d'ici la vie m'appelle
Je m'en vais mais j'ai le coeur
Qui sommeille, qui sommeille
Tout au fond de l'eau". ..

....chantait Marie Laforêt de sa voix nasillarde et un peu métallique..

Quant à la seconde, la balade avec un seul "l" ,  c'était  à Laussac, en Aveyron, l'année où le barrage de Sarrans a été vidé . Je me suis promenée, le coeur serré,  entre des arbres noircis, des pans de murs moussus,  des fermes sans bêtes et une église sans cloche, au milieu d'un grand silence, comme dans un village fantôme. L'ancien Laussac, le Laussac sacrifié,  immergé,  refaisait provisoirement surface, et ses chemins herbeux remontaient vers le Laussac épargné qui semblait lui faire signe du haut de son promontoire.

Mais l élément décisif de l'alchimie émotionnelle est venu du livre lui- même,  de son sujet, de sa voix narrative,  celle de Trina, et, pour moi, de cette langue italienne, chantante, musicale, qui rend toujours ma lecture plus intime, plus vibrante que la version française, si élaborée soit-elle.

Oui, Resto qui, je l'avoue, m'a profondément touchée. 

Trina parle  à une absente, une disparue, Marica, sa fille.

Elle lui fait la chronique de sa vie de paysanne, de montagnarde.

Elle lui dit son enfance entre un père aimant et une mère dure, puis sa vie de femme, aux côtés de son mari, Erich Hauser,  le taciturne éleveur - et menuisier - qu'elle aime depuis qu'elle est toute petite.

Elle dit la naissance de ses deux enfants, celle de Michaël,  le terrien, rétif aux études, et celle de Marica, son interlocutrice , cette fille "disparue", qui lui ressemblait tant et  aimait étudier, apprendre et enseigner, comme elle.

Trina semble définitivement enracinée  à Curon,   ce village des sommets, si verdoyant à la belle saison,  si blanc et glacé l'hiver, ce village du Haut Adige,  dans le Sud Tyrol  germanophone, que les fascistes italiens essaient d'italianiser à toute force, divisant le pays entre "restanti" et "optanti" qui optent pour l'Autriche ou l'Allemagne ...

Ils  interdisent l'école en allemand - encouragée par le curé du village, Trina et ses amies feront l'école clandestine dans les caves, les granges ou les prés,  au risque d'etre arrêtées ou déportées. Ne donnent les postes  administratifs qu'aux italianophones. Et déjà  menacent les villageois de noyer leur village et leur résistance  sous l'eau d'un barrage hypothétique. ..mais la guerre éclate : les nazis allemands remplacent les Italiens ...à la grande joie de certains qui voient dans cette occupation une délivrance! Le barrage est abandonné mais la chasse aux déserteurs et la férule nazie sévissent. Les temps sont durs, la montagne aussi. 

Quand la paix revient, enfin, revient aussi le projet du barrage...

La chronique de Trina est linéaire comme le temps qui passe,  implacable comme l'hiver, inéluctable comme le destin. Elle ne regarde pas en arrière, elle avance comme cette eau qui finit par noyer les espoirs, briser les luttes, user les forces.

A quoi a servi à  Trina,  l'ancienne institutrice, d'écrire aux "gens qui comptent", à quoi a servi au courageux Erich d'avoir été reçu par Pie XII,  pape failli et dodelinant , qui ne lui a pas dit un mot ni jeté un regard?

A quoi a servi leur longue patience à tous les deux, leur engagement, leur fidélité , leur solidarité,  leur courage ? À garder intacte leur dignité , sans doute, mais qu'elle est douloureuse,  leur dernière promenade , sur la digue du barrage , au bord du nouveau lac, avec leur vieux chien et leurs bêtes effrayées qu'ils mènent à  l'abattoir faute de pouvoir laisser à  l'un, son  travail de berger et aux autres, des terres où  paître.

La photo de la 1ere de couv' est vraiment celle du clocher de Curon, à demi immergé par un barrage qui n'a finalement pas eu le rendement qu'en escomptait la Montecatini mais qui, ironie du sort, est devenu le passage obligé des touristes en quête d'images romantiques et "the place to be" pour tous les abrutis du selfie...

Pour tous les lecteurs de Marco Balzano, ce clocher est l'âme  fière et droite d'un petit village qui ne voulait être ni fasciste, ni nazi, ni italien, ni allemand, juste germanophone et montagnard,  près du ciel, sur les alpages, où il fait si bon se rouler dans l'herbe  et où  les cloches des vaches tintinabulent, le soir,  dans les brumes qui montent de la vallée.

Un beau livre, simple, fort. Et triste.
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Décidément, en ce moment, j'ai la main heureuse. « Resto qui » de Marco Balzano est une très belle découverte que j'ai lu en français « Je reste ici ». Après les chroniques de Bookycooky et de Michfred, j'attendais sa sortie en français avec impatience.

C'est une excellente traduction de Nathalie Bauer puisque le lecteur peut y ressentir toutes les émotions que cherche à susciter l'auteur qui écrit simplement, dans un style dépouillé, limpide, et qui nous touche en plein coeur. J'ai refermé ce livre des larmes plein les yeux. Je me suis trouvée plongée dans la tête de l'héroïne, je me la suis accaparée, elle m'a été proche pendant toute la lecture.

Je me suis dit que ce XXème siècle avait été bien cruel et que nous avions beaucoup de chance nous génération de la paix. Mais à travers cette fiction, inspirée de faits réels, Marco Balzano souligne aussi l'inhumanité de certains intérêts politico-financiers.

Dans un premier temps, j'ai découvert le Trentin-Haut-Adige, région d'Italie située à la frontière autrichienne, au Tyrol Sud. Je savais que c'était une région autonome mais n'en connaissait pas l'histoire. En 1919, cette région autrichienne est rattachée à l'Italie et les fascistes tentent par tous les moyens d'italianiser cette province. Ce sont les alliés qui ont imposé, après la seconde guerre mondiale, la protection de cette minorité de langue allemande. Dans cette fiction tout est vrai sauf les personnages encore que le prêtre, le père Alfred, a été inspiré par le père Alfred Rieper, curé de Curon pendant cinquante ans.
La couverture représente le clocher de Curon émergeant du lac. Ce clocher est devenu une attraction touristique. Elle masque le désespoir qu'ont ressenti les villageois lorsqu'ils ont entendu le bruit des murs qui s'écroulent, la destruction de leur village et de tous les souvenirs qui s'y rattachent.


Dans les années 50, Trina éprouve le besoin d'écrire à Marica, sa fille qui a disparu un beau matin et dont plus personne n'a eu de nouvelles. Elle lui parle de son absence, des blessures qu'il a fallu surmonter pour accepter cette absence. Dans cette lettre, elle fait un retour en arrière et remonte à ses dix sept ans et lui relate son histoire d'amour naissante avec Erich, son père, la solidité de cet amour malgré les aléas de la vie, la résistance à Mussolini qui s'installe au village, comment l'école devient clandestine. Elle lui décrit au seuil de la seconde guerre mondiale, comment la région s'est trouvée prise en étau entre les nazis et les fascistes, les relations agressives entre ceux qui voulaient rester et ceux qui voulaient partir et le positionnement de son père devant la guerre, et tout cela, avec en toile de fond, l'imminence d'un danger : la construction, maintes fois reportée, d'un barrage hydraulique qui menace d'engloutir son village, Curon.

C'est un livre magnifique qui énonce les affres d'une plaie jamais refermée : la disparition d'un enfant. C'est aussi l'histoire d'une femme courageuse qui ne lâchera jamais la main de son mari dans toutes les circonstances y compris celles des plus dangereuses : la fuite dans la montagne. C'est encore une héroïne admirable qui se battra pour sa terre, son identité. Sa devise :

- les paroles de sa propre mère : « Aller de l'avant. Sinon Dieu nous aurait fait des yeux sur le côté, comme aux poissons ».
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La vie en est pleine de ces rencontres inattendues et précieuses qui font que chaque jour ne ressemble à aucun autre.....Ça y est , vous allez dire , " lui , il est tombé amoureux " pendant les vacances et il va nous " bassiner " avec son histoire ...Mais , non , pas du tout ...D'abord ma femme ne veut pas et puis nous ne sommes pas sur un site de rencontres...enfin , quoi que , si , finalement , oui mais il n'est pas comme les autres ce site , on y rencontre des amis et des amies..... Quoi ? Oui , c'est un peu ambiguë quand même cette affaire et je me demande bien comment je vais m'en sortir , moi .
Bon , je reprends ....Les vacances terminées , je suis retourné dans ma librairie préférée et là , sur l'étal ...il était là avec sa superbe couverture .Du bleu , de l'eau , le ciel et ..un clocher qui surgit fièrement de l'onde claire et.....c'est tout . Impossible de résister . Il paraît tout frêle avec ses 200 pages mais la quatriéme de couverture finit par me convaincre , me séduire , je l'adopte ....
Le soir - même, c'est le sommeil qui a raison de moi car j'y suis plongé ( c'est le cas de le dire ) dans l'extraordinaire histoire de ce petit village de Curon Venesta , au Tyrol , pris entre l'Italie , l'Allemagne , l'Autriche , la Suisse , un village qui n'appartient à personne mais intéresse tout le monde , un village qui va souffrir sous le joug des fascistes italiens , puis des nazis allemands , puis des investisseurs étrangers pour qui seul prime l'intérêt économique et financier ....Dans ce chaos sans fin vont évoluer des personnages attachants , attachés ou non à des valeurs , à leur village , des personnages qui prendront des chemins différents ou similaires , qui briseront des liens forts , malgré eux , simplement en raison des dramatiques évènements relatés.
Cette histoire est racontée par Trina et adressée à sa fille. On y découvre son portrait , certes , mais aussi sa " construction " de femme et de citoyenne dont la conscience se forgera au fil des pages...C'est un roman puissant , addictif , qui vous transporte dans un voyage dont on ne sort pas indemne mais sans doute un peu grandi ou grandie...
" Nous ne pouvons pas perdre du temps à nous plaindre de ce qui existait lorsque nous n'étions pas là . Il n'y a qu'une direction possible , comme disait Ma : "Aller de l'avant .Sinon Dieu nous aurait fait des yeux sur le côté. Comme aux poissons."
Je suis toujours prudent quant aux conseils que je donne car tout le monde , fort heureusement , n'a pas la même approche , les mêmes goûts, la même sensibilité. Là , pourtant , je me permets de....sinon ce serait sans doute dommage .. Encore hésitant ? Lisez les critiques.....Ah , ça y est ? Alors bonne lecture et .....à bientôt sur" notre site de rencontres" préféré .
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«  Mais l'Italien et l'allemand constituaient des murs de plus en plus élevés.
Désormais les langues étaient des signes raciaux .
Les dictateurs les avaient transformées en armes et en déclarations de guerre » .
«  A Curon , les gens ne paraissaient pas inquiets , juste plus las .Las des fascistes , las de tituber dans le noir » .

Deux extraits significatifs de ce beau roman historique , une page douloureuse de l'Histoire Italienne, que je ne connaissais pas , superbement écrit comme une longue lettre....

Au printemps 1923, Trina adolescente préparait son baccalauréat dans la région autrichienne du Haut- Adige, au Sud Tyrol, au coeur du superbe village de Curon.
La vie y suivait le rythme des saisons , l'histoire ne s'était pas élevée jusque là ....dans ces régions frontalières .
Trina, Pa et Ma , ses parents , Michaël , son frère parlaient allemand, étaient chrétiens , travaillaient aux champs et dans les étables..

Mais dès 1922, sur l'ordre de Mussolini les rues, les ruisseaux et les montagnes ont été rebaptisés .

Ses sbires ont même molesté les morts en changeant les inscriptions sur les pierres tombales , italianisé les noms , remplacé les enseignes des magasins, interdit aux habitants de porter leurs tenues habituelles ...

C'est un Tournant Historique .

La narratrice est alors dépossédée de sa langue, de sa terre, de sa culture .

A Curon les familles divisées, fracturées, écartelées , subiront de plein fouet les oppressions du fascisme puis du nazisme.
Tout au long de ce récit tragique , Trina parle à une absente, sa fille Marica, qui lui a été arrachée par Anita , la soeur de son mari Erich, et son mari Lorenz , des gens riches... beaucoup plus âgés que Trina et Erich.

Ils avaient choisi d'intégrer le Reich...

Elle lui conte son enfance : Ma , sa mère, insensible , froide, assez autoritaire, indifférente à la culture et au diplôme de sa fille devenue institutrice, Pa, son père , aimant, sa vie auprès d'Erich, son mari, orphelin, silencieux , aux longues mains nerveuses , l'amour de toute sa vie..

Nous découvrons une Italie divisée, trahie par Mussolini et ses acolytes , une population prise entre deux feux :
Partir ou rester?
Parler allemand ou italien?
Les tyroliens sont brimés au quotidien , l'auteure nous révèle une Trina courageuse, vaillante, résistante , indépendante ,devenue enseignante qui combat avec les «  Mots » aux côtés d'Erich , son amour.

Un magnifique récit tragique lié à l'histoire doublé de la douleur intense de l'absence ....
Découverte de la Grande Histoire à travers la petite sous des aspects inconnus, qui nous questionnent :

oppression et fascisme, nationalisme, dictats imbéciles , importance de la langue et de l'identité , des liens familiaux indestructibles et de la survie dans une période trouble sans parler de la construction d'un immense barrage ....
«  Ceux qui vivent , ce sont ceux qui luttent » . Victor Hugo.
Remarquable ! A lire !


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critiques presse (1)
Actualitte
27 septembre 2018
Fascisme, nationalisme, dictats industriels, passivité et dirigisme étatique (la contradiction s’éteint avec l’action des lobbies de tous ordres), tout cela constitue le fil rouge de ces vies que Trina raconte dans une langue crue, forte, pleine de la violence.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (61) Voir plus Ajouter une citation
Je me levais à la nuit avec Erich, lui préparais une soupe au lait et, quand il en avait besoin, l'aidais à traire les bêtes, à distribuer le foin. Me lever de bonne heure ne me pesait pas. Une fois seule, je me préparais une autre tasse de café d'orge, puis rejoignais les enfant. Le curé m'avait attribué une cabane à outils, derrière la boucherie. Désormais je n'avais plus que trois élèves. Les fascistes avaient effectué de nouvelles perquisitions dans la vallée, arrêté et frappé d'amendes d'autres instituteurs. Seuls les prêtres parvenaient encore à enseigner l'allemand grâce au prétexte du catéchisme.

Une fois la classe terminée, j'allais déjeuner chez mes parents. Je restais un moment chez eux ou rentrais et me mettais à lire. Ma ne supportait pas que je perde du temps de la sorte. Lorsqu'elle me voyait, penchée sur un volume, elle disait dans des marmonnements que j'emporterais mes livres en enfer et me chargeait des besognes domestiques, sans cesser de répéter que je devais apprendre à coudre pour le jour où j'aurais des enfants.
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Anche Erich andava all’osteria ad ascoltare la radio e mi riferiva che il duce faceva sempre più proclami trionfalistici, segno che le cose giravano male.
(Erich aussi allait écouter à l’auberge la radio et me rapportait que le Duce faisait de plus en plus de proclamations victorieuses, signe que les choses allaient mal)
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Je l'écoutais, incapable de répliquer. Je ne trouvais pas de mots pour le réconforter.
- Dans ce cas, prenons les enfants et allons-nous-en.
- Non ! hurlait-il.

- Pourquoi rester si nous devons un jour être privés de notre travail, de notre langue, de notre village ?
[Leur région est italianisée de force, les emplois sont de plus en plus réservés aux personnes qui parlent italien, et le village, Curon, est menacé par un barrage]

- Parce que c'est ici que je suis né, Trina. C'est ici que sont nés mon père et ma mère, c'est ici que tu es née et que sont nés mes enfants.
Si nous partons, les fascistes auront gagné.
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«  Le chagrin est désormais un vertige .Quelque chose à la fois de familier et de clandestin, qu’on n’évoque jamais. Au cours des années suivantes , les rares fois où il nous arrivera d’oublier les mots de cette lettre, nous partirons à ta recherche , bien conscients cependant d’obéir solitairement à un espoir qui ne nous anime même plus .... »
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Un jour que je cherchais à lui faire apprendre une poésie, je pensai que si on ne me l'avait pas fait haïr aussi viscéralement, c' était une belle langue, l'italien . À la lire, elle me paraissait chanter.
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